1000 ans
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1000 ans
Mille ans me séparent de toi. J‘entends pourtant les échos des enclumes, le brouhaha métallique, entrechoc d’épées plus d’une fois aiguisées. J’hume l’odeur âcre des peaux de bêtes trainant dans la poussière au milieu des tessons. Un enfant dans un coin joue aux osselets. Le chat passe, plus rapide que son ombre. Un feu aussi froid qu’inutile survit dans l’âtre péniblement. Je cherche ton visage sur le mur de pierres. Le sol délivre des messages d’amour qui me sont indigestes. J’ai l’appel de la forêt qui susurre des poèmes verdoyants. Je m’enfuis entre ses troncs opaques. La source fraîche lappe mes désirs de femme et apaise les manquements de l’âme. Je cherche ton visage dans les courants de l’eau. Les gerris décrivent des cercles d’ondes pour mieux brouiller les pistes. Ils m’amusent le temps d’un bal, petit menuet aquatique. Sur la vieille pierre en mousse, je trouve le repos. Elle a maintes fois entendue les confessions intimes de celles qui, bannies, errent, portant aux fronts : couronne de sureau. Me voici au sud, me voici au nord. Face à face. Il me faut choisir dans ces polarités le chemin du retour. Chemin de trépassée. La porte au nord est indigo-perlée comme la nuit porteuse d’étoiles. La porte au sud sent bon le musc et le jasmin. Je suis venue pour toi mais ton visage m’était interdit. Comme celui d’Euridyce au poète porteur de lyre. La barque est là déjà. Je refuse d’y embarquer. Il me faut avant cela revivre une dernière fois.