

4 minutes pour comprendre “Chat Control” et ses dérives potentielles
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4 minutes pour comprendre “Chat Control” et ses dérives potentielles
“Chat Control” : entre protection des enfants et dérive autoritaire
Ylva Johansson, ancienne commissaire européenne, présentait en mai 2022 le projet “Chat Control” qui s’inscrit dans la continuité d’une mesure temporaire “Chat Control 1.0”.
Officiellement intitulé “Règlement visant à prévenir et combattre les abus sexuels sur enfants en ligne”.
L’objectif est de “créer un cadre légale permanent et obligatoire pour forcer les services de communication en ligne à détecter, signaler et retirer les contenus pédopornographique” (CSAM).
La commission européenne justifie l’adoption d’un cadre permanent et renforcé suite à plusieurs constats. En effet, de nombreux fournisseurs de communication (WhatsApp, Telegram, etc…) ne participent pas ou peu aux efforts volontaires, créant des “zones d’ombre”. Il faut savoir que l’Union Européenne dépend principalement de signalements provenant d’acteurs étrangers notamment des Etats-Unis qui engendre des retards voir de l’inefficacité dans le traitement des enquêtes.
Le texte vise officiellement à renforcer la lutte contre les abus sexuels sur les enfants en ligne à travers trois étapes :
- Détecter les contenus pédopornographique
- Signaler ces contenus aux autorités compétentes
- Retirer et bloquer leur diffusion
La création d’un Centre européen spécialisé (EU Centre on Child Sexual Abuse) est prévu afin de centraliser les signalements et coordonner la lutte.
Cette mesure imposerait aux fournisseurs de services de communication d’utiliser des technologies IA pour analyser automatiquement TOUS les messages, photos, et fichiers échangés. La méthode qui serait privilégiée serait le CSS (client-side scanning) qui consisterait à analyser les contenus directement sur les appareils des utilisateurs avant leur chiffrement.
Violations des libertés individuelle et atteinte fondamentale au principe de présomption d'innocence
Le projet “Chat Control” constitue une inversion dangereuse du principe fondamentale de la présomption d’innocence, comme l’explique la juriste Noémie Levain : “La surveillance doit rester l'exception, pas la règle. Sinon, on fragilise l’ensemble du système démocratique”.
Cette proposition/projet transforme chaque citoyen européen suspect potentiel et soumis à une surveillance permanente et automatisée.
Surveillance de masse et atteinte au secret des correspondances
La mise en place de “chat control” entraînerait la surveillance de 450 millions d’Européens, ce qui violerait plusieurs droits fondamentaux.
- l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE (respect de la vie privée)
- L’article 8 (protection des données personnelles)
- Le secret des correspondances
Le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) et le Comité européen de la protection des données (CEPB) indiquent dans un avis conjoint que “la proposition pourrait devenir la base d’un scanning généralisé et indiscriminé de facto du contenu de pratiquement tous les types de communications électroniques”.
Seuls certains privilégiés seront exemptés de cette surveillance, les communications professionnelles des élites, la police, le personnel militaire et les législateurs eux-mêmes.
Cette discrimination démontre que “il ne s'agit pas de protéger les enfants, mais de surveiller et contrôler les classes populaires”, une justice à deux vitesse vera alors le jour, où les communications du peuple seraient épiées, analysées systématiquement, tandis que celles des elites resteraient protégées.
Un tournant autoritaire déguisé
Ce projet représente bien plus qu’une simple mesure pour protéger les mineurs ( 81 % des agressions se situent dans le cadre intra-familial selon les statistiques de la Ciivise). Il constitue un tournant autoritaire majeur. Sous couvert de la protection de l’enfance une surveillance de masse serait instaurée et briserait les fondements technologiques de la vie privée.
En simissant dans les espaces de communication privé, “Chat Control” supprime ce que Arendt décrivait comme les espaces intermédiaires entre l’individu et l’Etat, ces lieux où s'élabore la démocratie.


Pascaln il y a 5 heures
Merci pour cette présentation certainement volontairement courte sur un sujet aussi profond qu'inquiétant. Mais elle met très bien en lumière toutes les potentielles dérives de contrôle et de surveillance qui germent tout autour de nous...
Xavior Meire il y a 5 heures
merci, en effet l'analyse est succinte volontairement, et est une introduction à une série de texte plus profonds sur les dérives législatives qui servent à contourner certains droits fondamentaux.