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La circulation du désir : Récit 1996 - 1er épisode-2ème et 15ème Séquence

La circulation du désir : Récit 1996 - 1er épisode-2ème et 15ème Séquence

Pubblicato 25 feb 2020 Aggiornato 25 feb 2020 Cultura
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La circulation du désir : Récit 1996 - 1er épisode-2ème et 15ème Séquence

a coeur ouvert

A coeur ouvert - gouache sur papier 50x70 - 1990

LA CIRCULATION DU DESIR : RECIT 1996

2ème séquence :

Une première fois

qui aurait été occultée

autrefois mais qu'il aurait projetée

tant et tant de fois

sur cet écran aveuglant

qu'il aimait à chaque fois

contempler afin de distinguer

dans ces ombres fugaces

qui ne tardaient pas à disparaître

un semblant de vie, un quelconque paraître.

Enfin ce temps qui passe.

Et qui plus tard nous tasse.

3ème séquence :

 

Ce tableau qu'il avait peint. Sur lequel, il s'était échiné des jours durant à exprimer une certaine palpitation. Il avait voulu la souffrance. Dans cette chair bleue, il avait creusé des ridules vives. Le sang épais de l'amour. Le couteau avait tracé sur l'esquisse des traits vivaces. A côté, des teintes décolorées offraient un contraste surprenant avec les tons plus vigoureux qui cernaient le corps. On eut pu croire qu'il avait peint l'intérieur de la grotte avec un noir profond. En fait, il n'en était rien. Du brun, du vermillon, du bleu cyan, du rose tyrien, un jaune citron, du bleu outremer, un rouge carmin, tout cela délayé dans une terre d'ombre brûlée.

Si l'on s'approchait davantage, on reconnaissait dans cet emmêlement chaque éclat coloré. Et tout cela retourné par la pointe du pinceau. Et puis des traits noirs, filiformes, fixaient les contours du corps, l'arc de la paupière et l'ourlet empesé de la bouche offerte.

Ce tableau sur lequel son âme avait déteint. Pour lequel il avait couché toutes ses obsessions. Ce qu'il décrivait alors, c'était son désarroi. Combien de doutes allait-il une fois de plus affronter ? Pour ce tableau, sur lequel il avait déposé toute sa misère d'être, son âme s'était incrustée sur la toile.

Un tableau qui s'était perdu... qui avait suivi une autre route, un autre chemin. Et puis... qui s'était laissé prendre... Il recouvrait son mur. L'appartement de Yaël.

4ème séquence :

 

Elle s'était défaite de lui. Ne l'avait plus retrouvé. Quelque chose était perdue. Hors d'atteinte à tout jamais, pensait-elle. Elle se trompait.

Benoît avait été l'homme de son rêve. Ou plutôt celui qu'elle avait rêvé, façonné et, croyait-elle, créé de toutes pièces. Elle aussi avait déjà vécu pareille rencontre. Mais, contrairement à Benoît, elle ne pensait pas l'avoir jouée... Non, elle l'avait écrite puis effacée. Enfin, elle l'avait arrangée, peaufinée, rendue plus spontanée, plus libre, plus violente. Chaque mot avait été soupesé. Elle avait extrait du fouillis de sa pensée les phrases les plus originales et les meilleures tournures pour lui offrir son style propre. Et lorsque le résultat lui convint, elle relut chaque paragraphe et retoucha de-ci de-là quelques passages. Il fallait que ça coule. Un rythme plus enlevé. Et puis le mystère s'estompait. Alors, elle trancha dans le nerf du récit. Lacéra, effrita, disloqua tout. Ne demeurait plus qu'un regard et un corps blanc. Une robe noire. Une bouche luisante. Des fragments d'instants. Des mots rapiécés, d'autres disloqués. Et, avec ce matériau, elle réécrivit l'ensemble. Chaque mot trouvait de nouveaux espaces où se poser. Il trouvait enfin sa place.

5ème séquence :

 

La rencontre avait été avortée une première fois. C'était comme si la phrase dernière n'avait pas été assez convaincante. Il manquait quelque chose. Elle en avait peut-être trop retirée. Trop de coupures. Elle ne s'était pas départie de son être, n'y avait pas entièrement cru. Trop de scepticisme. Point la foi. Elle n'y avait tout simplement rien mis d'elle. Un texte froid. Impersonnel.

