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Chapitre 19

Chapitre 19

Veröffentlicht am 26, Apr., 2024 Aktualisiert am 26, Apr., 2024 Humor
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Chapitre 19

En sortant, je regarde furtivement à droite et à gauche. Ouf, Mickaël n’est pas là. Il n’est pas apparu, comme sorti de nul-part à prétendre avoir besoin de me parler.

Dans la voiture je mets la radio et tapote sur le volant au rythme des chansons qui sont diffusées. Au feu rouge, je me souviens que je dois encore trouver un deuxième aquarium pour la future copine de Surimi. Je me demande où je vais l’installer. Est-ce qu’il doit être actif même s’il n’y aura pas toujours de poissons dedans ? Juste au cas où j’aurais un poisson malade, que je doive retirer de l’aquarium principal en urgence ? Je vais avoir beaucoup de questions à poser à Rick. Il devra aussi m’expliquer comment se passe le changement d’eau. Je n’ai jamais fait ça, et aucune idée de comment je dois pratiquer.

J’arrive près de l’entrée du musée Grévin, Boulevard Montmartre et tourne sur la gauche pour rejoindre la rue vivienne. Je passe un coup de fil rapide à mes parents pour les prévenir que je suis juste à côté. Quand j’arrive devant leur immeuble, mon père est déjà au bord de la route pour m’ouvrir le parking. Dès que j’ai garé ma voiture, je sors et mon père s’exclame que je suis vraiment trop belle.

— C’est vrai tu trouves ? je lui demande en l’embrassant sur les deux joues.

— J’ai l’impression de te revoir adolescente, avec juste quelques petites années en plus.

Je ris et monte avec lui dans l’ascenseur. Il a dû aller chez le coiffeur lui aussi. Ses cheveux poivre et sel sont parfaitement coupés.

— Bichette ! s’écrie ma mère en me voyant passer la porte.

Elle porte son tablier tout tâché et à ses pieds je vois ses gros chaussons à tête de Mickey. Quand est-ce qu’elle va enfin s’en débarrasser ?

— Coucou Maman, je lui lance en allant l’embrasser.

— Le hachis parmentier est au four. J’ai acheté des belles pommes de terre et attendu vingt minutes chez le boucher pour avoir une viande de qualité.

— Tu n’étais pas obligée d’en faire autant. Une assiette de coquillettes avec une tranche de jambon aurait très bien fait l’affaire.

— Ca fait des semaines, enfin non, des mois que tu n’es pas venue manger. Je devais marquer le coup.

— Ca ne fait pas si longtemps. Tu exagères un peu.

— Si peu, ajoute ma mère en se frottant les mains sur son tablier. Tu veux boire quelque chose ? J’ai acheté du jus d’ananas.

— Juste un peu d’eau.

— De l’eau ? Pas du jus d’ananas ? Il est bio en plus et dans une bouteille en verre. Je suis sûre qu’il doit être très bon. Tu vas goûter.

— Ok, je capitule en souriant. Mais je n’en bois plus trop, je me suis mise à l’eau. J’ai même arrêté les sodas.

Ma mère revient dans la salle à manger avec un petit plateau et un grand verre plein de jus.

— Je te le pose ici, précise ma mère en le plaçant sur la table.

— Merci Maman…

J’ai l’impression d’avoir de nouveau quinze ans. Tous les jours je prenais un verre de jus d’ananas au moment du goûter avec une biscotte briochée tartinée de nutella. Heureusement, elle a oublié le nutella et n’a prévu que le jus.

— Tu n’as rien remarqué ? l’interroge mon père qui la regarde s’agiter d’un bout à l’autre de la pièce.

— Moi ? s’étonne ma mère.

Elle me regarde de haut en bas. Me félicite d’avoir mis un jean sans trou, bien que la couleur soit délavée. Je lui précise que c’est normal, et pas suite à une erreur de programmation au lavage.

— OH ! fait-elle brusquement en joignant les mains. Mais tu es redevenue blonde ! Et tu as coupé tes cheveux.

Elle s’approche et passes ses mains dans mes cheveux, les aplatissant au passage.

— Comme tu es belle ma bichette. Moi aussi j’ai changé de couleur. Cette fois j’ai testé l’acajou. Qu’est-ce que tu en penses ?

— Tu es trop belle, je lui dis en m’amusant avec ses bouclettes.

— Merci. Alors qu’est-ce que tu as de nouveau à nous raconter ? En tout cas tu as l’air en pleine forme et ça fait plaisir.

— Ca va, je commence en m’asseyant à la table.

— Tu as revu ton amoureux ?

— Maman ! Ce n’est pas mon amoureux, juste un ami.

— Ne jouons pas sur les mots. Il va bien ? Tu nous le présente quand ?

— Ne mettez pas le chariot devant la vache ! Chaque chose en son temps.

— C’est la charrue devant les bœufs, me reprend mon père en riant. Et tu as raison, prends ton temps.

