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Publié le 27 juin 2025 Mis à jour le 27 juin 2025 Jeunesse
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T’étais pas folichonne. C’est pas moi qui le disais. Mais lui. Le roi des vannes à deux ronds. Celui qui sortait ses griffes avant de lancer ses crochets pour briller en société.

– Sérieux, les mecs, on dirait E.T. Avec sa grosse tête, ses lunettes de naze et ses yeux chelous.

Il se croyait le plus fin. C’est tombé comme un caillou dans une mare. Personne n’a protesté. Certains ont ri. Toi aussi. On était en quatrième. E.T., c’était toi. Sophie. Ce jour-là, t’as pris la giclée du plouf en pleine tronche. Tu as ri avec les baleines. De toi-même ? Une gorgée d’eau croupie au fond de ton gosier. Rire réflexe. De façade. De survie.

J’étais témoin. Je n’ai pas pris parti. Le malaise flottait dans l’air. Gérald, le harceleur du groupe, en avait au service de tout le monde de toute façon. J’ai eu peur aussi. Valait mieux se faire discret. J’ai vu tes épaules trop raides. Toi, la fille que cet Adonis de Gérald appelait E.T.. Il n’était pas folichon non plus, pourtant. Je me rappelle ton regard qui s’est brièvement figé. Ta bouche qui riait faux, faute d’alternative. Parce que dans l’enfer du collège, jungle à ciel ouvert, pleurer, c’est signer son arrêt de mort. Alors, tu t’es conformée. Tu as ri, comme on met un pansement.

Les années ont passé.

Quand je t’ai revue en ce jour de rentrée, au lycée, t’avais affûté ta langue. Toujours la cible de quelques garçons qui ne te trouvaient pas jolie. Mais tu n’étais pas devenue polie pour autant. C’était toi, à présent, qui déclenchais les hostilités quand la jalousie te mordait. Tu livrais ta guerre de territoire. Quand j’ai entendu « C’est pas vrai, elle est dans ma classe. Je peux pas la saquer. ». J’allais vraiment te gâcher ta journée, ma parole ! À t’entendre, j’allais même te pourrir l’année. Je ne t’avais jamais agressée. J’ai donc compris que tu voulais passer de l’autre côté de la barrière.

Le poison ingurgité, tu l’avais métabolisé et voulais l’inoculer à ton tour. Reptile indocile. L’alien de Spielberg a beau se trouver du côté des bons, tu n’as rien appris de la leçon. Le venin qui t’irriguait, tu devais le recracher.

Je ne te cherche pas d’excuses. Rien ne te dédouane d’avoir voulu boucler la boucle. À défaut de la boucler.


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