Étreintes de Mohair ...
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Étreintes de Mohair ...
Aujourd'hui, j'ai envie de parler chiffons.
Ou plutôt de l'émotionnel que nous y associons.
Parfois ? Souvent ? Jamais ? Moi, tout le temps.
Je tisse un attachement profond à certains objets de mon quotidien, mais aussi à certains habits, car je les investis d'une mémoire sensorielle.
La plupart de mes vêtements m'évoquent un souvenir, une journée ou une nuit, un instant précieux. Je n'ai pas la mémoire des dates et je suis capable de me perdre dans mon propre village, mais je pourrais te raconter sur le bout des doigts comment j'étais habillée le jour où je l'ai rencontré, ou ce qu'une nuit il a effeuillé avec délice en un moment d'éternité.
Il y a ces robes rockabilly que je trimballe dans mes malles à chaque déménagement, celle que je portais le soir de mon dernier anniversaire à Rennes, ou cette nuisette rouge dont je n'évoquerai que la finesse dentelée glissant lentement sur une constellation de grains de beauté.
Chacun, ou presque, raconte une histoire à lui seul ou en puzzle.
Et puis, au fond de ma penderie, soigneusement plié, un de mes pulls qui se transforme en robe selon mes envies, cache, tissés dans chacune de ses mailles, les souvenirs de ses baisers. Et de ses mains aussi.
Je ne l'avais pas porté depuis lui.
Il est là, pourtant. Je le vois chaque matin. Plié au carré, détenteur en lui-même de ce secret au goût d'inachevé.
Celui que je ne raconte jamais parce que je ne comprends pas réellement ce qui s'est passé.
Ai-je rêvé, fantasmé ? Peut-être ai-je trop bu de ce thé bleu curaçao chez ma voisine soeurcière?
C'était comme deux comètes qui se reconnaissent dans l'immensité de la galaxie.
Rien ne les prédestinait à se croiser, ou au contraire, l'univers entier conspirait à les rassembler.
Mais l'univers a changé d'avis. Pas le bon moment, pas le bon tempo, et chacun reprend le cours de sa mélodie.
Reste le souvenir d'un amour qui n'a pas eu le temps de s'épanouir et qui se niche dans le mohair pour oublier la morsure de l'hiver sur une âme dénudée.
Et puis, il y a ces matins où le froid mord tellement que ma peau aspire à sa chaleur.
Ces matins où j'ai envie de m'y blottir et de chercher à débusquer du bout du nez le vestige de cet improbable "toi et moi", de m'envelopper de sa douceur, me remémorer la chaleur de ses mains, le ferveur de ses caresses, la passion de ses promesses.
Mais il n'y a que moi qui ne sais plus vraiment si je n'ai pas tout simplement rêvé trop fort d'un cœur similaire au mien pour toujours m'y sentir protégée.
Xoxo,
Juliette
image réalisée avec Seelab et retravaillée avec Canva