01.03 - ÉTAPE 3 : La méthode qui venait du froid
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01.03 - ÉTAPE 3 : La méthode qui venait du froid
L’étape 3 – La 4e de couverture (de conception) (1 h)
(Si Gougoule vous a amené ici directement, sachez que la série commence ici)
Fort de notre simple phrase issue de l’étape 2, on commence à bâtir brique par brique.
En reprenant l’accroche et l’approche de l’étape précédente, il faut maintenant développer un paragraphe complet pour résumer l’histoire. Pour ce faire, il faut intégrer du CONFLIT. C’est très important, le conflit ; c’est ce qui fait vivre un récit. Il devrait toujours y en avoir dans une scène ou un chapitre, que ce soit un problème à résoudre, une tuile pour le héros, un désaccord entre personnages, ou autre : bâtissez sur le conflit, c’est le ciment des histoires.
Idéalement, vous étofferez la phrase de l’accroche en un paragraphe qui sera lui-même composé de cinq phrases. Pourquoi cinq, me demanderez-vous ? Eh bien, parce qu’il est temps de rencontrer les méandres du storytelling et la raison pour laquelle cette méthode est ciblée pour les romans de fiction.
Storytelling 101
Késako ? En bon français, j’imagine que cela donnerait : « Les bases de l’art pour raconter une histoire ». Le « 101 » est dû à la codification des cours en Amérique du Nord, le premier chiffre représente le niveau du cours et les deux autres la leçon. Donc, Niveau 1 Leçon 01 (101) représente toujours le B-A-BA d’une discipline.
Alors, Storytelling 101, ça sonne américain comme ça, mais – comme souvent – ils n’ont rien inventé. J’aurais aussi bien pu titrer « La poétique » (Aristote, 335 av. J.-C.), mais avouez que c’est moins sexy ;-). Il s’agit donc des bases de la dramaturgie et de la structure des récits que nous devons aux Grecs et pas à Hollywood. Loin de moi l’idée de vous faire un cours magistral sur la chose, ce sera le sujet de la prochaine série d’articles. Dans le cadre qui nous intéresse, nous allons simplement exploiter la structure du récit pour nous aider à bâtir notre 4e de couv’.
Deux structures de base
ATTENTION ! J’entretiens moi-même une relation haine/amour très étroite avec ce qui suit. Je ne suis pas un fervent défenseur de l’idée de suivre ces structures aveuglément (écrire de la fiction, pour moi, reste un acte créatif et l’histoire est une entité à part entière qui peut et doit imposer ses besoins à son auteur). N’empêche qu’il faut bien commencer quelque part : on ne bâtit pas une cathédrale sur un champ, on érige d’abord des fondations.
La structure en 3 actes (du pur Aristote)
L’archétype de la structure de récit, ne la rejetez pas avant de l’avoir testée ! Apprenez à la connaître avant de la décrier, des best-sellers sortent toutes les semaines en suivant cette structure.
Bref, la structure en 3 actes c’est Début → Milieu → Fin avec un tournant décisif entre chaque. Pour un roman, on préfère parler en « écueils » plutôt que « tournants » car nous n’avons aucun
artifice visuel ou acoustique pour dynamiser le Milieu qui est plus long et on ajoute donc en général un écueil dans le second acte. N’oubliez pas, écueil, blocage, obstacle, appelez cela comme vous voulez, mais il faut bâtir sur du CONFLIT.
Le développement est assez linéaire. Votre personnage principal fait face à une situation (écueil 1) qui le propulse dans une tourmente (au sens large) dont il va devoir se sortir en faisant face à l’écueil 2 (éventuellement) et l’écueil 3, avant de retourner à sa vie normale (ou pas).
La structure « 3 écueils et une fin »
Les transitions sont moins marquées dans cette structure, il n’y a pas « d’actes » à proprement parler, mais toujours du CONFLIT marqué par une série d’écueils entravant la progression du personnage principal !
L’idée est ici d’être progressif (donc environ 25 % entre chaque écueil) et de développer à chaque fois la venue du prochain problème (ou écueil) et ce jusqu’à la résolution finale. On voit donc bien que le conflit fait avancer l’histoire. D’ailleurs, si le premier écueil peut être fortuit, les suivants devraient découler des actions des personnages eux-mêmes qui, en essayant de progresser, enveniment la situation. Évitez les interventions divines après le premier écueil, le restant du conflit devrait se construire par la trame et les actions de vos personnages.
