L'an zéro
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L'an zéro
L'enfant de la nuit, ou le Bugel-noz en Bretagne, est le gardien du troupeau, des chèvres, et des brebis égarées. Une sorte de berger, un petit peu loup-garou qui hulule comme une chouette sous les clairs de lune. Certains soirs, quand le toit qui recouvre nos augustes têtes, les astres qui guident, marins, troubadours, ou les paysans. Elles scintillent, ces étoiles, brillantes, jaune-citron et animent le sil du ciel éclairé par cette lumière, faite de constellations, de poussière, ou encore de météorites en fusion. Alors, le Bugel sort et effraie la population qui le voit pour la première fois. Pourquoi ? Son apparence, il a un long nez crochu, les pattes courtes, et le ventre rond, un lutin, quoi !
L'histoire que je vais raconter débute au XVII° siècle, Renan un gamin polymorphe, ou métamorphe, je ne sais plus exactement, venait d'embarquer. Il est de ma famille et c'est un être d'exception, mon arrière-arrière-arrière-grand-père vient de monter à bord d'un bateau de pirate, celui de Jean Amelin, une frégate volée au roi de France.
Quel culot ! Ce Capitaine n'est certainement pas de pacotille, et gare à ne pas croiser la route de son voilier.
Qui je suis ?
Cela n'a pas beaucoup d'importance, un témoin du recueil de récit de vie, un vieil homme maintenant, je vis dans un aber dans le bas du Léon, à proximité de la ville de Brest et des restes de son château. Un vrai château, pas un de carte. Je dis chapeau, il résiste à la guerre 39/45, et né Caste Lum sous l'épique ère Romaine ...
C'est beau le temps qui passe, et trépasse. Ce château de Brest, je l'aime quand encore parfois je me promène dans La Recouvrance et traverse le pont levant tel le soleil qui se lève à l'Ouest et se couche comme chacun le sait à l'Est de nos pensées modernes, lorsque l'on marche dessus on traverse un long cours d'eau douce, la Penfeld. Une gare maritime militaire, encore de nos jours...
Revenons aux moutons blancs de la mer, aux Caraïbes, arbres turquoise, végétation reine et la Nature encore sereine. Mon aïeul vit sur la frégate de son valeureux capitaine, le dit Jean Amelin né vers 1667 à Abbeville selon le livre que je lis et qui construit et conduit mon récit de vie de mes ancêtres, je suis juste comme un vent tourmenté, ce vendredi pas treize, à la recherche de mes racines, et de poésie exotique. Eh, oui !
Quand vous savez que votre famille est un brin originale, vous vous posez des questions, et une question est un point d'interrogation qui cherche une réponse. Donc, je disais que le Bugel-noz, Renan, est un sacré marin pas marrant du tout, un vilain pirate qui navigue comme jeune mousse sur "La Trompeuse" petit nom de cette frégate, qui est aussi un volatile, cet oiseau noir qui vole les proies, les poissons logés dans les becs de ses congénères qui, eux, savent pêcher !
Je conserve le livre chez moi et continue à lire son histoire, qui appartient à la grande Histoire de la flibuste et des filous de mon quartier. Mon sac, mes racines sont de Aber-Ildut, plus loin d' Ouessant, un rempart quelque part entre la mer d'Iroise et l'Atlantique nord qui vous pousse vent contraire, bien souvent, vers les Amériques...
Trêve de digressions, allons vers nos congénères qui génèrent bien des peines et des troubles dans des pays lointains, c'est à peine croyable qu'une poignée de gens sont déterminés à éliminer toute la paix maritime, si elle existe en pluie fine sur les côtes de ces nouveaux continents, comme ailleurs où passe l'être humain. Il est curieux de penser que chez cette espèce sauvage, l'humanité toute entière, elle se divise en deux, se scinde, certains humains aiment une notion non élémentaire, non alimentaire, mais essentielle pour bien respirer, ils aiment l'air et cherchent la paix !
