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Jour 2« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

Jour 2« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

Publié le 22 nov. 2025 Mis à jour le 22 nov. 2025 Aventure
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Jour 2« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

Au petit matin, l’écluse de la Bousille était enveloppée d’une fraîcheur piquante. Une brume légère formait un voile sur la forêt enflammée par l’automne ; chaque feuille semblait retenir son souffle.

La famille Debarre s’éveillait lentement. Jeanne, fidèle à ses rituels de reconnexion avec la nature, alla enlacer un arbre, comme pour sonder l’humeur du jour.

Le petit-déjeuner se déroula dans une bonne humeur presque insouciante. L’air était encore humide mais le ciel clair. On parlait déjà du trajet jusqu’à Magné, où Antoine, le deuxième frère, et Alisa, sa femme, devaient les rejoindre. Deux heures trente de navigation, une écluse automatique et un pont-levis...

Étienne blêmit en entendant le programme de navigation. Jeanne lui glissa, avec un sourire qui se voulait léger :

— Avec nos deux moussaillons, on ne leur posera pas de lapin.

Trop tard, le mot interdit, sembla résonner étrangement au-dessus de l’eau.

Pilou sonna le départ. Hélios ouvrit la marche, Kifanlo suivit, docile.

À peine dix mètres parcourus, Pilou appuya nerveusement sur la télécommande jaune. Le feu passa au vert. Hélios entra le premier dans l’écluse ; Étienne, toujours un peu lent à la détente, suivit. Mais les portes commencèrent à se refermer sur Kifanlo.

La panique éclata. On courut d’un bord à l’autre. Le bateau était coincé, serré comme dans un étau, entre les portes automatiques de l'écluse. La coque allait-elle supporter la pression…

La Sèvre Niortaise semblait vouloir leur transmettre un avertissement silencieux.

Jeanne, en bonne yogi, songea :

— Ça coule de source, elle ne veut pas de nous.

Puis, souhaitant garder son libre arbitre, elle appuya sur le bouton « Porte Aval », malgré les protestations d’Étienne. Elle n’avait jamais aimé nager entre deux eaux.


Les portes s'ouvrirent enfin, la croisière s'amuse pouvait commencer!


Sur ce tronçon, la rivière était large, l’eau presque immobile. Une semaine plus tôt, on y avait vu souffler des vents à plus de 100 km/h :

— Aujourd’hui, heureusement, c’est pétole ! souffla Déborah.

Camille, à la barre d’Hélios, conversait tranquillement avec Déborah sur la cuisson des lentilles. Capitaine Pilou avait lâché un peu de mou... Mais quelques secondes d’inattention peut-être, une rive qui se resserre dans un virage, une accélération non maîtrisée et ce fichu arbre qui était resté planté là… et l’arrière d’Hélios heurta le tronc et la berge avec une violence sèche.

Deux planches s’envolèrent.

Sur Kifanlo, les moussaillons se précipitèrent à la suite, gaffe à la main, pour récupérer les planches, en vain.

Étienne garda son éternel sourire.

— Si ce n’est que ça, ce n’est pas si grave. On verra à Magné, pas besoin de se dépêcher!

Le talkie resta silencieux, comme si Hélios préférait taire l’incident. Déjà se dressait le premier pont-levis.

Ce passage-là se fit sans douleur.

L’arrivée au ponton, en revanche…

Hélios, trop pressé, prit la tête et s’amarra sans laisser la moindre place pour Kifanlo. Celui-ci vint donc se coller à lui, qui, inexorablement, se pressa sur le bateau voisin...

— Qui n’a rien à faire là, tonna Pilou.

Un homme surgit de sa maison, alarmé :

— Dix tonnes plus dix tonnes… Vous allez écraser mon bateau, les marins d'eau douce !

Camille tressaillit. Déjà l’image de la caution perdue s’imposait à son esprit...

— Pas un bateau en plus, pria-t-elle !

Le voisin, heureusement, avait de l’expérience.

D’une voix ferme, il guida les deux capitaines pour redresser la situation.

Kifanlo termina en marche arrière, mais les péniches furent amarrées comme il se doit. Pour l’instant.


Inspection des dégâts.


Ce n’était pas deux planches, mais tout l’arrière bâbord d’Hélios qui avait souffert. La porte refusait de se fermer, la tôle était pliée… avec quelques morceaux d’écorces dedans…

Camille retenait ses larmes, cette croisière ne l’amusait plus, elle voulait rentrer.

Pour détendre l'atmosphère, on ouvrit des bières.

Jeanne monta faire du yoga sur le rooftop de la péniche, histoire de redescendre.

Chloé voulut la rejoindre et s’arracha la peau des doigts sur l’échelle.

Pilou tenta d’appeler l’assurance, un dimanche, avec la même autorité qu’à la barre.

Et c’est dans ce chaos qu’apparurent Antoine et Alisa, chargés de bagages improbables pour trois jours de navigation: cafetière Senseo, aspirateur à main, grille-pain et d’une dizaine de sacs et victuailles en tous genres…

Promesse d’un service cinq étoiles inattendu.

Cerise sur le bateau, Antoine ne se déplaçait jamais sans sa caisse à outils. Après quelques efforts, les hommes à bord parvinrent à redresser la tôle ; une corde maintint la porte fermée, plus ou moins. Enfin de quoi sécuriser les moussaillons.

Après un déjeuner revigorant, Jeanne et Déborah partirent à vélo, en éclaireur, pour ouvrir en avance les écluses manuelles.

Les péniches glissèrent jusqu’à Coulon, en pleine effervescence dominicale.

Barques vides, badauds nombreux.

— Heureusement qu’on n’est pas le 15 août, songea Étienne en se frottant les mains.

L’amarrage s’effectua toujours dans l’énervement mais sans catastrophe — un progrès notable.

Chacun s’éparpilla dans le village : la journée avait épuisé les corps et les esprits.

Camille s’installa en terrasse pour savourer le dernier rayon de soleil.

Jeanne offrit une glace à Chloé et Angelica.

Pilou contacta Sébastien pour relater les dommages avec une minutie que personne ne pouvait lui contester… sauf l’interlocuteur en repos dominical.

Le soir tomba rapidement sur Coulon.

Sur Hélios, le carré s’alluma, et la famille se réunit pour l’apéritif. L’air se chargeait de chaleur humaine quand le téléphone de Camille sonna, c’était Sébastien.

Pilou grogna.

— Qu’est-ce qu’il nous veut encore celui-là? Je lui ai pourtant expliqué en détail tout ce qu’il s’est passé…et il se relança dans un récit que déjà plus personne n’écoutait...

Camille s’absenta.

Et revint, livide.

— Deux kayakistes sont portés disparus depuis hier soir. Ils avaient loué une grande maison au bord de la rivière. Ils sont partis au crépuscule, on pense qu’ils étaient éméchés et qu’ils n’ont pas vu le danger. On n’a plus aucune nouvelle d’eux. Je crois que je les ai entendus hier soir quand je m’endormais…

Le silence s’abattit sur le bateau comme une chape.

Et chacun partit fermer ses écoutilles rapidement après le repas,

fatigué par les événements du jour, alourdi d’un pressentiment troublant.

Demain serait un autre jour.

Camille et Jeanne s’étaient retrouvés dans leur cabine et chacune lisait tranquillement à la lueur de leur liseuse, quand leur regard fut attiré par des faisceaux lumineux à travers des hublots. Elles s’en approchèrent pour voir ce qu’il se passait à l’extérieur, et les lumières s’éteignirent, comme par magie.



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