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Pénétrer à Longwood: Ile de Sainte Hélène.

Pénétrer à Longwood: Ile de Sainte Hélène.

Published Jun 23, 2021 Updated Jun 24, 2021 Culture
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Pénétrer à Longwood: Ile de Sainte Hélène.

Pour entrer dans l'intime de ce territoire oublié, il nous faut percer des architectures de songes éphémères et sombrer en même temps dans le profond désespoir d'une Atlantique côtelé.

Ces constructions changent au gré des perceptions tombées du ciel, entre les courants d'air chantés a capella, parmi les ombres échappées d'ossements méconnaissables.

Quelques arbres introduits par des anglais en cartigan boutonné sur jupe plissée mais néanmoins désabusés, ponctuent en couleurs, un décor las sans cesse recomposer qui ne pense plus à regarder le lever du soleil sur les terres africaines.

Un tableau vidé de ses tendres lettres de noblesse, barbouillé de sang, par d'ivres chambellans en robe de chambre de velours, attend  lamentablement pendu à son clou rouillé, sur un pan de mur jaune paille oublié.

Au loin, un village en mue, persuadé de son invincibilité, jase encore d'une haine de granit rose, parmi les euphorbes et pelargonium en colimaçon, et se transforme au fil du temps en une épure d'escaliers fourbus, menant à un quelconque palazzo imaginaire installé dans la lande volcanique et sur un Pégase tout de blanc vêtu.

Alors, surgis d'outre-tombe, des personnages flottants à la dérive, dans une souffrance poussièreuse, cachés sous de longues chemises blanches et de grandes bottes noires à l'écuyère.

Les fréquences sont basses. Il n'y a pas de bruits, de traces ou de reliefs qui se superposent et se cassent sur des rochers muets, dans ce coin si particulier et  si volubile.

Les lustres pendus avec soin, sont au grand complet, maintenus dans le feu sacré de leur brillance discrète, au dessus de la lumière, d'un mois de Mai toujours fuyant.

Ils ne sont jamais éteints dans le vent violent qui claque les cheveux, fait tomber en rafale d'ingénues écuries tressées en pergolas et les  legers souvenirs d'enfance à col claudine, petits bouts d'attachement sentimental sans sens délicat.

Ailleurs, un bassin sans eau ne cherche plus à recomposer les pièces de l'énigme; même si quelques unes sont encore lancées par des amoureux éperdus, en rhapsodie bleue, qui ne peuvent plus caresser la pierre tombale.

Le masque mortuaire est visible cependant, si on veut bien se donner la peine de se pencher correctement, 

Le cercueil n'est pas encore gravé, derrière les hauts volets d'une vieille et rabougrie demeure.

Il attend sagement son départ pour Paris ne tenant pas compte des menaces d'outrage pathétiques. 

Parfois, une flèche gothique surgit du néant et d'une cohorte d'oiseaux pourpres, hurlants et criants dans le vaste ciel tourmenté, pique du nez dans l'essence d'une eau de Cologne, seul souvenir olfactif qui reste du Corse.

Elle ouvre sur une fenêtre argentique à la contemplation esthétique.

Un rideau fluide se déchire dans un rayon à l'esprit plein de philosophie et recouvre une soupière de Longwy contenant un coeur fragile et un estomac impérialement mystérieux.

Plus tard, des gants blancs, les placeront dans deux vases d'argent, au-dessus de la martingale et des bacs à oranges aux seins opulents. N'en déplaise à la créole.

Il ne nous reste plus qu'à nous évanouir mollement en transperçant les nuages flottants, en morceaux épars, et à être attentif à la lumière des joncs, aussi.

Ce paysage est délimité, vous l'avez pressenti, par des murs de pierre montés à la va vite mais habilement construits par des mains invisibles enlaçant les giroflées des murailles.

La vigne vièrge est envahissante depuis si longtemps. Elle empêche l'exploration de transgression et résiste à l'instinct des frissons de destruction.

Orphelins à la dérive, suppliant la puissance de la mascarade de se taire, ces alignements minéraux trahisent l'ordre de cette campagne intérieure qui saigne longuement la mort d'un empereur encore trop présent dans un destin si prévisible.

Après des semaines d'agonie, Napoléon finira par rendre l'âme sur cette île de sainte Hélène.

Une fois descendu aux enfers et au cours de son séjour en terre, ses restes seront enveloppés dans des vieilles dentelles.

Elles contenaient bien de l'arsenic .

Qui sème le vent, récolte la tempête! Waterloo, Marengo, Vauban, Foch , Lyautey, réveillez vous bon sang!

Sur l'autre rive, l'eldorado déploie ses ailes sur des moribonds chancellants dans des embarcations de fortune.

Tout ce petit monde napoléonien tremble alors d'indignation à la pensée secrète qu'ils puissent un soir d'hiver envahir leur île!

Leur arrivée dépend tant de la pêche du jour!

Déjà cadavres de leur propre existance, ils tournoient sur le flot de leur océan de tourmente, s'arrêtant parfois de chercher leur âme, de l'aube au matin et du matin au crépuscule, dans une vie qui ne chatoie plus mais dont ils cherchent inlassablement à laver les taches de sang.

Ces marins protestent leur innocence, tout en rapportant des graines pour les semer sur les franges des baies du monde.

Parfois, ils transportent les cendres d'un immortel dans des blouses vaporeuses et des manches ballo,ns en lamé.

Pourquoi fallait-il donc ouvrir 4 bières? Une de fer blanc, l'autre d'acajou, une de bois exotique, et la dernière de plomb.

Dans les tombes de l'antiquité, les cavaliers étaient toujours enterrés avec leurs chevaux.

Dire q'un artiste s'est servi de ces migrants pour portraiturer Bonaparte en esclave noir enchaîné sous le Dôme des Invalides!

Son nom est Damien De Roubaix dit le Valet Cipriani.

Il fait toujours une pierre deux coups. Vous ne le saviez pas ?

Il parait aussi que le conservateur du musée a le titre de "gardien du tombeau de l'empereur".

Un soir de pleine lune, sans doute un peu nostagique et dévoré par la culpabilité, il aurait accroché avec des fils de nylon invisible, un squelette en plastique au dessus du sarcophage.

Les brigants jouent toujours aux dés avec des larrons en croix.

Ces derniers n'ont de cesse de se saouler pour ne pas être accusé du meutre d'un artiste et parce qu'ils sont sujet à des crises de somnambulisme.

Pire!

En proie aux doutes et aux hallucinations, les sorcières de Lady Macbet auraient sombré dans la folie tout en poignardant le beau destrier dans sa chair mise à nue nouvellement.

L'abolition complète des discours de la perfide Albion, toujours en quête d'une sensorialité joliment bohème , n'est pas contenue dans l'extrait des plantes

 

Jeanne Gabriel-Villeneuve 

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