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Chapitre 6 - TREBES, août 491

Chapitre 6 - TREBES, août 491

Veröffentlicht am 26, Nov., 2024 Aktualisiert am 26, Nov., 2024 Fantasy
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Chapitre 6 - TREBES, août 491


Gwench’lan s’apprêta à traverser la piste au moment où en amont les chevaux déboulaient pour leur deuxième tour et en aval les vociférations et les encouragements des spectateurs reprenaient de plus belle. Il maugréa en pressant le pas afin de franchir les quelques mètres de terre battue avant le passage des quadrupèdes poussés à la limite de leur résistance par des cavaliers surchauffés et excités par l’enjeu. Il n’avait que peu d’appétence pour la course et ne souhaitait guère se retrouver englué dans le sillage poussiéreux des bêtes lancées à vive allure.


Il ne se retourna même pas pour apercevoir qui menait le train et qui passerait en tête dans cette dernière ligne droite avant l’arrivée devant l’assemblée des rois et des nobles massés quelques centaines de mètres plus bas.


Aujourd’hui se déroulait Lugnasad, la fête du roi et Ban recevait ses homologues. Depuis une semaine les préparatifs étaient allés bon train. Les délégations étaient arrivées les unes après les autres et avaient installé tentes et bivouacs dans les prés bordant l’oppidum. De nombreux artisans avaient fait le voyage, rejoints par des marchands de tous horizons, et chacun avait garni son étal de ses meilleurs articles afin de retenir le chaland.


Lugnasad était une fête dédiée aux échanges économiques et aux foires commerciales. Toutes les classes sociales participaient aux réjouissances, c’était le temps des trêves militaires, du règlement des questions politiques, des mariages, temporaires ou définitifs, de l’audition de poètes et de musiciens ainsi que des jeux et des courses, de chevaux bien sûr mais aussi d’hommes et de femmes 1.


Gwench’lan était attendu ailleurs. Pendant que les jeunes cavaliers montraient leur adresse, les uns pour la gloire, les autres cherchant à s’engager au service d’un des rois et des nobles à l’affut de nouveaux  mercenaires, pendant que les éleveurs flattaient et louangeaient leurs montures, cherchant à négocier les futures saillies de leurs étalons, les druides et les hommes de loi passeraient en revue les jugements rendus à l’occasion des différentes affaires publiques ou privées survenues au cours de l’année écoulée. Les textes devaient être, les peines harmonisées, la jurisprudence enrichie.  Les contrats qui unissaient les cités devaient être renouvelés et toutes les dispositions administratives, financières ou politiques qui garantissaient la paix devaient être vérifiées. La tâche était vaste et le Haut-druide n’avait pas le temps de se joindre aux rois et d’assister avec eux aux jeux et aux concours.


De toute façon, à Lugnasad, les rois étaient au meilleur de leur forme, ragaillardis depuis le printemps par les cérémonies de Beltaine, et encore loin de l’automne et de la mise en dormance de Samaïn. A Lugnasad, les solennités religieuses étaient restreintes, tout comme les banquets du soir, chacun devant conserver ses forces pour les récoltes et les travaux des champs à venir.


Cette année, la fête se déroulait à Trèbes, au cœur du royaume de Bénoïc et, malgré la distance, la plupart des rois avaient fait le déplacement avec leur entourage. Ils avaient souhaité voir de leurs yeux le jeune homme dont on leur avait parlé et qui était censé les rassembler dans un avenir proche.


Ban avait eu le plaisir d’accueillir Bohort son frère, roi de Gaunes,  tous deux ayant pour femmes deux sœurs également. Ils se voyaient souvent et s’entendaient parfaitement, leurs royaumes respectifs étant voisins et situés à la limite de la Petite-Bretagne et de la Gaule.


