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Covid-Tinder: 0-1

Covid-Tinder: 0-1

Publié le 14 juil. 2022 Mis à jour le 21 juil. 2022 Curiosités
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Covid-Tinder: 0-1

Je m'étais confinée bien avant 2020. Je m'étais écartée du monde. Pas le choix...

La violence conjugale laisse des traces sur le corps. La violence conjugale améliore néanmoins la lucidité, jusqu'à l'extrême. Jusqu'à cultiver la méfiance et l'intolérance comme seules qualités valables.

Ma fille, ma maison, mon jardin, le sport, l'écriture, la photo. Rien de social, surtout rien de social.

Je m'étais habituée à être coincée dans mon passé. Il cadrait mon présent.

J'acceptais cette vie car c'était la mienne, je l'avais créée, et le monde extérieur s'agitait donc sans moi. Mon confinement loin de la mer, loin des miens, loin de mes amis. Mon confinement à moi.

 

Alors quand le reste du monde a été confiné, la banalité m'a rattrapée. Et ma réalité aussi. La détresse de certains m'a donné la permission de laisser la mienne revenir à la surface.

Et le premier fruit à mûrir après ce printemps émotionnel fut ma libido.

Une envie de sexe m'a submergée. Je la croyais détruite, ensevelie. Mon corps s'est déconfiné pendant le confinement.

 

Tinder, Meetic, faire des photos. J'avais perdu presque 20 kilos. Je me trouvais jolie. Je voulais être désirée et désirable.

 

Déconfinement, masque, vaccin, couvre-feu. Ca déblatérait sur ce qu'il fallait faire, sur ce qu'il aurait fallu faire, sur ce que l'on aurait pas dû faire...

Vaccin, pas vaccin

Pass, pas pass...Mais moi, je m'en foutais. Je voulais du sexe. 6 ans d'abstinence...

Puis Richard est apparu dans ma vie. Tinder nous avait trouvés, chopés, acoquinés.

Se voir masqués. Boire un café entre 13h30 et 14h00 sur une grande place ventée, car Richard travaillait en ville. J'avais trop envie. Et lui aussi.

Je lui tendais un piège, gentil mais un piège quand même...

-Je t'invite à l'apéro chez moi vendredi soir, ma fille est chez son père...

-Je finis à 18h00 et il y a le couvre-feu..hésita-t-il.

-Prend les petites routes. Entre chez toi et chez moi, on risque pas grand chose, on habite en cambrousse. Allez...J'insistai avec un regard plein d'envie.

Faire les courses, ranger la maison, s'épiler, changer les draps, faire de l'houmous et mettre le vin blanc au frais.

 

Un texto :

Tu veux que j'amène quelque chose?  Tu as envie de quelque chose de précis?

Je réfléchis.

Après 6 longues années à ne pas sentir le sexe d'un homme en moi, une seule boisson s'imposait...

Ma réponse :

Champagne!

Lui :champagne? Ok!

 

19h30, sa voiture se gare devant ma terrasse illuminée. Je sais qu'il regarde ma petite maison. Que s'il sonne, c'est déjà gagné... Peut-être.

Il sonne. J'ouvre. Et en le voyant, je sais que je ne le laisserai pas repartir.

Bjork, Radiohead, le film « Western », le champagne.

S'assoir dans le canapé. Discuter, se regarder, rire, être un peu pompette.

Un shot de vodka glacé.

 

« Il est déjà 2h !!! Je vais y aller... » me lança-t-il, pas très convaincu.

Je ne lui plaisais pas à 100%. Il ne me plaisait pas à 100%.

Je le regarde remettre sa doudoune, reprendre son sac.

Dans l'embrasure de la porte, je lui chuchote: «Tu ne veux pas rester?»

 

Sa bouche contre la mienne, sa langue enroulée autour de la mienne.

Je monte. Enlever mes vêtements. Tous mes vêtements. Un foulard rouge posé sur la lampe, pour ne pas forcer la pudeur. Je voulais que ce moment soit intense, rapide pour ne pas hésiter, lent pour s'en souvenir, interdit pour en rire plus tard, unique pour échapper à la banalité de cette pandémie désormais installée.

J'ai eu l'impression d'être la seule femme à faire l'amour ce soir-là.

Nous avons baisé toute la nuit. Il n'y avait pas encore d'amour.

J'aime ce mot, baiser.

Baiser pendant le couvre-feu, baiser le couvre-feu, baiser les masques, baiser le Covid. Ce mot veut dire tant de choses.

Le Covid n'existait plus. Son sexe tendu, le mien ouvert, humide, avide.

C'est ce que je voulais.

J'ai vaincu le Covid ce soir-là.

 

 

 

 

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