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Chapitre 1 : La Makdra

Chapitre 1 : La Makdra

Publié le 12 déc. 2023 Mis à jour le 6 avr. 2024 Fantaisie
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Chapitre 1 : La Makdra

Image de SnakeCroqueur (Artiste de cette image)

 

Bonjour à tous, 

Cette fois-ci, je ne poste pas une histoire courte. Ces histoires qui entraînent ma plume, mais amène une frustration du lecteur de ne jamais voir de suite. 
Ce soir, je vous pose ici, enfin, mon 1er Chapitre. Le 1er d'un roman qui me tient à cœur, car il sera lui aussi le 1er roman. Le 1er a être écrit intégralement, le 1er qui sera publié, mais aussi le 1er d'une trilogie. D'où toute l'importance pour moi qu'il soit très abouti. 

Je n'en dis pas plus. 
Je vous laisse lire, vous plonger dans l'histoire, et surtout, par égard pour tout le travail fourni, merci de me laisser vos commentaires, les plus explicites possibles. A votre lecture :

Chapitre 1 :

- La Makdra -

 

Ce monde, offrant de si magnifiques paysages, quelles que soit les saisons, quelles que soit ses contrées, animées de ses rires d’enfants revivifiant, nous baignant de ses couleurs aux danses folkloriques qui inondent nos esprits de ses joies édéniques, allait bientôt connaître des jours bien plus sombres…

 

Notre belle et si vieille planète a grandement évolué au cours des siècles. En des temps plus anciens, la Terre était peuplée, essentiellement, de quelques millions d’humains, de nains, ainsi que d’une très grande diversité d’animaux ; bien plus qu’à notre époque. Nous y trouvions aussi de gigantesques créatures, toutes aussi féroces que… féeriques. La loi du plus fort y régnait, c’était une question de survie. Chez les humains, nombreuses furent les guerres. Elles se succédèrent les une aux autres, déversant toujours plus de sang. Les raisons furent toujours les mêmes ; conquérir et asseoir les positions stratégiques. Plus leur monde prédominait et plus les conflits devinrent virulents et meurtriers. La paix n’avait jamais fait partie de leur coutume.

Ce que les hommes appelèrent la « Grande Guerre » fut la plus terrible et la plus sanglante de toute leur histoire. Des races entières furent massacrées, décimées jusqu’aux derniers. Des villages et des peuples furent rasés et réduits en cendre par pur besoin d’assouvir des pulsions de violence. Nombreuses furent les femmes dressées telles des trophées sur les places principales pour servir de remerciement aux guerriers, afin qu’ils répandent leurs semences victorieuses. Les faibles n’avaient guère d’autre choix que de périr, ou de se soumettre. Les plus forts, quant à eux, devaient faire leurs preuves au combat. La gloire était leur horizon, mais, bien souvent, c’était la mort qui les accompagnait sur le fil d’une lame.

Peu s’en sortirent sans perte et fracas. Les cadavres s’amassèrent en masse et furent brûlés afin d’éviter toute épidémie. On ne put jamais comptabiliser l’immensité des victimes de cette guerre. Un homme, cependant, prit la ferme résolution que cela devait cesser. Il maîtrisait un art mystique terriblement sombre et mystérieux. Personne d’autre que lui n’était capable de rivaliser avec de tels pouvoirs. Plusieurs noms lui étaient associés : le messager de la mort, le mage noir, ou, tout simplement, celui dont on ne devait pas croiser le chemin.

Il prit part à ce conflit, qui semblait interminable et dévastateur. Il sut convaincre les plus grands mages de ce monde de constituer une communauté, ayant pour seul objectif de mettre un terme à tout cela. Leurs puissances destructrices furent tellement dissuasives que les affrontements prirent fin peu à peu. Et pour les quelques braves obstinés qui ne comptaient pas capituler, ils furent soit exterminés sous les brasiers de l’enfer, soit ils sombrèrent dans les abîmes les plus profonds.

