Agathe n'aime pas le riz
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Agathe n'aime pas le riz
Pour les amateurs soucieux de leurs courbes, je m'engage à travers ces lignes à vous expliquer la formule pour devenir un authentique acète. Il suffit pour cela et comme pour Agathe, élevée dans un pensionnat du coté du Touquet, de vous astreindre à ingurgiter 40 bols de riz à midi, pendant une quarantaine de jours et sans bouillon sucré d'aucune sorte.
Je crois que le futur confinement, issu de la deuxième vague tant redoutée pourrait être une excellente opportunité pour mettre en application votre résolution, dont voici le plan d'urgence sur-mesure et pas uniquement destiné à des carmélites qui viseraient à intégrer l'Ecole Normale Supérieure: " Pour ne pas prendre un microgramme de gras, il est vivement conseillé une mono-diète de qualité en survêtement de pénitent, bouteille d'eau minérale à la main et à pas légèrement saccadé. "
Pendant le temps de ce parcours initiatique, Agathe dormait paisiblement sur une paillasse Made in France, bourrée de coton doux qui lui donnait des envies de visites de châteaux et de mariage dans de belles limousines allongées comme celles que l'on peut voir passer avec des nipponnes tout en blanc collées aux parapets du pont de l'Alma ou aux balustres du pont alexandre III, avec le coucher du soleil pour finir ce décor de carte postale. C'est ainsi qu'entre les prières obligatoires du matin et avant de commencer les cours de catéchisme ou d'histoire, Agathe se mit un matin, à parler à sa professeure de français, une très jolie blonde, qui cherchait en permanence à donner des cours de théâtre à des adolescents démunis de concentration et d'anticipation des écrits romanesques de nos grands auteurs de la littérature classique, de ses rêves nocturnes.
Avec la toute puissance de sa vocation, Brigitte Petitrognon, dernière d'une famille de 6 enfants bien peignés et toujours soucieuse de grandes précisions et ce depuis le berceau, écouta avec attention, la pensionnaire, avec son sourire d'éternelle jeune fille. Son engagement profond au sein de l'Education Nationale, lui valu ensuite, mais vous le savez tous, un beau mariage à tout juste 20 ans, avec un banquier d'affaire au col empesé et à la cravate bien nouée.
Afin que ma recherche frappe au plus juste, je me dois de vous avouer, qu'elle n'utilisait jamais sa règle pour taper sur le bout des doigts de ses étudiants paresseux et mal dégrossis et qu'elle tomba malgré tout, une après-midi, la délicieuse ingénue, et pour notre plus grand bonheur, sur un de ses élèves, (le plus doué d'entre eux, comme par hasard), du haut de son estrade et avec un trognon de pomme dans la main.
Vous n'imaginez même pas le tollé que cela produisit ensuite dans les familles bien pensantes du Nord de la France car elle obligea le pauvre malheureux en culottes courtes, et boutons dorés sur un martingale de la finance, (qui avait appartenu à son bon papa), de réciter par coeur des chapitres entiers en latin et à l'envers pour le punir de trainer ainsi et sans manières sous ses jupes, soit disant pour attraper ses gommes poussièreuses. Le jeune homme se moquait de ses punitions car il était parfaitement bilingue en latin-français et vise versa et savait cracher les pépins.
Alors un jour, au cours d'une émission de grande audience, la reine de la mode Christina Cordulla s'exclama naîvement: " Ma chérie, c'est impossible que je t'invite sur mon plateau, tu ne peux pas convoler en juste noce avec ce gamin car tu as déjà donné ta langue au chat et tu as finis ton consommé! Mais comment as tu fais pour tomber de ton escabeau? Tu veux que je t'apprenne à marcher avec des talons hauts? C'est le fameux cat walk des saxons!" Puis par dépit, elle se couvrit la tête d'un ridicule chapeau tout en bougonnant qu'on ne mélangeait pas les torchons et les serviettes!
Agathe fut quand même témoin de ce mariage de haute volée, et il a fallu à la hâte chercher des alliances pour enjoliver les veines d'amour de nos soupirants fort épris, trouver aussi des fleurs d'oranger, symbole de pureté, pour composer le bouquet et une ancienne jarretière arrachée un soir de pleine lune, à un ancien chevalier écossais de la noblesse britannique et puis et surtout le fameux pot de chambre! Et c'est sur ce dernier objet que je vais m'attarder maintenant et par confidences échappées de la bouche d'une adorable personne qui a fondé une start up au joli nom de: " A la française". Je l'ai rencontré, au cours d'un séminaire de développement personnel dans un sauna, quelque part en Champagne.
Nous étions transportés dans un van spacieux, confortable et climatisé et le paysage défilait doucement. Mes compagnons de voyage étaient tous en burn out et en short, chaussures de sport, tee-shirt à la mode wee-end, lunettes de soleil. C'était le début de l'été.
Donc, notre charmante enseignante aux cheveux couleur soleil de plomb, s'est ensuite vue dans l'obligation de se promener en charette décapotable avec un pot de chambre sur les bras, et annoncer de vive voix, à tout le Touquet complètement abasourdi par tant de vacarme, qu'elle allait se marier avec celui qui lui avait redonné vigueur pendant tant de nuits bien agitées et qu'elle reprenait du poil de la bête pour excercer à nouveau son noble métier, vocation oblige! Freud vous expliquera bien mieux que je ne l'écris ici, que ce passage dans les rues de la ville du bord de mer est un symbole fort et obligatoire pour passer de l'enfance à l'âge adulte. On a même retrouvé sur les parois des grottes pariétales des peintures de femmes à dos de dinosaures qui portaient des anneaux étranges autour des cuisses, (l'ancêtre de la jarretière) et surtout un pot sur la tête. De nos jours un cache-pot est laissé à la discrète courtoisie des convives sous la table de chevet et au cas où les commodités viendraient à se boucher, ce qui est assez fréquent, somme toute, les soirs d'orage.
