Chapitre 13
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Chapitre 13
Les discussions vont bon train autour de la table. La plupart des participantes semblent déjà se connaître, échangeant des anecdotes et des sourires complices. Une dynamique bien établie s’en dégage, comme si elles étaient des habituées d’un rituel secret qui m’est encore étranger. Je me sens à part, spectatrice d’un espace où chacune semble avoir sa place.
Lana, toujours douce et attentive, attire mon regard lorsque les rires s’apaisent. Elle prend la parole pour me donner un peu de contexte :
— J’ai lancé ce groupe il y a quelques années, après… après le décès de mon conjoint. À l’époque, j’étais perdue, et je n’arrivais pas à parler dans le cadre rigide d’un cabinet médical. Alors, je me suis dit : pourquoi ne pas se retrouver ailleurs, dans un endroit vivant, moins intimidant ? Ici, autour d’un verre, on parle quand on se sent prêtes, et sans pression.
Les autres acquiescent d’un signe de tête, des murmures d’approbation traversent la table.
— J’espère que tu trouveras aussi un peu de réconfort ici, ajoute-t-elle en me lançant un sourire rassurant.
Une à une, elles se présentent. Chacune partage quelques mots sur ce qui l’a amenée ici. Des histoires de ruptures, de perte, de solitude, parfois de traumatismes enfouis depuis des années. Les voix vacillent par moments, mais jamais je ne ressens de gêne ou de jugement. Il y a une honnêteté crue, presque belle, dans leurs mots.
Puis vient mon tour. Le silence se fait, et je sens soudain tous les regards se poser sur moi. Je fixe mon verre d’eau, cherchant quoi dire. Ma gorge se serre, comme si les mots refusaient de franchir le seuil de mes lèvres. Je respire profondément.
— Je… je m’appelle Avery. J’ai 24 ans et…
Les mots restent bloqués, pris dans une tempête que je n’arrive pas à calmer. Je bredouille quelques syllabes inaudibles, et mes yeux commencent à brûler. Une larme s’échappe malgré moi, trahissant tout ce que je tente de dissimuler.
Lana, attentive comme toujours, pose doucement sa main sur mon bras. Son geste est léger mais réconfortant. Elle ne me brusque pas, elle me donne juste l’impression que je ne suis pas seule.
— Prends ton temps, Avery. Ça va aller. Ici, personne ne te jugera, souffle-t-elle d’une voix calme et posée.
Je hoche la tête, reprends une inspiration, et me lance, la voix tremblante :
— J’ai eu un accident… Il m’a laissée handicapée. Physiquement d’abord, mais… aussi émotionnellement.
Un silence doux tombe sur la table. Je m’attends à lire de la pitié sur leurs visages, mais il n’y a que de l’empathie. Comme si chacune, à sa manière, comprenait le poids de mes mots. Je sens les larmes menacer à nouveau, mais cette fois, ce n’est pas à cause de la honte. C’est un début. Une minuscule fissure dans cette armure que je traîne depuis des années.
Lana me sourit doucement.
— Merci d’avoir partagé ça avec nous, Avery. C’est un premier pas, et il compte énormément.
Les autres femmes hochent la tête, certaines m’offrant des encouragements d’un simple regard. Une chaleur presque étrange m’envahit, comme si je venais de déposer un fardeau invisible que je portais seule depuis trop longtemps.
Je ne suis pas encore prête à tout dire. Pas prête à parler de la foule, de la peur viscérale qui m’habite depuis cette nuit-là, ni même de la douleur qui me tord la hanche à chaque pas. Mais pour la première fois, j’ai dit quelque chose. Et ce petit quelque chose me paraît énorme.
Je reprends mon verre d’eau, les mains légèrement tremblantes, et je reste silencieuse pour la suite. Mais pour une fois, ce silence ne me semble pas pesant.
Après deux heures de discussion, Lana annonce que la réunion touche à sa fin.
- Mais c’est l’heure de l’happy hour, et pour les habituées vous savez ce que ça signifie ! Celle qui souhaite se joindre à nous, nous allons profiter pour boire des shots de tequila et profiter de l’ambiance pour parler d’autre chose que nos soucis ! Tu te joins à nous Avery ?
J’hésite un instant. Les femmes autour de moi continuent de discuter, leurs voix douces et animées s’entremêlent dans un murmure rassurant. Elles m’ont l’air sincèrement agréables, et l’idée de rester un peu plus longtemps à l’extérieur, de ne pas m’enfermer dans mon loft dès maintenant, commence à me séduire. Ce serait bien, pour une fois, de me permettre ce moment.
Je sors mon téléphone de ma poche, prétexte pour vérifier l’heure, mais surtout pour m’occuper les mains et calmer le léger vertige qui me traverse. L’écran s’allume, et une notification capte immédiatement mon attention.
Jaxon Ryder — il y a une heure :
On se voit avant le concert alors ? Si tu veux bien sûr. J’ai vraiment envie de te rencontrer.
Mon cœur rate un battement. Les mots s’affichent, clairs et nets, sur l’écran, mais il me faut un instant pour les assimiler pleinement. Jaxon veut me rencontrer. Pas seulement au concert, mais avant. Une véritable rencontre, loin des messages distillés à travers nos écrans.
Je reste figée un instant, fixant ces quelques lignes qui déclenchent un torrent d’émotions contradictoires en moi. De l’excitation, bien sûr. L’idée qu’il ait envie de me rencontrer fait naître une chaleur douce dans ma poitrine, un sentiment presque oublié depuis longtemps. Mais, inévitablement, l’anxiété suit de près, menaçante comme une ombre qui refuse de me quitter.
Si j’ai réussi à venir ici aujourd’hui, je devrais réussir à rencontrer Jaxon. Cette pensée s’installe en moi, fragile mais persistante. Après tout, être ici, assise à cette table, entourée d’inconnues qui partagent leurs histoires, c’était déjà un défi immense. Et pourtant, je l’ai fait. Je suis sortie, je me suis confrontée au monde, même si ce n’est qu’un petit pas. J’ai réussi.
Je glisse discrètement mon téléphone dans ma poche, le pouce effleurant le message comme s’il portait déjà une promesse. Un mois. J’ai un mois pour m’y préparer. Un mois pour trouver le courage de dépasser cette peur qui me ronge. Car rencontrer Jaxon, c’est accepter de montrer cette partie de moi que je cache à tous. C’est le laisser voir ma réalité : mes déplacements lents, ma démarche incertaine, parfois mon fauteuil quand la douleur devient trop forte. Et si cela changeait son regard sur moi ?
Je repousse cette pensée d’un léger mouvement de la tête. Pas maintenant. Je dois me concentrer sur ce que j’ai réussi à accomplir aujourd’hui.
— Tout va bien, Avery ? me demande Lana d’une voix douce, m’arrachant à mes réflexions.
Je sursaute légèrement et esquisse un sourire maladroit.
— Oui, oui. Désolée, je me suis juste perdue dans mes pensées, dis-je en jouant nerveusement avec mon verre d’eau.
Lana me dévisage un instant, comme si elle devinait ce qu’il se passait dans ma tête, mais elle n’insiste pas. Les conversations reprennent autour de moi, et je me laisse porter par ce murmure réconfortant.
Pour la première fois depuis longtemps, je me sens presque normale. Peut-être que je peux y arriver. Peut-être que Jaxon ne me verra pas différemment. Peut-être que cette rencontre sera le début de quelque chose de bien.
Un mois. Je me le répète mentalement, comme un mantra. Ça me laisse assez de temps pour essayer d’être prête. Je peux le faire. Je dois le faire.