Elle recommença une fois encore. Cette fois, elle prit tout son temps. Il n'était plus indispensable de se presser. Le temps allait son chemin. Elle, elle vaquait à ses occupations et le laissait de côté : le texte... l'homme... son corps... sa voix - celle qu'elle avait imaginée - ... ces détails incroyables... le temps du récit... son unité... Le lieu, l'espace où ça se passait.

Le temps défilait et elle vieillissait de quelques jours. Elle se sentait être la proie d'un soupçon. Quelque chose de vague qui l'attirait encore vers ces régions terribles qu'elle n'aimait plus explorer.

Combien de portes à ouvrir encore avant de retrouver, vraiment, l'incroyable nudité de son être ?

Elle savait bien que l'écriture n'était pas forcément l'enjeu d'une souffrance qu'elle aimait, autre part, explorer.

Elle expérimentait plutôt. Ainsi, elle se cherchait. Tentait de retrouver d'autres voies d'accès, non plus ces escaliers en colimaçon qui serpentaient dans son esprit à n'en plus finir. Coûte que coûte, il lui fallait un corps. Un lieu où elle se serait blottie, abritée, creusée, terrée, tapie, recroquevillée. Un lieu et un espace où elle habiterait enfin. Un corps assez grand pour la contenir. Et, pourtant, point trop vaste. Elle n'aimait guère les immensités ni les déserts où sa solitude - elle le savait- lui rejaillirait immanquablement à la figure. Car elle fuyait surtout cela : cette solitude blafarde qui vous suit et vous colle à la peau, sans façon, sans cesse et qui s'introduit en vous et vous amenuise, vous rendant pareil à une peau de chagrin.

6ème séquence :

 

- Un homme assis dans un couloir. Ca c'est Duras. Elle est morte. "Quand j'écris je ne meurs pas. Qui mourrait quand j'écris ? Il faudrait que je ne passe plus mes nuits à boire, que je me couche tôt pour pouvoir vous écrire des lettres très longues afin de ne pas mourir."*

Elle avait commencé à relire "Les yeux verts" de Duras et avait songé à son texte. A la rencontre. Elle se sentait profondément durassienne Yaël, alors, elle relut de nouveau ses mots ; les siens, non ceux de Marguerite.

Une femme était morte en elle.

Elle écrivait cette rencontre comme dans une pièce de Duras, pour que les mots les plus anodins soient semblables à ceux qui contiennent tous ces souffles qui circulent, tentant de se frayer un chemin parmi toutes ces ronces. Car l'espace qui place ici ses silences est si broussailleux qu'il faudrait une serpe pour en venir à bout. Tailler dans le vif, élaguer, tronçonner, lacérer, trancher...

 7ème séquence :

 

C'est ce qu'elle fabriquait. Elle tronçonnait son texte comme s'il s'agissait de sa vie. Elle segmentait chaque paragraphe, formant ici et là quelques séquences pour la trame qu'elle souhaitait obtenir. Yaël n'était disponible désormais que pour ces phrases que, quotidiennement, elle sortait du chapeau de son esprit.

C'était devenu sa respiration. Comme un rituel. Chaque matin. Une phrase. Une seule. Et ainsi de suite.

Ce matin-là, elle écrivait. L'homme avancerait dans la rue puis se mettrait à courir, ses jambes se déroberaient presque.

* La lettre. Les yeux verts. Cahier du cinéma. Marguerite DURAS.

8ème séquence :

 

La petite musique de son esprit. S'il ne s'agissait que de cela : retrouver la musique. La rencontre aurait été... et non cette présence-absence insupportable pour elle, pour ses sens, son cœur.

Longtemps, elle s'était laissé dériver mais cela suffisait aujourd'hui. Elle ne voulait plus de ces simulacres facétieux.

Pourquoi endosser une fois encore un autre masque ? Se montrer telle quelle. Ne plus dissimuler ses rides. Un visage de trente ans, c'est déjà la marque d'une décomposition certaine. On ne peut dire que l'on soit sûr de cela. Et pourtant... même si cela demeure invisible, on le sent en soi. Il y a une particule derrière la peau qui se flétrit de jour en jour. L'enveloppe n'est rien. Mais l'âme ?

