Ed Wood (Tim Burton, 1994)
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Ed Wood (Tim Burton, 1994)
"Ed Wood" est un double biopic: officiellement il raconte l'histoire "du plus mauvais réalisateur de tous les temps" et de son émouvante amitié dans les années cinquante pour une ancienne gloire hollywoodienne du cinéma d'épouvante des années 30 ayant sombré dans l'oubli et la toxicomanie, Bela LUGOSI, le "Dracula" (1931) de Tod BROWNING. Officieusement, il s'agit d'un autoportrait dans lequel Tim BURTON évoque à travers Bela LUGOSI sa propre étrangeté et sa relation à son mentor, Vincent PRICE, autre star du genre tombée dans disgrâce (hormis sa voix, très utilisée dans les années 80 pour des bandes annonces ou des clips comme "Thriller" de Michael JACKSON). Si contrairement à Ed Wood, Tim BURTON est un réalisateur doué et reconnu en dépit d'une filmographie inégale, il n'en partage pas moins avec son homologue des fifties un goût prononcé pour la marge et les freaks en tous genres (savoureuse galerie de gueules et de physiques hors-normes, de l'ex-catcheur Tor à l'efféminé Bunny interprété par Bill MURRAY). Wood lui-même avait des penchants considérés comme déviants dans les années cinquante puisqu'il aimait se travestir. "Ed Wood" qui appartient au genre des méta-films reconstituant une période révolue de l'histoire des studios comme par exemple "Boulevard du crépuscule" (1950) ou "The Artist" (2011) partage avec eux le même noir et blanc rétro et classieux. Et s'il délaisse les classiques pour les séries Z, il montre que les créateurs qu'ils soient géniaux ou tâcherons méritent un égal respect dès lors que leur travail estl'expression de leur intégrité. C'est le sens de la rencontre entre Ed Wood et Orson WELLES qui sont confrontés aux mêmes problèmes de financement et d'ingérence des producteurs dans leur travail. Ajoutons que si Johnny DEPP offre une prestation qui a le mérite de la sobriété (par rapport à d'autres Burton) en indécrottable rêveur, c'est Martin LANDAU qui crève l'écran en offrant une composition extraordinaire de véracité justement récompensée. La relation filiale qui se noue entre lui et Wood est la colonne vertébrale du film, permettant au premier d'effectuer une sortie digne et nourrissant les réalisations du second d'une sincérité qui compense leur aspect cheap.