Chap 4 : Loga Dreki
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Chap 4 : Loga Dreki
Trois jours s'étaient écoulés depuis que le docteur Crowley avait transporté Hypolite Vlutte à son domicile, avec l'aide de Jin ils avaient déposé le corps du vieux monsieur dans le cabinet qui se trouvait dans l'aile ouest de la maisonnée. Depuis, le docteur n'avait cessé de l'ausculter jour après jour sans pour autant comprendre la nature de la maladie. Hypolite avait bien repris connaissance, mais il se trouvait toujours dans l'incapacité de bouger, seuls ses yeux pouvaient encore se mouvoir. Le docteur Crowley assis face à son bureau fumait sa pipe lasse de fatigue, derrière lui, une grande et large fenêtre laissait rentrer la lumière du jour.
On frappa à la porte, Miss Crowley entra un plateau à la main sur lequel reposait une cafetière, une tasse et des petits gâteaux.
- Milena, quelle heure est-il ?
Miss Crowley décrocha un regard préoccupant à son mari. Elle déposa le plateau sur le bureau et commença à servir le café.
- Gallen, très cher, ne me dîtes pas que vous n'êtes pas sorti de votre cabinet de toute la journée ?
Le docteur poussa un profond soupir, sa femme détestait le voir passer ses journées à s'occuper des malades, ce qui était souvent le cas étant le seul médecin du village. Conbien de fois, Miss Crowley l'avait elle retrouvé tard le soir somnolent sur sa chaise? Il était bien trop surchargé de travail.
- Comme vous ne me répondez pas, je suppose que la réponse doit être oui. Si vous continuez de la sorte, un jour prochain c'est vous qui serez dans l'obligation d'aller consulter un médecin. Enfin... Pour répondre à votre question, l'horloge vient de sonner trois heures.
- Je vois... dit simplement Mr Crowley.
Gallen cracha une volute de fumée et se tourna vers Mr Vlutte allongé sur une banquette installé dans un angle de la pièce entre une armoire à pharmacie et une commode. Milena suivit son regard, c'était une femme brillante et sérieuse qui étudia à l'académie des sciences météorologique de Rezia, la deuxième plus grande ville de Provos. Le docteur Crowley s'y rendait régulièrement pour assister à des conférences et lorsqu'il croisa la route de Milena qui se trouvait dans sa troisième année d'étude, Gallen tomba littéralement sous son charme. Une harmonie s'installa très vite entre eux, car ils étaient sur la même longueur d'onde, tous les deux souhaitaient refaire le monde, l'un en soignant tous les malades qui franchiraient sa porte et l'autre en tentant de comprendre les effets du changement climatique qui cause petit à petit la rareté du vent dans tout le pays d'Haizea.
Au bout d'un an de rendez-vous et de discussion passionné, Milena tomba enceinte et dû mettre fin à ses études à l'âge de 23 ans. Gallen Crowley pour subvenir au besoin de sa famille commença à recevoir des patients et ne put lui non plus aller au bout de ses études. En prime, il quitta la confrérie de l'ordre des Medecins de Medlelin qui le payait pour toutes les recherches qu'il faisait sur le corps humain. Quant à Milena, elle reçut les brimades de ses parents et collègues lui reprochant d'avoir fait passer son compagnon, et même leur enfant avant sa carrière. Miss Crowley ne regrettra jamais son geste, même si elle était tombé enceinte assez jeune, elle s'était toujours senti assez mature pour prendre les décisions adéquates.
- Vos recherches, on t'elles avancé depuis hier ? Demanda-t-elle à Mr Crowley, tout en prenant chaleureusement la main de Monsieur Vlutte qu'elle avait rejoint.
- Pas autant que je l'espérai, répondit celui-ci. Malgré toutes ces années d'études, malgré toutes ces décorations, je n'ai jamais vu une telle maladie, le tomodensitomètre lui-même n'a rien trouvé.
- Gallen, vous ne pouvez pas vous en remettre entièrement à la technologie, elle a elle aussi ses lacunes. Si cela ne marche pas et bien, servez vous donc de ce que vous savez. On dirait que vous rechigniez à l'utiliser, mais en avez vous guère le choix ?
Le docteur Crowley éteignit sa pipe et la rangea dans un tiroir, à son tour, il se rendit auprès de son patient.