Cette communauté perdura bien après la « Grande Guerre ». Elle s’était renforcée et elle devint prédominante sur l’ensemble du globe. Cet homme, réputé pour ne pas faire dans la dentelle, avait largement contribué à ce que la paix revienne sur Terre. Harzkkar, toujours vêtu d’une longue robe noire, descendant jusqu’aux pieds au ras du sol, une cape à capuchon en permanence rabattue sur la tête, était et resta le grand maître de la communauté la plus puissante au monde.

Ne voulant plus de guerres de cette envergure sur cette planète, il imposa ses idéaux sur chaque royaume, menaçant les dirigeants d’intenter à leur vie, ainsi que celle de leurs plus proches sujets. Instaurer la terreur était la seule solution qui lui parut la plus radicale. La seule à ses yeux qui avait une chance de réussir. Afin d’accroître ses rangs, et d’affermir sa suprématie, il pactisa avec les créatures les plus viles et les plus redoutables que ce monde eut connus ; les dragons. La communauté, devenue la pire crainte des royaumes, exigea sa présence à toutes les assemblées décisionnaires sur chaque territoire. Elle s’empara de places prédominantes au pouvoir, laissant les baillis et les sénéchaux au rang de simples laquais. Leurs paroles primaient désormais sur celles des connétables.

Un sentiment de dépossession s’instaura au fil du temps, ce qui entraîna une inimitié envers les mages. Les nobles et les conseillers des rois se sentirent écartés, isolés du pouvoir, et affaiblis de ce fait. Quelques malheureux eurent le courage de s’insurger, mais ils virent leurs vies être mises à prix. Nombreux furent les seigneurs qui disparurent sans laisser de traces après avoir essuyé un différend envers la communauté.

Renommée par la suite « la Makdra », symbolisant l’union des mages avec les dragons, la communauté n’aimait pas les contestataires. Beaucoup finirent comme cobayes de leurs diverses expériences. Quoi de mieux que de la chair fraîche pour tester les effets subis d’un nouveau sortilège, recueillir les réactions à l’ingestion d’une potion ou simplement vérifier la nocivité d’un poison ?

Les taverniers prenaient régulièrement le loisir de conter la folle histoire de la perte intégrale de tout le bataillon du Baron Al-Debreck, de la contrée de Bug’in Gram. Ce récit insufflait la peur. Il relatait ce que pouvait engendrer la colère des mages de la Makdra. Le baron, pensant qu’il avait encore un droit de décision sur ses biens, aurait refusé, catégoriquement, de céder quelques parcelles de terrain à la tristement connue… Dësz. Ce mage faisait partie de l’élite. Elle était l’une des trois mages de confiance de Harzkkar. Lui déplaire était pourtant réputé pour ne pas être sans conséquence. Celle-ci n’aurait cherché qu’à posséder quelques lopins de terre dans le simple but de se ressourcer, un lieu de repos. Un endroit éloigné de tous ces charognards de mages, qui, voulant se servir d’elle pour atteindre Harzkkar, lui vantaient en permanence leurs mérites. Le lendemain de cette altercation, le baron vit son marais envahi d’une horde de crapauds. Ses jardins, ses cours, quant à eux, étaient jonchées d’armures… vides. Dësz avait la capacité étonnante de lancer de véritables déferlantes de puissance magique, rien que par le son de sa voix. Elle n’avait nullement besoin d’artifice pour déployer une force destructrice. On la surnommait régulièrement Dësz, el Sirania, l’unique survivante des landes de la Sir-Anys. Notre baron, Al-Debreck, se retrouva du jour au lendemain avec la seule compagnie de ses domestiques. Des âmes pensantes lui conseillèrent de s’estimer heureux, il pouvait encore jouir de la présence de femme et enfants. Le baron, à l’évidence, considéra cela comme une bien maigre consolation, préférant, sans nul doute, une bonne garde armée à une vie de famille bien remplie. Il sut tout de même se rassurer sur un point, il s’en était sorti indemne, et surtout, sous sa forme humaine. 

