Dernier chapitre 19 – Délivrance à la chapelle Saint-Trémeur
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Dernier chapitre 19 – Délivrance à la chapelle Saint-Trémeur
De toutes les chapelles de la presqu’île, celle de Saint-Trémeur était celle qui faisait le plus peur aux enfants. La légende racontait que le père de Trémeur était le Comte de Konomor, puissant seigneur du Poher, qui avait eu six femmes, qu’il avait toutes tuées quand elles étaient enceintes. En effet, une sorcière lui avait prédit que s’il avait un fils, celui-ci causerait sa perte. C’est pourquoi, quand le comte de Konomor demanda en septième épouse, Trifina, la fille du Comte de Vannes, Warok hésita mille fois. Mais, soutenu par Saint Gildas qui l’accompagnait dans toutes ses grandes décisions, il se résolut à accepter cette union pour maintenir la paix entre les deux comtés voisins.
Les premiers temps d’union furent heureux mais quand Trifina se rendit compte qu’elle attendait un enfant, elle fuit le domaine du Poher pour retourner à Vannes chez son père. Elle était presque arrivée quand le comte de Konomor, devenu fou, la rattrapa et lui trancha la tête. La Comte Warok alla récupérer le cadavre de sa fille chérie et fit appeler Saint Gildas. D’un signe de croix, il lui remit la tête sur les épaules et la ressuscita. Trifina accoucha d’un beau garçon qu’on appela Trémeur, mais ayant quand même perdu la tête, fini ses jours dans un couvent. C’est ainsi que Saint Gildas s’occupa de l’éducation du jeune Trémeur. Celui-ci était enjoué et bienveillant et accompagnait Saint Gildas dans toutes ses occupations. Un jour qu’il se rendait à Landevennec pour visiter Saint Guénolé, il le laissa à Plougastel pour jouer au jeu de la soule, une balle en cuir remplie de foin que les enfants tapaient avec leurs pieds dans des cages en osier. Konomor, qui passait par là, reconnut son fils et lui trancha le cou. Bien lui en fasse, Trémeur maudit son père et continua à jouer, sans tête, en attendant que Saint Gildas revienne la lui remettre sur ses épaules. Saint Trémeur continua ainsi sa vie et son père fut excommunié pour ses faits.
La chapelle de Saint-Trémeur apparut en descendant la longue route du kordennad(1) de Rozégat. Discrètement érigée dans un charmant placître de châtaigniers, hêtres et chênes, ici règnaient le calme et la volupté. Augustine et sa mère firent trois fois le tour de la chapelle avant d’entrer, récitant prières et litanies pour la vie de l’homme de la famille. Augustine demanda à sa mère de lui montrer à nouveau le morceau de pain béni. Celui-ci avait retrouvé sa belle couleur dorée et Augustine se sentit plus confiante dans l’avenir même si sa mère n’avait toujours pas retrouvé sa tête. Elle lui prit la main et la fit entrer dans la chapelle. On n’y entendait que le crépitement des cierges et le souffle du vent qui entrait par la porte laissée ouverte. Augustine lâcha alors la main de sa mère pour aller fermer la porte. Quand elle se retourna, elle vit sa mère s’agenouiller face au bénitier près de la porte. Elle se courba et glissa sa tête dans l’alcôve située sous le bénitier. Son corps s’allongea tout entier sur le sol, elle se mit sur le dos, laissant ainsi apparaître son ventre devenu énorme. Ses mains crispées se détendirent et ses épaules s’affaissèrent. Augustine, consciente que cette position soulageait les maux de sa mère, avança dans la nef de l’humble chapelle aux murs crépis et aux pavés de schistes. Elle s’agenouilla instinctivement à gauche de l’autel, où se trouvaient la statue de Dieu, le père tout Puissant, entouré de deux anges gardiens. Il tenait sur ses genoux, son fils Jésus et la colombe du Saint-Esprit, sur son épaule. Augustine enjoignit ses doigts et pria à haute voix :
- Dieu, Oh Mon Dieu, faites que mon père revienne vite auprès de nous. Qu’il soit en bonne santé et qu’il retrouve la femme de sa vie. Elle a besoin de lui…
A ces mots, Augustine entendit sa mère émettre un cri et accourut auprès d’elle. Elle avait sorti sa tête dans l’alcôve et avait retrouvé ses esprits.
- Le travail commence, Augustine ! lui dit-elle entre deux crispations. Vas chercher la sage femme du village pendant que je prie Sainte-Marguerite.
