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Chapitre 17 : Pendant ce temps-là à Logonna-Daoulas

Chapitre 17 : Pendant ce temps-là à Logonna-Daoulas

Published Jan 28, 2025 Updated Jan 28, 2025 Adventure
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Chapitre 17 : Pendant ce temps-là à Logonna-Daoulas

Déjà huit mois que le Père Kervalle était à la carrière de Logonna-Daoulas. Les temps étaient durs et le travail laborieux mais le mace(1) était presque terminé. Avec ses compagnons, ils avaient creusé, charrié, taillé les pierres qui formeraient le soubassement de l’un des plus grands calvaires de Bretagne. Selon les fabriciens Corre et Periou, et le curé Baod, qui suivait de près la conception et la fabrication du calvaire, celui-ci mesurerait dix mètres de haut et le noyau du soubassement, en forme d’octogone, ferait un mètre soixante-dix de côté, flanqué de quatre épais contreforts. En effet, avec cent quatre-vingt statues, pesant de cent à deux cents kilos chacune, la fabrication du mace en pierre de Logonna devait être monumentale. Nombre de ses compagnons étaient décédés, de la peste le plus souvent, mais l’épuisement et le manque de nourriture contribuaient aussi à cette forte mortalité.

Le père Kervalle tenait bon. Chaque coup de pioche qu’il donnait, il le faisait pour sa femme, pour sa fille, pour ceux qu’il aimait et pour ceux qui l’avait quitté. Ainsi, ses journées étaient rythmées par tout cet amour invisible qui l’entourait et le protégeait. Il donnait aussi de sa personne pour accompagner ses compagnons vers leurs dernières demeures et parfois, par chance vers la guérison. Il s’était rendu compte qu’en passant ses mains au-dessus des corps des malheureux, à quelques centimètres de leurs bubons dont ils étaient recouverts, et en récitant les prières que sa femme avait multipliées pour sauver leurs filles, certains hommes guérissaient. Un jour qu’il était au chevet d’un mourant venant de Plougastel, celui-ci délirant, lui raconta que trois des cloches de l‘église du bourg étaient revenues dans le clocher. Il lui parla aussi des miracles répétés d’une jeune fille rousse du Kordennad(2) de la Fontaine Blanche et le pria de l’emmener la voir pour qu’elle le guérisse.

- Cela ne peut-être que mon Augustine ! se-dit le Père Kervalle

Malheureusement, l’homme mourut avant de pouvoir en dire plus et le Père Kervalle, dont la mission pour le calvaire étant bientôt terminée, décida que le temps était venu de rentrer au Pays et de retrouver sa femme et sa fille. Il quitta donc le jour-même ses compagnons et parti à pied, bâton de pèlerin à la main. Il n’était qu’à quelques heures de marche de Plougastel, mais la nuit venant rapidement en cette saison, il fut contraint de se trouver un refuge pour la nuit, aux abords de la rivière de Daoulas. La nuit était fraîche et il ne trouva aucune habitation aux alentours, ce qui le contraint à passer la nuit à la belle étoile. Mais celle-ci ne fut pas belle mais hantée de cauchemars, de frissons, de visions effrayantes où Ar Vossen(3) régnait en maître sur la Terre. Il entendit même, à plusieurs reprises dans la nuit, le grincement de la charrette de l’Ankou(4) qui passait non loin de lui. Au petit matin, frigorifié mais ruisselant de sueur, il ouvrit sa chemise et découvrit que son torse était recouvert de bubons en forme de croix. Comprenant le mal qui était en lui et donc l’impossibilité de revoir celles qu’il aimait, le Père Kervalle rampa à travers un champ de fougères roussi, créant ainsi un tunnel où il atterrit au milieu d’une petite clairière, loin de toute civilisation. En effet, là était sa plus grande peur : transmettre cette peste à quiconque il croiserait. Il avait vu tant d’agonies et de souffrances qu’il ne pouvait pas être à l’origine d’une nouvelle transmission… même si sans aide, c’était la mort qui l’attendait.

- Potius Mori, Quam Feodari, se dit le Père Kervalle qui était le dicton de Plougastel « Plutôt mourir que la souillure ».



(1)mace : socle d'un calvaire

(2)Kordennad : Division de paroisse en breton

(3) Ar Vossen : La peste

(4) Ankou : Ange de la mort


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