Une tension grandissante se fit sentir au fil des années. Les hostilités furent fréquentes et plus violentes que jamais. Les humains dépourvus de magie, parfois dénommés les Ozckys par les mages, signifiant en langue ancienne « le petit peuple », étaient rarement les vainqueurs de ces affrontements. Et pour ceux qui, par un malheureux hasard, arrivaient à leur réchapper, il n’en était point le cas pour le reste de leur famille, les jours qui suivaient. 

Tout ceci ne plaisait guère à Harzkkar. Il n’avait pas participé activement à la fin des conflits de cette guerre aussi macabre que futile, où des races furent intégralement décimées, pour que d’autres massacres perfides prennent place. Afin d’y remédier, il prit la ferme résolution d’intervenir, une fois de plus. Pour les Ozckys, il mit en place des procédures rigoureuses et régulières pour tout ce qui impliquait la répartition des territoires entre royaumes, la gestion des problèmes d’ordre diplomatique et établi des règles d’échange de marchandise. Sous le contrôle de la Makdra, une assemblée se réunirait toutes les cinq lunes pour en décider. Elle comprendrait une dizaine de grands mages soigneusement sélectionnés par les élites de la communauté, ainsi que tous les rois ou leurs conseillers.  

En ce qui concernait la communauté, Harzkkar rappela à chaque membre que tout débordement serait suivi de l’exclusion. Ce qui, pour un mage, revenait à n’avoir plus aucune chance d’évoluer. Il n’y avait rien de pire pour cette caste que d’être laissée pour compte. La mort serait une bien plus douce fin à leurs yeux.

Au fil du temps, il devenait bien rare que les rois puissent participer aux assemblées. Le surnombre des membres rendait les décisions longues et fastidieuses, contraignant les mages à y consacrer plusieurs jours, bien trop à leur goût, pour en venir à bout. Ils s’arrangèrent, par simple intimidation, suivie parfois de quelques débordements en usant de leur puissance magique, pour qu’ils deviennent les seuls participants. La royauté n’avait plus son mot à dire, elle avait fini par perdre ce droit. Un de plus. Voyant leurs crédibilités s’amoindrir, le peuple se mit à contester régulièrement le rôle de la souveraineté.

Ganaë fut le premier à manifester son besoin de redorer le blason de la couronne. Bien qu’il soit devenu roi depuis peu, il avait su rapidement redresser les divers torts laissés par son prédécesseur. Il avait restauré plus d’égalité auprès de son peuple. Les taxes étaient mieux réparties. Les injustices, telles que le droit de cuissage, les paiements en nature sur les récoltes, avaient été supprimées. La traite des esclaves fut la première qu’il fit disparaître. Il ne supportait pas l’idée que l’on puisse abuser ainsi de la condition humaine. Chaque travail méritait son salaire. S’attirant la sympathie d’une grande partie de ses sujets, il put se constituer une armée forte. Pour ne pas récolter la colère de la noblesse, il leur apporta ce qu’ils adoraient bien plus que l’argent : le pouvoir. Il concéda une partie des droits réservés exclusivement à la royauté : proposer et instaurer les lois du pays à ses côtés. Il put ainsi obtenir de solides alliances au sein de son royaume.

Mais voilà, la Makdra posait problème. De par son omniprésence, elle empiétait sur ses projets. Il avait beau constituer une puissance militaire impressionnante, elle n’était pas suffisante pour rivaliser avec la communauté. Au mieux, il n’avait réussi qu’à repousser le jour où il perdrait le contrôle total. À quoi bon avoir de bons soldats, si leur principale utilité était de servir le thé à ces messieurs de la Makdra durant les arènes de combat ?

