Faire le vide CHAPITRE III
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Faire le vide CHAPITRE III
CHAPITRE III : LE CADEAU
- Monsieur Mähler ?
Cela faisait maintenant huit ans qu’il était son coach sportif, mais Nastia ne s’était jamais résolue à le tutoyer ou à l’appeler par son prénom. Une distance qui était une marque de respect et qu’elle n’avait pas cherché à imposer, ça s’était fait comme ça, c’est tout.
- Bon, Nastia, la position est correcte, tu as retravaillé ta séquence mentale, c’est bien. Montre tes cartons maintenant.
Nastia lui tendit les cibles sur lesquelles elle s’était entraînée tout l’après-midi. Le président les regarda attentivement, revenait sur certaines pour peaufiner son analyse, puis il dit :
- Il y a trop de coups de doigt ma fille ! Avant de quitter le pas de tir, tu t’entraînes à sec : tu prends bien la bossette, et tu accompagnes doucement le mouvement en gardant ta position une ou deux secondes, avant de poser ta carabine. Pour terminer l’entraînement, tu tires 5 balles sur un carton neuf, ça doit être cinq mouches. Allez, au boulot ma belle !
Nastia s’exécuta. Elle fit le vide autour d’elle, puis posa la plaque de couche sur son épaule, et souleva son arme. Elle calma sa respiration puis, lentement, vint poser délicatement sa joue sur le busc et son œil se plaça juste devant le dioptre. Son doigt agrippa la bossette, puis elle visa en alignant guidon – canon - cible, tira à sec en respectant les consignes du coach. Elle se sentait bien, elle allait le remporter ce titre régional. Pas de suspens !
Elle tira cinq cartouches dans la nouvelle cible. Quand le carton arriva à quelques mètres de son poste de tir, elle vit que le défi du coach était presque atteint. Alors elle mit sa 22 long rifle en sécurité, nettoya le pas de tir en ramassant les douilles qui avaient giclé jusque sur le poste voisin, reboucha la fosse, se dirigea vers l’armurerie pour ranger la carabine du club, et enfin se changea aux vestiaires. Elle n’était pas mécontente de sa séance d’entraînement, et le dernier carton lui donnait raison : 3 mouches et 2 dix, presque parfait. Une fois rhabillée, elle sortit son cahier de tir et décrivit sa séance en détail, afin de reproduire les bons gestes pour les prochaines compétitions.
« Championnat régional de tir : Anastasia Bajenov indétrônable au tir trois positions à 50 mètres »
Sa mère était tellement fière : sa fille, une fois de plus dans le journal, page des sports ! Elle avait un peu honte aussi : elle aurait aimé que Nastia possède sa propre carabine, mais ce n’était pas raisonnable au vu de son petit salaire de couturière. Sa grande fille était un vrai cadeau du ciel : toujours souriante et pleine de vie, les félicitations à chaque bulletin, sûrement le bac avec mention en juillet, et une tireuse aguerrie ! La sonnette retentit dans la petite maison en briques, venant perturber les pensées de Madame Bajenov.
« Monsieur Mähler ? »
Nastia et sa mère furent très surprises en ouvrant la porte : le président ne s’était jamais rendu à leur domicile. Son corps, pourtant imposant, cachait mal la housse de carabine qui tanguait derrière lui.
« Bonjour à toutes les deux ! Je m’excuse pour cette visite à l’improviste mais je tenais à féliciter la championne ! s’exclama le président. Et voici un cadeau, dit-il en tendant la housse de carabine à Nastia. »
La housse n’était pas vide, elle contenait le dernier modèle de carabine 50 mètres de chez Fein.
« Monsieur Mähler, je ne peux pas accepter ce cadeau, c’est beaucoup trop !
- Tu le mérites, crois-moi ! Tous les papiers ont été faits à ton nom, tu ne peux plus refuser ! Cette carabine t’appartient.
-Balchoï spaciba ser ! Merci beaucoup Monsieur ! »
Et Nastia lui sauta au cou.