- Ma Chère Miléna, vous vous doutez bien que j'aie déjà essayé, je ne suis pas aussi obtus que vous le pensez. Cependant, cela n'a pas fonctionné et pour cause, regardez dans son dos.
Milena s'exécuta et retourna Mr Vlutte sur le côté. Ce qu'elle vit lui fit porter une main à la bouche, elle en lacha le patient de son mari. Une tâche sombre d'environ dix centimètres de diamètres recouvrait la peau entre les omoplates.
- Qu'est-ce donc? Je n'ai jamais vu une chose pareille. Au toucher cela n'a aucune texture, on dirait qu'elle fait partie de la peau.
- À vrai dire, je n'en ai aucune idée, les manuels en ma possession ne font pas ouvrage d'une telle maladie de peau.
- Je suppose donc que vous ne savez pas si c'est contagieux ?
Mr Crowley secoua la tête, il ne pouvait répondre à cette question non plus. Il expliqua à sa femme que la tâche s'aggrandissait petit à petit et que d'ici deux semaines, il ne serai pas étonné qu'elle ne recouvre tout le corps de ce pauvre Hypolite. Le docteur parti regarder par la fenêtre, à l'extérieur leurs deux fillettes jouaient à la corde à sauter dans le jardin. Vue de dos, Milena observa que son mari semblait épuisé.
- Vous devriez vous reposer Gallen, allez faire un petit somme, je veillerai sur Hypolite.
- Comment voulez-vous que je parvienne à dormir, ces villageois comptent sur moi, s'ils apprennent que je suis dans l'incapacité de soigner Monsieur Vlutte... Ah Milena, si vous saviez comme je me sens impuissant.
- N'ayez crainte, vous êtes un excellent médecin. Peut-être devriez vous envoyez un courrier à la confrérie des médecins, ils pourraient vous renseigner.
Mr Crowley renfrogna la mine.
- Vous savez bien que si on est venu vivre dans ce village, c'est pour nous éloigner de cette bande de vieux schnock et de leur avarice. Il est hors de question que je leur demande conseil.
- Et que pouvez faire d'autres ? Dit Miss Crowley d'une voix douce. À Médelin, ils en savent sûrement plus que nous, imaginez que cela soit une maladie qui circule là-bas. Désirez-vous que j'envoie un courrier à mon frère Sébastian? iI pourra leur transmettre directement n'oubliez pas qu'il suit la même voie que vous.
Mr Crowley dû admettre que sa femme mettait le point sur un élément essentiel, et si Mr Vlutte avait contracté la maladie à la capitale. Aux dernières nouvelles, il y avait passé quelques jours. Il devait également admettre que le frère de Milena le respectait beaucoup, il pouvait donc lui faire confiance.
- Vous avez gagné ma chère, écrivez à votre frère le plus vite possible.
Durant les trois jours de convalescence d'Hypolite, Alice était venue prendre de ses nouvelles tous les jours. La compagnie de la jeune fille lui avait fait beaucoup de bien, car sa famille se trouvant à Medellin, personne ne venait le voir, excepté Alice et ses parents. Peu de temps après que Milena soit partie écrire la lettre, Alice était revenue au cabinet, mais cette fois dans le but d'obtenir des explications sur la méthode qu'avait utilisée le docteur pour réveiller monsieur Vlutte. Gallen Crowley, ne répondit jamais à ses questions, pire que cela, il l'ignora délibérément en évitant son regard. Encore un qui cachait quelque chose, Alice laissa le docteur à ses affaires et promit à Hypolite qu'elle reviendrait le voir le lendemain.
La dernière solution qui restait à Alice, était de rendre visite à l'homme mystérieux. En retournant à la ferme, elle chercha à convier Natie à l'accompagner, car elle refusait d'y aller toute seule. Elle frappa à la porte de sa voisine mais c'est son père qui lui ouvrit, un homme au cheveux dégarni avec une jambe droite en métal. Il annonça à la jeune rousse que sa fille se trouvait au village pour vendre du lait frais aux habitants. Alice n'eut aucune difficulté à la trouver car Natie tirait une charette qui ne passait pas innaperçu. Son amie accepta sa requête, elle lui demanda juste de patienter le temps qu'elle ramène les bouteilles vide chez elle, c'est son père qui sera content car elle avait réussi à vendre tout le stock.