Ganaë ne contestait pas que la communauté ait mis un terme à toute forme de guerre. Il pensait lui-même que le sang avait suffisamment souillé le sol ces derniers siècles. Mais s’il y avait bien un point qu’il ne supportait pas, c’était que l’on s’immisce dans ses affaires. Le roi était et devait rester le seul à gouverner. Il était hors de question qu’il en soit autrement.

Pourtant, Ganaë n’attachait guère d’importance aux apparences et aux quelconques marques de distinctions. Il ne prêtait que peu d’attention à ces yeux brillants d’admirations qu’il croisait. Ni à ces cœurs palpitants de mille feux des jeunes filles qui avaient eu l’honneur d’entrevoir leur roi. Ses demoiselles, toutes aussi séduisantes les unes que les autres, le laissaient sans émoi. Bien que la majorité d’entre elles percevaient ses véritables charmes, au-delà du titre qu’il portait, cela lui était égal. Il est vrai que son intense regard bleu azur, renforcé par une expression ferme et profonde, faisait de lui un homme réfléchi et déterminé. Ses cheveux, d’un beau noir de jais, n’étaient que rarement vus en bataille. Il les avait de préférence lisses, coiffés vers l’arrière, se terminant en queue de cheval pour habiller entièrement sa nuque. Ce charme charismatique, ainsi que sa carrure imposante du haut de ces six pieds, fut longtemps son arme de prédilection. Elle lui permit d’obtenir de nombreux services et précieuses informations, là où la violence aurait été vaine. Avec le temps, il sut devenir extrêmement persuasif et s’entourer de relation fiable.

Fort de ces nouvelles fréquentations, il put découvrir une caste aux capacités particulièrement intéressantes : les alchimistes.

N’étant pas appréciés des mages, ils agissaient dans l’ombre, conservant soigneusement leur anonymat. Leurs travaux portant sur des matériaux aux spécificités très rares, celles d’être réceptives à l’essence magique, les mages les voyaient d’un mauvais œil. Quelques-uns furent d’ailleurs pendus pour sorcellerie pour avoir associé les forces occultes à divers objets, tels que des bagues, des armes, ou toutes autres matières composées de métal. Ganaë y avait entr’aperçu une opportunité. S’allier à eux serait propice pour que son armée devienne plus puissante, et, de leur côté, il saurait leur apporter ce qu’ils leur manquaient cruellement : protection et moyens pour expérimenter en toute tranquillité. Depuis ce jour, il leur rendait régulièrement visite dans une des tours de garde où ils les avaient aménagés. Les mages n’y traînaient jamais leur guêtre, ne voulant pas se mêler aux petits peuples, et encore moins à ces hommes en armure pleins de sueurs odorantes. Ganaë, tel un jeune marmouset, s’amuser à essayer et récupérer, par la même occasion, divers objets imprégnés de magie.

Les alchimistes ne furent pas les seuls qu’il découvrit. Il fut fort surpris de rencontrer d’autres personnes qui avaient cette même soif insatiable de connaissance de ce monde. Une envie prédominante de comprendre chaque phénomène qui nous entourait. Mais exposer des théories n’était pas suffisant pour démontrer. Ces personnes n’arrivaient jamais au bout de leurs réflexions par fautes de moyens. Ganaë les enrôla aussitôt. Un tel besoin d’enrichir son omniscience ne devait pas être gâché. Il leur octroya la facilité d’étudier plus profondément les aspects physiques de la vie, pour être en mesure de leur donner une explication valable. En retour, leurs recherches servirent bien entendu leur souverain, mais tout autant leur royaume. Ils permirent, à titre d’exemple, d’améliorer l’agriculture avec un système d’irrigation, compensant ainsi le manque d’eau de certaines terres, trop arides pour la culture. Ils adaptèrent des jambes en bois pour aider les estropiés de la guerre à remarcher le plus naturellement possible. Maintes inventions sortirent de leur collaboration. Ganaë les avait appelés « les scientificus » : Homme à la recherche du savoir.

