Le visage d’Akseli se décompose, je me pince la lèvre en le regardant.

— Tu penses…commencé-je, tu penses qu’on devrait lui demander ce que ça signifie ? 

— Est-ce qu’il va vouloir nous le dire ? 

— Si on ne le fait pas, on ne saura pas ! soufflé-je.

Je repense à ce qu’a dit son père par rapport aux deux disparitions d’hier soir. On les aurait vus s'ils étaient venus à Beldem vu qu’on était sur place et ce n’est pas le cas. 

— Et si on y retournait ? propose Akseli.

— A Beldem ? Maintenant ? 

— Bah oui, où veux-tu qu’on aille d’autre ? Je déposerai les feuilles vu que tu penses que ça aurait dû rester là-bas. Mais d’abord, je vais recopier le texte. 

Je le regarde partir dans sa chambre, je secoue la tête avant de récupérer les tasses et de faire la vaisselle. Je pars ensuite m’habiller et me coiffer avant de le retrouver dans le salon, prêt à partir. 

— On y va, tu remets les feuilles où tu les as trouvées et on rentre, on est d’accord ? questionné-je.

— Oui, m’dame ! sourit-il.

Bizarrement je ne le crois pas mais je vais faire un effort. On quitte notre maison avant de rejoindre le pont pour aller à Beldem. 

Sur le trajet, les regards se portent sur nous vu la direction que nous prenons. Une fois devant le pont, nous sommes interceptés par deux agents municipaux. 

— Que comptez-vous faire ? demande l’un.

— Traverser, répond Akseli

— Nous vous déconseillons d’y aller, rétorque l’autre agent.

— On prend en compte votre conseil, dis-je, bonne journée.

On les salue avant de traverser le pont sous leurs ordres de revenir. Une fois de l’autre côté de la rive, on s’aperçoit qu’on voit un peu mieux qu’hier même si ce n’est pas encore ça. La brume et la pluie fine restent présentes. Akseli regarde un peu partout en tentant de se rappeler les maisons où se trouvaient les feuilles. Je le regarde se déplacer en le suivant de près, hors de question que je me perde encore comme hier. Je remets le col de mon manteau correctement alors qu’Akseli s’arrête devant les escaliers menant à la clairière. On se regarde en sachant très bien ce qu’il s’est passé hier.

— Prête ? demande-t-il, car c’est là qu’on a trouvé la dernière…

— Non, je ne le suis pas, mais comme je veux rentrer le plus vite possible, on va le faire…

On prend notre courage à deux mains et on grimpe les marches. La brume s’épaissit ce qui ne nous rassure pas. Une fois qu’on a gravi les escaliers, on sent que l’atmosphère a changé. La brume se disperse, nous sursautons quand nous voyons un vieux bâtiment en bois délabré.

— Non, je rentre pas, dis-je, rêve.

— J’ai rien proposé encore !

Je le regarde et fais un pas en arrière pour lui faire comprendre que je n’irai pas plus loin. Il soupire en levant les yeux au ciel avant de s’avancer vers le bâtiment.

— Au pire, dépose la par terre, c’est là qu’on l’a retrouvé ! proposé-je

— Pas faux, mais bon, autant entrer non ? 

— Non.Tu pose cette feuille et on se barre !

— Rhoo… Rabat-joie… soupire t-il.

Il sort le papier de sa poche et la dépose devant le bâtiment avant de reculer jusqu’à moi. Rien ne se passe.

— On se casse, ordonné-je.

— Bien m’dame.

On fait demi-tour, à peine avons nous entamé la descente dans les escaliers qu’on entend des rires d’enfants qui nous glacent le sang. On se regarde, on hésite à se retourner pour vérifier que c’est qu’une simple hallucination mais ni lui ni moi n’avons envie de tenter quoi que ce soit. On continue notre chemin alors que les rires semblent nous suivre, on accélère le pas, la peur commence à m’envahir. On s’arrête d’un coup quand les silhouettes des enfants apparaissent juste devant le pont. Akseli me prend la main, nous les regardons alors que mon rythme cardiaque s’emballe. Les enfants pointent leur doigt dans notre direction, je commence à trembler et nous nous retournons avant de voir la silhouette d’un homme. Son visage est caché sous une capuche, des fils sont attachés à ses doigts et en regardant leur direction, je me rends compte qu’ils sont rattachés aux enfants.

“Le marionnettiste”

— Akseli, on doit trouver un moyen de partir, chuchoté-je, et vite.

— Bah je t’écoute… 

Je m’agrippe à lui, la situation est terrifiante. Je ne sais pas ce que veut cet homme ni ces enfants et ce qu’ils attendent de nous. Je veux juste rentrer chez nous. Je ferme les yeux, je ne veux pas voir comment tout ça va se terminer, si on doit mourir, je veux que ce soit rapide. Les bras d’Akseli m’enlacent, je peux sentir les battements rapides de son cœur. Puis c’est le silence total. Je me demande si je peux ouvrir les yeux, Akseli tapote doucement mon dos.

— On peut partir Rebecca, dit-il.

Je ne me fais pas prier et nous nous dépêchons de traverser le pont pour retrouver Vallione.