Chapitre 4
Sur Panodyssey, tu peux lire 30 publications par mois sans être connecté. Profite encore de 28 articles à découvrir ce mois-ci.
Pour ne pas être limité, connecte-toi ou créé un compte en cliquant ci-dessous, c’est gratuit !
Se connecter
Chapitre 4
Chapitre 4
Florence
J’ai les yeux rivés sur le parking depuis la chambre d’hôpital dans laquelle Clara a été installée. Après m’être prêtée au jeu des formalités administratives sans grand enthousiasme, j’ai choisi avec ma fille les menus pour les repas des deux prochains jours. Une infirmière est ensuite venue prendre la tension de Clara, son pouls et sa saturation en oxygène avant de lui faire une prise de sang. Une analyse d’urine a également été demandée. En ce moment, un interne est en train de réaliser la ponction lombaire, assisté d’une doctoresse. Je préfère ne pas regarder. Savoir qu’une aiguille pénètre dans la colonne vertébrale de ma fille et lui prélève du liquide céphalo-rachidien me donne des frissons rien qu’en y pensant alors je n’ai certainement pas envie de le voir de mes propres yeux. Le regard dans le vide, je ne peux m’empêcher d’imaginer le pire. Je me sens bien seule. Comme ce matin au petit-déjeuner, Stéphane me manque à nouveau terriblement. De son mètre quatre-vingt-dix, je l’imagine poser son menton sur ma tête, ses bras autour de mes épaules et m’embrasser les cheveux en me chuchotant que tout va bien se passer. Je préfère chasser cette idée de ma tête. Ça fait cinq mois qu’il n’est plus là. Cinq mois qu’il a quitté ma vie. Cinq mois que chaque nuit, son fantôme hante mes nuits. J’ai toujours détesté les motos. Depuis son accident, j’ai affreusement peur de la mort. Je surprotège Clara par crainte de la perdre elle aussi. Je l’empêche de faire du vélo dans les rues, d’aller seule à l’école et je ne supporte pas qu’elle s’éloigne de moi. Je me dis que si elle disparaissait, je ne pourrais jamais m’en remettre.
- Voilà, c’est terminé. Tu as été bien courageuse, Clara. Maintenant, je t’invite à rester couchée. Tu as prévu des activités pour t’occuper ?
Je tourne la tête et découvre le visage souriant de ma fille.
- Oui, j’ai apporté des perles. Tu veux que je te fasse un collier ?
- Avec grand plaisir. C’est très gentil de ta part, lui répond la doctoresse.
- C’est quoi ta couleur préférée ?
- Le vert.
- Oh, comme moi. Cette couleur me fait penser à la nature. Et Maman dit que je suis sa petite émeraude, hein Maman ?
- Tu es mon bijou le plus précieux, Clara.
- Et mon Papa, il disait que j’étais son petit renne.
- Comme c’est mignon !
- Je trouve aussi. Dommage qu’il soit mort.
Cette dernière phrase jette un froid. La doctoresse ne tarde pas à prendre congé suivie de l’interne. C’est dingue cette faculté qu’ont les enfants à dire les choses telles qu’elles sont, sans s’embarrasser de fioritures. Je relève le haut du matelas pour permettre à Clara de s’asseoir puis je prends place à ses côtés sur le lit. J’attrape la table à roulettes qui permet de prendre les repas au lit et l’avance à la hauteur de Clara avant d’y poser les perles.
- Je suis très fière de toi, ma puce, lui dis-je en l’embrassant sur les cheveux. Tu n’as pas eu trop mal ?
- Je n’ai rien senti grâce au patch. Ne t’inquiète pas, Maman.
J’essaie de ne pas me laisser submerger par mes émotions. J’aimerais bien ne pas me tracasser pour elle, mais c’est impossible. Je ne peux évidemment pas le lui avouer et ne lui réponds donc rien. En attendant de passer l’IRM, nous fabriquons plusieurs colliers de perles.
- Maman, tu crois que Papa peut me voir d’où il est ?
Je suis un peu prise au dépourvu. Je ne m’attendais pas à sa question.
- Je ne sais pas, mon trésor. Mais si c’est le cas, il doit être drôlement fier de toi.
Je crois que ma réponse la satisfait car elle esquisse un sourire avant de me tendre un collier composé de perles vertes.
- Celui-ci, c’est pour la doctoresse, me précise-t-elle. Et maintenant, je vais en faire un jaune et noir pour Mathilde, en référence à ses abeilles.
Je trouve que ma fille s’exprime plutôt bien pour une enfant, mais j’imagine que c’est normal à force de ne côtoyer que des adultes. Parfois, j’aimerais arrêter le temps pour ne pas qu’elle grandisse trop vite. Je me dis que j’ai hâte qu’elle rentre à l’école pour se faire des amis de son âge.
(si vous avez aimé ce chapitre, pensez à laisser un "j'aime"