Le Sonneur d'Irylia (partie 1)
Auf Panodyssey kannst du bis zu 10 Veröffentlichungen im Monat lesen ohne dich anmelden zu müssen. Viel Spaß mit 9 articles beim Entdecken.
Um unbegrenzten Zugang zu bekommen, logge dich ein oder erstelle kostenlos ein Konto über den Link unten.
Einloggen
Le Sonneur d'Irylia (partie 1)
Le premier jour du grand renouvellement commençait à poindre. Irylia, la cité lumière, se préparait au nouveau cycle qui serait, cette fois, placé sous la protection du corbeau nuit. Les habitants s'affairaient à ranger les étoffes, bannières et autels à l'effigie du cerf herbacé. Le temps des terres fertiles était révolu. Dans quelques jours, le monde d'Oryn serait plongé dans l'obscurité. Cela n'était pas arrivé depuis des siècles. Les anciens n'en avaient que peu de souvenances et les ouvrages de la grande Bibliothèque n'effleuraient que succinctement le sujet. On raconte que, lors du dernier cycle du corbeau nuit, spectres et parias se seraient alliés pour modeler le monde à leur image. De nombreuses villes subirent les flammes, le chaos et la destruction. La grande Bibliothèque d'Irylia ne fit pas exception et ses parchemins, réduits en cendres, emportèrent avec eux les récits et mémoires des cycles précédents. Les Gardiens des souvenirs avaient juré de ne pas retranscrire les évènements de cette sombre période. Que l’obscurité demeure obscurité, et le mal ignoré.
Le mystère entourant cette époque donna naissance à nombre de superstitions et légendes. Certaines affirmaient qu’il serait possible de se passer de la protection du corbeau nuit en clouant sur sa porte un mannequin de paille ayant pour entrailles les restes faisandés de corbillats. D’autres mentionnaient une prière qu’il faudrait déclamer à chaque pleine lune afin d’obtenir la bénédiction du Lycan, seule faveur divine capable de repousser les créatures d’Outre-monde, excepté les Hommes-loups.
Et puis il y avait les plumes à nouer aux cheveux des vierges pour qu’elles n’enfantent pas magiquement un angelot au plumage sombre. Sans oublier le grain à semer sur le pas de la porte et le rebord des fenêtres dans l’espoir de soudoyer l’oiseau noir. Les croyances tournaient généralement autour de ce que les peuples connaissaient des animaux protecteurs. Mais il existait un rituel jugé indispensable et commun à chaque grand renouvellement : le chant des trois dames d’airain.
Quelques jours avant le changement de cycle, un habitant d’Irylia était désigné pour devenir le Sonneur. Lorsque la dernière lune s’élevait au-dessus de la haute tour Azurine, le Sonneur frappait de son marteau, les trois cloches dans un ordre précis. La mélodie obtenue était appelée « chant des dames » et annonçait l’avènement du nouveau protecteur et le départ de son prédécesseur. Le cerf herbacé devait très bientôt laisser sa place au corbeau nuit, et emporter avec lui la verdoyance et la fertilité des terres d’Oryn. Heureusement pour les Oryniens, les récoltes avaient été si abondantes que la nourriture ne risquait pas de manquer durant l’obscurcissement. À condition, bien sûr, que la lumière soit de retour lors du cycle suivant. Car s’il est bien une croyance que personne n’osait mettre en doute, c’était bien celle concernant le Sonneur et le « chant des dames ». Qu’adviendrait-il de ce monde si, par malheur, le Sonneur manquait à son devoir et que les cloches d’airain demeuraient silencieuses ?
***
Ce matin-là, comme toujours, l’animation ne manquait guère au Ruisseau Écumeux, la taverne du port d’Irylia. Marins et marchands allaient et venaient éructer leur joie de vivre tout en profitant des récits de voyage de quelques vadrouilleurs assoiffés par leurs périples. Et si l’alcool ruisselait comme une rivière débordante, au point d’en noyer plus d’un, il n’en demeurait pas moins une chaleureuse ambiance de franche camaraderie que les roustes et bastonnades ne savaient entacher. Elsie, la tenancière, surnommée Généreuse, autant pour sa gentillesse que pour sa poitrine, assistait aux joyeuseries tout en remplissant les chopes de mandrivoise, sorte de bière locale parfumée à la mandrilia, une plante cultivée sur le flanc de la montagne écarlate.