L'autre, la guerre... Allez comprendre ou savoir pourquoi !
Moi, j'ai ma petite idée, poursuivons, je me tais. Pourtant, ma mémoire est bavarde, quelques peu confuse, je refuse l’hospitalité de l'hospice, et j'aime l'air salin, les marches, ainsi que me baigner dans de l'eau à moins de quinze degrés. Oublions cela, allez les enfants, go aux tropiques où ses troubadours, un petit peu lourds sévissent et sont de service !
Pas loin de la Jamaïque, le capitaine Jean Amelin terrorise les flottilles commerciales qui y naviguent dans cette mer noire de bleu, si belle. Sans vergogne, il écrase et pille des ports, des anses où font escales des confrères.
Aussi, selon un rescapé d'une attaque de pirate, ce gredin a décidé de voler, violer, et couler tous les bateaux, qui passent dans le secteur, qu'il considère comme le sien, tel que sa frégate "La Trompeuse" souvenez-vous volée au roi de France qu'il manie, lui et son équipage valeureux, en grande intelligence stratégique du combat naval, cherchant de l'or. Je le répète, ses pirates volent, convolent, puis veulent des trésors et s'enrichir ces gredins, des haut-perchés dans le règne du péché !
Et dire que ce Renan dans mon arbre généalogique est non seulement, petit, car c'est un Bugel-Noz, un lutin des forêts, un peu fou qui s'est fait embarquer sur le flux des flots que sont les veines de la Terre, notre très belle et luxuriante planète !
Pour compléter le tableau, des oiseaux vivaient sur les berges de l'île de Jamaïque.
Quelques aigrettes bien blanches jouaient à respirer de l'iode sur la plage, leurs sons, leurs voix, leurs cris ressemblaient à de la joie, à ses échassiers. Pas de chants de guerre ou de marins qui sortaient du gosier plein de vin, ces sots de pirates...
Cependant, ces guerriers, sont bien avant Karl Marx, les inventeurs du communisme, sur le navire après la bataille, le partage du butin se fait ainsi : selon l'importance de son grade, sa hauteur dans la hiérarchie sur le navire selon mes sources lus sur un moteur de recherche connu, « Le capitaine et le quartier-maître reçoivent chacun deux parts du butin ; le canonnier, le chirurgien et le maître d'équipage, une part et-demie, les autres officiers une part et un quart, les flibustiers, une part chacun ; le charpentier moins que le matelot vu qu'il ne participe pas à la bataille ; et une demi- part pour le mousse. Cependant cela peut varier selon les règles établies par le capitaine. »
Vous ai-je parlé du rescapé ? Ma mémoire flanche de plus en plus et parfois, je me désespère de m'égarer. Vous ai-je raconté l’histoire de cet homme vivant et mort de trouille qui a alerté, les rois des désirs de filouteries de Monsieur Amelin, lui et sa bande naviguaient dans la Caribbean Sea comme disent les anglosaxons pas très loin de leur anse de refuge de Montego Bay, la partie nord-ouest de l'île de la Jamaïque, un lieu d'accueil, pas une marina royale, comme on peut avoir à Brest actuellement.
Cette anse est "tropicalement" belle, en plus d'offrir un bon mouillage à l'abri des vents forts dominants de ce secteur et de cette époque, ce sont des bananiers, des cocotiers, et des terres cultivées par les indigènes qui y habitent, un paradis, ce paradigme, hors du temps.
Au XVIIe siècle de notre ère, les vents étaient moins forts que sous notre dérèglement climatique. Cependant, les guerres marines, les découvertes de terres et les naufrages étaient légion, et ce jour-là, les hommes à bord de la frégate "La Trompeuse" avaient faim et soif de butins et de sang quand l'ombre d'un vaisseau marchand, fort de trente-six canons, avec à son bord le capitaine Georges Johnson venu en découdre, payé par d'autres marchands anglais las d'être coulés, ils avaient armé ce fort navire de guerre capable de défendre leurs peaux...
