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Elucubrations spécialement hédonistes

Elucubrations spécialement hédonistes

Published Apr 19, 2020 Updated Sep 28, 2020 Offbeat
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Elucubrations spécialement hédonistes

De petits chemins de traverse le long de la Seine, constituent sous les ponts de Paris, des escapades idéales pour les amoureux en quête de nature insolite. Des petites fleurs dans l'esprit des pissenlits y poussent par myriade ça et là, et à travers les pavés gris, dans un joyeux fouillis négligé. Par endroits, les quais sont si spatieux que des noctambules un peu bohèmes, vagabonds et perdus y ont installé de façon provisoire d'éphémères matelas pour y passer des nuits de tintamarre et des jours tranquilles" comme à la maison ".

Ce sont en réalité, des refuges de fortune sombre pour ces drilles de sans-abris avisés et confinés en plein-air. L'atmosphère y est bon enfant ou débridée, c'est au choix de la déambulation. Par moment, on y trouve des couples étrangement assortis et d'un âge incertain, les traits déformés comme une vieille pomme de terre par les rictus de la vie. Des sans-papiers, des gueux, des va nu-pieds, des sans-dents ou des sans-familles avec souvent une foultitude de sacs en plastique pour contenir quelques rares effets personnels. Rester dans ces petits coins secrets de la capitale conçus avec des objets du hasard constitue une prouesse à ciel ouvert et nécessite pour survivre un certain détachement quasi nécessaire vis à vis de la vie matérielle et sociale et surtout de rester en bonne santé pendant des années.

Aujourd'hui, ces lieux de véritable misère sont désormais cachés et à l'abri des regards méprisants ou indiscrets du badaud de passage qui n'est d'ailleurs plus autorisé à s'y promener, à moins qu'il n' habite à justement quelques mètres au-dessus, sur les quais bordés de somptueux hôtels particuliers, bâtis pour la plupart dans le siècle du grand raffinement à la française à savoir le XVIII°siècle. Moulures, parquets au point de Versailles, cheminées, suite parentale, piscine privée, marjordomes, belle vue sans gêne aucune et tutti quanti.

Certaine famille princière de l'étranger y demeure aussi, mais ferme dans un beau geste philanthrope, leurs lourds volets, tout au long de l'année. A cet égard, on peut se demander pourquoi ces logements restent vides et si ce n'est pas le personnel qui y loge confiné de toute les façons depuis si longtemps? Quand les chats ne sont pas là, les souris dansent et les rats sortent la nuit, le long des berges endormies en faisant des courses pour savoir qui gagnera le plus vite les quais du miracle romantique à la lune étoilée.

Je suppose que les grands de ce monde sont partis depuis longtemps, bien avant le confinement, dans leurs résidences secondaires ou propriétés de bords de mer, dans leurs nombreuses maisons en lisière de montagnes suisses ou de parcs aux nombreux pins californiens ou plus simplement se sont réfugiés dans leurs châteaux qui menacent cependant ruine. Peut être aussi que les coups de projecteurs des bateaux de croisières, d'une densité inouie en été, les éblouissent tant qu'ils ne peuvent plonger dans des beaux draps en satin et dans leur rêve au lustre sophistiqué. Le port du masque sur les yeux n'étant pas obligatoire et ne servant aussi strictement à rien, à moins que ce ne fusse ceux de compagnie aérienne de prestige.

Remonter la couette, baisser les rideaux et voyager aux pays des songes ouatés...

En mai, quelques jours après avoir fêter comme il se doit le déconfinement, c'est à dire sur les berges, avec nos vélos dans une main et dans l'autre, nos paniers à casse-croûte et au grand air redevenu pollué et alors que jusqu'à cet instant, nos pauvres gens avaient réussi à toujours dormir avec un certain panache dehors sous les soupirs, gargouilles, et autres zouaves avec une bouteille de rouge coincée au creux de leurs reins, ils mourront dans leur sommeil, sans faire de bruits, c'est triste à dire mais sans gêner personne! Oubliés par tous mais sans avoir coupé les liens avec la nature, ils seront emportés au vert paradis. Ils n'ont rien à perdre les malheureux puisque de toute façon ils n'avaient rien, qu'ils étaient déjà fort vieux, et contaminés.