À l’étage, loin du tumulte, somnolait encore le jeune Tobin, fils unique de la défunte sœur d’Elsie, Odolina et du Capitaine Oweyn, parti depuis dix lunes écumer les eaux frémissantes de la mer embrasée.
Recueilli par sa tante après le départ de son père, Tobin était de ceux qui aspiraient à une vie paisible. L’aventure ne l’attirait pas le moins du monde et dormir était une de ses occupations favorites, si ce n’est sa favorite. Tobin était un rêveur, un flâneur. Il pouvait rester des heures, assis sur le rivage, à fixer l’horizon sans jamais éprouver l’ennui. Et bien qu’il lui arrivât parfois de remplacer Elsie au comptoir, ses journées étaient le plus souvent dépourvues d’obligations. Et cela lui convenait parfaitement. Alors pourquoi ? Pourquoi avait-il été choisi pour devenir le nouveau Sonneur d’Irylia quand tant d’autres espéraient marteler les dames d’airain à sa place ?
La sélection du Sonneur était effectuée dans le secret le plus total, entre les murs de la haute tour Azurine, par Yldegroln le Gardien des souvenirs et Cysim le Maître des cloches. Personne ne savait vraiment comment cela fonctionnait. Le marteau était déposé dans les flammes éternelles aux premières lueurs du grand renouvellement et retiré au cinq centième jour du cycle. L’on pouvait alors voir apparaitre sur son manche le nom du Sonneur désigné.
Tobin refusait d’être l’élu. Il ne voulait pas être important, ni qu’on le remarque. Mais il était pourtant devenu, malgré lui, le jeune homme le plus célèbre d’Irylia et, peut-être même, du monde d’Oryn. Car de lui dépendait à présent le sort de tous, du Ruisseau Écumeux jusqu’aux Falaises du Crépuscule. Voilà pourquoi il refusait de se lever alors que le soleil poursuivait sa course. Tobin s’efforçait de dormir pour ne point subir les affres de la notoriété. Il souhaitait qu’on l’oublie et que son absence pousse Yldegroln et Cysim à revoir leur plan. Que son nom, tout comme lui, soit effacé…
Il n’en avait pas toujours été ainsi. Avant la mort de sa mère, Odolina, Tobin ambitionnait de rejoindre l’ordre des Guetteurs. Ces derniers avaient pour tâche d’arpenter les terres d’Oryn afin de prévenir tout malheur. Ils observaient, écoutaient, questionnaient parfois, analysaient et rapportaient leurs informations aux autorités compétentes. Ainsi, grâce aux Guetteurs, personne n’était laissé pour compte. Qu’importe le rang, qu’importe le lieu. Tobin les tenait en estime et rêvait de parcourir le monde, tout comme eux, protégeant ainsi sa famille et ses amis d’éventuels dangers. Mais l’image qu’il avait d’eux fut, hélas, ternie durant le cycle de la loutre argentée.
Odolina était une Cueilleuse. Elle sillonnait régulièrement les champs dorés et les vallées émeraude pour y récolter diverses plantes qu’elle apportait ensuite aux différentes guildes d’Irylia. Un jour, alors qu’elle se rendait à la montagne écarlate pour y cueillir de la mandrilia, elle fut attaquée par des Hommes-loups. Ces derniers accusaient les Guetteurs d’avoir tué l’une des femmes de leur clan. La justice d’Oryn est loin d’être parfaite et, le sang appelant le sang, il arrive souvent que certains payent de leur vie la folie des autres. Odolina fut exécutée au nom de la vengeance, et les Guetteurs s’en retournèrent à leurs occupations, sans remontrance ni punition. Quelques jours plus tard, Oweyn, le père de Tobin, capitaine de l’Odolyn, fut emprisonné dans les geôles de la cité pour avoir roué de coups l’un des Guetteurs qu’il tenait pour responsable de la mort de sa femme. Il fut libéré le jour du grand renouvellement, alors que la loutre argentée faisait place au cerf herbacé. Puis il reprit la mer, le cœur brisé, confiant son enfant à la Généreuse Elsie du Ruisseau Écumeux. Le temps fit son œuvre. La rage devint colère, puis la colère devint dégoût… et ce jusqu’au renoncement. Car est impuissant celui qui peint sa vérité sous des yeux aveuglés.
