3ème cérémonie
En Panodyssey, puedes leer hasta 30 publicaciones al mes sin iniciar sesión. Disfruta de 29 articles más para descubrir este mes.
Para obtener acceso ilimitado, inicia sesión o crea una cuenta haciendo clic a continuación, ¡es gratis!
Inicar sesión
3ème cérémonie
Je viens de passer la moitié du séjour ici, à Santa Rosa, et je dois dire qu'aujourd'hui je suis épuisé. Je suis dans une lassitude, j'ai du mal à tenir debout, chaque effort me coûte, comme si j'étais en hypotension manifeste depuis ce matin. Il faut dire que la cérémonie d'hier a été particulièrement éprouvante avec une préparation plus puissante et concentrée. J'ai plongé d'un coup dans les nimbes de l'Ayahuasca, et les ascenseurs me faisant monter au paradis puis redescendre au purgatoire ont été particulièrement récurrents et rapprochés. A peine, après avoir vomi, avais-je pu me laisser retomber sur ma couche et me blottir sous ma couverture pour chercher un peu de réconfort, que j'entendais à nouveau l'appel à me purger à nouveau. J'ai souvent eu du mal à trouver les forces suffisantes à rassembler pour me relever ou pour évacuer ce qui demandait à être expulsé.
Il me faut reconnaître que j'avais posé une intention forte de nettoyage de certaines souffrances passées. Et il faut bien avouer aussi que c'est à chaque fois une sacré mise à l'épreuve de ma volonté et de ma détermination, avec toujours cette invitation vicieuse de la plante qui me teste, et qui me dit avec son apparence démoniaque, regard jaune et sourire mesquin : « C'est l'heure...Tu veux ou tu veux pas ?Tu viens faire ton travail ou tu préfères rester te reposer ? », et c'est tout particulièrement éreintant quand il n'y a plus beaucoup d'énergie à rassembler...
Et en même temps. Où se situe véritablement le travail ? Est ce simplement un travail de nettoyage intérieur, autant que faire ce peut ? Ou ne devrais-je pas aussi y voir pour moi un test en sens inverse ? Plutôt que systématiquement monter au charbon quand je perçois un malaise monter, toujours vouloir assumer au mieux mes responsabilités et avoir cette fâcheuse tendance à me confronter avec insistance aux problèmes qui se présentent à moi ; ne me faudrait-il pas apprendre à être un peu moins exigeant envers moi-même ? Savoir mieux écouter et respecter mes limites, sans culpabilité ni remords, ne pas vouloir être prêt à toujours tout affronter, apprendre à mieux accepter l'imperfection d'une situation, m'autoriser à lâcher prise et reconnaître qu'il ne m'appartient pas de toujours tout résoudre, plutôt que de me laisser acculer dans mes plus profonds retranchements ? Peut-être parvenir à trouver un meilleur équilibre, entre cet impératif tyrannique du « il faut », et un « je veux/je peux » plus respectueux de moi-même ?
De toutes façons, je ne pouvais pas faire autrement, tellement les forces me manquaient. J'y suis allé quand le mal-être général devenait trop important, j'ai régulièrement esquivé en restant allongé et en me disant que le malaise allait finir par passer. Essayant de ne pas me laisser trop perturber par les forces noires qui me tirent vers le bas, essayant de me maintenir autant que possible dans le confort et le bien-être, malgré toutes les dissonances et les sensations pertubantes qui viennent les distordre et les malmener. J'étais dans un état second, semi conscient et semi endormi, très oscillant et cyclique, alternant des visions lumineuses et colorées avec la noirceur nauséabonde et la saveur amère et répugnante en bouche du purgatoire.
L'effet s'atténuant, je ne perçois pas José ni Claudio quitter dans la nuit la Maloca, tandis que je m'y assoupis éreinté, alors que l'Ayahuasca a plutôt tendance à maintenir éveillé tout le reste de la nuit. Me réveillant peu avant l'aube, je regagne alors mon habitation et vois avec surprise et ravissement une énergie lumineuse, telle une aura, qui scintille sur tout le pourtour des plantes que je croise. C'est une luminosité très douce, d'une couleur argentée, comme si sous l'effet rémanent de la decoction je percevais cette dimension invisible à nos sens ordinaires, cette énergie qui anime chaque organisme vivant, au delà de sa dimension organique et matérielle. Comme si, sous l'effet de l'ayahuasca, je chaussais des lunettes qui me font sortir du domaine du visible et me permettent de voir ce qui se passe dans les domaines des infra-rouges ou des ultra-violets.