Paniquée, Augustine sortit en trombe, laissant sa mère sur le sol glacé, prise de contractions de plus en plus rapprochées. Elle appelait au secours quand une femme sortit des bois. C’était la Naïg Ar Vengleuz(2) qu’elle avait rencontrée à la fontaine de Saint-Languis. De retour à la chapelle, la Naïg ne put constater que de l’arrivée imminente du bébé. Elle demanda à Augustine de se placer derrière sa mère et de la prendre dans les bras pour qu’elle soit en position assise. L’invitant à pousser, de plus en plus fort, la mère Kervalle délivra un beau bébé, un garçon, qui se mit à hurler de tout son saoul. Quelle surprise et quel bonheur, tels étaient les sentiments partagés par Augustine et sa mère. La Naïg tendit le bébé à sa mère qui se calma instantanément à son contact. Le temps était comme suspendu, le bonheur à portée de main, mais une ombre demeurait au tableau. Son tendre mari reviendrait-il ? Aurait-il le bonheur de voir son fils ? Une nouvelle contraction la sortit de ses pensées. Puis, une autre. La Naïg ne comprenait pas ce qu’il se passait et demanda à Augustine d’aller chercher de l’aide. Elle ressortit alors et décida de se diriger vers le sud. Arrivée à la grève de Porz-ar-loc’h, il n’y avait que des cabanes de pêcheurs qui étaient vides à cette heure avancée de la nuit. En regardant vers la mer, elle vit une lumière qui dansait sur les flots et commença à appeler de plus en plus fort, qu’on lui vienne en aide. La barque arriva enfin sur la grève et Augustine expliqua rapidement la situation aux passagers qui restèrent cois sauf un qui sauta de l’embarcation, avec son chien, et prit Augustine dans ses bras et l’emporta rapidement. C’était son père qui était enfin revenu, et par la force avec laquelle il la tenait, avait retrouvé toute sa santé. Ils coururent tous les deux vers la chapelle d’où l’on pouvait entendre des cris à dix lieux à la ronde. Quand le père Kervalle et Augustine entrèrent à bout de souffle, la mère tenait dans chaque bras, deux beaux bébés têtant déjà le sein de leur mère. La mère Kervalle leva les yeux vers l’entrée et son visage s’illumina en voyant son mari en vie, accompagné de leur fille bénie. La Naïg s’effaça pour laisser la famille se retrouver et c’est avec un bonheur incommensurable que le père Kervalle découvrit qu’il avait deux fils et visiblement, en bonne santé. C’est tout à leur bonheur retrouvé que le visage de la mère se crispa à nouveau et qu’elle sentit ses entrailles de déchirer.
- Dieu cela ne doit pas être possible, je ne peux en supporter davantage, dit la mère Kervalle.
Une contraction plus forte que toutes les autres la fit hurler de douleur. Augustine reprit sa place derrière sa mère et le père Kervalle prit celle de la Naïg, pour accompagner sa femme pour le meilleur et pour le pire.
- Je vois une tête ! Pousse ma petite Mammig(3), tout va bien aller… dit le Père Kervalle.
Et un troisième garçon poussa son premier cri en même temps que le son d’une cloche qui se mit à retentir à toute volée dans le hameau, le kordennad et jusqu’au bourg. La quatrième cloche était revenue et l’harmonie était de retour au clocher.
Une semaine plus tard, à l’église de Saint-Pierre, le curé Baod eut l’extrême gratitude de célébrer le baptême des triplés de Kervalle. Tous les habitants de la Presqu’île s’y étaient retrouvés pour fêter la naissance exceptionnelle des trois garçons et des miracles répétés de leur fille aînée.
Le père, la mère et Augustine portaient chacun, un des bébés, et le curé Baod les baptisa en les nommant : Jean, Louis et Trémeur.
A la fin de la cérémonie, les cloches sonnèrent comme jamais, toute la journée durant, chassant ainsi la période de chaos et de deuil que la presqu’île avait subie. C’est en entendant les cloches sonner que les habitants de Plougastel surent qu’il en était définitivement terminé de l’Ar Vossen(4).
Bientôt, le calvaire monumental serait en place près de l’église Saint-Pierre ? La Croaz Ar Vossen(5) avait été érigée sur la route de la Pointe de l’Armorique, ce qui protègerait la presqu’île pour des siècles et des siècles…
(1) kordennad : Division de paroisse
(2)Naïg Ar Vengleuz : devineresse en breton
(3)Mammig : maman en breton
(4) Ar Vossen : la peste
(5) Croaz Ar Vossen : le croix de la peste
RESSOURCES
- Plougastel-Daoulas : ses villages, ses traditions LM Bodenes
- Plougastel-Daoulas : Patrimoine architectural et statuaire Les Amis du Patrimoine de Plougastel
- Contes de Plougastel LM Bodenes
- Plougastel-Daoulas : Notice à l'usage du pélerin et du Tourisme Henri Pérennès
- Aucune IA n'a été utilisée pour écrire cette histoire.
MERCI
A tous les habitants de Plougastel qui m’ont ouvert leurs portes et leurs mémoires, prêter des livres... lors de mes balades à travers les ribines de la presqu'île, mes visites dans les chapelles, seule, pendant les pardons ou lors des animations du musée de la Fraise...
Je dédie cette histoire à ma Tante Yvonne, qui pendant cent ans de vie, à dédier ses prières à la vierge Marie.