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16 août 2022

16 août 2022

Published Aug 16, 2022 Updated Aug 16, 2022 Culture
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16 août 2022

20 August

And as I walked by the river today all the corn had been cut, and there were no barges left where the soldiers would work like slaves to get them in and out of the water while the officer sat on the bank, not even watching, but paring his nails.

16  août 2022[1]

Et tandis que je me baladais le long de la rivière, tout le maïs avait été coupé.

Tout le blé avait été coupé lors de ma balade le long de la rivière. Il n’y avait aucune barge, de celles où les soldats travaillaient comme des esclaves à les                                  [2]pendant que l’officier, assis sur la rive, s’aiguisait[3] les ongles sans même les regarder.

 

The soldiers were dressed in flimsy football shirts and dirty singlets or nothing, but the officer had on his neat uniform and a white jersey which he must once have had for school sports.

Les soldats étaient habillés avec des maillots de football pauvrets, des marcels sales ou rien. Par contre l’officier lui portait son bel uniforme et  un jersey blanc qu’il avait dû porter une fois pour un cours de sport.

 

Now those barges were not there.

Mais là tout de suite, les barges n’étaient pas là.

 

They and the men must have crossed the channel to take part in the great battle the day before yesterday. Each barge would hold a tank so snugly and the men would sweat and strain just as they did here, only now it would be to get the monsters on to a French beach, and overhead there would be bombers and gusts of machine-gun fire.

Elles et les hommes avaient du traverser la manche pour prendre part à la grande bataille la veille de la veille. Chaque barge portant un tank sur mesure et les hommes suant et peinant comme ils le faisaient ici, mais le faisant cette fois pour      [4]les monstres sur une plage française, et au-dessus de leurs têtes il y aurait des bombes et des rafales de tirs de mitrailleuses.

 

Then there is death and dying over there still and agony all night for some.

Puis il y la mort, ceux qui meurent encore là-bas et pour quelques-uns l’agonie toute la nuit.[5]  

 

The five labourers forking the corn into the lorry see me by the river's brim and shout. I think one waves. It is so far away that I dare not answer for fear of a mistake or insults. I just watch the rhythm of the blue shirted and the white shirted ones playing to each other with their movements like flute and oboe.

Les cinq laboureurs qui chargeaient le maïs à la fourche dans le camion me virent sur le bord de la rivière et se mirent à crier. Ils étaient si loin que je n’ai pas osé répondre de peur de me tromper ou de les insulter. Je me contentais de regarder les mouvements des maillots bleus et des maillots blancs qui, jouant ensemble, imprimaient un rythme comparable à une flute et un hautbois.

 

I think that being still by the river with prunes and biscuits and coffee and precious chocolate is almost to be easy. To take your shirt off and lie back against the spiky satin grass! To feel the first heavy drops of rain on your skin and to know that no one will come near you.

Je pense qu’être posé tranquillement près de la rivière avec des prunes, des biscuits, du café et du précieux chocolat, c’est quasiment une vie facile. Enlever son maillot et s’allonger pour sentir sur son dos les pointes de l’herbe satinée ! et sentir les premières grosses gouttes de pluie sur sa peau tout en sachant que personne ne viendra près de soi.

 

Yet how I loathe nature lovers! My thoughts are never on nature though I go out to roam for hours in the fields every day. My thoughts always go to history, to what has happened century after century on each spot of earth. To lovers lying on the banks, young men that are dead.

Et pourtant, comme je loue les amoureux de la nature ! mes pensées ne vont jamais à la nature même bien que je passe des heures à errer dans les champs chaque jour. Mes pensées sont toujours portées vers l’histoire, ce qui s’est passé siècle après siècle sur chaque lopin de terre. Aux amoureux alongés sur les rives, aux jeunes hommes qui sont morts.

 

 

On a torn piece of note-paper that I found was an eagle coming out of a circle on which was written Per Ardua ad Astra, then in washed-away ink an address of some aircraftman. And I remembered how a month ago I had found the same piece of paper, only then I could read his address. Now I couldn't. What was the letter about?

Sur un bout de papier déchiré que j’avais trouvé, il y avait un aigle sortant d’un cercle, sur lequel était écrit Per Ardua ad Astra, puis avec une encre à moitié effacée l’adresse de quelque aviateur. Et je me suis souvenu qu’un mois auparavant j’avais trouvé le même morceau de papier, mais qu’à ce moment-là, je pouvais lire son adresse. Maintenant, je ne le pouvais plus. Que disait la lettre ?[6]

 

 

[1] En prévision d’un 20 aout 2022 un peu surchargé, je préfère anticiper la traduction de l’entrée du 20 et du 22 aout 1942. Comme quoi, je suis bien dans l’élaboration d’un prototype…

[2] J’en suis au prototype, j’ai énormément de travail à faire en amont, et je préfère, à partir de maintenant, sachant que toutes les conditions ne sont pas réunis à faire un travail « complet », laisser l’espace au travail futur. Là, particulièrement, le lien entre les épis de maïs et les tanks mérite largement que je prenne beaucoup plus de temps pour traduire ce petit « get in and out ». Il y a énormément de masse dans cette petite expression.

[3] Je choisis « aiguiser » pour « paring », pour la suite du passage.

[4] Voir note 2.

[5] Très clairement pas contente de cette traduction, mais pas pour les raisons qu’on pourrait croire. La mort, Denton la connait très personnellement, il en connait « chaque étape », ici il la décompose en trois, et ce sont des détails d’une importance Kapitale pour plonger dans le texte. Cette traduction n’est pas mauvaise de ce point de vue, mais améliorable fortement. Je me fous du côté « littéraire », anglais, français ou zimbabwéen…je m’en fous, au sens je l’espère prochainement séminal. En fait c’est le « over there » qui me pose soucis. Le temps et l’espace, chez Denton, un petit mot, un « je-ne-sais-quoi » comme le dirait Jankélévitch, un petit « q » qui peut se transformer en grand « K », encore faut-il lui donner la place et la masse adéquates.

[6] La beauté d’une traduction réussie, est de pouvoir rendre l’ambiguïté telle que découverte, en tout cas à mon sens. Et laisser ceux qui la perçoivent la percevoir, et les autres pas. Frustrant.

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