— C’est juste pour le connaître. Savoir à quoi ressembleront mes petits-enfants. C’est moitié de la maman et moitié du papa tu sais, m’informe ma mère.

— Pour le moment nos seuls enfants sont des poissons et chacun a les siens.

— Et comment va ton poisson ? Sushiki ? Sukiki ? tente mon père.

— N’écorche pas son prénom ! C’est Surimi premier du nom. Le grand Surimi 1er.

— Il nage bien ton petit bout d’écailles ?

— Très bien. Il est heureux comme un poisson dans l’eau depuis qu’il a son aquarium. Je pense vraiment que sa dépression est en rémission. Il n’a plus l’air de broyer du noir ni d’avoir envie de se noyer en tout cas.

— Bonne nouvelle. Si même ton poisson était suicidaire, ça ne t’aurait pas aidé à aller mieux.

Ma mère revient avec un petit ramequin de cacahuètes. Je pioche dedans en continuant de parler.

— Depuis que je m’occupe de lui, j’ai un regain d’énergie. Oh, je vous ai dit que je prévois de lui acheter une copine ?

— Oui. Il va être heureux avec une amoureuse.

— Ces petites bêtes ne doivent pas vivre seules. Sinon ils s’ennuient et souffrent de stress. Je dois acheter un deuxième aquarium plus petit, qui me servira à faire la quarantaine. Et une fois que je serais certaine qu’elle est en bonne santé, elle ira partager le grand océan de Surimi.

— Tu recommences à faire des projets. Je trouve ça merveilleux, se réjouit ma mère.

— Oui, enfin il ne s’agit que de prendre un deuxième poisson… je ne prévois pas de changer de vie non plus.

A table, nous mangeons le hachis parmentier en rigolant lorsque j’ai la mauvaise idée de mentionner Mickaël.

— Pourquoi parles-tu de lui ? m’interroge ma mère sans cacher son mécontentement.

— En réalité, il est venu me voir.

Elle avale sa bouchée et manque de s’étouffer sous mes yeux.

— Quoi ? fait-elle d’une voix enrouée.

— Il était là hier. Apparemment il voulait me parler.

— Te parler de quoi ? s’agace ma mère en faisant taper sa fourchette au bord de la table.

— Je ne sais pas exactement. Je lui manque.

— Manquait plus que ça, commente simplement mon père en fixant son assiette.

— Il t’a sorti les yeux humides et les balbutiements ? Cet homme est un vrai clown.

— Il voulait juste me parler, j’insiste. Savoir comment j’allais.

— Ca ne le regarde plus. Vous n’êtes plus ensemble.

— Je sais, je réponds à ma mère. Il est revenu aujourd’hui.

— Encore ! crie-t-elle en agrandissant les yeux. Et que voulait-il cette fois-ci ?

— Parler. Savoir comment j’allais.

— Pfff, râle-t-elle en levant les yeux. Il n’est plus avec sa dinde ?

— Maman, ne l’appelle pas comme ça. C’est peut être une femme très bien. Mais j’ai appris qu’ils n’étaient plus tous les deux.

— Ah ! Elle l’a quitté ? Dans ce cas je retire ce que j’ai dit. C’est certainement une femme bien. Mais ça n’empêche pas qu’elle vole les hommes déjà pris.

— Hum, fait doucement mon père en s’essuyant la bouche avec une serviette.

— Qu’est-ce qu’il y a ? Ah mais non ! Ca n’a rien à voir, enchaine ma mère en le regardant. Moi j’étais célibataire quand je t’ai rencontré.

— Mais Papa avait déjà une copine, je lui rappelle en souriant.

— Une copine, c’est un grand mot. Ils allaient juste se promener au parc. Et entre nous elle n’était pas jolie, ni intelligente. Tu méritais bien mieux qu’elle, assure-t-elle à mon père.

— C’est certain, confirme-t-il en me jetant un regard lourd de sous-entendus.

Je serre les lèvres pour ne pas éclater de rire, pendant que ma mère continue de se justifier.

— Oh et puis il y a prescription, nous n’allons pas déterrer cette vieille histoire. Et ton père était entièrement d’accord pour me fréquenter en même temps qu’elle.

— Ca va être de ta faute, je murmure à mon père en me penchant vers lui.

Ma mère s’éclipse avec le plat et revient juste pour débarrasser la table avant de disparaitre de nouveau.

— Et tu revois ton ami bientôt ? m’interroge mon père pour changer de sujet.

— Rick ? Je vais chez lui demain. On va regarder des Disney. Et j’apporte une tarte aux myrtilles pour le goûter.

— Il est chanceux cet homme.

— Tiramisu de chez Picard, dit ma mère en revenant avec le dessert.

Pendant qu’on se sert, mon père continue de me questionner.

— Il s’appelle Eric ?

— Pas du tout.

— C’est Alderick-Vince, termine ma mère à ma place.

— Oh, ce n’est pas courant.

— La faute de ses parents qui n’arrivaient pas à tomber d’accord. Mais tout le monde l’appelle Rick.

