Chapitre 19 : Le Mystère s’épaissit

Ivana se tenait près du muret derrière le logis, observant au loin, les bras croisés. Ses yeux étaient fixés sur une silhouette à peine visible, qui semblait s’affairer à quelque chose près d’un sentier enneigé.

Yoann, qui ne pouvait s’empêcher de la suivre du regard, remarqua son comportement étrange. Intrigué, il quitta le salon et s’approcha doucement.

— « Qu’est-ce que tu fais là ? » demanda-t-il en chuchotant, lui faisant presque peur.

Ivana sursauta, puis fronça les sourcils, visiblement agacée.

— « Yoann ! Tu m’as fait peur… Qu’est-ce que tu fais là ? »

— « C’est plutôt à moi de te demander ça. Tu regardes quoi, exactement ? »

Elle hésita une seconde, mais finit par lâcher dans un murmure :

— « Tu te souviens du type louche de l’autre soir ? Celui avec le trench beige et le bonnet ? Il est encore dans les parages. »

Yoann se tendit légèrement.

— « Tu es sérieuse ? Tu veux qu’on l’interpelle ? »

— « Pas encore. Je dois savoir où il va. Suis-moi, si tu veux m’aider. »

Yoann jeta un coup d’œil vers le salon, où les autres participants semblaient absorbés dans leurs activités.

— « Et pour le manuscrit ? »

— « Laisse tomber, tu te rattraperas après », dit Ivana avec impatience.

Sans attendre sa réponse, elle s’élança discrètement vers le sentier enneigé, laissant Yoann la suivre en silence.

La silhouette avançait à une allure rapide malgré une légère boiterie. Ivana et Yoann faisaient de leur mieux pour rester hors de vue, leurs pas étouffés par la neige fraîche.

— « Tu es sûre de ce que tu fais ? » murmura Yoann, tout en observant les alentours.

— « Je dois savoir qui il est et ce qu’il veut », répliqua Ivana, ses yeux fixés sur leur cible.

Ils le suivirent jusqu’à une maison isolée. La silhouette entra rapidement à l’intérieur, laissant la porte entrebâillée. Ivana et Yoann se cachèrent derrière un arbre proche, leurs souffles visibles dans l’air glacé.

— « Et maintenant ? » demanda Yoann, légèrement inquiet.

— « On attend. S’il ressort, on le suit à nouveau. Sinon, on entre. »

Après quelques minutes, aucune activité ne se fit remarquer. Ivana prit une décision.

— « Viens, on y va. »

Ils s’approchèrent de la maison avec précaution. À l’intérieur, ils trouvèrent une table encombrée de documents, des photos épinglées sur un mur, et divers objets étranges. L’un d’eux attira particulièrement l’attention d’Ivana : un collier en bois, gravé d’un symbole inconnu, posé à côté d’un cahier taché d’encre.

Elle le ramassa, son pouls s’accélérant. Le symbole lui semblait familier, mais elle n’arrivait pas à se souvenir d’où. Yoann, en revanche, était captivé par les photos.

— « Regarde ça, Ivana », dit-il en montrant le mur.

Parmi les images, ils reconnurent des clichés des participants du stage. Cyril, Aminata, Amélisse, Badou… et même Ivana elle-même. Certains clichés semblaient dater de plusieurs années.

— « C’est quoi ce délire ? » murmura Yoann, choqué.

Ivana examina les photos avec attention, cherchant des indices. Mais son regard se posa de nouveau sur le collier. Elle se demanda s’il pouvait être un lien avec Carl ou simplement une pièce d’un puzzle plus grand.

En voyant Yoann inspecter les lieux avec tant d’attention, Ivana sentit un frisson d’angoisse. Il semblait profondément attaché à elle, plus qu’elle ne l’avait imaginé.

— « Et s’il découvrait la vérité ? » pensa-t-elle. « Et si tout ce qu’il croit savoir sur moi s’écroulait ? »

Elle l’observa à la dérobée, son regard tombant sur ses mains tremblantes. Yoann semblait perdu dans ses pensées, probablement encore perturbé par les photos.

Elle inspira profondément et dit doucement :

— « On devrait partir d’ici. Je ne veux pas qu’il nous surprenne. »

Yoann acquiesça, mais son regard était troublé. En sortant de la maison, il murmura :

— « Ivana… il y a quelque chose que tu ne me dis pas, n’est-ce pas ? »

Elle se figea, mais répondit d’un ton calculé :

— « Je veux juste comprendre ce qui se passe ici, comme toi. Et ça, ça ne me plaît pas. »

Yoann ne répondit pas, mais ses yeux trahissaient un mélange de confusion et de suspicion.

Lorsqu’ils retournèrent au logis, l’atmosphère avait changé. La matinée touchait à sa fin, et les participants commençaient à rassembler leurs manuscrits pour les remettre à Ivana.

Dans le salon, les feux de cheminée crépitaient doucement, et une odeur de bougies parfumées flottait dans l’air. Pourtant, Ivana était tendue.

Elle nota que le manuscrit d’Amélisse manquait, ce qui attira son attention. Yoann, quant à lui, semblait encore sous le choc des découvertes de la maison.

Ivana annonça :

— « Merci à tous d’avoir terminé vos manuscrits. Nous nous retrouverons cet après-midi pour discuter de vos impressions finales. D’ici là, prenez un peu de temps pour vous. »

Alors qu’elle montait dans sa chambre pour commencer à lire les manuscrits, son esprit était divisé entre les mystères qui l’entouraient et l’attachement grandissant de Yoann.

Elle s’installa à son bureau, ouvrit un premier manuscrit, mais son regard ne cessait de dériver vers le collier posé à côté d’elle.

— « Qui es-tu, Carl ? » murmura-t-elle pour elle-même.