Chapitre 16
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Chapitre 16
Jeudi 11 avril 2022
Encore une nuit où j’ai mal dormi. L’insomnie a encore frappé et m’a tenu éveillée jusque tard dans la nuit. Mais j’ai décidé d’aller chez le coiffeur, alors je me pousse pour sortir du lit. Comme chaque fois que je me réveille fatiguée, je ronchonne en descendant l’escalier.
— Bonjour mon p’tit chat, je dis entre deux bâillements.
J’ouvre le couvercle de l’aquarium et nourris mon poisson Aujourd’hui il a le droit aux larves lyophilisées.
— C’est trop dégueu, je commente en vidant le sachet.
Je referme le couvercle et vais jeter le petit sachet vide en le tenant du bout des doigts, comme s’il risquait de m’exploser dans la main.
Dans la cuisine, je prépare mon chocolat et le met à chauffer. En attendant je retourne dans le salon.
— Maman va chez le coiffeur aujourd’hui. C’est cool hein ? Tu me reconnaitras j’espère. Ne pense pas que je t’ai donné à une inconnue. Je te serais fidèle jusqu’à ton dernier battement de nageoire.
Je me tourne et mes yeux voient le mini cactus posé sur la table basse.
— Je t’avais déjà oublié toi.
J’attrape le pot et le tourne doucement dans mes mains.
— Hmm… Je vais t’appeler Ratus. Les plantes aiment qu’on leurs parle parait-il. Alors je vais te parler à toi aussi. Comme à mon p’tit chat.
Je place le pot juste à côté de l’aquarium. Au moins lorsque je parlerais à mon poisson, mon cactus pourra m’entendre lui aussi. Je vais faire le maximum pour qu’il se plaise bien chez moi et qu’il grandisse.
Quand j’ai terminé mon petit déjeuné, je retourne dans ma chambre choisir un jean et un chemisier. Je reste dans des vêtements simples, mais aujourd’hui je n’ai pas envie de porter les sweats habituels. Serait-ce bon signe ?
Je me maquille très légèrement, juste pour avoir meilleure mine. En revanche j’applique une couche épaisse d’anti cernes pour ne pas effrayer les gens que je vais croiser. J’ai des yeux de panda. Ca me rappelle qu’Aurélie adore les pandas. Elle est amoureuse des ours. Mais surtout des pandas... Pour me coiffer je fais une espèce de grosse couette, que je transforme en chignon décoiffé grâce à quelques épingles.
Avant de partir, je relance les chants des baleines en rapprochant l’enceinte de l’aquarium. Mon doigt glisse doucement sur la vitre et Surimi vient tout de suite pour le suivre.
— Maman va se faire toute belle et jolie. A tout à l’heure mon chéri.
Je pars à pied. Pour une fois, je ne me cache pas dans ma voiture et profite du soleil. Le printemps démarre et marcher dans les rues ensoleillées devrait être bon pour mon moral.
Avec mes écouteurs dans les oreilles, je vais jusqu’au coiffeur. Il n’y a pas trop de monde et je n’ai presque pas à attendre.
— Vous savez ce que vous souhaitez faire ? Coupe ? Brushing ?
— Je veux couper. Faire un carré plongeant, comme ça, je dis en montrant une photo sur mon téléphone. Et je voudrais redevenir blonde. Retrouver ma couleur naturelle, celle de mes racines.
— Oh, d’accord. Alors… réfléchit la coiffeuse en détaillant mes cheveux. Il va falloir décolorer, ça risque d’abîmer vos cheveux.
— Ce n’est pas grave, je les recouperais quand ils auront poussé. Je ne veux plus de roux. Ni de cheveux longs.
— Très bien. Je vais préparer les produits, me dit-elle en repartant près des bacs où elle prend un pot et des tubes.
Je croise mes mains sur mon ventre en fermant les yeux. J’inspire et expire un bon coup. Ca y est, je vais enfin ressembler à celle que j’étais avant et que j’aimais. Trop d’années à être rousse et à laisser pousser mes cheveux pour plaire à Mickaël. Je réalise combien j’ai été bête de céder à tous ses caprices. C’était ma tête après tout. Et il n’avait pas à imposer ses préférences. Je ne ferais plus jamais cette erreur de laisser quelqu’un m’obliger à avoir une apparence que je n’aime pas.
— Allez, c’est parti, dit la coiffeuse en revenant avec un petit chariot.
Tout sourire, je regarde mon reflet une dernière fois, déjà prête à lui dire adieu.
Pendant que la coloration pause, je feuillette quelques magazines et découvre les derniers potins. A force de me renfermer sur moi-même, j’ai raté tout ce qui s’est passé dans le domaine des célébrités. Les nouveaux couples, les ruptures, les naissances, les tromperies, les succès, les échecs…
Mon portable vibre et je regarde distraitement. Quand je vois que c’est Rick, je me concentre déjà plus.
Rick : Bonjour ma chère Liloo.
J’espère que tu vas bien.
Hier j’ai oublié de te parler de ton premier changement d’eau. Tu l’as prévu quand ?
Le premier changement d’eau. De quoi il parle ?
Lou : Bonjour cher Alderick-Vince.
Ca va et toi ?
Heu… Quel changement d’eau ?
Rick : Oula….
N’écris pas mon prénom en entier, ça me fait trop de bizarre.
Le changement d’eau de la semaine.
Celui qui est très important. Une semaine après avoir mis ton aquarium en marche.
Dois-je en conclure que… tu n’es pas au courant ?
