Le Guca Festival : LE festival de musiques balkaniques
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Le Guca Festival : LE festival de musiques balkaniques
Le Guca Festival. LE festival de musiques balkaniques, fanfares dans la lignée des Goran Bregovic ou Emir Kusturica. Des cuivres endiablés, rythme précipité, toujours plus vite, toujours plus entraînant. C'est une course éperdue contre le temps, un empressement panique en même temps qu'une soif de vivre, une volonté de faire la fête, coûte que coûte, jusqu'à être entièrement absorbé par la musique et sortir hors du temps. Une transe à la mode yougoslave !
On déambule dans les rues de ce petit village transformé en scènes ouvertes pour l'occasion, et chaque terrasse compte son orchestre d'une dizaine de cuivres délivrant leur rythmique hyper entraînante. Les mélodies s’entremêlent, il y a comme une surenchère permanente au milieu de des litres de bières ingurgités. Attenant, des stands vendant nourriture, tee-shirts, et apparat militaire. Le béret de l'armée serbe est l'accessoire suprême. Dans certains bars, les jeunes enivrés chantent des hymnes militaires à la gloire de la Serbie. Il y a comme un malaise qui s'installe. Revenant de la Bosnie ravagée par les velléités de Milosevic, on prend conscience que l'esprit nationaliste est encore bien présent dans les têtes des jeunes, rêveurs du retour à la grande Serbie. Ca fait peur...
Le grand concert a lieu le soir au stade. Nous y faisons la connaissance d'un couple de grecs avec qui nous passons la soirée. Plusieurs stars de variétés serbe sont présentes ce soir, et nous échangeons aussi un peu avec les serbes qui nous entourent, enfin ceux qui maîtrisent un peu l'anglais et non le russe comme langue étrangère. La nuit tombe, les fanfares prennent le relai, on se retrouve à faire la fête et danser avec un grand groupe de jeunes européens qui vivent dans un camping non loin.
Nous les rejoignons au Paprika Camp dès le lendemain. Le Paprika Camp ! Résurgence par excellence de l'esprit beatnik des années 70, il s'agit d'un terrain et d'une grange que Miroslav, un serbe d'une de cette époque loue à ses frais. Il y a installé quelques douches, une cuisine extérieure dans laquelle chacun peut préparer à manger et où une cuisinière sert des soupes à prix modique, un bar, des tables avec parasol, et et une sono pour l'ambiance. Chacun peut venir y planter sa tente ou garer son camion librement, il n'y a pas de tarif, tout repose sur la libre participation et le partage mutuel. Les gens viennent de toute l’Europe, des espagnols, des italiens, des hongrois, des polonais, des grecs, des roumains, bref c'est un énorme melting pot de la jeunesse erasmienne, pour qui l'Europe est un vaste terrain dans lequel on peut circuler librement selon ses moyens.
Le jour on va se baigner au lac ou à la rivière, on erre dans les rues de Guca pour une bière ou du cochon grillé à la broche, le soir on sort tous ensemble pour assister aux festivités. La nuit tombe au Paprika Camp. Les instruments sortent, ma guitare tourne, on chante en choeur des hymnes internationaux, Beatles ou Rolling Stones, chacun se prête au jeu. Quand je vois le sigle Ohm sur le tee-shirt de mon ami Javier, une communion nous empare, on se colle front contre front et on entonne cette vocalise, rapidement rejoins par une, deux, cinq, dix, vingt personnes, en cercle sous la nuit étoilée à fredonner une immense Ohm et des chants indiens.
Quel instant unique et magique !!! Il se dégage au Paprika Camp une harmonie, une entente, une complicité entre tous, faisant revivre l'utopie communautaire de nos ainés hippies, l'espace de quelques jours, quelques instants, ce grand rêve de fraternité universelle abandonné depuis au profit de l'individualisme de la société de consommation. « Hippie is not dead ! » nous scande le Paprika Camp.
Le festival se termine. Chacun organise ses plans à venir. Beaucoup sont venus en stop et sillonnent l'Europe tout l'été au gré des vents. Avec notre trafic, nous représentons une aubaine : celle de pouvoir se déplacer facilement où l'on souhaite. Pour nous c'est le retour. Se pose la question du chemin : reprendre l'axe nord en passant par Belgrade puis autoroute croate vers l'Italie ? Ou contourner par le sud , en traversant le Monténégro avant de rejoindre Dubrovnik ? Nous avons rencontré deux espagnols et deux filles belges qui cherchent une voiture pour continuer vers le sud. On a 4 places, le Guca s'invite aux prolongations ! On prend donc la route tous les 6, direction les canyons du Monténégro.