Partie 2 : La remise en question - Chap. 7 : La soutenabilité d'un mode de vie
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Partie 2 : La remise en question - Chap. 7 : La soutenabilité d'un mode de vie
Bon - il est clair que ni migration ni tourisme ne sont des nouveautés, ni des inventions modernes, ni des résultats de l'avancée technologique des moyens de transport et de déplacement ou de leurs infrastructures, ni des effets plus ou moins collatéraux de la mondialisation. Comme déjà dit, l'humanité parcourt le monde en tous sens pratiquement depuis qu'elle existe, tout au plus les avancées technologiques et la mondialisation ont-elles pu servir d'accélérateurs - et encore. Les humains ont toujours voyagé à la recherche de nourriture et de ressources, les régions plus prospères ont toujours exercé une force d'attraction sur les populations de celles qui l'étaient moins, les civilisations plus développées ont toujours été des pôles de savoir, de culture et de technologie où les esprits curieux du monde se rassemblaient pour apprendre et pour échanger leurs connaissances et leurs techniques, et les plus aisés ont toujours profité de la vie entre autres en faisant du tourisme dans des lieux de villégiature. Les stations balnéaires ne sont pas une nouveauté des temps modernes : leur existence est attestée au moins depuis l'époque romaine, et même bien avant. Les gens aisés fatigués de la ville allaient se ressourcer ou se refaire une santé dans leurs résidences à la campagne, à la mer ou à la montagne. Et les caravanes de marchands ont toujours relié les différentes régions du monde entre elles pour échanger des biens de toutes sortes. Dans ce sens-là, rien de neuf sous le soleil.
Une éternelle insatisfaction ?
Rien de neuf non plus dans le fait que certains critiquent la curiosité humaine et la soif d'expansion de l'humanité en connaissances comme en richesses, et accusent toutes ces choses d'être à l'origine de tous ses maux. Pour ceux-là, l'individu qui n'a aucun don particulier, qui est tout à fait ordinaire, qui n'est pas particulièrement savant, qui ignore tout de ce qui ne fait pas partie de sa vie et de son quotidien et qui n'a aucune envie de le connaître, qui reste tranquille dans sa chambre entre ses quatre murs, qui fait sa vie et meurt là où il est né et qui se contente de ce qu'il a, c'est lui le vrai sage, l'être humain accompli et l'homme heureux. Et toujours pour ceux-là, le reste de l'humanité se perd dans de multiples quêtes (et en invente toujours de nouvelles) dans lesquelles elle ne trouve jamais ce qu'elle cherche... parce que ce qu'elle cherche vraiment n'est pas ce qu'elle croit chercher (la meilleure preuve en étant qu'une fois qu'elle a enfin trouvé ce qu'elle croyait chercher, aussitôt elle s'en désintéresse, s'en dit déçue et s'invente un autre objet de quête pour se maintenir en mouvement : elle n'éprouve pas cette satisfaction durable d'avoir enfin trouvé le bonheur, elle éprouve juste la satisfaction passagère d'avoir remporté la récompense d'une chasse au trésor qui n'est pas toute la vie...). Elle connaît la joie, la joie de la conquête, mais pas le bonheur. Parce que le bonheur n'est pas un objet de quête, ni une destination, ni même un voyage, mais un état d'esprit.
Une question d'échelle
Ce qui est nouveau par contre dans notre monde ici et maintenant, c'est l'échelle à laquelle les choses se passent. Migration et tourisme se passent en tous sens en même temps à l'échelle du monde entier et à des vitesses encore jamais connues. Et comme nous l'avons vu avec l'énergie, l'échelle à elle toute seule change beaucoup de choses, et parfois même elle change tout.
Des réserves d'énergie qui doivent faire fonctionner un seul véhicule ou qui doivent en faire fonctionner mille, des millions, ou des milliards, ce n'est pas la même chose. Les réserves de pétrole auraient probablement pu facilement durer sept cent cinquante ans si on s'était contentés de les utiliser au rythme où on le faisait au tout début du vingtième siècle, quand l'automobile venait tout juste d'être inventée et quand tout le monde pensait encore que son usage était appelé à rester très limité, et quand on n'avait pas encore inventé ces matières plastiques qui ont fait du pétrole un véritable or noir ; mais aujourd'hui, ce n'est plus possible, et l'épuisement des réserves de pétrole est prévu dans quelques décennies tout au plus - à moins d'un retournement de situation aussi brutal qu'improbable. Même si de toutes parts, on y travaille, à ce retournement de situation.
Pour un village africain, absorber un nouvel arrivant dont personne ne sait très bien d'où il vient mais qui s'y rend utile et qui s'y intègre, ce n'est pas un grand problème. Mais même pour tout un continent, l'Europe par exemple, absorber d'un seul coup des millions de réfugiés d'un pays en guerre, ou sous la férule d'un régime oppressif, c'est un problème.
Si de nouveaux arrivants s'installent sur une terre vierge, ou peu s'en faut, même s'ils sont nombreux, évidemment, personne ne leur fera de problème. Mais s'ils arrivent sur une terre déjà occupée, ça risque de se passer beaucoup moins bien.