Gwench’lan hâta le pas en direction de la maison ronde construite de bois et de toile spécialement pour l’occasion et dressée au milieu d’une vaste clairière. A l’ombre de son abri se pressaient déjà un bon nombre de ces hommes d’esprit provenant de ces royaumes et qui attendaient là le début de la séance. Il y retrouva Merlin, invité d’honneur en tant que druide du Haut-Roi de Bretagne.


Il était à peine arrivé qu’il entendit poindre une irritation et constata que plusieurs participants en étaient venus aux mots. Il s’avança afin de se rendre compte de l’incident et se trouva face à un jeune homme manifestement imbu de sa personne.


Un de ses contradicteurs se plaignit : 

« Il n’est pas normal qu’il arbore les insignes de son apprentissage et se pavane ainsi. Le laisseras-tu faire sans rien dire ? »

Le jeune homme objecta :

« C’est bien la première fois que l’on dénigre ma formation !

— Comment t’appelles-tu ? demanda Gwench’lan.

— Mon nom est Lucius.

— Et que sont ces décorations que tu portes hardiment devant nous ?

— Ce sont les marques de mon enseignement, à Burdigala 2, qui atteste du grade que j’ai obtenu.

— Est-ce la première fois que tu participes à notre assemblée Lucius ?

— Oui, et j’ai hâte de partager vos connaissances !

— Tu ne pouvais pas savoir alors qu’il y a trois interdits les jours de réunion et que le premier de ces interdits est d’afficher son grade. Il est d’usage que chaque druide vienne sans sa baguette car il n’est pas convenable de montrer les ogams qui la décorent et qui sont autant de symboles témoignant des niveaux franchis par son propriétaire. 

— Alors comment distinguer ceux d’entre vous qui ont la préséance sur les autres ?

— A Lugnasad, personne ne se targue de parler plus haut que son voisin, chacun a droit à la parole et à l’écoute de l’assemblée. Range tes insignes si tu veux siéger avec nous. »

Le jeune homme sembla contrarié mais obéit aux consignes. Les insultes s’arrêtèrent et l’altercation n’alla pas plus loin. 


Quelques minutes plus tard Gwench’lan entendit pourtant monter l’exaspération et constata que plusieurs participants en étaient venus aux mains. Il s’avança

afin de se rendre compte de l’incident et se trouva à nouveau face à Lucius.

Un de ses contradicteurs se plaignit :

« Il n’est pas normal qu’il nous coupe la parole et nous assène ses arguments sans réserve. Le laisseras-tu faire sans rien dire ? »

Lucius objecta :

« C’est la deuxième fois que l’on dénigre mon érudition !

— Tu aurais pu savoir qu’il y a trois interdits les jours de réunion et que le deuxième de ces interdits est de conclure un débat de sa propre initiative. Il est d’usage que chaque druide ne fournisse pas la dernière strophe d’un chant ou le dernier argument d’une joute verbale afin de laisser à son contradicteur l’opportunité de poursuivre son raisonnement ou sa plaidoirie.

— Alors comment clore une discussion si les débats restent ouverts en permanence ?

— A Lugnasad, nous prenons le temps de la parole et de l’écoute. Plie-toi à cette règle si tu veux siéger avec nous. » 

Le jeune homme sembla mécontent mais obéit aux consignes.  Les coups se calmèrent et l’altercation n’alla pas plus loin.


Puis Gwench’lan jugea le temps venu d’ouvrir la séance et invita chacun à s’asseoir. Mais il entendit de nouveau rapidement siffler la colère et constata que plusieurs participants en étaient venus à s’échanger des coûts de bâton. Il s’avança afin de se rendre compte de l’incident et se trouva encore une fois face à Lucius.

Un de ses contradicteurs se plaignit :

« Il n’est pas normal qu’il s’octroie la place de Docteur sans délibération. Le laisseras-tu faire sans rien dire ? »

Lucius objecta :

« C’est la dernière fois que l’on dénigre ma position !