***
« Allez, le Sonneur ! L’est temps d’ouvrir tes gobilles ! Tu n’vas pas rester dans l’noir toute la journée alors que l’obscurcissement s’en vient dans quatre jours ! » Elsie se tenait près de Tobin et le secoua énergiquement, ses deux avant-cœurs, ronds comme des clomélos, se balançant au-dessus de la tête du jeune homme.
« Laisse-moi tante Elsie, oublie-moi. Je suis sur le point d’être effacé, marmonna Tobin.
— Dis pas d’conneries l’gamin. J’ai promis à ton père de t’garder au chaud jusqu’à son retour. Pas envie qu’il me jette à la flotte pour nourrir ses foutus craint-l’air.
— Aucun risque, t’es insubmersible.
— C’est ça marre-toi p’tit pogneur ! Allez s’coue-toi, faut que j’aille faire une course. Va t’occuper des buvaillons avant qu’ils ne se cognent le bar !
— D’accord, d’accord, soupira le garçon, donne-moi une minute, j’arrive. »
Elsie quitta la chambre. Tobin, assis sur le bord du lit, fixa ses mains, cherchant un début de transparence. Mais ses doigts, quelque peu tremblants, demeuraient bien en chair. Il posa alors son regard sur le tabouret, à côté du lit. Le marteau du Sonneur y trônait, fier comme une relique consciente de son importance. Le prénom du jeune homme était gravé sur le manche taillé dans le bois sacré du Vieux Saule de la Forêt d’Elnaryl.
« Ce n’était donc pas un rêve, songea-t-il, dans quatre jours, je gravirai les mille marches de la haute tour Azurine et martèlerai les trois dames d’airain. Dans quatre jours, sous la protection du corbeau nuit, je condamnerai le monde à l’obscurcissement. Un cycle entier sans jamais voir la lumière du soleil. Un environnement effrayant, propice à l’émergence des créatures d’Outre-monde. Qu’adviendra-t-il des Oryniens ? Qu’importe après tout, puisque ces derniers se moquent bien de ce que je ressens. Les ténèbres ne sont finalement qu’une tempête récoltée pour avoir semé le vent. Un juste retour de bâton, un équilibre nécessaire. Quelle douce vengeance d’être celui qui déposera l’obscur voile sur les yeux des Guetteurs ! Je comprends, à présent, le choix des flammes. Il ne pouvait en être autrement. Il fallait que ce soit moi. »
En temps normal, remplacer Elsie n’était pas une corvée. Le neveu de Généreuse prenait plaisir à remplir les pintes de mandrivoise, à servir les clients, à écouter les récits des voyageurs. Il avait l’assurance nécessaire pour tenir en respect les fauteurs de troubles aux ivresses impétueuses ; il ressemblait beaucoup à son père. Mais ce jour-là, Tobin n’avait guère le cœur à rire. Alors il ne disait mot. Il se contentait d’acquiescer, de remercier d’un signe de tête et de ramasser les Lotis de cuivre et les Drams d’argent.
L’arrivée d’un étranger encapuchonné sorti Tobin de son apathie. Il avait l’allure d’un vieillard à la démarche lente et mal assurée. Son corps peinait à se tenir droit comme s’il supportait le poids du monde. Sa cape était sombre, grossièrement rapiécée. Il portait une sacoche tout aussi usée que ses fripailles et tentait de maintenir le tout sur ses vieilles jambes trémulantes. Les discussions s’étaient tues, sa lente marche jusqu’au comptoir fut observée dans un silence monastique. Le vieil homme se posa devant Tobin et le salua sans lever la tête.
