En partageant son attention entre les indications sur les quais, dans les couloirs et dans les escaliers, et le bruit de fond de sa bulle intérieure, Caroline arrive sur le parvis de la cathédrale. Un espace immense et noir de monde.

Comment repérer qui que ce soit dans toute cette foule ? Elle essaie, regarde à gauche, à droite, devant, derrière, mais tout ce qu'elle voit, c'est une succession d'illustres inconnus. Ils sont de tous les âges, de tous les genres, de toutes les tailles, de toutes les couleurs, ils parlent toutes les langues, ils marchent d'un pas décidé, ils vont droit devant eux dans toutes les directions, certains marchent, d'autres courent, il y en a même en skateboard ou bien en rollers, ils savent où ils vont, aussi ce qu'ils cherchent, et la moitié d'entre eux au moins a le smartphone collé à l'oreille ou maintenu droit devant soi. Aucun n'a l'air comme elle tout perdu sans savoir très bien où aller.

Elle se souvient des règles de prudence. Elle se rappelle qu'elle fait une cible idéale pour un voleur à la tire, surtout avec son sac à dos et ce qui est de manière évidente la sacoche d'un ordinateur portable. Il est trop visible qu'elle est seule et perdue. Elle tente d'aviser un banc, mais elle n'en voit aucun. Alors elle bat en retraite vers l'impressionnant portail de la cathédrale, s'y adosse au mur, se débrouille pour sortir son smartphone de son sac à dos, l'active, ouvre son application de téléphonie puisque les messageries demandent toutes Internet, repère le numéro de Siggi dans son historique et lui envoie un message, tout en protégeant son précieux des deux mains comme l'or de la Réserve fédérale des États-Unis. Il ne faudrait pas qu'un pickpocket le lui arrache au vol, ce n'est vraiment pas le moment. Ce n'est jamais le moment, certes, mais ce le serait maintenant moins que jamais. Cologne, ce n'est ni Tokyo ni Osaka.

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