Chapitre 32 : Loin des Yeux, Près du Passé.
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Chapitre 32 : Loin des Yeux, Près du Passé.
Chapitre 32 : Loin des Yeux, Près du Passé.
Cyril observa par la fenêtre du train à grande vitesse qui filait vers Tokyo. Tout était différent ici : l’architecture, les visages, l’atmosphère. Il aurait dû se sentir perdu, mais à la place, il éprouvait un soulagement étrange.
Je suis enfin loin de tout ça.
Après des mois de cauchemars et de culpabilité, il avait quitté la France, laissant derrière lui un passé qu’il espérait ne jamais revoir. Le Japon représentait pour lui un vide à remplir, une opportunité de devenir quelqu’un d’autre, au moins pour un temps.
Son ami Kenji, un Japonais qu’il avait connu à l’université en France, l’attendait sur le quai.
— Bienvenue chez toi, du moins pour cette année, lança Kenji avec un sourire.
Cyril esquissa un sourire en retour. Chez lui. Il n’en était pas si sûr, mais il jouerait le jeu.
Les premières semaines furent un mélange de fascination et de frustration.
• Il notait tout dans un journal intime, chaque découverte, chaque difficulté, chaque fierté.
• Il photographiait la ville, les temples, les forêts. Comme si capturer le monde autour de lui l’empêchait de penser au passé.
• Il s’était inscrit à un club de boxe, où il évacuait son stress à coups de poing sur un sac de frappe.
• Il travaillait dans un bar temporairement grâce à son ami Kenji .
Mais malgré ses efforts, certaines nuits, il se réveillait en sueur, hanté par l’image du corps inerte de sa mère, près de la cheminée.
Je suis loin, mais je n’oublie pas.
Le verre glissa sur le comptoir avec une précision parfaite.
— Arigatō gozaimasu, dit Cyril en inclinant légèrement la tête.
Le client, un homme d’affaires en costume impeccable, hocha la tête avant de prendre son verre de whisky.
Cyril n’aurait jamais imaginé devenir barman à Tokyo. Mais quand Kenji lui avait parlé d’un poste temporaire dans un bar tranquille, il avait accepté sans hésiter. Il avait besoin d’un travail stable pour prolonger son séjour, et surtout, d’un rythme de vie qui l’empêcherait de trop penser.
Dans ce petit bar tamisé de Shinjuku, il se sentait à l’aise. Les clients étaient souvent les mêmes, des habitués qui venaient oublier leurs journées éreintantes dans le monde du travail.
Oublier.
Comme lui.
Cyril s’était construit un équilibre fragile.
• Le jour, il explorait la ville, photographiait les rues animées et les temples cachés.
• Le soir, il travaillait au bar, échangeant quelques mots en japonais avec les clients.
• La nuit, il notait tout dans son journal, transformant son exil en récit.
Mais malgré cette routine, le passé le rattrapait toujours.
Certaines nuits, il rêvait encore de Félicia étendue près de la cheminée.
Il se réveillait en sueur, puis se répétait en boucle :
“Ce n’est qu’un accident.”
“Ce n’est qu’un accident.”
Mais plus le temps passait, plus ces mots sonnaient creux.
Un après-midi, il assista à un cours intensif de japonais, histoire d’améliorer sa compréhension.
— Kyō wa, “shikata ga nai” o benkyō shimasu, annonça la professeure.
Cyril releva la tête.
“Shikata ga nai.”
L’expression lui semblait étrangement familière. Il ferma les yeux un instant, et une voix résonna dans sa mémoire.
“On ne peut rien y faire, alors avançons.”
Son cœur rata un battement. Sa mère.
Elle disait toujours ça lorsqu’il était enfant, à chaque échec, à chaque frustration.
Il observa la professeure, une femme d’une cinquantaine d’années, Sakura, qui lui adressa un sourire bienveillant.
— C’est une expression importante au Japon. Elle nous apprend à lâcher prise.
Lâcher prise.