— Tu aurais dû savoir qu’il y a trois interdits les jours de réunion et que le troisième de ces interdits est de revendiquer la place de Docteur et de s’assoir sur le siège qui lui est destiné. Il est d’usage qu’à la fin de l’assemblée soit désigné celui d’entre nous qui aura manifesté la plus grande sagesse et la plus grande équité et que lui soit attribué ce fauteuil. En attendant il reste inoccupé en signe d’humilité 3.

— Vos usages sont dépassés et il n’est pas étonnant que votre corporation soit sur le déclin !

— A Lugnasad, nous faisons preuve de respect les uns envers les autres ce qui n’est pas ton cas. Tu ne peux siéger avec nous. 

— Alors, annonce-le à celui qui m’a envoyé ici ! Il est certain que tu ne t’en feras pas un ami !

— Nous allons voir s’il ose aller contre une décision du Haut-druide !

— Tu le trouveras sans peine en sortant. Que tes yeux se tournent vers le soleil levant : nos couleurs sont les plus vives et les plus clinquantes de ce pitoyable rassemblement ! »


Gwench’lan savait qu’il devrait aller au bout de sa menace sous peine de perdre toute crédibilité vis-à-vis de l’assemblée entière. On ne garderait pas bien

longtemps un chef qui ferait preuve de pusillanimité face à un individu aussi arrogant et prétentieux.


Il sortit de la maison ronde suivi par l’ensemble de ses confrères et se dirigea vers le campement. Lucius n’avait pas menti. L’étendard qui surplombait le pavillon central claquait au vent de toute sa fougue. Merlin, qui avait emboité le pas de Gwench’lan, sentit un flottement derrière lui. Les druides avaient reconnu la bannière et n’étaient plus aussi pressés de rencontrer celui ou ceux qui s’en référaient.


A peine Gwench’lan était-il arrivé devant la tente qu’un homme en  soutane en sorti.


« Vous ! s’exclama le druide.

— Que me vaut l’honneur de cette visite ? demanda l’homme.

— Nous venons te ramener ton homme de loi, il bafoue toutes les règles de bienséance et perturbe les autres membres de l’assemblée. »


Merlin profita de cet échange pour interroger discrètement son voisin :

« Qui est ce prêtre ? Et de quel royaume sont ces couleurs ?

— Le nom du prêtre, je ne le connais pas, mais nous sommes assurément devant le clan des hommes de Claudas… »


Merlin comprit instantanément la menace.

« Claudas ! Le roi fauteur de troubles, celui-là même qui s’était abstenu de répondre à l’appel de Gwench’lan un mois plus tôt. »

Le prêtre avait pris son temps avant de répondre d’un air maussade.

« Claudas ne va pas être content, car c’est son fils cadet que tu viens de renvoyer, celui qui a suivi la formation des plus illustres enseignants à Burdigala.

— Depuis quand un roi breton envoie-t-il sa progéniture à l’école romaine ?

— Depuis que nous avons prêté allégeance à son empereur ! Et que Claudas et sa famille se sont convertis au christianisme ! Nous n’avons que faire que tes remontrances et de tes coutumes Gwench’lan ! Il me semblait pourtant te l’avoir fait clairement comprendre au printemps dernier !

— Que s’est-il passé entre eux ? demanda encore Merlin à son voisin.

— Au moment où Gwench’lan s’apprêtait à allumer les feux rituels de Beltaine devant toute notre communauté, nous avons vu s’approcher une dizaine de prêtres conduits par celui-ci, chacun portant une simple bougie allumée à la main ! »


Merlin imagina la scène sans mal.

« La première flamme à Beltaine devait être consacrée par les druides ! C’était clairement une provocation à laquelle s’étaient livrés les disciples du

Christ ! », se dit-il.    


« Mais peut-être veux-tu reprendre nos débats ? » demanda encore l’homme à la soutane, prenant à partie la foule qui commençait à s’agglutiner autour de

lui.

Gwench’lan fulminait. Le prêtre reprit.

