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Le Nihon shoki et le Kojiki, deux livres japonais fondateurs

Le Nihon shoki et le Kojiki, deux livres japonais fondateurs

Published Jan 17, 2021 Updated Jan 17, 2021 Culture
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Le Nihon shoki et le Kojiki, deux livres japonais fondateurs

Tout comme nous avons l'Iliade et l'Odyssée, les Japonais ont le Nihon shoki et le Kojiki, deux livres qui mêlent légendes et Histoire. Tous les deux sont principalement attribués à Ō no Yasumaro, un bureaucrate et chroniqueur de la cour de Nara qui aurait rassemblé des récits oraux. En plus de leur valeur historique et littéraire, ces deux ouvrages ont également un rôle politique.

 

Le Kojiki ou la Chronique des faits anciens

Officiellement publié en 712, au tout début de la période de Nara, le Kojiki retrace l’ascendance divine du Japon. C’est dans cet ouvrage que l’histoire des divinités shinto (appelées kami) est narrée, depuis la création du monde jusqu’au 33e empereur lui-même descendant de la déesse du Soleil. Si cet ouvrage fait clairement référence à la religion shinto, il ne faut pas y voir un livre saint ou un code moral comme les saintes Écritures occidentales. 

On y retrouve ainsi des chants, des poèmes et des récits qui sont pour la première fois écrits en “japonais”. Pourquoi des guillemets ? Parce qu’à cette époque, les Japonais utilisaient encore les caractères chinois pour retranscrire leur propre langue. Ils gardaient uniquement la prononciation des sinogrammes pour en faire un syllabaire capable de retranscrire les sons de la langue japonaise. Le Kojiki est ainsi le plus vieux livre en japonais.

 

Le Nihon shoki ou les Chroniques du Japon

Quelques années plus tard, en 720, le Nihon shoki est achevé. S’il commence lui aussi par rappeler les mythes fondateurs du Japon et l’ascendance divine de l’empereur, le Nihon shoki est ensuite plus historique. Il évoque les décisions des empereurs, les relations diplomatiques et des faits historiques.

Étant un livre à vocation officielle, il est rédigé en chinois, comme tout ce qui avait trait à l’administration de l’époque. En effet, pendant la période de Nara, les Japonais cherchent à copier le système chinois qui est alors l’un des plus performants.


Le contexte politique du Kojiki et du Nihon shoki

À cette époque, les échanges entre la Corée, la Chine et le Japon vont bon train. Le bouddhisme introduit au VIe siècle depuis la Corée gagne en popularité et les Japonais adoptent l’écriture chinoise et copient l’administration de l’empire du Milieu qui lui, a déjà une histoire séculaire. L’ambition de l’archipel était alors de rivaliser avec son voisin chinois.

On peut ici rappeler cette célèbre missive du prince Shōtoku Taishi (574 - 622) à l’empereur de Chine qui commençait par “De l’empereur du soleil levant à l’empereur du soleil couchant”. Le Japon se posait ainsi comme un égal.

Seulement voilà, le pays n’ayant pas d’écriture propre, son histoire était orale, très récente et peu impressionnante. C’est alors que les empereurs ont commandé le Kojiki et le Nihon shoki afin de se doter eux aussi d’une longue histoire et d’une origine divine.

Ces deux livres mettent ainsi en avant non seulement l’histoire du Japon qui remonte à la nuit des temps, mais également sa religion native, le shintoïsme. Il s’agissait également de faire la part des choses avec le bouddhisme, religion importée, qui gagnait du terrain et de l’influence.

Le Kojiki, un outil de propagande nationaliste

Pendant les siècles qui ont suivi, le Kojiki est rapidement tombé en désuétude. Il faudra attendre l’ère des Tokugawa (1603 - 1868) et la création des “études nationales” pour que les Japonais se replongent dans ce texte. À cette période, il était encore très prestigieux d’étudier le chinois et le confucianisme. Les kokugaku, c’est-à-dire les études nationales, se positionnaient donc à contre-courant en voulant remettre le japonais au centre des préoccupations. Avec ses récits de kami et d’empereur divin, le Kojiki proposait une vision toute japonaise du monde.

Durant l’époque Meiji (1868 - 1912), le Japon a poussé encore plus loin l’utilisation du Kojiki en le déclarant historique : ainsi l’empereur était réellement considéré comme le descendant des kami et les Japonais comme un peuple supérieur. L’archipel n’a en effet pas été épargné par la montée d’une forme de fascisme. Les conquêtes et les massacres auxquels se livrait le gouvernement étaient alors légitimés par cette ascendance divine. C’était l’ordre naturel des choses que les Japonais dominent les autres peuples. Il faudra attendre la fin de la Seconde-Guerre mondiale pour que l’empereur japonais reconnaisse publiquement ne pas être une divinité.

Aujourd’hui, les chercheurs continuent de s’intéresser à ces ouvrages et aux nombreux commentaires qui en ont été faits à diverses périodes. Ces deux livres sont le reflet des mentalités de différentes époques ainsi que des œuvres littéraires à part entière. À ce titre, ils font toujours pleinement partie du paysage culturel japonais.

 

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