Il ne leur fallut pas longtemps pour associer leurs idées avec celles des alchimistes et, par voie de conséquence, combiner leurs expériences. Le résultat s’annonçait des plus prometteurs.

Ganaë était d’un naturel très curieux sous ses aspects un peu rustres, et il n’était pas rare qu’on le retrouve dans la plus grande bibliothèque du monde, celle qu’il avait fait construire au sein de son château. Il y avait réuni un grand nombre d’ouvrages, provenant de diverses régions. Certains semblaient intemporels. Il avait dans l’idée que la culture et la connaissance étaient essentielles et qu’elles méritaient d’être préservées. Il prévoyait, dans un avenir proche, d’en faire profiter l’ensemble de son peuple. Chaque livre y était conservé et rangé avec soin. Chaque rouleau de manuscrit ou parchemin était enfermé dans un étui de cuir, à l’abri de l’humidité et de la lumière. Pouvant les compter par milliers, tous étaient classifiés par thème et par ordre alphabétique. Les étagères faisaient au moins trois fois sa taille. Des escaliers coulissants permettaient d’atteindre les ouvrages les plus hauts perchés. Ces plus beaux souvenirs d’enfance le submergeaient régulièrement en ce lieu. Quand il se plongeait dans les contes qu’il connut à sa prime jeunesse, il avait l’impression d’avoir accompli le rêve de ces parents : prendre le temps de vivre ces écrits incroyables.  

Dans ce bâtiment sculpté en bois en grande partie, aux fresques magnifiques représentant l’histoire des Hommes à travers les siècles, Ganaë s’était réservé un espace juste pour lui. La bibliothèque, dite d’ordre royale, n’était ouverte d’accès actuellement qu’à la noblesse. Mais une chambre forte n’était dédiée qu’à lui. Ganaë y avait recueilli les livres les plus importants à ces yeux. La plupart étaient si anciens qu’il semblait tomber en lambeau, la couverture usée. Le titre à peine lisible. Des pages prêtes à s’envoler. La pièce était toute juste assez haute pour lui. Les étagères se faisaient moins nombreuses et moins larges. On y retrouvait un amas de poussières et toiles d’araignées, qui dépareillait avec le reste de la bibliothèque. L’air y était lourd et l’odeur de papier vieilli par les âges y était très prenante. On pouvait y ranger qu’une cinquantaine d’ouvrages tout au plus. La majorité d’entre eux traitait de diverses légendes passées. Ganaë s’en nourrissait dès qu’il le pouvait. Assis à même le sol, on le retrouvait souvent avec les mêmes écrits, ceux qui contaient l’histoire d’Athanaëlle. Chaque page, chaque récit à son sujet étaient tous assez flous et mystérieux. Les livres d’histoire semblaient vouloir effacer son passage sur terre. Il avait dû mal à discerner si elle était une déesse ou toute autre créature. Ce qui l’intriguait bien plus, c’est que certains ouvrages lui attribuaient le mérite de l’apparition des dragons. En était-elle vraiment à l’origine ? Elle se serait attiré ainsi les foudres des dieux, et ils auraient tout fait pour que toutes traces de son existence disparaissent. Ganaë passait tout son temps libre à tenter de comprendre les écrits de très vieux manuscrits qui pourraient démystifier cet être. Il ressortait régulièrement frustré, faute de ne pas avancer. Les langues employées étaient souvent trop anciennes et il ne parvenait pas à les déchiffrer. Malgré cela, il restait persuadé que la magie était due aux dragons. Qu’ils en étaient la source ! Les mages ne faisaient que récupérer l’essence magique pour la réutiliser. Ce qui expliquerait que l’initiation pour la maîtriser soit si complexe. L’alliance de la communauté de la magie avec les dragons prendrait, alors, tout son sens.

Ganaë était bien conscient que tout ceci n’était que son interprétation, sans réel fondement, mais il était fort aisé de constater que, dans les lieux où la magie était la plus prédominante, un dragon se trouvait à proximité. Ceci était d’autant plus vrai dans les régions où se situait les quatre plus anciens d’entre eux : Dækkrium, Dronitos, Drantys et Rakgdor.