Bien des années après les croisés et leurs croisades, j'ai appris pourquoi la mariée devait absolument se tenir à la gauche de son futur mari, dans toutes les cérémonies officielles de notre chère république et encore une fois c'est l'ingénieuse fondatrice de la société "A la française" qui m'en a parlé entre deux petites coupettes de champagne.
C'est une histoire calquée sur l'art de bien décorer une table façon " A la gauloise" où le verre de vin blanc doit toujours être placé au bon endroit: à gauche du verre de vin rouge qui tache les nappes blanches en face d'une fourchette, piques en l'air, (à moins qu'elle ne soit gravée de vos armoiries et d'un joli coq tricolore bien de chez nous). La faute de goût est dans ce cas précis impardonnable car tante Ginette vous a toujours répété qu'il faut savoir recevoir sans faire d'impair.
Donc, l'homme essayant de kidnapper sa future promise (mais déjà prise) est obligé selon le docte protocole de la tenir fermement par la main gauche, car de la droite il tient son sabre prêt à repousser les assaillants et toutes les personnes aux mains sales qui tombent comme des mouches surtout si elles sont opposées à son alliance et Dieu seul sait combien ils furent nombreux.
Quand à Agathe, encore vierge, elle ne s'était engagée et n'avait jamais jurée (car c'est vilain) de permettre à Brigitte de prendre si bien soin de son jeune amoureux. Elle fut cependant choisie, presque de force, car elle représentait un gage ou un alibi cousu main. En effet, il y a bien longtemps, vers le III° siècle, un certain consul du nom de Quintien, ordonna qu'on coupa d'un coup les seins de Agathe numéro1, au doux prétexte qu'elle avait refusé de l'épouser! Dieu soit loué, Birgitta, en robe très haute-couture fut épargnée puisqu'elle accepta d'ouvrir le bal avec son père en haut-de-forme et queue de pie. Petit détail mais d'importance aucun grains de riz ne dépassaient de son peigne à cheveux en écaille! Agathe traumatisée par ses années de pensionnat n'aimait plus le riz et avait refusé ostensiblement d'en lancer sur le couple et le parvis. Voilà pourquoi tant de mauvais esprits non chassés trainent encore, aux abords du palais rue de Matignon. En revanche avec l'accord du futur roi Emmanuel le Bon, et pour garantir bonheur et chance à la France qui attend d'être félicitée et comme il se doit selon une autre tradition, la pluie de riz fut remplacé par des confettis récupérés la veille lors de l'enterrement de la vie, de l'ancien et jeune vieux garçon et par des pétales frais. Mais surtout on équipa les fringants ministres d'étuis à souffler des bulles de savon de grande qualité. Vous auriez vu cela! Des phoques soufflant à qui mieux mieux, les bajoues toutes gonflées et au bord de l'explosion!
Pour terminer dans la liesse et afin que Brigitte ne soit pas tenter de retourner chez ses parents, on modifia aussi par décret, une autre coutume: celle du port du voile car Brigitte était très belle, je vous l'ai déjà signalé. Explication: A l'époque des mariages arrangés, les parents de bon ton et un brin lucide, recouvraient le visage de leur fille avec le fameux linge fin et jusqu'à ce que le mariage soit célébré. L'homme épousait ainsi sa petite moitié de service sans tenir compte de ses critères physiques. La morale était ainsi sauvée!
Qu'aurions nous fait, de toute façon, de nos binoclardes, boutonneuses et autres moches dévouées? Il ne restait plus que le couvent qui servait en exclusivité mais avec une certaine élégance de la soupe à l'oignon, punissant ainsi à tout jamais les mauvaise fées qui ne s'étaient pas penchées sur le couffin des laides filles. Elles apprenaient ainsi mais sur le tard, les règles redoutables du savoir vivre et du bien manger avec un poil au menton.
C'est ainsi que la religion fut pensée: pour lutter contre l'isolement social et accompagner les femmes les plus vulnérables dans le maniement de la pince à épiler, de l'étalage du fond de teint et de l'anticerne ainsi que de l'utilisation d'un produit de pemière nécessité: le rouge à lèvres de couleur rouge baiser. Les parloirs de ces monastères étant transformés pour l'occasion en cellule anti- crise avant l'heure tout en faisant bénéficier aux récluses écoute et soutien psychologique, conseils devant d'éventuelles violences conjugales à venir. Oh mirage de l'amour!
Agathe s'est engagée aujourd'hui comme volontaire dans un groupe "A la française" sans frontières, pas accompagnée car célibataire, elle se tient toute droite à votre disposition pour parler aux insomniaques de culture, gastronomie, recettes d'apéritifs, oenologie et cristallerie. Elle a développé avec les personnes passionnées de son équipe, le sens de la curiosité et le goût du détails qui ne sont pas à piquer des hannetons, car elle connait les moindres détails de votre vie privée.
Jeanne Gabriel-Villeneuve