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Colonisation, Françafrique : Petite mise au point

Colonisation, Françafrique : Petite mise au point

Published Jul 9, 2020 Updated Jul 9, 2020 Politics
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Colonisation, Françafrique : Petite mise au point

Il est très difficile de traiter en quelques mots de problèmes aussi complexes que ceux de la colonisation et de la Françafrique. Cependant, il est nécessaire de remettre quelques pendules à l’heure en ces temps de repentance et de sanglots politiquement corrects.

La grande mode actuelle, en France, chez une certaine intelligentsia de la pensée unique, est de refaire l’histoire d’une façon manichéenne comme on souhaiterait qu’elle fut et non comme elle est réellement et ceci en plaçant les bons d’un côté et les mauvais de l’autre. Je pense en particuliers à la colonisation et à la période Françafrique qui ont effectivement existé mais pour lesquelles quelques mises au point sont nécessaires.

Lorsque De Gaulle décida de décoloniser l’Afrique, certains leaders politiques comme Léon M’ba au Gabon n’était pas d’accord. Il souhaitait que son pays devienne un département Français d’outre-mer. D’autres comme ceux de la Côte d’Ivoire ou du Sénégal n’ont ni chassé les anciens colons, ni confisqué leurs terres. Dans les années 70 - 80, la Côte d’Ivoire s’en sortait bien économiquement et socialement. Malheureusement avec la disparition d’Houphouet Boigny, l’incompétence et la corruption des élites locales ont mis à mal ce pays. Pour être honnête, l’action de la France n’y est pas étrangère, surtout en ce qui concerne l’affaire Gbagbo et l’attaque de Bouaké le 6 novembre 2004...une honte Françafricaine!

J’ai connu des Français nés en Côte d’Ivoire durant la colonisation et possédant la nationalité Ivoirienne qui n’étaient pas des brutes sanguinaires et étaient appréciés par leurs employés ou amis Ivoiriens. Durant cette période, de nombreuses infrastructures furent créées (Ponts, chemins de fer, routes, dispensaires, canaux d’irrigation...). Au moment des indépendances, les pays étaient pacifiés il y avait un système administratif, scolaire, sanitaire,... qui fonctionnait. Il ne faut pas se leurrer, la France et les autres pays qui possédaient des colonies ne le faisaient pas dans un but humanitaire mais plutôt dans celui de s’approprier les richesses. Malgré cela, les réalisations étaient bel et bien là et fonctionnelles.

Au moment des indépendances, toutes ces structures furent laissées en place puis par un système de coopération, elles furent remises progressivement aux nouveaux états, sauf en Guinée où Sékou Touré avait préféré le camps des Russes. De toute façon, à l’époque de la guerre froide, il n’y avait pas beaucoup de solution pour les anciennes colonies : Soit le monde libre, soit le bloc communiste. Mais les pays qui étaient du côté du monde libre étaient mieux lotis que les autres.

La coopération Française coûtait cher à la France. Au niveau enseignement, les lycées techniques ou les écoles d’ingénieurs possédaient des équipements aussi modernes si ce n’est plus que les établissements équivalents en France. Des sommes importantes étaient déversées sur l’Afrique pour de multiples projets, il y avait aussi de nombreuses sociétés françaises dans ces pays. C’était la Françafrique, oui, mais tout le monde en profitait et pas seulement la France comme le font croire certains. Et ce n’est pas les ONG (organisations non gouvernementales) qui démentiront mes propos avec 70% de frais de fonctionnement et 30% des montants qui vont plus ou moins où ils doivent aller (dans le meilleur des cas) ...et le pire, c’est qu’elles continuent ce type de fonctionnement sans aucun remord.

Fin 2012, lorsque les terroristes ont attaqué le Mali, l’armée Malienne débandait totalement, elle prenait raclées sur raclées. Les djihadistes étaient à Mopti, à 600 km de Bamako, plus rien ne les retenait. J’étais à Bamako à l’époque et le 11 janvier 2013 au matin, lorsque j’ai entendu que l’opération Serval avait commencé, j’ai su qu’on avait évité le pire. Car contrairement à ce que peut penser une certaine élite intellectuelle française, les terroristes sont des tueurs sanguinaires sans aucune pitié, capables de massacrer hommes, femmes et enfants. 
Pendant plusieurs mois, ça a été l’euphorie, on vendait des petits drapeaux français dans les rues, la France était acclamée...puis vient l’opération Barkhane. A partir de là, le gouvernement Français a commis erreurs sur erreurs et la plus grosse fut d’empêcher les troupes Maliennes de remonter au dessus de Kidal pour soit disant protéger les Touaregs indépendantistes (MNLA)...On s’opposait directement à la souveraineté d’un pays. L’ambiance a alors totalement changé et nous avons eu droit à un French Bashing, favorisé en sous main par les Chinois et les Russes. 

N’oublions pas l’intervention Sarkozy, Blair, Bush en Libye qui fut la cause principales des problèmes terroristes du Sahel, mais pas la seule.