Ces quatre dragons semblaient tellement âgés, qu’on les disait immortels. Personne ne connaissait leur origine. Les légendes parlaient d’eux au temps des dieux. Existaient-ils à la genèse de ce monde ? Eux seuls seraient en mesure de lever le voile sur leur histoire. Mais comme tous les dragons, ils n’étaient pas très loquaces.

La prochaine assemblée des mages, destinée à la répartition des terres, allait bientôt se produire. Mais, pour celle-ci, il fallait que seuls les rois et reines y participent. Ganaë avait un plan, et il savait déjà comment y parvenir. L’identité des mages y assistant n’étant pas un secret, il leur rendit visite. Sur un ton commun et détaché, voici ce qu’il leur exprima :

« Cela doit être particulièrement pénible, toute cette perte de temps qui vous est si précieux, tout cela pour de telles futilités. Tout le monde sait qu’il est bien plus d’utilité publique que vous le consacriez dans vos laboratoires. La magie s’apprend par l’expérimentation, après tout. Vous savez, je serais certainement en mesure de convaincre les rois de faire cette sale besogne à votre place. Ce ne sont que quelques parcelles de terrains à répartir après tout, et puis les règles du commerce sont déjà bien établies, que rajouter de plus. Faut-il vraiment y passer sa vie ? »

Ces paroles résonnèrent comme un sentiment de justesse morale. Pour être reconnu, avoir un bon échelon social au sein de la communauté la plus puissante de cette planète, qu’est la Makdra bien entendu, il fallait soi-même être doué. Plus un mage prouvait sa maîtrise des arts occultes et plus il avait la possibilité d’accéder au conseil des mages. Vingt membres le composaient seulement. Un classement déterminé par les quatre habituels que sont Harzkkar, Beyhr, Mhùus et notre magnifique Dësz permettait de choisir qui seraient les élus : ceux qui auront le privilège de faire partie du conseil. Ici, tout se décidait pour le monde la magie. Donc, tout se décidait pour le monde.    

Le temps. Cette donnée si précieuse et qui nous manque quand on souhaite rapidement évoluer. Un mage de faible niveau ne pouvait pas se permettre d’en perdre. Or, les membres du conseil n’assistaient jamais aux assemblées.

Ganaë ayant pu se débarrasser de la présence des mages, il put passer à la suite : convaincre les têtes couronnées. Il envoya un messager à destination de chaque royaume, portant la lettre suivante :   

« Cher roi (reine) du royaume de…

J’ai appris par le plus pur des hasards que nos mages se désintéressent très singulièrement de l’intérêt de la prochaine assemblée. Ceci n’étant plus un jeu aussi attractif de prestige qui pouvait l’être à ces prémices, ils ont décidé de ne pas y assister. Il se peut que, si personne ne s’y présente, qu’elle soit repoussée d’une dizaine de lunes. La seule alternative qui se présente serait que nous, principaux intéressés, y assistions. D’un point de vue purement personnel, j’y serais. Retrouver un peu de gloire passée auprès de mon peuple en montrant que nous sommes encore en mesure de décider pour nos royaumes me semble primordial. Durant le temps où nos mages s’amuseront avec le feu du bout de leurs doigts, nous serons occupés à ranimer la flamme qui anime nos rôles de souverain. Je serais enchanté de vous y voir, sur un lieu plus intimiste que celui déterminé par nos chers confrères encapuchonnés. Une carte vous permettra d’y parvenir.

Dans l’agréable attente de vous voir. »

Au bout de quelques jours, il put voir les effets de son stratagème. Cinq seulement avaient manifesté qu’ils seraient présents pour la prochaine assemblée. Mais, le nombre importait peu. Les noms de ceux qui avaient répondu à l’appel étaient exactement ceux dont il avait besoin. À eux six, ils rayonnaient sur plus de la moitié de la planète. Leur force, leur expérience seraient un atout indéniable. Une demi-lune les séparait pour la suite de son plan.

