VŒUX POUR L’AN 2026
VŒUX POUR L’AN 2026
L’année s’achève, et les calendriers hésitent déjà entre deux lumières : quelque chose en nous demeure en attente. Non des promesses convenues, non des vœux de surface que l’on oublie sitôt prononcés, mais une parole qui tienne, qui traverse, qui engage. Voici, pour 2026, ce que nous pourrions souhaiter à tous et à chacun. Même si la barre est haut placée et les rêves bien présents.
Que l’histoire des peuples ne s’écrive plus à l’encre rouge du sang, mais à l’encre bleue — bleu profond, bleu marine — comme la patience des abysses, comme la fidélité des marées et des grandes circulations atlantiques, ô mer ancienne, ô mer recommencée, toi qui portes sur tes eaux la mémoire du sel et des premiers départs, la mémoire des seuils franchis et des retours espérés…
Car nous sommes bien à l’heure d’immenses bouillonnements : temps d’écume et de fracture, temps de surchauffe et de dispersion, où les villes grondent dans leurs réseaux de cuivre et de fibre, où les savoirs s’empilent sans encore s’accorder pareils à des débris d’épaves après la tempête. Les voix montent trop haut et s’écoutent trop peu, dans le vacarme des places publiques et la fulgurance des écrans. Et l’homme debout dans cette lumière blanche — l’homme comptable des choses éphémères, l’homme pressé, fébrile — cherche encore sa juste mesure, son souffle commun, son feu véritable : non le brasier de ruine, mais la lampe du veilleur, la clarté qui ne consume pas et qui éclaire le pas de l’autre dans la nuit.
Que l’An Neuf ouvre donc une clairière. Qu’il nous donne des mains pour relier les rivages, des paroles qui ne blessent pas la chair du monde, des colères qui se transforment en veilles patientes — veilles des bergers aux flancs des montagnes, des guetteurs aux tours des ports, des mères au chevet des naissances.
Souvenons-nous…
« Et il advint, au bord de l’abîme, dans le fracas mêlé aux murmures de la fin d’un monde ancien, que surgit cette question, la plus simple, la plus grave, la plus redoutable de toutes : le monde est-il encore un lieu pour s’aimer ?
Elle oublia que le premier feu n’est pas celui des machines, ni celui des armes, ni celui des tours d’acier, ni celui des algorithmes sans visage. Le premier feu — le seul qui éclaire sans brûler — est celui du regard qui reconnaît, qui murmure : Tu es. Et parce que tu es, je suis davantage. C’est le feu discret d’un lien. Le feu matriciel qui relie.
Un monde pour l’amour n’est pas un monde parfait. C’est un monde à la mesure du fragile, à la mesure du vivant, à la mesure de ce qui tremble, de ce qui se risque, de ce qui s’offre — sans garantie, sans filet, sans programme. » (in Du vide au feu)
Que le feu né du vide — ce feu prométhéen, ce feu volé aux dieux et longtemps errant dans nos forges — redevienne feu intérieur, lieu de trempe pour la conscience, lenteur nécessaire et courage d’être ensemble sans se dissoudre, urgence d’être peuple sans devenir meute, d’être nation sans se changer en muraille.
À toutes et à tous, sur cette terre ronde où nous tournons ensemble, que l’année nouvelle réserve des chances vraies : celles qui font grandir sans écraser, qui rassemblent sans confondre les visages, qui apprennent à dire nous sans effacer les noms singuliers, les accents divers, les mémoires particulières — cette richesse lente des lignées humaines. Et que, dans le tumulte des temps, dans le fracas des empires et des ambitions, nous sachions encore — ô, sachions-le — écouter le murmure ancien du monde, qui ne demande pas des vainqueurs, mais des passeurs ; non des conquérants, mais des semeurs ; non des maîtres, mais des veilleurs aux portes de l’aube.
Allons, allons maintenant. Que ces vœux reposent comme la braise sous la cendre, comme la semence sous la terre gelée, comme la promesse sous le givre de l’hiver. Que nous y revenions lorsque l’heure est juste, lorsque le cœur se resserre, lorsque la main tremble au seuil des décisions. Et que le silence entre deux phrases fasse déjà son œuvre — ce silence habité, ce silence matriciel où germent les recommencements — pour tous et pour chacun, pour les peuples et pour les solitaires, pour ceux qui parlent et pour ceux qui écoutent, dans l’ombre des bibliothèques comme dans la patience des champs.
Et que nos vœux ainsi échangés continuent d’éclairer.
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