Quant au Burkina, parlons en. Ce sont les réseaux sociaux qui ont fait partir le président Blaise Compaoré avec l’aide de rappeurs comme Smockey, qui après avoir installé le bazar dans le pays coule des jours heureux en France alors que la population souffre au quotidien.
Là aussi, j’étais dans le coin, aussi bien quand le peuple est descendu dans la rue pour faire partir Blaise qu’au moment du coup d’état de Diendéré. A ce propos, c’est pour éviter un bain de sang et après discutions avec le Mogho Naba (Le Roi traditionnel des Mossis) que le patriote Diendéré s’est rendu. Il ne faut pas oublier qu’il dirigeait le RSP (Régiment spécial présidentiel) sur-entraîné et sur-armé et une bagarre avec l’armée aurait été dévastateur.  Ces jours là, nous avons aussi vécu des moments de grande solitude. De plus, Diendéré s’est fait ‘avoir’ par des politiciens pourris. Excusez l’euphémisme.
Ensuite, plus rien n’a été dans le pays devenu une ‘grande démocratie’ et cité en exemple : L’économie est tombé, 1/3 du pays est sous contrôle des terroristes, la misère est partout, les sociétés étrangères pillent le pays, la corruption a pris des proportions jamais égalées, les exécutions extra judiciaires sont courantes (de toutes façons la justice est corrompue), ...Et ceci contrairement à ce que disent nos amis de RFI et de FR24 qui sont les chantres de la bien pensance française en Afrique. D’ailleurs nombres d’Africains ne s’y trompent pas quand pour eux RFI signifie Radio Fausse Information. Le magazine Jeune Afrique ne vaut guère mieux.

Et ceci nous amène naturellement aux méchants Français qui pillent l’Afrique. Sauf que là encore on se trompe gravement de cible. Ce fut assez vrai un temps mais la France a de moins en moins d’ intérêts économiques en Afrique. Au Burkina et au Mali, aucune mine d’or n’appartient à une société Française, elles sont détenues par des sociétés Australiennes, Sud Africaines, Canadiennes, Turques, Chinoises, Russes,... En Guinée, les mines de bauxites sont majoritairement Russes, Chinoises,... De même que le pétrole en phase d’exploitation au Sénégal l’est par une majorité de sociétés non Françaises. Au Congo Brazza, si Total y est encore bien présent, la manne pétrolière est partagée entre une multitude de compagnies de toutes nationalités. Ce qui ne fut pas toujours le cas.

Et finalement pour résumer :
- La colonisation : Totalement anormale mais il y eu des aspects positifs.
- La Françafrique : Il est évident que ce systèmes s’il a pu avoir des effets positifs au départ ne peut plus perdurer et aurait dû s’arrêter au début des années 2000.
D’ailleurs, la colonisation, comme la Françafrique, n’ont pu prospérer en Afrique que grâce à une élite locale qui créait un terreau favorable. Encore une fois et pour être objectif, les héros comme Sankara au Burkina Faso et qui avaient une vision positive pour l’Afrique furent victime de la Françafrique aidée par les gouvernants des pays voisins. A elle seule la Françafrique n’aurait pu éliminer ’proprement’ Sankara. Jerry Rawlings au Ghana fut beaucoup plus pragmatique.
- La France pille les richesses de l’Afrique : Faux. L’ Afrique est devenu l’open bar de tous les prédateurs économiques internationaux et la France est loin d’être le premier. Alors tirer à boulet rouges sur ce bouc émissaire ne pourra avoir que des effets négatifs en faisant l’impasse sur les autres problèmes.

L’ Afrique doit se développer seule et non plus être ‘coacher’ par une Françafrique traditionnelle ou par une Françafrique ‘Bien pensante’. Seuls les Africains, noirs comme blancs seront capables de mener à bien cette œuvre colossale. Elle doit aussi tenir compte des erreurs passées et arrêter son misérabilisme favorisé par la pensée unique.
Les sociétés Africaine sont le fruit de centaines d’années de cultures, de religions, de civilisations totalement différentes des sociétés occidentales. Il est impossible de calquer quelque modèle qu’il soit, et surtout pas nos modèles occidentaux!
Les tripatouillages des constitutions opérés par de nombreux chefs d’état Africain n’est que la conséquence de l’imposition d’une démocratie de façade à des peuples à qui elle ne convient pas. Si on regarde l’histoire de l’Afrique, on y trouve des Royaumes (Royaume du Kongo,...) des Empires (Empire Mandingue,...) mais pas de démocratie à grande échelle. Un mode de gouvernance démocratique a pu exister mais sur des bases ethniques et avec des populations composées par un nombre restreint d’individus. 
Que ce soit les religions (Islam, Chrétienté,...) ou mode de gouvernance, les Africains ont toujours essayés d’africaniser ce que l’on leur imposait de force et ceci à juste raison.

Suite aux nombreux problèmes politiques et à l’instrumentalisation honteuse du Covid 19 au Mali, la situation sociale y est très tendue. J’invite donc les journalistes et autres futurs historiens à venir y faire un tour et pas seulement dans les hôtels à 150$ la nuit et dans les bars à putes mais sur le terrain car je pense qu’une page de l’histoire de l’Afrique de l’Ouest risque de s’écrire avant la fin de l’année. Hélas, la race des Michel Honorin, grand reporter qui allait à la bagarre, n'existe plus et les marioles que l'on voit parfois descendre de l'avion d'Air France préfèrent rester bien à l'abri dans leur chambre d'hôtel et lire les journaux locaux que d'aller au 'contact'.

Bamako le 9 Juillet 2020.

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