C’est ainsi qu’ils se rendirent au point de rendez-vous que Ganaë leur avait fixé. Ils sortirent d’une forêt dense et sombre, composée d’arbres totalement dénués de feuilles. Ils étaient noircis de l’écorce à la racine, certainement due à ce cadre nocif et lourd, rempli d’humidité. L’air était imprégné d’une odeur de terre boueuse, difficilement respirable. La moiteur se ressentait sur leur visage, perlant de fines gouttelettes. La vue qui se dressait devant eux n’était pas mieux pour autant. Un marécage, avec tous les charmes qui le composaient. La lisière continuait sur leur droite et s’enfonçait peu à peu dans une épaisse brume. Elle continua sa course jusqu’aux massifs montagneux, que l’on distinguait à peine. Au milieu de ce mélange de tas de boue, de mousse verte grisante et crasseuse serpentait une rivière, coupant en deux ce décor à la fois lugubre et malsain. Il conduisait à une vieille bicoque, branlante, qui semblait à l’abandon depuis des années. Seuls les croassements des quelques corbeaux qui y logeaient perturbaient un silence de mort. Le ciel filtrant tout rayon de soleil assombrit encore plus cette scène peu rassurante. Des vautours tournoyaient au loin, cherchant certainement de quoi se mettre dans le bec.

Nos rois empruntèrent le seul chemin qui leur fit face. Même si cet endroit n’avait rien d’accueillant, ils avancèrent d’un pas assuré. Les clapotis de l’eau se firent entendre au fur et à mesure qu’ils s’approchèrent. De rares crapauds sautés sur les nénuphars. Une puanteur s’installa, due à une végétation pourrissante sur le bas-côté.

Arrivés enfin à une double porte en bois, cerclée de fer et de hauteur de deux hommes environ, ils poussèrent pour entrer. Les gonds emplis de rouilles firent un bruit crissant et sourd, cassant les tympans.

Ganaë les attendait, derrière une longue table oblongue, tout aussi rustique que le cadre de cette espèce de grange. Une seule pièce la composait. Le toit était fait de poutre et de pailles, troué par l’usure du temps, laissant passer un vent sifflant et glacial, soulevant par moment toutes poussières et brindilles. Les larges et hautes fenêtres de la bâtisse faisaient passer le peu de lumière que son extérieur pouvait donner. Des ombres dansantes étaient animées par la vivacité des flammes des torches murales.

 

 

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Commentaires (8)

En tant que lecteur, je rêve d’une carte qui dessinerait les lignes de l’empire et poserait le nom des communautés et des personnages principaux vivant sur les terres décrites. Poiur mieux s’y plonger. On entre vite dans le récit et on sent l’intrigue.
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Snakecroqueur il y a 4 mois

Elle est prévue ^^. Elle est en cours de réalisation et sera mise avant le préface.
Merci Alexandre pour ton retour. C'est super important pour moi ^^.
Fantastique ! Après, je découvre ce genre de fiction et c’est vrai que de voir la tête des personnages cela aide à entrer dans l’histoire même si je comprends que des lecteurs préfèrent sans tête ! ))) C’est très personnel.
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Morgane Danet il y a 4 mois

Tu plantes bien le décor ☺️. On voit que tu as bien travaillé ton texte. J'avoue que je prends une sacrée claque, je n'arrive pas à ta cheville pour écrire comme toi. De quoi avoir un coup de bambou 😔. La vieille ado que j'étais n'existe plus, elle a disparue... Bon, de façon, mes écrits resteront pour moi, donc, je ne vais pas me faire trop de mouron pour ça.
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Snakecroqueur il y a 4 mois

Merci pour ton retour Morgane.
Chacun écrit à sa façon, son style.

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