- Tu m'as surprise, je ne m'attendais pas à ce que tu te décides à aller le voir. Qu'est-ce qui t'as convaincu, demanda Natie.
Toutes les deux marchaient le long d'un chemin de sable à l'extérieur du village, c'était le seul chemin empruntable jusqu'à la colline. Alice n'entendit pas la question de son amie, elle s'amusait à sauter d'un pas à l'autre comme s'il y avait des plateformes invisibles et qu'elle risquait de tomber dans le vide. À un moment, elle glissa sur une flaque gelée, il avait fait très froid la nuit précédente et elle se retrouva les fesses par terre. La jeune fille dépousierra sa robe pleine de terre et se retourna soudainement vers Natie.
- Pardon, Natie! Tu m'as parlé ?
- Rien d'important, je ne voudrais pas gâcher ta bonne humeur qui fait plaisir à voir, dit Natie d'un air jovial
Alice lança un sourire entendu à son amie, puis se déchaussa, marchand pied nu sur la terre. En cette après-midi pleinement entamée, elle avait envie de sentir le monde sous ses pieds. Là-haut , au-dessus d'elles, des nuages brumeux parsemaient le ciel, ils pouvaient neiger à tout moment, Alice leva les bras en l'air, inspira un bon coup puis souffla aussi fort qu'elle le pouvait. Une rafale de vent accompagna son souffle comme pour répondre à son relâchement. Un large sourire se dessina sur ses lèvres comme si la jeune fille avait compris que le vent s'était manifesté pour elle. Natie adorait voir son amie dans ces états de félicité, la jeune rousse donnait l'impression de ne faire qu'un avec la nature. Exalté par la scène qui s'offrait à elle, Natie imita sa camarade sans pour autant se déchausser, car il faisait bien frisquet. Toutes les deux se payèrent un petit moment de liberté qu'elles conclurent par un grand éclat de rire.
Les deux adolescentes finirent par atteindre la maison abandonnée au sommet de la colline qui surplombait légèrement la vallée champêtre, l'homme au tatouage de dragon les attendait patiemment assis sur une chaise comme si il était au courant qu'elles viendraient en ce jour. Lorsque les filles arrivèrent près de lui, il les fixa longuement l'une après l'autre sans un mot, les filles en furent gênée. Au bout de quelques secondes qui semblèrent interminables, il se leva et exécuta un étrange signe avec ses mains. L'homme les joignit l'une et l'autre dans un geste ressemblant à un signe de paix.
- Cela veut dire bienvenue, leur dit il.
Alice et Natie se plièrent conjointement en une révérence pour répondre à sa salutation. Natie remarqua que tout comme Alice, l'homme marchait pied nu, elle tenta de le lui montrer, mais celle-ci était envoûté par les yeux de leur interlocuteur, les iris étaient entièrement jaune avec des pupilles noirs en forme de fente. C'est bien la première fois, qu'elle voyaient des yeux d'une telle sorte chez un homme.
- Je me nomme Loga Dreki, Alice Mira, je présume et vous jeune demoiselle vous devez être Natanaelle Beauffray.
Les deux amies se regardèrent estomaquées.
- Comment vous...? Commença Alice
- Comment je connais vos noms ? C'est Mirabelle qui m'a prévenu que vous viendriez sûrement à deux. Elle te connaît très bien Alice, elle sait à quel point tu es prudente et tu as raison, en ces temps troublés, il est dangereux de placer sa confiance en des inconnues.
- Que voulez-vous dire par en ces temps troublés, demanda Natie?
- Si vous voulez bien me suivre, il est plus sage d'en parler à l'intérieur.
Loga posa sa main sur la porte d'entrée, il y eut une légère secousse sismique, une douce chaleur remonta de la terre réchauffant les pieds nus d'Alice. Une odeur de rosée du matin se répandit soudain dans l'air.
- C'est étrange, j'ai la sensation que le soleil vient à peine de se lever, pourtant, on est en plein milieu de l'après-midi, constata Natie.
- C'est de la magie, affirma Alice sans l'ombre d'un doute.