Cyril se mordit la lèvre. Et si c’était ce qu’il devait faire ?
Petit à petit, Cyril réduisit les appels à Amélisse et Badou.
Moins il parlait du passé, plus il pouvait croire qu’il n’existait pas.
Un jour, Amélisse lui envoya un message.
Amélisse : Tu nous manques. J’espère que tu vas bien.
Cyril : Tout va bien. Ne t’inquiète pas pour moi.
Il hésita à lui dire la vérité. Qu’il se sentait coupable d’oublier.
Puis il verrouilla son téléphone et le rangea.
Ce matin-là, Cyril se réveilla tard après un long service au bar.
Il attrapa son téléphone machinalement, fit défiler ses notifications…
Et s’arrêta net.
Nouvelle vidéo postée anonymement – “Un accident… ou un meurtre ?”
Son cœur s’accéléra. Il cliqua dessus.
L’écran s’anima.
Le logis.
Le salon.
La cheminée.
Et puis, une silhouette familière.
Félicia.
Cyril sentit une sueur froide couler le long de sa nuque.
Impossible.
On distinguait mal la scène, mais on voyait clairement un corps basculer brusquement.
Les battements de son cœur résonnaient à ses oreilles.
Quelqu’un avait filmé le moment exact de la chute de sa mère.
Il fit défiler les commentaires sous la vidéo.
“Un accident étrange… Regardez bien la façon dont elle tombe.”
“Pourquoi personne n’appelle les secours tout de suite ?”
“La chute me semble bizarre, quelqu’un l’a peut-être poussée…”
Quelqu’un savait.
Quelqu’un avait filmé.
Quelqu’un jouait avec eux.
Et ce quelqu’un, il le savait désormais, c’était Carl.
Le téléphone tremblait dans ses mains. Il hésita à appeler Amélisse ou Badou… mais non.
Pas eux.
Il devait en parler à quelqu’un d’extérieur. Quelqu’un qui ne savait rien de son passé.
Kenji.
— Moshi moshi ? répondit son ami.
— Kenji, c’est Cyril.
— Oh, mec ! Ça va ?
— Non.
Le silence au bout du fil fit comprendre à Kenji que quelque chose n’allait pas.
— On peut se voir ? demanda Cyril d’une voix tendue.
Kenji accepta sans poser de questions.
Une heure plus tard, ils étaient assis dans un petit café près de Shibuya.
— Bon, qu’est-ce qui se passe ? demanda Kenji.
Cyril hésita. Il ne pouvait pas lui dire toute la vérité.
— Quelqu’un me harcèle.
Kenji arqua un sourcil.
— Une ex ? plaisanta-t-il.
— Non, sérieux. Quelqu’un m’a envoyé une vidéo bizarre. Je crois… je crois qu’on essaie de me faire peur.
Kenji reprit son sérieux.
— Tu as une idée de qui c’est ?
— Pas encore.
Mensonge. Il savait exactement qui c’était.
Kenji réfléchit.
— Écoute, ne réagis pas. Ne commente pas la vidéo, ne contacte personne. Peut-être que la personne attend que tu paniques.
— Et si elle publie autre chose ?
Kenji le regarda longuement.
— Alors il faudra que tu sois prêt.
Cyril hocha la tête, mais son esprit était ailleurs.
“Je ne suis pas prêt.”
Le lendemain, Cyril retrouva Akihio, un homme d’une quarantaine d’années rencontré à la salle de boxe.
— Tu as une sale tête, remarqua Akihio en s’asseyant en face de lui.
Cyril soupira.
— J’ai vu quelque chose que j’aurais préféré oublier.
Akihio croisa les bras.
— Ce n’est pas parce que tu es loin que ton passé l’est aussi. La vraie question, c’est : es-tu prêt à l’affronter ou préfères-tu continuer à fuir ?
Cyril resta silencieux.
Akihio sourit, comme s’il connaissait déjà la réponse.
— Tu finiras par faire le bon choix.