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Chapitre 16 : Au gré des vents contraires

Chapitre 16 : Au gré des vents contraires

Veröffentlicht am 2, Nov., 2024 Aktualisiert am 12, Nov., 2024 Biography
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Chapitre 16 : Au gré des vents contraires

À chaque fois que le sort me joue un mauvais tour, que le sol se dérobe sous mes pieds, ou que je perds une bataille, je m’effondre l’espace de quelques heures. Tout devient sombre, lourd, épais. Je ressasse les phrases, analyse les mimiques comme les silences, déconstruis tout ce qui s’est passé, pierre après pierre, rejoue les scènes au ralenti, passe en revue mes fautes, envisage ce que j’aurais pu faire différemment. Puis, à bout de force, je finis par m’endormir dessus et étouffe les remords sous l’oreiller. Je refuse de devenir cette femme aigrie qui s’accroche à la rancœur et cherche des réponses sans parvenir à les trouver. Parce que je pense que c’est, précisément, ce que William attend. J’ai le sentiment qu’en refusant de lever le voile ultime, il espère garder une partie de moi captive, en suspens, et je refuse de lui laisser la moindre miette de ce plaisir salace. Ma vie reprend donc le cours de sa partition, sous l’impulsion d’un autre métronome, je tourne la page, progressivement. Et tâche de me raisonner, de me concentrer sur la suite, que je rêve en couleurs pastel. Une perpétuelle funambule qui navigue en permanence entre deux planètes, deux univers parallèles mais diamétralement différents. La semaine, je suis une maman solo, qui travaille, engagée dans une relation à distance et qui galère un peu. Un week-end sur deux, je suis amoureuse, heureuse, je flotte sur un nuage, cotonneux, sensuel, tendre et charnel. Et puis le lundi suivant, le quotidien m’ampute d’une part de cet éphémère bonheur qui s’envole dans un des derniers TGV, direction Paris.  

 Quand Emmanuel arrive le samedi, nous nous immergeons dans une bulle rien qu’à nous. Comme pour rattraper le temps, comme pour compenser le manque des jours passés comme celui des jours à venir et vivre en apesanteur. J’évite les horloges, maudis le temps qui file quand je voudrais le suspendre, m’attache de plus en plus. Nous vivons collés-serrés jusqu’au lundi matin, quand le cœur plombé, le corps courbaturé, je pars travailler, priant les heures d’accélérer leur cadence pour que je puisse le retrouver et savourer encore un peu de sa présence dont le temps est déjà compté. Avant qu’il ne reparte dans une vie que je ne connais pas et dont je redoute les sirènes. En ces minutes grises, mon plexus se comprime, immanquablement. Je le regarde s’éloigner par la fenêtre jusqu’à perdre sa silhouette, tâche de reprendre contenance et retourne auprès de Fleur en troquant la tristesse en tendresse.  

Les mois passent, les relations avec William sont glaciales. Je crois qu’il ne digère pas les dommages et intérêts mensuels qu’il doit me payer. Ou alors c’est peut-être parce que Fleur lui parle d’Emmanuel ; je n’ai aucun problème avec ça et je ne vois pas pourquoi je me cacherais. Quoiqu’il en soit, il refuse toujours de m’adresser la parole, exigeant que nos échanges se fassent exclusivement par claviers interposé. Lorsqu’il vient chercher la petite, il joue au roi du silence. Tout seul. Moi, je ne joue pas, je ne me suis jamais amusée avec lui, ce n’est pas aujourd’hui que ça va changer. Je le sens bouillir, je perçois son regard désapprobateur, presque méprisant sur moi. Il ne supporte pas que je puisse me sentir bien, ou que je sois mieux, sans lui. Je n’ai pas envie de me cacher, je n’ai aucune raison de lui cacher, je ne lui dois plus rien et surtout, il est muselé. Il sait très bien qu’il ne peut pas prendre le risque de jouer à ses petits jeux pervers de stalker démasqué sans répondre de ses actes, autrement plus méchamment, qu’avec des séances de papotes obligatoires sur un divan moelleux. Parfois, quelques petites remarques acerbes, presque chuchotées, brisent le silence. Sur mes tenues, mon maquillage, une phrase de la petite, reprise hors contexte sur “Son Manu”. Quand sa flèche empoisonnée me vise directement, je souris de toutes mes dents pour bien lui faire comprendre que je me fiche totalement de ce qu’il peut bien penser, quitte à surjouer pour le piquer au sang. Quand ça concerne Fleur, j’essaie de lui expliquer que personne ne le remplacera, mais que j’ai le droit de refaire ma vie. Un peu sur tous les tons, je dois dire... 