Loga esquissa un sourire à l'encontre de la jeune fille puis rentra à l'intérieur de la maison. Natie lança un coup d'œil à son amie qui hésitait à entrer. En fait, elle craignait que leur hôte ne soit attaqué par un fantôme ou quelques autres esprits malfaisant. Natie, qui semblait lire dans les pensées d'Alice, lui prit la main et l'entraîna à sa suite.
- Tu n'a rien à craindre, Isaac et Gontran t'ont bien raconté qu'ils n'ont rien vu qui fasse peur dans cette maison et en plus les fantômes dorment le jour, c'est bien connu.
Alice n'était pas rassurée pour autant, c'est ce que les parents racontaient à leurs enfants pour éviter qu'ils viennent se réfugier dans leur lit en pleine nuit, mais elle était en était plus une, elle savait percevoir où se trouvait la vérité. Les feux filles passèrent la porte d'entrée en même temps, elles débarquèrent dans une grande salle circulaire dont les murs étaient nacré de rose et de beige. Sur le sol carrelé, se reflétait un gigantesque lampadaire accroché à un plafond représentant un ciel étoilé. Il n'y avait aucune fenêtre dans cette pièce et une unique porte au fond. Natie resta bouche bée face au décor de toute beauté qui s'offrait à elle, qui aurai cru que cette petite maison abritait une salle aussi spacieuse. Elle avait cette étrange sensation d'être ailleurs. Alice fixait son regard sur le ciel étoilé, elle en était émerveillé. Elle porta les deux mains à sa poitrine, une vague de chaleur comme à l'extérieur la submergea.
- Nous ne sommes plus dans la maison, n'est ce pas ? Tout cet endroit transpire de magie, la première fois que Mirabelle m'a parlé de la magie, je n'avais aucune connaissance de ce que cela pouvait être à part ce que l'on peut en lire dans les romans. Depuis peu, elle se manifeste à moi de manière assez aléatoire, cela peut être de mon fait ou bien celui de quelqu'un d'autre. Est ce vous qui avez créé cette salle, interrogea Alice ?
- Tu es très perspicace et observatrice avec ça, ce sont des qualités que j'admire chez une personne. Tu as raison, c'est bien de mon œuvre, en insufflant un peu de mon mycel, j'ai donné une illusion à la maison et j'ai ouvert un "passage". En vérité, tout ce que vous voyez n'existe pas vraiment, en ce moment, nous nous trouvons dans le salon.
Loga ouvrit la porte en bois d'ébène et entra suivit des filles, à l'intérieur la salle était complètement différente, elle était petite, poussiéreuse avec un plafond bas, des torches avec des flammes vertes éclairait les lieux. Le sol était dallé, un large tapis rouge s'étendait jusqu'à une cheminée en marbre noir, sur laquelle reposait des artefacts mystiques. Loga brisa le silence qui régnait depuis que les filles étaient entrées.
- Ici, nous nous trouvons dans la pièce sans limite. C'est une salle de mon invention qui permet à quiconque de venir s'entrainer à l'abri des regards indiscret.
- C'est fabuleux ce que vous avez reussi à faire, vous cachez bien votre jeu en tout cas. On dirai que personne ne fait attention à vous au village Au fait, c'est quoi le mycel? Demanda Natie qui avait retrouvé l'usage de la parole.
- En ce qui concerne le mycel, j'y arrive, ne vous inquiétez pas. Je te remercie pour le compliment jeune demoiselle, pour répondre à ta remarque, il faut toujours se méfier de l'eau qui dort. Mais je vous rassure je ne suis pas dangereux, s'amusa Loga face à la perplexité des deux filles.
L'homme tatoué ferma la porte qui se verrouilla dans un clic sonore faisant sursauter les deux amies. Soudain, il prit de l'ampleur, son ombre s'agrandit lui donnant une aura et une prestance incalculable. Alice et Natie apeuré se réfugièrent au fond de la salle.
- Bien, nous allons pouvoir commencer, lança Loga d'une voix retentissante. Mais tout d'abord...
Il claqua des doigts, les flammes des bougies qui étaient d'ordinaire vertes virèrent au jaune orangé et un feu s'alluma dans la cheminée, après cela l'atmosphère devint plus chaleureuse même l'aura que dégageait Loga revint à la normale, ce qui rassura les deux filles.
