Autobi(bli)ogaphie : Les Contes du Yiddishland et Nasr Eddin Hodja
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Autobi(bli)ogaphie : Les Contes du Yiddishland et Nasr Eddin Hodja
Il y a des émissions radio qui n'ont pas duré bien longtemps. Leur succès a été relatif, les dissensions dans les équipes ont eu raison d'elles, et le public, après avoir légèrement boudé l'émission, l'a complètement oubliée. "Ouvert la nuit", avec Tania de Montaigne et Alexandre Héraud fait partie de cette catégorie d'émission. Diffusée entre septembre 2011 et juin 2012, de 21h à 23h, elle faisait la part belle à la culture sous toutes ses formes, avec des invités très variés et bien sûr des morceaux live. C'était plutôt une bonne émission, dans mon souvenir. Je me souviens surtout que plusieurs des chroniqueurs de cette émission ont ensuite enchaîné avec d'autres projets. Il y avait notamment Eva Bester, chroniqueuse littéraire, de livres méconnus, passés inaperçus en leur temps, et méritant néanmoins toute notre considération. Eva Bester est ensuite devenue l'animatrice et productrice de l'émission "Remède à la mélancolie", et aujourd'hui elle a pris les commandes de la tranche 20h-21h, avec "le Grand Canal", sur les traces de Laure Adler.
Parmi la myriade d'artistes et d'invités qui se sont succédé dans l'émission, je retiens notamment une chronique d'Eva Bester, au sujet d'un livre de Ben Zimet « les contes du Yiddishland ». Il s'agissait de contes d'origine juive polonaise, complètement fantasques et très rigolos, mettant en scène les « sages de la ville de Khelm », face à une population qui s'interroge sur certains faits ou pratiques. Les Sages donnent des réponses complètement absurdes après tout un raisonnement faussement sérieux.
Je me souviens que j'avais commandé le livre le lendemain dans la librairie Ryst, à Cherbourg, où je vivais alors. La libraire avait eu toutes les peines du monde à écrire Yiddishland. Mais le plus important était que le même jour où j'ai commandé ce livre, j'ai acheté Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja, sur les conseils d'un ami. Il s'agit d'un recueil de petites histoires mettant en scène Nasr Eddin, un hodja du centre de la Turquie, au 13e siècle. C'est très drôle à lire.
Quelques jours plus tard, je reçois les Contes du Yiddishland, et à ma grande surprise je découvre que plusieurs histoires sont communes. Quand je dis « communes », je veux dire que ce sont exactement les mêmes, mais chacune transposée dans son univers propre, à Khelm d'un côté, en Turquie de l'autre. Dans un monde juif et dans un monde musulman. J'avoue que ma lecture prit un tout autre tour après cette découverte fortuite. Quand j'évoquais ce trait à mes amis, tous mes dirent que c'était tout à fait normal, que ces histoires partaient d'un substrat commun, et qu'avec la diaspora, il était logique que l'on retrouve les mêmes histoires en Pologne et en Turquie. J'étais déçu que ma découverte ait suscité aussi peu d'enthousiasme. J’avais eu l’impression de détenir une clé d’un possible dialogue israélo-palestinien, de montrer combien il s’agissait en réalité d’une même culture et que tous étaient frères dans l’absurdité générale. Enfin, bref, je m’étais enflammé un peu vite. Cela ne m’a pas ôté le plaisir que j’ai parfois à relire ces petits apologues.