Une élite de quelques dizaines de milliers de personnes à travers le monde qui prend l'avion, ce n'est pas la même chose que quand tout le monde prend l'avion.
L'un ou l'autre touriste isolé qui vient se reposer de l'agitation de la ville au bord de la mer, ou des vagues de millions de touristes qui prennent les plages d'assaut pendant plusieurs mois d'affilée, ce n'est pas pareil.
Et ainsi de suite.
L'échelle change tout. Ou tout au moins elle change beaucoup de choses. Et c'est quand on passe à une échelle supérieure que les problèmes commencent à se poser.
"Si tout le monde faisait pareil..."
Quand on éduque un enfant et que l'on veut le détourner d'un comportement où il ne voit aucun problème, ou dont les conséquences ne lui paraissent pas graves, une des choses qu'on lui dira est : "si tout le monde faisait comme toi, on ne s'en sortirait pas !"
Certains comportements, ou certains modes de vie, ne sont tolérables que s'ils ne sont le fait que de peu de gens. D'une minorité. De quelques exceptions. De rarissimes exceptions. Dès qu'un peu plus de monde les adopte, dès que les exceptions cessent d'être rarissimes, dès que la minorité qui les adopte devient plus considérable, et plus encore dès qu'ils deviennent le fait de la majorité, voire de la totalité, ils deviennent vraiment problématiques.
Un mode de vie polluant peut être traité par-dessus la jambe par une minorité de quelques riches (d'autant plus qu'ils comptent sur le fait que l'intendance suivra derrière eux de toute façon). Mais s'il est adopté tel quel par une majorité de gens qui ne font pas plus attention que les riches en question (ou qui font encore moins attention qu'eux), et qui, eux, n'ont pas toute une intendance pour suivre derrière, pour réparer ce qu'ils cassent ou pour nettoyer ce qu'ils souillent, cela devient un problème environnemental.
Un mode de vie de gaspillage ne pose guère de problème si seulement peu de personnes gaspillent : la nature est sufisamment abondante pour l'absorber. Mais si c'est tout le monde qui gaspille, c'est plusieurs planètes qu'il nous faudrait pour suivre le rythme. Et encore : à condition qu'elles soient toutes équivalentes à la Terre au niveau des ressources et de la biodiversité. Or, jusqu'à preuve du contraire, nous n'en avons qu'une seule.
Renouvelabilité
On dit parfois que l'eau fossile n'est pas renouvelable. Ce n'est pas tout à fait vrai. Mais ce qu'il y a, c'est que pour que cette ressource se renouvelle, il faut compter quelque chose comme quatre-vingt mille ans. Or au rythme où nous sommes en train de puiser dans ces réserves, elles dureront tout au plus... quelques dizaines d'années. Leur rythme de renouvellement est de très loin inférieur à ce qu'il faudrait pour suivre le rythme actuel de notre consommation - qui est à première vue appelé à s'accélérer encore. En fait, elles vont s'épuiser bien avant d'avoir eu le temps de se renouveler.
Elles sont renouvelables, mais pas assez pour suivre le rythme de notre consommation. Donc dans la pratique, c'est comme si elles ne l'étaient pas. Leur renouvelabilité est insuffisante, donc elle ne change rien, elle n'a aucun impact, ce n'est pas elle qui va nous sauver. Donc on considère qu'elles ne sont pas renouvelables. Pour que leur renouvelabilité soit prise en compte, donc considérée comme existante, il faudrait remplir au moins une de ces deux conditions (et probablement les deux) : soit il faudrait accélérer considérablement le rythme de leur renouvellement... soit il faudrait moins "taper dedans".
A-t-on des solutions pour remplir l'une ou l'autre, ou les deux ? Pas à ma connaissance (si on en avait, on n'en parlerait pas comme d'un problème). Le plus réaliste consistant à moins "taper dedans", donc à trouver, par exemple, d'autres méthodes d'irrigation pour l'agriculture dans le désert. Le dessalement de l'eau de mer peut-être ?
Et les plus pessimistes diront que même si on avait des solutions, il ne faudrait pas se réjouir trop vite et crier au miracle pour autant, car nul ne sait si les solutions en question ne poseraient pas d'autres problèmes par la suite, qui seraient peut-être encore plus graves...
Problème d'échelle, encore une fois.
Et ceci n'est qu'un exemple, certes pas directement lié à notre sujet de base, mais qui illustre bien ce problème de la limitation des ressources (en disponibilité comme en renouvelabilité) par rapport à l'usage qu'on en fait. Je ne sais pas si le pétrole est simplement non-renouvelable ou bien renouvelable beaucoup, beaucoup, beaucoup trop lentement pour que cela puisse être pris en compte, comme pour l'eau fossile, mais quel que soit le cas, la problématique est la même.
Crédit image : © Myst / Fotolia
Surf Xi hace 1 mes
en principe Gaïa fabrique du pétrole comme elle respire ; si on passe commande avant 24h on l'aura peut-être dans quelques dizaines de millions d'années ; il en faudrait combien ? 😇
Jackie H hace 1 mes
🤣🤣🤣🤣🤣🤣🤣
Non mais sans rire, avec beaucoup d'humour, vous avez parfaitement défini le problème 👍🏻😏😏😏😕😕😕