- Dans le modèle « étape par étape », le développement se fait par à-coups. Notre personnage rencontre un problème, le règle, en trouve un second sur sa route, le règle à son tour, et ainsi de suite jusqu’à la conclusion.
- Dans le modèle « mise en place + du conflit jusqu’à la fin », le développement s’amorce par un écueil particulier qui change la condition du personnage principal. À partir de ce point, il essaie de s’en sortir, mais retombe toujours dans la condition précaire qui est la sienne, et ce, jusqu’à ce qu’il trouve la bonne voie. La difficulté dans ce modèle est de ne pas stagner. Malgré le schéma de « retour en arrière », il faut pouvoir construire un sens de progression.
- Dans le modèle « du début à la fin », on retrouve le même schéma répétitif, mais sans mise en place initiale particulière (elle est occultée et/ou suggérée).
Le paragraphe
Il se constitue comme suit :
- 1 phrase de présentation et mise en place du récit
- 1 phrase pour l’écueil 1
- 1 phrase pour l’écueil 2
- 1 phrase pour l’écueil 3
- 1 phrase pour conter la fin
Soit le fameux total de 5 phrases.
Avec ce paragraphe, vous avez maintenant une idée générale du roman. Rappelez-vous, 1 paragraphe de 5 phrases. Normalement, cela ne devrait pas vous donner des masses de détails, ce n’est pas le but, donc essayez de ne pas y passer beaucoup plus d’une heure.
Encore une fois : inutile d’analyser à outrance, laissez-vous guider, cela devrait être plaisant comme exercice, vous mettez juste vos idées sur papier pour le moment. Pas besoin pour ce paragraphe d’être parfait dans sa construction syntaxique, vous aurez l’occasion d’y retourner et de le peaufiner au fur et à mesure que l’histoire prendra forme dans les étapes suivantes. TOUJOURS revenir en arrière et modifier les étapes précédentes quand une idée change ou s’affine. Par exemple, écrire ce paragraphe peut avoir quelque peu ébranlé votre certitude sur l’accroche de l’étape 2. Pas d’hésitation, modifiez-la pour refléter votre nouvelle approche.
Exemple
Pour notre projet fictif Et si je te sauvais ?, la 4e de couverture conceptuelle ressemblerait à ceci :
- [mise en place] Un physicien et mathématicien de génie travaille avec sa femme et assistante sur un système révolutionnaire de projection probabiliste par modélisation du réel pour l’ONU afin de pouvoir prédire efficacement les catastrophes naturelles, humaines et sanitaires.
- [Écueil 1] Absorbé par son travail, il arrive en retard à un gala organisé pour lever des fonds et assiste impuissant à l’agression et au meurtre de sa femme.
- [Écueil 2] Rongé par le remord, il se plonge dans ses travaux afin de modéliser les événements qui ont conduit au meurtre de son épouse et trouver un moyen de les enrayer, mais pour cela, il fait fi de tous les protocoles et est renvoyé du projet, perdant ainsi toute chance d’aboutir.
- [Écueil 3] Il propose alors ses services à un consortium financier intéressé par les capacités de prédiction des marchés de son système, mais ces derniers découvrent ses intentions de retourner dans le temps et décident de l’éliminer pour s’emparer de son invention et dominer le monde.
- [Dénouement] Le scientifique déjoue son assassinat et se projette dans le passé pour sauver son épouse, mais les sbires du consortium l’ont suivi et l’en empêchent, car si sa femme ne meurt pas, la machine à voyager dans le temps ne sera jamais inventée et le consortium ne peut passer à côté d’une telle invention dans son arsenal.
Avertissements
Du conflit, du conflit et encore du conflit. Les écueils dont nous parlons ne sont bien entendu que vos PRINCIPAUX obstacles. Entre chacun, le développement de votre trame doit être cousu de conflits également.
J’insiste bien sur le fait qu’il s’agit ici d’une 4e de couverture de conception (c’est-à-dire d’un outil pour VOUS, l’auteur) et non pas de la 4e de couverture commerciale (le petit résumé à frissons au dos du livre et en général écrit par l’éditeur).
Elles sont très rarement les mêmes, et leur différence peut même être très importante… illustration avec Forfait illimité* :