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02.La Légende de Nil - Jean-Marc Ferry - Livre I - Les Diamants de Sarel-Jad - Chapitre premier - 1

02.La Légende de Nil - Jean-Marc Ferry - Livre I - Les Diamants de Sarel-Jad - Chapitre premier - 1

Published Feb 8, 2023 Updated Feb 24, 2023 Culture
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02.La Légende de Nil - Jean-Marc Ferry - Livre I - Les Diamants de Sarel-Jad - Chapitre premier - 1

 

Santem a l’expérience de problèmes résistants. Dans ce cas, il ne s’entête pas. Au lieu de se crisper sur la recherche de solutions immédiates, il s’abandonne à rêver tout éveillé. Son regard suivait le fil de l’eau… Il venait de se rendre auprès de « sa » rivière, légèrement en aval par rapport au niveau de sa maison. À cet endroit, la végétation de la vallée est dense et touffue. C’est là qu’il aime à s’asseoir, dissimulé dans les roseaux. Il a appris à demeurer immobile et à ne faire aucun bruit. C’est à cette condition que l’on peut voir la nature s’animer. Les animaux reprennent confiance, sortent de leur cache, se sentent chez eux. Santem eut le privilège de voir surgir un chat des marais à dix pas de l’endroit où il se tenait assis. Trop préoccupé pour remarquer la présence de l’homme, le chat sauvage approcha en rampant d’un objectif qu’il était encore seul à percevoir. Cependant, Santem tentait par autosuggestion de ne faire plus qu’un avec le feuillage et le sable, de se rendre invisible ou de se transformer en une pierre de la berge. Il « neutralisa » sa présence. Ainsi put-il avec sérénité admirer le petit félin, et singulièrement chez celui-ci un art consommé de l’économie : chacune de ses pattes est posée avec une telle précaution que pas un crissement de jonc ne se laisse entendre. Pourtant, deux bécasseaux s’envolèrent sous son nez. Au lieu de bondir pour tenter d’attraper un des volatiles en envol, le chat, sans se démonter, avisa une poule d’eau qui revenait au nid. Il rampa aussi silencieusement qu’un tigre cherchant à éviter l’alerte des singes, redoubla de précautions jusqu’à ce qu’à son estimation un seul bond pût suffire. En un éclair, il tenait l’oiseau dans sa gueule.

Santem retint cette scène de la vie naturelle comme une leçon. Tout doit en chaque détail être calculé, mesuré, prévu, ce qui n’empêche pas d’agir selon des principes. Un événement, cependant, lui revenait obstinément en mémoire : « l’oiseleur », comme le nomment ses filles, s’est, une fois encore, montré au marché du village portuaire. Il a voulu acheter aux pêcheurs le blé tendre que Santem avait remis au Conseil, afin que celui-ci en effectue la distribution aux villageois, à chacun selon ses besoins. Aux dires des filles, il prétend que c’est pour nourrir ses oiseaux. Depuis quand nourrit-on des oiseaux avec une denrée de valeur ? Les filles l’ont appelé « l’oiseleur », parce qu’il exhibe en cage des oiseaux de couleurs vives que l’on n’a jamais vus dans l’Archipel. Ce sont ces mêmes oiseaux qu’il propose en échange du blé tendre... Un comportement étrange, qui laissa Santem songeur. Il avait demandé à ses filles de lui faire une description du personnage : un homme plutôt râblé, chauve, visage glabre, démarche raide, des bagues à trois doigts et une pierre de couleur incrustée dans le lobe de l’oreille…

— Mais je l’ai entrevu au marché des bergers !

Santem venait de se rappeler cette vision fugitive. Il en avait éprouvé un sentiment qui le renvoya au temps où il était jeune homme : il patrouillait avec cinq autres jeunes gens aux confins occidentaux de la Grande Île de Mérode, car des habitants y avaient signalé des étrangers d’allure patibulaire. La rumeur était allée bon train sur le thème du « débarquement ». Courait un bruit d’invasion par les « barbares » des Terres blanches. Santem avait vu accoster un bateau chargé de douze hommes venus d’ailleurs. Sans haine ni colère un instinct clair lui dictait d’affronter l’adversaire. Le jeune homme avait perçu l’hostilité chez ces gens. De par son éducation il était formé à l’hospitalité vis-à-vis des étrangers. Ceux qu’il avait pu accueillir s’étaient montrés ouverts, cherchaient à s’entendre avec les indigènes. Mais il en allait différemment avec ceux qui venaient d’accoster : ils respiraient arrogance et hostilité. Le jeune Santem avait ressenti le danger résonner dans sa tête, aussi clairement que si les guetteurs postés sur les collines de la Grande Île avaient sonné l’alarme. Son impulsion fut alors de se diriger droit vers le groupe, avec une détermination exempte de peur, la main posée sur la garde de sa dague, pour exiger des explications. Instinct du défenseur qui, mu par une détermination si implacable qu’elle se dispense de la haine, avait repéré l’adversaire que rien n’aurait su l’empêcher d’affronter à travers une lutte à mort, où toute peur est transcendée. Bien que les étrangers fussent deux fois plus nombreux, ils rebroussèrent chemin, affectant la nonchalance, et remon­tèrent dans leur bateau pour s’éloigner du rivage…

C’est dans une même disposition au combat frontal que, de façon fugace, Santem était entré, en entrevoyant l’oiseleur ; et c’est en se rappelant cet instant, qu’après coup il identifia l’homme qui sera son ennemi mortel.

 

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