« Bonjour, jeune seigneur ! articula-t-il d’une voix chevrotante.
— Bonjour, monsieur ! répondit Tobin, puis-je vous servir quelque chose ? Une pinte de mandrivoise peut-être, la spécialité de la maison !
— Merci mon garçon mais je n’ai pas soif !
— Peut-être avez-vous faim dans ce cas ? Je peux vous préparer une salade de clomélos si vous voulez, ils sont tout juste mûrs et ne coûtent que trois Lotis.
— Merci, vraiment, mais je n’ai pas faim !
— Dans ce cas, j’ignore comment vous être utile monsieur !
— Oh mais si ! Vous pouvez m’être d’une très grande utilité, sourit l’étranger, en me confiant votre fardeau.
— Mon fardeau ?
— Votre marteau !
À ces mots, la salle entière se dressa comme un seul homme.
— Qui qu’t’es, étranger, pour exiger une telle chose ? s’emporta l’un des marins.
— Je ne suis qu’un honnête voyageur, usé par les cycles, et je n’exige rien si ce n’est que l’on me permette d’aider ce jeune garçon.
— Le marteau sacré ne doit être manié que par celui que les flammes éternelles ont choisi ! déclama un autre client.
— Et qui en a décidé ainsi, hein ? explosa l’inconnu. Qui ? Je vous l’demande !
— Les Dieux, murmura Tobin sans conviction.
— Les Dieux ? reprit l’étranger. Quels Dieux ? Ces animaux légendaires qu’on ne voit pas ? Ces soi-disant protecteurs qui nous imposent leurs cycles ? Ne me dites pas que la perspective de passer plus de cinq cents jours sans voir la lumière du soleil vous enchante, alors que nous venons de vivre un cycle merveilleux d’abondance et de paix ! »
Les clients du Ruisseau Écumeux perdirent soudainement leur fougue. Certains replongèrent même le nez dans leur chope. L’homme à la capuche avait raison. Personne ne voulait de la protection du corbeau nuit, car ladite « protection » ne leur était pas destinée. Le dieu charognard ne servait qu’à équilibrer le bien et le mal. En imposant son règne, il permettait aux créatures d’Outre-monde de vivre un cycle entier à la surface en totale liberté. Car telle était la volonté des animaux protecteurs.
« Et si je vous disais qu’il existe un moyen d’éviter les ténèbres, poursuivit le voyageur devant une salle presque entièrement pleine, buvant ses paroles. Et s’il suffisait de transgresser les règles établies, rien qu’une fois, pour sauver des milliers de vies !
— Comment ? demandèrent quelques impatients.
— En laissant les dames d’airain prolonger leur silence ! répondit le vieil homme.
— Impossible ! cracha le marin en tapant du poing.
— Réfléchissez, c’est le chant des dames qui prévient le sortant et appelle le nouveau protecteur. Si les cloches restent muettes, le corbeau ne se réveillera pas et le cerf restera ! C’est évident ! »
Tobin aperçu un court instant le visage du vieillard sous sa capuche. Il souriait à pleines dents. Des dents bleues, acérées tels des crocs…
***
Après le départ du voyageur et le retour d’Elsie, Tobin quitta les murs d’Irylia et se dirigea vers l’Anse des Nautiles. Il aimait cet endroit presque autant que sa modeste chambre, à l’étage de la taverne. C’était un lieu magique où le chant des vagues s’échouant sur le sable sonnait comme une douce berceuse rassurante. Tobin s’y recueillait chaque fois que la vie se faisait difficile. C’était comme une bulle hors du temps, un sas de décompression. Il fixait l’horizon et parlait à voix haute. Il attendait le retour de son père tout en cherchant conseil auprès de sa mère. Tobin n’était pas un marin, pas plus qu’un marchand. Il n’avait ni la constitution de l’un ni l’aisance de l’autre. C’était un bout d’homme, court sur pattes et chétif. Mais malgré sa candide apparence, il gardait en lui une immense colère depuis la mort