9ème séquence :

 

Elle avait posé autour d'elle tous ses miroirs. Yaël se dévisageait en chacun d'eux. Elle contemplait le blanc pâle, quasi translucide de sa peau mêlée aux nuages cotonneux et la trame d'azur effilochée par la masse blanche faisait comme un couperet franc qui découpait sa chevelure en l'empêchant d'irradier tout à fait.

Elle tournait et virevoltait devant chacune de ses psychés en mimant une danse où chaque pas se trouvait être lourd de sens. Elle se laissait surprendre par ces signes que son corps habituellement impénétrable acceptait de découvrir. Quelque chose de lascif la poussait à créer dans son corps un jeu cruel. Elle se trouvait dépareillée. Elle aurait désiré que des mains rudes se plaquent sur sa nuque et qu'elles l'écrasent, qu'elles s'y enfoncent. Elle aurait voulu sentir la paume rêche, sèche. Que les doigts puis les ongles brisent la ligne de son corps. Que l'on dessine sur sa peau des traînées sanglantes, comme des sortes d'arabesques fébriles, signes vifs d'où sa vie s'épancherait. Et puis, il y aurait eu un gobelet d'argent où le sang se serait déposé, qu'elle aurait bu sans vraiment s'en trouver rassasiée.

Le sang coulait déjà. Ce qui lui permettait de tracer sur son manuscrit des lettres écarlates. Le papier buvait avidement le liquide. Ses ongles pénétraient la chair toujours plus lacérée et l'entaillaient profondément. Etre une plaie à vif. Non plus se décomposer mais se vider.

10ème séquence :

 

Le ciel s'était effacé de son champ de vision. Volets fermés. Porte-fenêtre entrouverte. Une profondeur incroyable. Etait-ce le regard ? Elle semblait être devenue aveugle. Elle ne voyait plus ou alors au fond d'elle-même. Elle scrutait méthodiquement ses entrailles. Comment cela circulait-il ? Dans quel ordre ? Avec quelle vigueur ? Certes, le sang suivait le cours des artères. Bien sûr, le cœur pompait. Mais quelle angoisse soutenait-il ?

Sur quel arc porter la flèche ? En quelle âme se ficherait-elle ? Tirerait-elle un carreau dans la cible choisie ? Avec quelle intensité ? Qu'elle serait sa course, son chemin et son envol ?

Il existerait tout un cheminement. Comme la pensée chemine et parcourt les neurones avant d'éclater dans le cerveau, elle suivrait lentement un espace puis se plaquerait soudainement dans le crâne, ici où la pupille s'arrondit... ou plutôt, non, légèrement au-dessus. Dès lors, une perforation infime apparaîtrait. Un petit trou. Un passage étroit pareil à une tache d'encre dont les bords ne s'élargiraient point.

Et puis Yaël suivrait la voix inconnue. L'écouterait encore. Il y aurait, posée et à peine indécise, la marque de la main sur le front d'albâtre. Et brusquement un éclat bruyant, intempestif et iconoclaste surgirait. Elle se dériderait. Le sourire élèverait les commissures de sa bouche tout en plissant les fossettes tendres.

Peu de temps se serait écoulé entre cet instant et le suivant. Ce ne serait qu'une fraction irréductible où l'image de son corps s'effacerait progressivement.

11ème séquence :

 

Les traces du récit sont installées. Celui-ci peut s'enorgueillir de posséder une présence incomparable. Il a tracé un trait long et vigoureux sur sa peau. Pourtant, c'est une feuille qui fléchit sous les coups de boutoir de la plume. Serait-elle un livre qu'on pénétrerait ?

12ème séquence :

 

Sa main s'était ouverte. Yaël le contemplait, le scrutait avec une curiosité vorace. Des paillettes dans les yeux. Benoît paraissait s'être rétracté sur lui-même. Il eut voulu, à cet instant, disparaître de sa vue. Il était contracté, infiniment nerveux. La scène qu'il avait visionnée tant de fois dans son crâne ne présentait plus la même configuration. Sur sa trame, quelques accrocs avaient effiloché la toile. Il ne rejouait rien, non, c'était beaucoup plus retors que cela ; il existait ici, en cette rencontre, une création subtile dont il se trouvait être à la fois le témoin et l'acteur. Cela dépassait tout ce qu'il avait alors imaginé. Rien de comparable. Une magie insurpassable l'enveloppait. Il avait la sensation nette de vivre un instant exceptionnel qui ne se renouvellerait pas de sitôt. Mais comment faire ? Comment être ? Etait-ce cela qu'on lui demandait ? Etre un personnage ?