- Vous avez peut-être envie de vous asseoir, non ? Dit Loga d'un air plein de malice.
- Euh... On veut bien, mais il n'y a pas de meuble ici, sur quoi va-t-on s'asseoir ? Constata Alice
- Il vous suffit de l'imaginer. Penser à ce dont vous avez besoin en ce moment et il se matérialisera.
Alice trouva l'idée amusante de tenter de faire apparaître un objet par la pensée, elle essaya immédiatement. Comme elle avait envie de reposer ses pieds un peu endoloris pour avoir marché pied nu, elle visualisa un fauteuil en velours rouge. Aussitôt le siège apparu sur sa droite à l'endroit même où était Natie, ce qui ne manqua pas de la faire sursauter. Alice toucha le fauteuil, il était bien réel, aucun doute là-dessus, elle se lova dedans et constata à quel point il était confortable. La jeune fille aurait pu facilement y passer des heures. Satisfait par le contentement d'Alice, Loga se tourna vers Natie.
- À ton tour, de quoi as tu besoin pour te sentir bien ?
Contrairement à Alice, Natie n'avait pas tellement envie de s'asseoir, lorsqu'elle était tendue, elle préférait rester debout. Ce qui lui manquait actuellement était sa peluche préférée, une lapine nommée Pami que sa mère lui avait offert pour ses 4 ans et qu'elle adorait cajoler tous les soirs avant de s'endormir. Elle lui rappelait sa mère décédée deux ans auparavant. Natie pensa très fort à sa peluche, le jouet se matérialisa dans ses bras sous l'ahurissement de la jeune fille. Alice de son côté applaudissait le spectacle.
- Dans la salle sans limite, tout ce que vous désirez peut se manifester à partir de votre imagination. Il y a cependant une contrepartie à tout ça, car pour que l'objet voulu apparaisse, il vous faut puiser dans votre Mycel qui n'est pas illimité.
- Allez vous enfin nous révéler ce qu'est le Mycel ? S'impatienta Alice.
- Je pense que tu le sais déjà, dit Loga. Avez, vous ressenti une sentation particulière entre le moment où vous avez penser à ce que vous vouliez et le moment où la chose est apparu?
- L'espace d'un instant, j'ai eu chaud, se rappela Natie.
- Moi, j'ai senti quelque chose circuler en moi, comme une espèce de liquide.
Les yeux de Loga s'illuminèrent.
- C'est ça, vous avez toutes les deux raisons. Le Mycel que l'on appelle aussi le fluide magique sont de fines particules d'énergies formant un courant qui circule en toute être vivant sur Eléria. C'est la source de la vie qui est directement dérivée de l'Arbre Monde. Lorsqu'un être humain meurt, son corps laisse place à ces particules qui retournent à l'Arbre le créateur de toute vie. C'est en puisant dans le Mycel que les humains peuvent canaliser la magie, mais si l'on ne fait pas attention et que l'on s'en sert à tort et à travers alors on peut y perdre la vie.
- Cela veut donc dire que tout le monde peut l'utiliser alors ? Dans ce cas, pourquoi est ce tabou, pourquoi les habitants d'Alone refusent d'en parler ? S'étonna Alice.
- On nous a toujours raconté depuis notre plus tendre enfance que l'Arbre Monde était notre créateur et que nous les habitants d'Eléria nous lui devons la vie sauf que nos parents et notre professeur ont toujours fait l'impasse sur cette magie qui est en chacun de nous, murmura Natie à son amie.
- J'ai beaucoup voyagé à travers le monde et je peux vous assurer que Alone n'est pas le seul village où la magie est décrier. C'est un constat planétaire.
Tout en parlant il tripotait un collier avec des griffes qu'il portait autour du cou, jusqu'à maintenant Alice n'y avait pas fait attention, elle était même sûr qu'il n'était pas au cou de Loga auparavant
- D'après moi, continua Loga, je pense que seulement 0,3 % de la population utilise encore la magie.
Les deux filles se regardèrent abasourdies.
- Ne soyez pas si surprise toutes les deux, gardez plutôt espoir que ce nombre finira par augmenter et que la magie refera partie de la vie des Elériens comme par le passé. Il faut aussi que vous sachiez que aussi merveilleuse soit elle, la magie a causé des catastrophes sans précédent et qu' au fil des années les Elériens ont commencé par en avoir peur.