Lou: Mais, je ne savais pas. Tu es sûr de m’en avoir parlé ?
Je dois vider l’eau de l’aquarium ? Mais ça va me prendre un temps fou !
Et où je mets Surimi pendant ce temps-là ?
Ca y est, je paniiiique !
Avec ma coloration qui pose sur ma tête, je ne peux pas me permettre de suer à grosses gouttes. Pourtant je sens déjà que je transpire en imaginant devoir vider mon aquarium et le remplir ensuite pour remettre Surimi dedans au plus vite.
Rick : Pas de panique ! Il ne s’agit de rien qui soit au-dessus de tes capacités.
L’idée c’est de vider environ un tiers de ton eau, pour la remplacer par de l’eau « neuve » et d’ajouter ensuite les mêmes conditionneurs que tu as utilisés lors de ta première mise en eau pour éviter un pic de nitrites.
Pendant que tu fais ton changement d’eau tu laisses Surimi dans son aquarium. Ce n’est pas la peine de le remettre dans son bocal (ce serait même dangereux.)
Tu as un siphon ? Un seau ?
Lou : Bien-sûr que j’ai un siphon à mon évier, mais quel est le rapport ?
J’ai aussi un seau pour faire le ménage.
Un tiers de l’eau ?! Mais je vais la mettre où toute cette eau ?
Comment je la vide ?
Je ne savais pas tout ça, tu es en train de m’affoler !
Je n’ai pas le temps de lire sa prochaine réponse, la coiffeuse m’appelle au bac pour rincer mes cheveux. Mon portable est dans ma poche et pendant que le soin pose je le reprends pour lire le message de Rick.
Rick : Ne le prends pas mal. Mais qu’est-ce que tu me fais rire !
Liloo voyons, je ne parle pas du siphon de ton évier.
Tu n’as pas un genre de pompe avec un tuyau pour aspirer l’eau et les saletés déposées sur les graviers ?
Le seau il ne faut pas qu’il y ai eu de produit dedans, tu dois utiliser du matériel dédié à l’aquarium pour éviter toute contamination.
Oh misère, je pense en me mordillant la lèvre.
Lou : D’accord, je vais m’acheter un seau. Un autre seau je veux dire.
Je le trouve où le siphon ? Au rayon bricolage ?
Je dois faire ça aujourd’hui ?
Surimi risque d’y passer si je ne le fais pas dans les temps ?
La coiffeuse revient et rince le soin. J’ai l’impression de sentir déjà ma chevelure plus légère. Avant d’appliquer la coloration, elle avait coupé grossièrement ma longueur pour que mes cheveux m’arrivent aux épaules.
Elle enroule ma chevelure dans une serviette éponge et je retourne m’assoir face au miroir.
— Prête ? me demande-t-elle en frottant la serviette sur mes cheveux.
— Oui, je lui réponds impatiente.
Elle lâche mes cheveux et la blondeur me met des étoiles dans les yeux. Qu’il est bon de redevenir soi-même.
— Donc pour le carré plongeant, je fais les mèches les plus longues à quel niveau ?
Je lui montre à peu près la longueur que je souhaite et elle commence à manier ses ciseaux et coupe mes cheveux comme un paysagiste le ferait avec un buisson.
Mes lèvres sont pincées, mon visage un peu crispé alors que la coupe prend forme.
— Brushing ? m’interroge la coiffeuse quand elle a terminé.
J’acquiesce en gardant mon sourire. Elle sèche mes cheveux en les enroulant autour d’une grosse brosse ronde et le reflet que me renvoie le miroir me plait de plus en plus.
Quand elle a terminé et me montre l’arrière de ma tête avec un miroir rond, je remarque que le sourire ne quitte plus mes lèvres. Je me trouve belle. Très belle. Trop belle. Et je passe plusieurs fois mes mains dans mes cheveux doux et brillants.
Dès que je sors du salon, je reprends mon portable et lis le dernier message de Rick.
Rick : Non, il ne va pas mourir si tu ne changes pas l’eau aujourd’hui.
Le siphon (ou la pompe) s’achète dans les magasins spécialisés ou en animaleries. Tu en trouveras facilement sur internet au pire.
Je te recommande de faire le changement ce week-end.
Une fois par semaine c’est l’idéal.
Mais si c’est trop contraignant et que ton eau n’est pas trop polluée, tu peux envisager un changement tous les quinze jours.
Pour l’eau tu la vidange dans le seau et tu l’utilises pour nettoyer ton filtre (la ouate, les éponges) et les décorations si tu veux.
Mais surtout ne les rince/lave JAMAIS à l’eau du robinet.
Lou : D’accord… Je vais retourner chez Jardiland pour m’équiper.
Je vais faire ça dimanche. Tu pourras bien tout m’expliquer samedi ?
En marchant vers chez moi, je guette sa réponse qui ne tarde pas à arriver.
Rick : Evidemment. Je pourrais même te passer une pompe, j’en ai plusieurs.
C’est fou comme je souris facilement depuis que Surimi et Rick sont dans ma vie.
— Maman est rentrée, je préviens mon poisson en retirant mes chaussures.
Je viens devant l’aquarium et me penche pour lui montrer ma nouvelle coupe.
— Alors ? Qu’est-ce que tu en penses ? Moi j’adore. Toi aussi ?
Ca sonne et je retourne devant la porte avec ma veste toujours sur le dos. J’ouvre en me demandant qui ça peut bien être. Et là, mon cerveau s’arrête de penser quand je le vois.
— Salut Liloo, me lance Mickaël en me faisant un beau sourire.