Ecosystémique du temps
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Ecosystémique du temps
Le temps réel. C’est le mot-clé ces dernières années dans le monde du logiciel. Peut-être aussi pour notre monde ou ce que l’on en attend.
"Les systèmes informatiques temps réel1 se différencient des autres systèmes informatiques par la prise en compte de contraintes temporelles dont le respect est aussi important que l'exactitude du résultat", autrement dit le système ne doit pas simplement délivrer des résultats exacts, il doit les délivrer dans des délais imposés.
Imaginons que l’on conçoive un système capable de comparer des ensembles définis à tout moment. Cet algorithme aurait ainsi pour objet d’analyser, sur demande, selon les critères définissant ces pairs, un ensemble dit « systémique » que l’on pourrait observer, comparer selon certains axes ou dimensions. Le résultat de l’opération serait obtenu via un ou des calculs dit exécutés « en temps réel ». C’est-à-dire sur cet ensemble qui aura peut-être changé à peine le calcul exécuté. En fait, c’est un peu comme si l’on essayait de prendre en photo un essaim de chauve-souris qui s’envolent de façon désordonnée à plus de cinquante kilomètres par heure. L’essaim se sera dispersé avant même que l’image ne soit imprimée sur les pixels de l’appareil photo, et la nouvelle photo n’aura, pour ainsi dire, rien à voir avec l’ancienne. Mais quel intérêt alors ?
Si cette conception d’un système non seulement en mouvement mais en redéfinition perpétuelle est difficile à intégrer pour certains, elle est pourtant inspirée de la nature et de nous-mêmes. Ne sommes-nous pas, au fond comme sur la forme, en perpétuel changement puisqu’en perpétuelle interaction avec notre environnement ?
Mais comment auditer un système qui s’exécute en permanence ?
Mon expérience m’amène à me rendre compte qu’un tel outil est difficile à concevoir pour certains, malgré toute son utilité. En effet, comment maîtriser la machine si l’on ne peut l’arrêter ? Peut-on revenir en arrière pour vérifier si l’évènement que l’on a capturé est reproductible ? Le temps réel nourri en continu de données issues de la réalité n’est-il pas trop précieux pour être arrêté, même à but d’observations positives ? Il y a un réel aspect contributif et écosystémique dans de tels échanges. A l’image du web lorsqu’il a été initié. Il n’appartient à personne et ne peut être arrêté ni circonscrit.
Et comment émettre un diagnostic sur un patient en perpétuel changement d’état ?
Pourtant je constate que l’on s’échine de plus en plus à effectuer ce diagnostic afin d’évaluer la tendance et gérer le palliatif, et non l’état des lieux avec des objectifs curatifs. Le diagnostic posé ne peut donc être considéré comme une étiquette cette fois, mais plutôt comme une trace sur une toile blanche qui amènera peut-être à distinguer un jour un ensemble constitué par ces faisceaux d’évidences.
Cette logique peut nous sembler familière en pleine seconde vague du COVID. Nous l’attendions cette vague. Tellement que le clapotis sur le rivage nous laissait déjà présager un tsunami.
La tendance épidémique est à la hausse. Tout est relatif. La France se trouve « moyenne » dans sa gestion de la crise d’un point de vue sanitaire comme économique.
Nous serons tous "cas contact" un jour.
Pendant que certains poursuivent cette course à l’auto-diagnostic afin de se prémunir de tomber malade mais surtout, d’être confiné, les statistiques s’accumulent et les indicateurs de performance de nos outils de contrôle s’adaptent et ne permettent plus de suivre une quelconque ligne de base. On en arrive à se demander s’il y en a jamais eu une ?
Chercherait-on, avec les analyses, les calculs et le diagnostic en temps réel, à rattraper ce que notre cerveau lui-même a du mal à capturer, intégrer, au point que l’on préfère parfois vivre dans la réminiscence du passé plutôt que dans un présent auquel on a du mal à s’ajuster ?
Le temps réel, finalement, c’est délivrer un résultat exact, au temps souhaité. Si le temps souhaité est dépassé, on parle alors de système « à la demande ». N’est-ce pas finalement ce que l’on cherche chacun et que l’on a tant de mal à atteindre, en cette ère de l’éphémère et du virtuel capturé sur Instagram ? Être là vraiment, présent, en temps réel ou à la demande, en instantané et non en décalé ?
1 Jane W. S. Liu