« Après le feu, peut-être voudras-tu te soumettre à un autre élément ? Toi et tes semblables êtes si souvent pressés d’invoquer vos ordalies ! Que dirais-tu

de l’eau ? Nous ne sommes pas éloignés d’un lac il me semble. Et si nous confions nos livres sacrés aux rides de sa surface, le premier qui coulerait

ferait triompher l’autre ! Ne serait-ce pas une bonne idée ? »

Le prêtre défiait manifestement le Haut-druide devant toute l’assemblée et Gwench’lan n’avait toujours rien répondu. Son exaspération était pourtant perceptible.

« Suis-je bête ! reprit encore l’homme de Dieu, tu n’as pas de livres sacrés ! Vous préférez vous en remettre à votre mémoire et à

une diffusion orale de vos préceptes !  Qu’à cela ne tienne, peut-être pourrais-tu utiliser une de vos pierres sacrées à la place ! »

La foule se mit à rire à cette dernière bravade. Merlin vint prendre Gwench’lan par le bras et lui dit en aparté :

« Ne cède pas à la colère, c’est ce qu’il cherche !

— Je ne peux le laisser m’insulter de la sorte sans réagir ! répondit-il. Vois tous les druides qui me fixent et attendent ma réponse ! Ils ont peur de ce prêtre semble-t-il !

— La peur que je lis dans leurs yeux est celle de ta réaction, car ils savent bien que tu ne ferais qu’une bouchée de ce prêtre déplaisant mais que cela entrainerait la guerre avec Claudas. Nous savons tous qu’un jour où l’autre ce conflit resurgira mais n’en soyons pas à l’initiative. Déjà que Claudas brûle de se venger du camouflet qu’Uther Pendragon lui a infligé, s’il apprenait en plus que c’est son fils que nous souhaitons mettre à sa suite à la tête de la Bretagne ! Tant qu’Arthur est à une portée de javelot de lui, nous devons faire profil bas !

— Alors ? reprit le prêtre. Quelle est ta réponse ? »


Gwench’lan s’avança vers lui, chacun autour d’eux retenait sa respiration.

« L’eau est l’élément par lequel les prêtres baptisent au nom de ton Dieu, je ne veux pas me soumettre à une ordalie par l’eau avec toi ! 4 »

Puis, afin de couper court à toute riposte, il se drapa de sa dignité et rebroussa chemin d’un pas rapide, suivi à nouveau par l’ensemble des druides.

Il entendit encore les ricanements des hommes de Claudas et crut reconnaître celui du prêtre au milieu de ceux de ses serviteurs. Merlin l’entendit maudire contre tous ces ecclésiastiques.

« Un jour viendra où les prêtres du Christ seront poursuivis et on les huera comme des bêtes fauves, la roue du moulin moulera menu et le sang des moines lui servira d'eau» 5




[1] Ce qui n’est pas sans rappeler l’histoire de la Déesse Macha, obligée de courir contre les chevaux du roi des Ulates alors qu’elle est enceinte.

[2] Il s’agit de la ville de Bordeaux.

[3] La « Place du Docteur » semble avoir été repris en modèle par les guerriers et leur « Part du Héros » à la différence près que si les druides ne cherchaient pas les honneurs, les guerriers briguaient le morceau de choix du cochon que l’on appelait « Part du Héros ». Les espaces de discussion circulaires comportant

un fauteuil vide étaient peut-être à l’origine de la Table Ronde et du Siège périlleux à moins qu’au contraire Aurélien ait voulu s’en inspirer pour lui inventer une origine celtique. Je ne lui ai pas demandé.

[4] L’anecdote au sujet de l’ordalie par le feu ou par l’eau est une libre adaptation d’une rencontre similaire entre Dubtak, le druide du roi Laégaïr, chef suprême de l’Irlande, et Saint-Patrick au cours de son œuvre de christianisation de l’Irlande. 

[5] Cette satire a été couchée sur le papier presque mot pour mot par d’Hersart de La Villemarqué dans le Barzaz Breizh.


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