Au bureau, c’est toujours un peu compliqué avec Dorian. Je vois bien qu’il a du mal à se remettre de notre séparation. Et qu’il observe ce que je fais, quand je pianote des heures durant sur mon téléphone, en conversation avec Emmanuel, par exemple. Il tend l’oreille quand je discute avec Nolwenn, entonne à tue-tête les chansons que nous fredonnions ensemble, me toise, cherche une réaction, à la manière d’un enfant que l’on aurait mis au coin. Au début, j’essaie d’être bienveillante et compréhensive, mais je dois bien avouer que sa présence m’agresse. Je savais que ce n’était pas une bonne idée, bon sang ! Sans compter, la plupart de mes copines qui se méfient d’Emmanuel et m’exhortent, sans relâche, à la prudence : 

— Non, mais Ju, tu ne le connais pas ce type ! Ok, c’était ton banquier, mais tu sais quoi de sa vie ? Si ça se trouve, il est marié et il te ment ? T’es peut-être sa maîtresse, cachée dans l’ombre ? Tu devrais vraiment faire attention… 

Je comprends que mes “proches” puissent s’inquiéter mais en même temps, je ne crois pas vraiment les avoir beaucoup vus se précipiter au portillon quand j’avais l’impression d’apprendre la brasse coulée. C’est vrai que j’avais délibérément mis de la distance avec tous ceux et celles qui de près ou de loin avaient fait partie de la liste de mes suspects quand je cherchais à découvrir l’identité du Stalker. Et ils étaient nombreux. Mais quand quelqu’un est au bord du précipice, ça se voit sous le maquillage, non ? Alors que paradoxalement, celles qui sont toujours restées au plus près de moi quand je flirtais avec l'abîme, ne se permettaient pas de jugement à l’emporte-pièce. Nolwenn et Johana, notamment, me soutenaient chacune à leur manière et semblaient prendre la mesure de l’importance qu’Emmanuel revêtait à mes yeux. De l’autre côté de la Seine, je sais que lui aussi subissait le même scepticisme amusé de la part de sa famille, de ses amis et de ses collègues. Nous étions fondamentalement opposés, mais c’est peut-être précisément ça qui nous a attirés l’un vers l’autre. Je crois qu’il avait ce qui me faisait défaut et réciproquement. Lui était posé, dans le contrôle, pragmatique. Il avait eu une vie assez préservée et entretenait des relations qui m’apparaissaient alors comme idylliques avec ses parents. C’était le genre de familles qui se rassemblent à Noël autour d’immenses tablées, un feu dans la cheminée, le genre à s’appeler tous les deux jours simplement pour prendre des nouvelles, sans reproches, sans pression, sans culpabilisation. Moi, j’étais l’écorchée, débrouillarde, un peu grande gueule, une femme capable de déclamer Racine sans trembler, doublée d’une gamine qui jure comme un charretier et qui s’en amuse, une douce maman avec des griffes aiguisées et un passé compliqué. Je pense que je faisais souffler un léger vent de folie dans sa vie un peu trop lisse, peut-être même que je l’encanaillais, avec toutes mes aspérités qui sait ?  

Progressivement, nous apprenons à jongler avec les planètes, à faire chacun de la place sur les étagères et dans les placards pour accueillir l’absence de l’autre, à griffonner des mots d’amour, que l’on cache un peu partout, pour se réchauffer lorsque le manque devient trop pesant. Suspendue à un fil, la tête souvent ailleurs, je ne suis jamais tout à fait ici et maintenant. Quand ma fille est chez son père, une partie de mon esprit est captivée par mon portable, en surveillance constante. Je refuse les week-ends loin de Rennes, au cas où les choses tourneraient mal chez William. Pas d’escapade sans un réseau téléphonique à toute épreuve, c’est la règle.

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