Certains évoqueront alors et pour ne pas pleurer de chagrin et surtout par comparaison car la nature humaine est ainsi faite, les brillants capitaines d'industries qui seront en train de couler à pic et qui jusqu'à présent avaient réussi à garder la tête hors de l'eau. Couler à plus de 65 ans passés, une main posée sur le ventre bedonnant et l'autre tenant une coupe de champagne, n'a vraiment rien de risible. Comment ne pas être secoué de rire jaune par ces empires de la finance qui sombreront et sombrent déjà tel des titanics géants rencontrant des pointes d'iceberg à la dérive? Qu'importe l'avenir et la fin d'une vie de l'homme des ponts aux pieds nus, sa cause nous l'avons souligné, était déjà perdue d'avance. Mais l'autre homme, celui qui magnifique figure légendaire, avait réussi bon an mal an, à accompagner son épouse tant de fois à l'Opera en lui tendant le bras vers le bar, comme il se doit, à susciter les vocations de ses enfants chéris bien trop grands, c'est à dire à suivre le style flamboyant du Daddy en reprenant les amarres, et barres du navire tout en sortant de l'ENA. Cet homme qui avait construit sa fortune écu après écu à coups de réunions, de gloire successive acquise pendant de longs séminaires pour le ressourcer, cet homme qui passait ses nuits en déplacement dans des avions remplis de cadeaux, dans des hôtels solitaires loin du cocon familial mais dans les bras de gentilles dames consolatrices de tant d'infamies, oui pour cet homme est ce normal de subir ainsi si atrocement les revers de cette pandémie? Ce n'est pas juste répliquera Calimero avec sa coquille d'oeuf plantée sur le crâne. Il a travaillé toute sa vie pendant que Monsieur Clochard contait fleurettes aux promeneurs du dimanche!

Monsieur Charles-Henry des Hauts de la Chalarde ne pourra plus apporter son soutien financier aux associations caritatives,ni à la recherche pour le vaccin du covid-19, ne pourra plus marier ses filles dans les beaux domaines du sud de la France qui font l'honneur des chênes truffiers. Comment continuera t-il de gagner tout en se consolant oh !l'imprudent dans les bras des femmes de chambres des hôtels situés au 4 coins du globe? Si l'argent venait ainsi à lui manquer, à se brider, il faudra inventer un nouveau protocole à l'utulisation du monde et de ses habitants et surtout se créer un nouvel égo démesuré, ainsi soit-il et vive les maraudes la nuit!

Le pire c'est que les maisons de vente seront aux arrêts par pénurie d'oeuvres d'art et que l'on ne pourra plus spolier nos compatriotes, ni dérober dans les musées à cause du fameux décret d'inaliénabilité qui forme un geste barrière aux collections. Nous avons déjà assez pillé nos voisins pas seulement au temps de colonies ou des guerres. Et puis toutes les belles oeuvres sont déjà parties et ne reviendront plus. La dispersion des lots se fera pour une fois en jet-ski, en hélicoptère ou du haut d'un drone en furie. En vérite l'univers a déjà claquemuré les divines créations de l'histoire de l'arts mais chut! L'homme est bien un loup pour l'homme, tout le monde le reconnait maintenant.

Eparpiller des lots d'oeuvres d'art au-dessus des bidonvilles ou dans le désert d'un pays de la corne d'Afrique comme l'Erythrée? Quelle indécence! et  puis c'est impossible crient les professionnels de l'art en une seule réaction commune: " L'Art déclinera toujours sa préciosité qui en a fait sa réputation car il sacré, vous ne le saviez pas? De toutes les manières les peuples du monde n'ont besoin que de produits de première nécessité c'est à dire une trousse contenant un kit de survie avec de l'amour dans un flacon, de l'eau fraiche dans un autre et des calins au beurre salé dans une boite à biscuits." 