- Comme ce qui s'est passé à Kélénos? Mon père et Hypolite m'ont raconté la tragique histoire, enfin ils ont commencé, ma mère à coupé court à la conversation, bougonna Alice.
- Kelenos est loin d'être la seule ville à avoir été victime de la puissance de la magie, il y eut bien d'autres endroits. Avez-vous entendu parler de la légendaire ville de Fénicia ?
Les deux demoiselles firent oui de la tête, elles avaient étudié l'histoire de cette ville durant leur 4e année, c'est en ces lieux que naquit l'Arbre Monde et les Acadiens en étaient le protecteur. Ce peuple vénérait l'Arbre Monde, mais il se passa une catastrophe et la ville ainsi que ses habitants disparurent. C'est aussi à ce moment-là que le monde se scinda en plusieurs terres. Tel était ce qui était raconté dans les livres d'histoires.
- Fénicia était une ville splendide où il fait bon y vivre, malheureusement le mal s'y répandit désirant obtenir un pouvoir qui le dépasse, car c'est à Fénicia que résidait l'essence centrale de la magie. Lorsqu'il tenta de s'en emparer, l'énergie dégagée était telllement intense que cela a causé un énorme cataclysme, comme vous le savez, le monde s'est détaché et l'Arbre Monde a disparu dans les cieux loin de toute civilisation.
- On raconte qu'après avoir tenter de s'emparer de l'essence de la magie, le mal perdit son âme et son corps fut pieger dans une prison pour l'éternité. Depuis ce jour son nom a été oublié et les Elériens l'appelle par son nom fatidique de Ténébreux, frissonna Natie.
Alice lança un regard indigné à la jeune fille, personne ne devait prononcer ce nom au risque que son esprit vienne les hanter dans leurs rêves.
- Il ne restera pas emprisonné pour toujours, le sceau qui le maintenait à l'écart est en train de se briser, la magie disparaît de plus en plus chaque jour, l'Arbre Monde n'aura bientôt plus suffisamment de pouvoir.
- C'est donc pour cela que Mirabelle désire que je libère ma magie, c'est parce qu'il est en train de se libérer ? En suis-je vraiment capable, n'est elle pas trop dangereuse ? Déglutit Alice
Loga, qui ressentait les émotions de sa protégée leva une main comme pour la calmer., aussitôt, Alice se sentit apaisée par son geste.
- Ne t'en fais pas, tu ne sera pas toute seule. Et puis c'est ce que les humains en font qui rend la magie dangereuse.
La jeune rousse repensa aux blessures qu'elle avait infligées à Erin par accident, elle ne voulait en aucun cas refaire du mal à quelqu'un. Alice ferma les yeux et secoua fortement la tête pour se vider de ses pensées. Loga tenta de la rassurer.
- Ne te culpabilise pas pour un quelconque méfait qui se serait produit, je sais que tu penses à la querelle que tu as eue avec cette demoiselle de bonne famille l'autre jour. À ce moment, tu ne maîtrisais rien, c'était encore nouveau, mais je suis là pour t'apprendre à contrôler ton pouvoir, tout se passera bien. Pour commencer, on doit définir dans quelle caste de magicien vous vous trouvez.
- Castes ? Comme un clan, vous voulez dire ? Questionna Natie
- Oui, il existe plusieurs groupes de mages à travers le monde.
Loga fit apparaître un tableau dans le vide et se mit à écrire dessus à la main.
- Il existe quatre castes de mages, les élémentalistes qui comme leur nom l'indique utilise des sorts liés aux éléments qui nous entourent, à savoir l'eau, la terre, l'air et le feu, les Thaumaturges qui ont la capacité de guérir les maladies. La 3e caste est celle des métamorphes, ils peuvent se transformer en n'importe quel animal, les plus talentueux sont même capable de prendre la forme d'animaux légendaires ou disparu. Enfin pour terminer, la caste des invocateurs, ils ont l'art d'appeler des chimères des esprits désincarnés provenant d'autres dimensions.
