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La ville s’étalait à ses pieds. Comme un long ruban, elle emplissait la vallée de ses éclairages. Assis contre le muret de pierres, il essayait de maîtriser l’envie de cigarette qui le rongeait depuis le début de la soirée. Six mois qu’il avait arrêté. Il n’allait pas tout foutre en l’air maintenant. L’envie revenait comme un écho du passé qui refusait de se dissiper. Il faisait jouer le paquet entre ses doigts. Il était plein. Seul le papier argenté manquait à l’intérieur. Soigneusement retiré. Il huma l’odeur du tabac. Le refuge dans la tempête de sa vie d’avant. Les souvenirs de ces bouffées de nicotine étaient vivants. Les yeux fermés il pouvait presque entendre le crépitement du tabac en train de brûler, musique insidieuse et persistante. Il ouvrit les yeux. Une légère brume voilait le scintillement de la cité au bas de la colline. Il se leva, vida son paquet sur l’herbe noire, écrasa le tout du talon et se dirigea vers sa voiture.
Le portail électrique se déclencha pour lui ouvrir le passage. Les murs gris s’éclairèrent sous l’effet du spot automatique et ce qui, pour certains passait pour une villa et pour d’autres un blockhaus, apparut derrière les feuillages.
- Où étais tu passé? J’étais inquiet
- Ça va. Je ne suis pas un gosse. Et tu n’es pas mon père non plus.
- Effectivement, mais sans moi, tu serais où aujourd’hui?
- Écoute Sigfried je n’ai pas envie de discuter de ça maintenant. C’est bon. Je suis là et tout va bien. Sers nous plutôt un verre.
Le docteur Siegfried Klumbb venait de redresser sa longue silhouette. À quarante ans il était devenu un homme accompli. Il avait reçu le prix international de biologie et la médaille Schleiden pour ses travaux sur le vieillissement cellulaire. Il était lauréat du prix Nobel pour l’année à venir. Il devait sa réussite à son protégé, son cobaye. Celui qu’il avait façonné dans son laboratoire, celui qui lui avait donné carte blanche. Échange de bons procédés.
- Je t’ai enregistré le journal du soir. Tu devrais regarder ça va te plaire.
Sur la paroi de béton ciré, l’écran blanc descendit dans un murmure presque imperceptible. Le présentateur du JT fit son apparition en même temps qu’un jingle énervant. Klumbb baissa le son. Ce n’était pas tant le discours du journaliste qui les intéressait mais le portrait d’un homme mûr trônant au centre d’un avis de recherches. Le numéro de la police en caractère énorme défilait au bas de l’écran, promettant une récompense à qui pourrait apporter des renseignements sur l’individu. Un dénommé Alton Bishop, âgé de 57 ans. Un rire animal s’échappa alors du sofa de peau noire qui s’étalait au milieu de la pièce.