 Cependant et paradoxalement, en cette période de délations intenses où tout le monde épie tout le monde, certaine entreprises battent des records de vente par internet et Jeff Bezos se retrouve plus riche que Crésus ou le roi de Robin des Bois. En véritable Picsou il n'a pas l'idée de redistribuer aux démunis son trop plein acquis sur le dos de ses salariés qui risquent d'être contaminé derrière les halls de cartons logotosisés. Il est vrai que la révolte populaire des Nu-pieds n'a touché que la Normandie car le rois Louis XIII  souvenez vous de vos cours d'histoire non masqués, voulait instaurer la gabelle dans le Cotentin à la place et en droit du privilège du quart-bouillon. C'est malin! 

Qu'il prenne alors une amazone pour témoin et écoute le concert caritatif incroyable de la Grande Lady Gaga qui a permis de collecter des millions et des millions de dollars en un temps absolu avec des stars confinées!

J'ai rencontré au début du confinement, un homme riche et éclectique, grand collectionneur qui se posait 20 milles questions à la minute tout  en tourillonnant son crayon à papier et qui avait dans son appartement jouxtant l'ambassade de Grande-Bretagne, rue du Faubourg Saint-Honoré, des tableaux anciens et modernes, des boîtes en vermeil, de l'orfèvrerie à gogo, des livres anciens, des objets d'art chinois posés sur des petites tables marquetées à l'entrée de sa grande galerie, des bijoux et même des sacs de pierres précieuses. Parmi ces lots importants et sur un cabriolet d'époque Louis XV, couleur vert amande et d'une grande estampille (mais je n'ai pas été me glisser sous le jupon car j'étais en jupe) trainait son attestation non d'autorisation de sortie mais d'inscription à Pôle Emploi, dans le grand goût du XVIII° siècle, à la négligence maitrisée près d'un chandelier en argent. Cette visite était grandiose et bien plus intéressante que les visites virtuelles proposées par les services culturels en panne d'idées et en 3D de nos musées.

A vue de nez, j'avais estimé son incroyable bazar à 3 ou 4 millions, mais c'était sans compter avec les grandes toiles réalisés par des artistes contemporains qu'il avait négligemment posées au sol comme un Pierre Soulages tout noir sur noir et qui a été de son vivant accroché au Musée du Louvre, un soir noir sans lune. Mais à y regarder de plus près, un jour d'exposition début janvier, je n'ai rien vu car c'était noir de monde. La profondeur du noir n'est pourtant qu'apparence ai-je expliqué à un ami dubitatif qui m'accompagnait. " Mais si je t'assure le noir est une couleur qui se fond dans la nuit des temps comme le bleu indigo des touaregs dans les plis de leur foulards "

Cet homme du fauboug était riche de bien précieux mais au chômage!

Comment la richesse et la pauvreté peuvent-elles être en phase avec ce virus qui déséquilibre tout et met à jour les distorsions évidentes de nos inégalités et mode à penser? La réflexion retstera éternelle car quelques années séparent et séparereont toujours l'homme de la rue, de l'Afrique affamée, de l'homme des beaux quartiers, dans les beaux appartements. J'affleure alors par associations d'idées, à un monde meilleur avec une envie soudaine de prendre ma mère dans mes bras pour lui dire combien je l'aime. Je lui soufflerai à l'oreille qu'elle n'ira jamais dans ces horribles maisons pour les retirés de la vie, les déterritorialisés viellissants, les rejettés de la sociétés sous des ponts transformés en manèges à mourir.

Que ce virus nous laisse en paix dans nos fantaisies d'hommes libres et fraternels!

Jeanne Gabriel_Villeneuve

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