Je veux écrire pour les recalés des moules préconçus.

Ceux qui ne rentrent pas dans les cases; les "marginaux", les originaux.

Ceux que les conventions emmerdent. Ceux qui voient plus loin et au travers des choses et des gens. Ceux qui croient en la nouveauté, la créativité. Le potentiel des histoires singulières et de l'esprit humain.

Les sensibles, qui se font secouer, bousculer par une société qui voit d'un fort mauvais oeil leur capacité à ressentir profondément. Ceux qui aimeraient qu'on leur laisse le temps qu'il faut pour examiner les questions et les défis qu'amènent une vie, mais qu'on presse comme de vulgaires citrons standardisés, qualibrés, pour vite entrer dans les rangs, quasi aveuglément.

Ceux qui ont des choses à dire mais qui n'osent pas. Ceux à qui on voudrait apprendre que ce qui est légitime existe déjà.

Ceux qui appréhendent la vie selon leurs ressentis. Ceux qui ne savent pas faire autrement qu'en ressentant. Ceux qui sont persuadés, ceux qui savent au fond d'eux que cette capacité est la matrice de belles choses. Ceux qui se battent pour garder la tête hors de l'eau.

Ceux qu'on pointe du doigt, à qui on jette à la figure qu'ils sont non-conformes, et ne conviennent donc pas.

Ceux qui cherchent leur place et se résignent parfois à se dire qu'elle n'existe pas.

Pour tous ceux là, je veux écrire.

A ceux là je veux dire qu'ils ne sont pas seuls. A ceux là je veux rappeler qu'ils ajoutent des nuances de couleurs à la vie, et que c'est eux qui la rendent splendide dans son tragique.

A ceux là je veux transmettre ma chaleur et partager mon espoir et ma force de les faire exister. Pour qui ils sont, exactement ce qu'ils sont. Sans rognage, sans compromis, sans bricolage, sans découpage.