— Et Aurélie le connait ?

J’avale la bouchée de tiramisu en souriant à ma mère.

— Non. Je le garde pour moi toute seule. Il n’y a que Surimi qui aura l’honneur de le rencontrer. Un jour.

— Tu vas l’inviter chez toi ? Fais attention bichette, ne fais pas entrer n’importe qui.

— Oh Maman, je ne fais pas entrer n’importe qui chez moi. C’est Rick, j’insiste en prononçant son prénom.

— On n’est jamais trop prudent. Et quel âge à mon futur gendre ?

— Aucune idée. Sûrement la trentaine.

— C’est un vieux !

Je pouffe de rire et le bout de tiramisu que j’ai dans la bouche a failli ressortir.

— Trente ans ce n’est pas vieux.

— Il est plus vieux que toi, précise ma mère.

— Oui mais ce n’est pas grave. Et il a peut-être moins. Tu sais que je suis nulle pour donner un âge aux gens.

— Je te fais marcher et toi tu cours, se moque-t-elle. Moi, du moment qu’il aime les films Disney, je peux tout accepter.

Ma mère et sa passion pour Disney… S’il se passe quelque chose avec Rick et que je lui présente mes parents, je ne dois pas oublier de l’avertir qu’il va rencontrer la plus grande fan de Mickey. Des bibelots achetés au célèbre parc d’attraction décorent tout leur appartement. Si au début ça gênait mon père, il a fini par s’habituer et ne prête même plus attention aux chaussons qu’elle porte toujours.

Nous terminons le déjeuner autour des éclats de rire et d’anecdotes de la famille.

— Et ton Rick il est parisien ?

— Non il est de Bourgogne. Toute sa famille est là-bas.

— Il vient de pays de la moutarde, s’exclame mon père qui adore le condiment.

— Toujours en train de penser à manger, se moque ma mère.

 

Le déjeuner se termine dans la joie et la bonne humeur. Ma mère est ravie que je fasse découvrir le monde de Dory à Rick. Même si elle aimerait que je lui montre toute la collection des Disney. Elle accepte même qu’il vienne chez eux pour voir toutes ses figurines. Mais je crains que ça ne passionne pas Rick d’avoir des détails sur Dumbo, Jasmine, Simba, Bambi, Cendrillon…

 

Je fais la route jusque chez moi en chantonnant au volant. Ce petit moment en famille m’a fait le plus grand bien. Comment ai-je pu ne pas aller les voir pendant si longtemps ?

— C’est moi bébé chou !

Je retire mes chaussures et marche jusqu’à l’aquarium.

— Ca n’a pas été trop long ? Maman a essayé de manger vite, mais papi et mamie sont très bavards.

J’accroche ma veste dans l’entrée et prends mon téléphone. Aurélie m’a envoyé un message pour avoir de mes nouvelles. D’après ce qu’elle m’écrit, je crois qu’elle a encore failli étriper sa stagiaire avant sa pause déjeuner. Rick aussi m’a contacté. Il me demande ce que je fais aujourd’hui. Je m’empresse de lui répondre que j’ai fait des courses avant d’aller déjeuner chez mes parents.

Lou : Et toi ?

Rick : J’ai nettoyé l’aquarium de Bubulle et Coco.

Cet après-midi je m’occupe du deuxième.

Qu’ils soient sur leurs 31 pour te rencontrer.

Je lui réponds par un smiley avec des étoiles à la place des yeux.

Lou : Cet après-midi j’essaye de me poser et de me concentrer sur un livre.

Rick : Intéressant. J’affectionne ce genre de programme.

Quel livre ?

Lou : Le magasin des suicides de Jean Teulé. Tu connais ?

C’est un cadeau de ma meilleure amie.

Quand je lui disais chaque jour hésiter entre me pendre au lustre et avaler tout un tube d’aspirine avant de m’ouvrir les veines.

Rick : Te pendre au lustre ?

Ca existe encore les lustres ?

Lou : Je n’ai pas de lustre…

Mais Aurélie me prenait quand même au sérieux.

Rick : La prochaine fois menace plutôt de sauter par la fenêtre.

Je l’avais fait, mais apparemment je n’étais pas crédible.

(J’habite au rez-de-chaussée et au premier étage.)

Rick : (Tu as un appartement à chaque étage ?)

Lou : (Presque. Je vis dans un dupleix.)

Rick : (Sympa.)

Et ton amie t’as pris au sérieux avec ta menace du lustre ?

Elle n’a pas réagi que tu n’en avais pas ?

Lou : Je crois qu’à force elle n’écoutait plus trop.

Juste qu’elle avait peur que je passe à l’acte.

Une fois je lui ai dit que j’allais avaler une boule de billard pour m’étouffer.

(C’est pas beau les peines de cœur.)

Rick : Et heu… tu as un billard ?

Je lui réponds avec un smiley qui rit. Et il m’envoie lui aussi un message avec un émoticône qui pleure de rire.

 

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