- Est ce que quelqu'un à déjà réussi à utiliser les 4 types de magie ? Demanda Alice
- Non, c'est impossible, il faudrait une quantité de Mycel incommensurable, un humain normal ne pourrait supporter autant de pouvoir. Par le passé, il existait une autre catégorie de sorciers, on les appelait les magiciens du temps, de nos jours il n'en reste plus, ils ont disparu il y a des milliers d'années.
Avide de question, Alice leva la main comme si elle était à l'école, ce qui fit rigoler Natie.
- Comment savoir dans quelle catégorie, on se trouve ? Enfin, pour ma part, je crois savoir, parce que Mirabelle me l'a dit, mais pour Natie par exemple.
- Attends, pas si vite. J'étais d'accord pour t'accompagner parce que tu me l'a demandé, mais il n'a jamais été question que j'apprenne à utiliser la magie moi aussi. Je ne suis pas sûr de le vouloir dit Natie en se frictionnant les mains.
Alice bondit du fauteuil, et vint prendre les mains de Natie dans les siennes. La pensée de se retrouver toute seule à apprendre la magie lui était inconcevable. Dans tout village et ceux depuis leur plus tendre enfance, Natanaelle avait toujours été sa seule alliée, sa confidente, celle avec qui elle passait le plus clair de son temps. Même ses parents, qu'elle aimait pourtant par-dessus tout, n'arrivaient toujours pas à la comprendre. Elle avait la sensation qu'en plus il lui cachait des choses sur elle et son enfance. C'était pour cette raison qu'elle s'était beaucoup rapproché de Natie, elle avait trouvé en sa voisine, une fille en qui elle pouvait donner sa confiance et aujourd'hui, Alice avait besoin d'elle.
- S'il te plaît, je ne veux pas apprendre toute seule, je sens qu'un lourd fardeau est en train de peser sur mes épaules, j'ai besoin de toi. On s'était toujours promis de tout faire ensemble.
Natie poussa un long et profond soupir, face au visage implorant d'Alice, elle n'avait jamais pu résister. Après tout, pensa t'elle, cela pourra peut-être moi lui servir à elle aussi un jour.
- D'accord, d'accord, tu as gagné. C'est bien parce que tu es ma meilleure amie.
Alice serra joyeusement Natie dans ses bras puis lança un regard entendu à leurs instructeurs signe qu'elles étaient prête. Loga demanda aux jeunes demoiselles de venir s'asseoir en tailleur juste en face de lui.
- Je vais devoir vous envoyer dans un espace particulier, c'est à cet endroit que la catégorie dans laquelle vous vous situez vous sera révélée.
- Pourquoi ne pouvez-vous pas, nous le dire vous-même, demanda Alice de plus en plus inquiète ?
- Plutôt que ce soit moi qui vous la révèle, ce sera plus marquant si vous la découvriez pas vous-même. Par contre, je vous préviens, il se pourrait que le danger vous guette dans le lieu où vous irez, les sbires du seigneur des ténèbres tenteront peut-être de vous empêcher de réveiller votre magie. Il traque sans relâche les utilisateurs tels que vous sur le point de s'éveiller.
Alice n'avait pas lâché la main de Natie, son inquiétude ne cessait de grandir et elle n'arrivait pas à calmer ses mains qui tremblaient. Peut-être que si elle gardait la main de son amie dans la sienne, elles iraient ensemble dans cet endroit. Loga marcha jusqu'à la cheminée et prit l'ocarina qui reposait dessus puis il vint s'asseoir en tailleur face aux filles et se mit à jouer de l'instrument. Un son mélodieux résonna en écho dans toute la pièce. Alice trouva la musique formidable, quelque chose en elle avait envie de danser, elle ferma les yeux le sourire aux lèvres et se laissa complètement bercer. Plus le son prenait en intensité plus son corps se balançait d'avant en arrière. Soudain, elle n'eut plus envie de danser, au contraire le sommeil commença à l'envahir. Alice sentit la main de Natie relâcher la sienne, son corps tomba sur le côté et elle s'endormit d'un sommeil profond. Bientôt, Alice irait l'accompagner dans les songes, elle résista le plus longtemps possible, mais à son tour, elle finit par s'écrouler. La musique continua encore quelques secondes puis s'arrêta tout doucement, Loga posa l'ocarina à terre. Agenouillé auprès des filles, il leur caressa les cheveux et leur souhaita un bon voyage.