de sa mère et l’emprisonnement de son père. Comment le monde pouvait-il accepter une telle injustice ? Comment ne pouvait-il pas comprendre la violence d’un homme désespéré d’avoir perdu l’amour de sa vie ? Ils méritaient toutes et tous de subir l’obscurcissement. En tant que nouveau Sonneur, il lui suffisait de jouer le chant des dames. Mais il y avait Elsie, Oweyn… la seule famille qu’il lui restait. Il avait le pouvoir de leur éviter ce cycle de ténèbres. Qu’allait-il faire ? Ce que l’on attendait de lui ? Son devoir et, par conséquent, assouvir sa vengeance en aveuglant les Guetteurs ? Condamner à la peur les Oryniens complices de sa tragédie ? Ou disparaitre et laisser le cerf herbacé protéger Oryn un cycle de plus et lui offrir abondance et fertilité, tandis qu’il rejoindrait les Effacés, les spectres nés de l’oubli…
La nuit tomba sur l’Anse des Nautiles. Tobin quitta sa bulle et regagna Irylia. À peine avait-il franchi les portes qu’une foule se pressa tout autour de lui. Des hommes, des femmes, des enfants, des vieillards avec, pour seule demande, que Tobin ne martèle pas les cloches d’airain. La théorie de l’étranger aux dents bleues avait fait le tour de la ville et les Iryliens semblaient y croire dur comme fer. Se trouver là, au milieu des gens l’interpelant, le touchant, était un véritable calvaire pour quelqu’un qui passait son temps à frôler les murs, tête baissée, pour ne pas être remarqué. Le jeune homme se faufila tant bien que mal jusqu’à la haute tour Azurine et referma la porte derrière lui. Les clameurs restées à l’extérieur, le garçon reprit son souffle. Il fit quelques pas avant d’être rejoint par Cysim le Maître des cloches.
« Bonsoir, maître Sonneur ! lança poliment ce dernier.
— Bonsoir.
— Qu’est-ce qui t’amène dans mon humble demeure ?
— Je voudrais vous rendre le marteau. Remettez-le dans les flammes, qu’elles désignent quelqu’un d’autre, s’il vous plaît.
— Mais enfin, Tobin, c’est impossible. Les flammes éternelles ont besoin de temps pour choisir et graver le nom de l’élu.
— N’y a-t-il pas un autre Tobin à Oryn, capable de frapper trois cloches ? s’emporta le jeune homme.
— Je comprends tes craintes mon garçon, il n’est pas évident d’être Sonneur, d’autant plus avec ce qui nous attend.
— J’ai entendu dire qu’il me suffisait de ne pas jouer le chant des dames pour que le cerf demeure un cycle de plus. Est-ce vrai ? demanda Tobin
— Je l’ignore, répondit Cysim, personne n’a jamais pris le risque de provoquer les Dieux ! C’est une tradition ancestrale, les choses sont ainsi et, à ta place, je ne jouerais pas avec les animaux protecteurs. Il en va de la sécurité de tous.
— Mais si c’était vrai ? insista le garçon.
— Eh bien si cela était vrai, nous connaîtrions un nouveau cycle merveilleux et la nature n’en serait que plus belle.
— Alors nous devri…
— Mais dans le cas contraire, précisa le Maître des cloches, la colère des Dieux serait redoutable !
— Plus redoutable qu’une nuit de cinq cents jours ?
— Plus redoutable que tout ce qu’Oryn a pu connaître depuis sa création. »
De retour, non sans mal, dans sa chambre, à la taverne d’Elsie, Tobin s’allongea, ferma les yeux et se laissa porter jusqu’au royaume des songes. Irylia, lentement, s’endormit. Un voile de silence recouvrit la cité, sous les cieux étoilés du cerf herbacé. Non loin de là, au sommet d’une des plus hautes collines de la vallée des Dunes, adossé au mégalithe du Serpent Azuréen, souriait un vieil homme encapuchonné. Un sourire à s’en déformer la mâchoire, presque inhumain.
« Dormez bien, jeune seigneur, grinça-t-il entre ses dents cérulées, puisse la nuit vous être bonne conseillère… »