Ce n'était certainement pas ce qu'elle attendait. Il le sentait à son regard. Une ombre légère dévoilait les traits précieux de son visage. Elle devait bien attendre quelque chose.

Il se trouvait ridicule. Et le temps, comme pour lui infliger d'autres sévices, s'étirait démesurément. Il n'avait pourtant qu'un geste à faire...

La main nue de Yaël luisait étrangement. Elle paraissait se vêtir de cet éclat pour mieux l'envoûter. Et puis, il s'agissait de se démarquer des ténèbres ambiantes. L'assombrissement du monde.

Il prit sa main offerte et la serra voluptueusement. Elle tressaillit. Des ondes incroyablement denses s'emparèrent de tout son épiderme. Un froid particulier envahit ses membres alors que son front fiévreux laissait s'épandre des gouttelettes furieuses jusqu'à ses tempes, prêtes à noyer les yeux tout en s'épanchant délicatement le long de l'aile du nez pour chuter alors, lorsque les lèvres seront atteintes, dans ce vide fou.

Un son tendre. La sueur s'égouttant sur le trottoir créait ici une sonorité mate, fluide, incomparable.

Elle n'avait pas bougé. Les pieds ne s'étaient pas arrachés de leur socle. Or, il était nécessaire d'agripper et de desceller ce corps pour l'emporter. Il devait parvenir à confondre son âme avec la sienne.

Il eut fallu tenir un autre langage. D'autres mots étaient souhaitables. Des vocables qui auraient des affinités avec la puissance du silence. Ainsi, ce qu'il convenait de déjeter hors de la gorge, c'était des sons à la fois vibrants et étouffés mais point déclamatoires. Aucune exclamation. Surtout, pas de distorsion. Il ne faudrait pas coasser. Etre doux. Etre simple. Etre soi.

13ème séquence :

 

Avec Yaël dans ses bras, il s'était retourné une dernière fois vers l'espace où sa vie avait enfin pris toute son ampleur. Il emmenait ce souvenir dans les replis de son cerveau.

Deux aveugles. Vision liée, cousue. Un autre regard. Ils avançaient tous les deux liés, comme s'ils percevaient d'avance le but à atteindre. Bien des mots furent échangés alors. Mais aucun ne pouvait être retranscrit sur une quelconque portée. Un langage d'aveugle fait de signes impénétrables. Un langage amoureux qu'eux seuls pouvaient défaire, rendre intelligible. C'est en eux que cela se jouait.

14ème séquence :

 

Un cœur monstre avait retenti ou plutôt rugi. De-ci de-là, des scories de voix persistaient, s'agrippaient avec une démesure extrême autour des barreaux d'une fenêtre. Deux mains blanches s'y maintenaient. On eut dit des serpents pâles et ceux-ci s'entrechoquaient, mêlant leur teinte, créant sur le noir des barreaux comme des variations inédites.

Des ombres se balançaient. Et tout cela se mouvait. Une mesure pendulaire. De bas en haut.

On ne saurait définir ces deux présences qui existaient dans cette pièce. C'était comme si, se jetant d'une histoire, elles avaient décidé de s'exiler et de supplanter,  sur le terrain de l'écriture, le cerveau qui les avait conçues. Il était question de marge. Ces deux ombres s'étaient mises en marge, d'elles-mêmes renvoyées à l'annexe.

Il s'agissait de la remise en question de chaque mot. Etait-ce cela que Yaël avait organisé, façonné ?

15ème séquence :

 

Il était bien question des mots. Quelque chose de cristallin s'était interposée. En lieu et place d'une histoire définie, une autre s'était imposée. C'est qu'elle n'avait plus rien relu. Et les mots, le temps faisant son œuvre, s'étaient délités. D'eux-mêmes, creusant au-delà des marges leur chemin, ils avaient transité vers d'autres sommets, d'autres monts, d'autres corps. Ainsi, les mains n'appartenaient plus au même corps.

(A suivre).

Début du récit avec le 1er épisode suivre ce lien :

https://panodyssey.com/fr/article/culture/la-circulation-du-desir-recit-1996-1er-episode-1ere-sequence-sfep6wvbgd52

 

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