Chapitre 2
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Chapitre 2
Le surlendemain, au QG de BrainDrive France à Paris, Vincent Péric a fait réunir tout le staff dans la grande salle de conférence vitrée, au fond de laquelle trône le logo BrainDrive : le « B » qui forme un visage de profil, avec un cerveau dans la boucle du haut.
Après quelques blagues sur l’intervention des militants anti-BrainDrive, le candidat en vient au fait ; le planning n’attend pas. Tout le monde est impatient de connaître son nouveau successeur, même si quelqu’un, dans la grande salle en verre, est clairement pressenti pour le poste.
— … Comme vous l’avez compris, je vais devoir quitter mes fonctions, mais je reste proche de vous. Vous n’allez pas vous débarrasser de moi aussi facilement !
Un ricanement collectif résonne.
— Je ne vais pas vous faire attendre plus longtemps, vous connaissez mon amour pour les longs discours. Je souhaite donc nommer une personne dont l’engagement et la fidélité n’ont d’égal que le talent…
Des têtes se tournent sans hésitation vers un homme svelte dans la fin de la trentaine, dont les élégantes lunettes de vue surplombent des yeux clairs sublimés d’un épicanthus. Des yeux qui se plissent à mesure qu’un sourire se dessine sur son beau visage.
— … Chère équipe, chers amis, je nomme en tant que nouveau Président Directeur Général de BrainDrive Inc. : Valérian Nguyen.
Les jambes de Valérian s’animent machinalement. Étourdi, il fend l’assemblée en liesse, secoué par des mains qui l’empoignent et des bras qui l’étreignent trop fort, sous des félicitations et des applaudissements qui ne sont plus que de sourdes détonations, l’espace d’un instant. Il reprend ses esprits en rejoignant Vincent sur l’estrade. Sa main fébrile attrape celle de son modèle qui l’adoube, puis le tire vers lui et l’enlace comme un père fier de son fils, au milieu des flashs qui viennent scintiller sur eux. Le rêve du jeune et nouveau PDG est devenu réalité.
Le planning n’attend pas. Le tout nouveau PDG et Vincent rejoignent le directeur technique qui a une nouvelle de la plus grande importance à leur annoncer.
Les sourires et les félicitations fleurissent au passage de Valérian dans le grand open space lumineux, rythmé de néons encastrés, de boiseries et de briques rouges. Tout en marchant, il adresse quelques signes de tête polis aux regards pleins d’attentes et d’espoir qui placent en lui une lourde responsabilité ; comme une compression dans sa poitrine.
Chez BrainDrive, l’environnement de travail est conçu pour que les employés soient détendus et heureux : il y a quelques îlots de bureaux, mais surtout de larges poufs, des tables hautes et sièges-balançoires, des fauteuils suspendus, un parc animalier et une crèche. Dans celle-ci, une petite tête blonde court maladroitement en direction de Vincent, les bras tendus, les yeux étincelant d’amour. Vincent profite de son passage pour entrer dans l’espace vitré et insonorisé, et porter son fils qui rit aux éclats, sous le regard attendri des puéricultrices et des employés.
Une fois installés tous les quatre dans l’un des cubes acoustiques disposés çà et là dans le vaste espace cosy, le directeur technique, par un frottement de la main sur son bandeau BrainBand, déporte l’image formée dans sa tête sur l’écran fantôme, une grande plaque de verre au fond de la petite salle insonorisée. D’un geste, Valérian active le floutage des surfaces vitrées, les abritant des regards indiscrets, en ne manquant pas de s’assurer de l’œil validateur de son mentor, qui stimule son fils assis sur la table en lui faisant des grimaces.
Ils se voient tous deux présenter la nouvelle fonctionnalité inestimable tout juste livrée et testée par l’équipe technique. Après de longues explications sinueuses dans le jargon étanche qu’aiment employer les techniciens, entrecoupées par les babillages du fils de Vincent, le candidat intervient :
— Donc si je résume : on peut enfin cibler les injections ?
— Oui ! répond le directeur technique. Mais les cibler uniquement vers un circuit d’activité neuronale fort et identifiable : une peur très forte… une phobie, en fin de compte.
— Une phobie ? ! répète Vincent à son fils, en écarquillant les yeux pour le faire rire.
— Et les effets secondaires ? s’inquiète Valérian.
— Il y a des risques d’infection… confesse le directeur technique avec embarras.
— D’infection ? répète Valérian.
Le technicien approuve, l’air grave.
— C’est-à-dire, « infection » ? le sonde Valérian.
— Tous les simulateurs de subconscients testés on réagit de la même manière : à moyen terme, ils rejettent les injections… Comme quand on rejette un implant non compatible… J’sais pas… Il faudrait voir ça avec la neuropsy…
Vincent adresse un regard éloquent à son poulain. Ce dernier se souvient de tout ce qu’il a appris. Il sait ce qu’il faut faire ; il vient de prendre les commandes, il faut garder le tempo, il faut acter sa présidence, il faut prendre des décisions sans attendre.
— On lance quand même, tranche Valérian.
Vincent, impressionné, ne cache pas sa fierté. Le directeur technique reste perplexe un instant, étonné, mais se réjouit presque de passer à la vitesse supérieure.
— On lance en prod, tu es sûr ? vérifie-t-il. On n’a pas encore testé sur de vrais subconscients…
— Go, confirme Valérian.
— Même liste ?
— Oui.
— Rajoute Paula Serreri et Leonie Jacobsson, complète Vincent.
En sortant du cube, le responsable sécurité, Trévon, fonce sur l’ex-PDG et son successeur. Son visage ouvert annonce une bonne nouvelle :
— Excusez-moi messieurs, on a retrouvé les trois hackers. Sales braindeads !
« Braindead » est l’insulte suprême à la mode, qui vient tout droit des États-Unis, pour désigner les rares personnes qui refusent d’utiliser le système BrainDrive. La traduction littérale : « cerveau mort » est éloquente quant à l’image que la société a de ces individus arriérés et réactionnaires ; ces moldus.
— Ils sont enfermés en bas, précise Trévon.