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Samia

Samia

Publié le 4 juin 2024 Mis à jour le 4 juin 2024 Culture
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Samia

C’est fini, Samia ne sortira plus manifester. Sa mort a été sa première et sa dernière liberté.

Janvier 2015, les manifestations reprennent dans les grandes villes du pays. La révolte renait dans les rues du Caire. Avec ses amis militants dans le même parti de gauche, Samia sort commémorer le quatrième anniversaire de la révolution égyptienne. Quatre ans déjà ! Comme d’habitude, la police réprime violemment les contestations. Une seule balle a suffi pour la mettre à terre, au pied de ses espoirs. Samia s’est effondrée sur le trottoir dur. Alaa, son camarade, la prend dans ses bras, tente de la réanimer, lui chante l’ivresse de la résistance, cite des versets coraniques, mais le corps inerte ne réagit plus. Transportée à l’hôpital, dans la voiture d’un autre camarade, les médecins n’ont pas réussi à la sauver, à la ramener à la vie. Samia décède en martyre sur l’asphalte, sur le plus grand boulevard d’Alexandrie, Talaat Harb, sous les yeux ébahis de la foule.

Le lendemain, d’autres protestations naissent et envahissent les rues du pays pour dénoncer le meurtre de Samia. Les médias du monde en parlent.

A son enterrement, des mains d’hommes soulèvent son cercueil recouvert du drapeau égyptien. Comme l’exige la tradition, sa mère, ses sœurs, ses amies et sa fille ne l’accompagnent pas à sa dernière demeure, elles ne la portent pas.  Elles restent à la maison pour pleurer et recevoir les condoléances.  Les femmes n’ont pas le droit de porter leurs morts. Encore des voix d’hommes, des cris d’hommes, des mots d’hommes jusqu'à la tombent.

Samia militait pour une égalité des droits, elle rêvait d’un pays où  sa fille pourrait vivre librement sans avoir peur d’être une femme.

La scène n’émeut plus. Il y a quatre ans, le même scénario. A la même date, à la même place, une foule en colère se soulève, une révolte ! Des gens s’amassent, un président tombe, un autre le remplace et rien ne bouge.

Le soleil brûle l’horizon, les routes sont bloquées, la constitution oppose toujours le groupe à l’individu, impose l’Etat comme Dieu et parle de sujets et non de citoyens.

C’est fini, Samia ne sortira plus manifester. Sa mort a été sa première et sa dernière liberté.

 

 

 

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