Une histoire de Police
On Panodyssey, you can read up to 10 publications per month without being logged in. Enjoy9 articles to discover this month.
To gain unlimited access, log in or create an account by clicking below. It's free!
Log in
Une histoire de Police
22 Jan 13
Rajiv, le gardien de la maison avec qui je m’entends particulièrement bien, me raconte cette histoire qui vient de lui arriver.
Au marché de Mikalou là où il vit, la mairie a décidé d’interdire tous les vendeurs ambulants, si présents partout aux 4 coins de Brazzaville. Lundi, la police a donc fait une descente sur le marché pour arrêter les récalcitrants. Il ne va pas s’en dire que tout cela a mené à un grand grabuge, et la police a du faire usage de la force et utiliser des bombes lacrymogènes pour disperser la foule.
Rajiv a un « petit ». Un petit ici, c’est un jeune qui te rend de multiples services, en échange de quoi tu subviens à ses besoins, tu le conseilles et tu l ‘aides à s’insérer grâce à tes relations. Tout le monde a son/ses petits dans les quartiers, c’est une sorte de relation d’ainé aux plus jeunes dans une logique communautaire. Ce petit donc accompagnait une sœur qui portait son bébé dans le dos près du marché quand les incidents ont éclaté. Lorsque la police a jeté une bombe lacrymogène enfumant la mère et le bébé, le petit a protesté. De suite, il s’est fait embarquer et jeter en prison au commissariat du coin.
Rajiv, de visite à un oncle, apprend la nouvelle. Il décide de se rendre au commissariat pour plaider le relâchement du petit. A peine entré, on lui demande expressément d’en sortir. Il refuse, affirme qu’il s’agit d’un lieu public et qu’il n’en partira que quand bon lui semblera, c’est à dire après explications sur ce qu’est devenu le petit. Immédiatement il se fait interpeller, fouiller, et mettre en prison lui aussi.
Ce n’est que quelques heures plus tard qu’ils se font libérer. Quand Rajiv demande à ce qu’on lui remette son téléphone et les 30.000fr CFA qu’on lui avait confisqués au moment de son arrestation (env. un demi mois de salaire), on lui recommande de circuler vite fait.
Le soir, je vois Rajiv qui reprend son service de nuit. Il est assez abattu et m’explique ce qui vient de lui arriver. Je lui demande s’il n’y a aucun moyen de retourner protester auprès du commissaire, ou de porter plainte auprès d’autres autorités. Et Rajiv de rétorquer laconiquement : « Tu sais, moi je n’ai pas les relations. Si je connaissais quelqu’un au commissariat, je pourrais récupérer mon téléphone. Mais ici, si tu n’as pas les relations, tu ne peux rien réclamer. »