Eux armaient dans la baie de Jacmel. "La Trompeuse", forte de, pardonnez-moi du peu, douze canons supplémentaires et ayant en plus un lot de huit femmes du coin, le lupanar vit passer le vaisseau et restèrent à l'abri des canons aux anglais, le vin coulait à flot et leur frégate aussi resta à flot, les pirates riaient de ce coup du sort.
C'est ainsi que le "Cadiz Marchant" un petit peu emprunté par le Jamaïca Channel car c'est gros un vaisseau et peu habile aux diverses manoeuvres, le capitaine accompagné d'un bon d'instructions sévères récupérer le navire "la trompeuse" cette frégate est et restera la propriété du roi de France, et Lynch veut la paix avec les Français bien que ce soit tous des pirates, selon lui. Le vaisseau pâtot bateau navigue dans ses eaux translucides et peu lucides, repartent de la Jamaïque le regard d'acier acide, car, ils n'ont pas trouvé le pirate Amelin et sa bande d'escrocs aux crocs de vils ours des mers du Sud. Leur projet aux hommes de ce capitaine aussi rude que les rides de l'eau un jour de grand vent, voulaient tout simplement voler toutes les cargaisons des voiliers marchands et si possible de l'or, de l'argent, sur cette côte.
Renan, mon aïeul n'est pas un vilain garnement, un simple aventurier, il tente une expérience : sortir de la forêt de Huelgoat, ou les lutins vivent trop serrés, et lui justement, il aime chanter, jouer, boire et manger, or il fait peur à la population qui parfois pour un baiser au claire de lune, osent venir se câliner au coeur, au creux des arbres. Des hêtres, des chênes, pas de pelouses dunaires, ni de roselières, ni de marais salants, ni de landes sèches ou humides, ni de haies et talus, or on y trouve de la magie, une roche pas cinéphile, une roche qui tremble sous les notes de flûtes que jouent les habitants du coin, tant cette pierre aime la musique, elle s'anime. Je l'ai vu de mes yeux vu !
Aaaatchoum, j'éternue, je dois aller voir un rhumatologue, vais-je arriver à clore cette intrigue, celle de ma couronne de brindilles sauvages et l'astre de mes nuits, je vous en parlerai, si vous suivez ses lignes que je jette sur le papier comme on jette une bouteille à la mer. C'est mon trésor, ma mémoire fuyante. J'ai un début d’Alzheimer, alors vous savez prenez ce qui ne vous semble pas trop flou, pas trop fou.
Comme ce matin dans un jardin botanique à proximité de la route de Quimper, du pont, le Wallon du Stangalard me souffle le vent...
Quelques fleurs poussent, doucement.
Une allée d'hortensia, des bleus, des mauves, des fauves, des roses...
Que m'arrive-t-il au juste ?
Bien sûr que je suis sonné... frappadingue, aussi...
Mon médecin de famille, je ne le reconnais plus. Est-ce une femme, un homme... ou comme les voitures un hybride.
Je marche sous les premiers traits de géométrie du génie coloriste, et je trouve que l'être suprême a du talent. La marche ? Elle est pour moi salvatrice, elle comble mon intérieur, ce vide nacré versus huîtres, ou ormeaux. Ce n'est pas de ma faute si mon for intérieur est plutôt bananeraie bancale, ou bonzaï que Hêtre.
Vous voulez savoir mon prénom, et je dis non. Pas plus que le nom, c'est ma couverture, et permettez-moi de vous dire, je nage en eau froide. Une bruine épaisse masque les graphiques et graffitis de quelques amateurs d'art des rues. Un son de port, une corne de brume, et la sirène des balises cardinales ou dangers isolés me font peur.
Pourquoi ne me sentais-je pas très loin de mon élément ?
