Coïncidence
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Coïncidence
Chère M,
J’étais en train de lire « Maison de jour, maison de nuit » quand j’ai reçu ton mail racontant le tracé de tes pérégrinations. L’un des personnages d’Olga Tokarczuk est Marta. Et là Marta disait, en substance, au narrateur : « J’apprends à connaître le monde sans sortir de chez moi. » Marta avait l’habitude de faire de longues poses entre deux phrases, ce qui permettait à son interlocuteur de réfléchir au sens de son propos et d’imaginer que Marta apprenait le monde grâce à la télé, aux journaux peut-être, peut être à l’Internet. Puis Marta de continuer : « Quand on voyage on est occupé que par soi. Quand on est à la maison on est. C’est tout. » Ton mail en est l’illustration. Quand on voyage, on en oublie jusqu’à ses amis. Je l’avais déjà expérimenté.
J’ai beaucoup voyagé pour mon travail. Souvent, vite et longtemps. Le temps passé au travail c’était du travail. Le reste du temps je ne m’occupais que de moi : ne pas rater le train pour Montpellier, ne pas rater l’avion pour Pau, ne pas rater le dernier service au restaurant, trouver à manger dans une station service dans le cas contraire, ... Voyager est une activité égocentrée.
Quand je suis chez moi, il me suffit d’être. C’est tout. Le monde entier concourt à mon bonheur et à mon confort. L’été le jardin m’offre sa fraîcheur, l’hiver les radiateurs leur chaleur. Les jours de pluie, la musique de Mahler. Bozena, la lumière. Toujours. La vie avec Bozena est un bonheur de chaque seconde (même quand on s’engueule) et je suis bien décidé à ne pas en perdre une miette.
Voilà bien longtemps que je ne « nuance » plus les propos de Joëlle. Connais-tu la loi de Brandolini ? « La quantité d'énergie nécessaire pour réfuter des idioties est supérieure d'un ordre de grandeur à celle nécessaire pour les produire. », disait-il. En clair, si quelqu’un dit des conneries durant dix secondes il faut dix minutes pour rétablir la vérité. Si c’est durant une minute, il faut une heure. Et ainsi de suite. S’il me fallait commenter ou rectifier ses bobards, ma vie n’y suffirait pas.
Je retravaille, en effet. Tu es bien informée. Un ancien client a proposé de m’embaucher pour que je continue à m’occuper de ses recrutements. Comme je n’avais rien de mieux à faire, j’ai accepté. Depuis le téléphone ne sonne plus seulement par erreur, pour m’annoncer un décès ou pour me dérouler une publicité. C’est bon d’avoir un pied dans la vie active.
Je vous embrasse tous les deux,
J
- Photo d’entête : Julien Ziemniak
- site internet : jb-photographies.net