Bien sûr, un ersatz d'enfance refait surface. Quand j'ai vu le médecin, il a dit Alzheimer. Alors, avant que ma vie s'effiloche, et que je me trompe entre ma mère et un chien... j'ai suivi son conseil... pour ne pas mourir sur la mise en abyme de mon ultime zest de mémoire...
Un métissage de mots et de maux, sonnerie de la montre... mon fils m'appelle, je ne tiens pas à le décevoir. Je ne tiens plus qu'à lui... ce successeur, un petit peu de moi tout de même... jour J plus un !
Tout est à apprendre... qui suis-je...
Que sais-je ? Vaste sujet.
Vaste point d'interrogation. L’oeil du cyclope, mon esprit fume. Le regard du cyclone, ce trou béant qui parfois sème le trouble dans votre survie animale, sur le bocal de la démesure Océane, ce géant tropical le cyclone est là sur cette carte marine, et il avance. La capitainerie ne nous a pas informés, coincés au port de plaisance de Gibraltar, je suis mon capitaine comme une ombre imbécile. Lui faisant totalement confiance, je crois qu'il est fiancé à la mer.
Mercredi, oui, le médecin vient de m'apprendre ma maladie. Alzheimer. Muet comme une taupe, je pleure de l'intérieur. Ma vie va s'effacer, plus de cohérence, plus rien si on vit sans mémoire. Qu'en pensez-vous ? Et qui êtes-vous ?
Des espions. Ou des pions de la vie, celle aux multiples rencontres...
Tiens, la rosée du matin. Je suis au Wallon du Stangalard, des canards font coin-coin et des visages sourient à la vie. Le choc du diagnostic sans aucun doute, alors je me souviens des embruns, du vent et de la mer. De la peur aussi, mais pourquoi ce blocage système ?
Hier soir, je mangeais du cassoulet de Toulouse, une bonne boîte, étais-je sur un voilier ? À côté des canards, des visages, j'oublie la ville puis je me creuse la tête. Qui suis-je ?
Aucune importance en fait, j'aime le héron cendré, ne le dévore que des yeux, et pourtant je suis carnivore. Bon, le médecin a été franc, Alzheimer avez-vous de la famille ?
Oui. Un fils quelque part. Mais où ?
Alors écrivez vos mémoires pour lui.
Et me voici ou voilà en voyage sur un banc, imaginant ma vie. Qui suis-je ? Que sais-je ? Un bon titre déjà mais bon qu'ai-je fait au bon Dieu, je dois être une source de distraction et Hugues Balavoine un être humain ou un personnage imaginaire. Pourtant, un indice cet individu, ce nom est celui qui s'accorde en compagnie de l'organisme, « Voile sans frontières » nous sommes au coeur de la brume de Gibraltar, le rocher îlot illuminé de mille feux proches de sortir de la mer Méditerranée. Nous sommes tous les deux et rions, pourtant ce brouillard est dense, allez, escale au port de plaisance de Gibraltar. Une bonne journée de navigation demande du repos avant la grande aventure, celle de rentrer devant le continent africain et d'éviter les lézards, comprenez les lascars dans le texte. Hugues est le skipper ; moi une personne qui rêve à voix haute. Tiens notre courant dévie la route, je le sens bien à la barre franche. Un ris dans la voile de pris, et nous encaissons l'effet de site, le bateau gîte puis, on se trompe d'entrée de port. Retour en arrière, puis la douane nous attend au ponton. Rien de suspect, Hugues est franc, sûr de voix. Moi. Mon passeport à la main, je tremble terriblement. La douane espagnole nous laisse passer, « Voile sans frontières » c'est chouette !
Plus loin, un vol de mouettes rieuses... je les reconnais encore
Sur le banc, les souvenirs anodins sont là, cette rencontre au café devant un verre ou plus d'un verre. Puis l'énorme vedette à quai, celle des Anglais. Je bois et ne ris pas.