Chapitre 20 - À l’aube d’une nouvelle croisade
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Chapitre 20 - À l’aube d’une nouvelle croisade
Loin du monastère, Bernard de Clairvaux, L’ombre du trône du Saint-Empire Germanique, continue d’étendre son influence. Depuis plusieurs mois, il prêche une seconde croisade. Son talent oratoire, lors d’un sermon à Vézelay en mars 1146, lui permet de rallier le roi de France, Louis VII, à sa cause. Il aspire à unir tous les chrétiens d’Europe pour reprendre la Ville Sainte des mains des Seldjoukides, une dynastie turkmène qui préoccupe grandement les chrétiens d’Orient.
Alors qu’il se rend à Mayence pour rencontrer l’Empereur Conrad III, successeur de Lothaire, il décide de faire un détour par le monastère de Disibodenberg. Officiellement, il s’agit d’une visite de courtoisie entre deux chrétiens. En réalité, la réputation grandissante de la nouvelle Mère Supérieure ne cesse de l’inquiéter. Cette femme est devenue dans tout le Royaume une véritable légende.
Comment une simple femme peut-elle faire preuve de tant de talents dans l’écriture, la musique et la médecine ? Ayant eu vent également de son intransigeance vis-à-vis des étrangers, il feint de lui montrer le plus respect :
— Révérende Mère, votre sagesse est connue dans tout le Saint-Empire. Désireux de servir Dieu de mon mieux, je cherche votre bénédiction et vos conseils pour libérer la Ville Sainte.
Hildegarde, le regard empreint de gravité, répond :
— Monseigneur, votre foi est puissante, mais je doute que la guerre soit la meilleure solution pour plaire à notre Seigneur. La Terre Sainte doit être un havre de paix pour toutes les religions, pas un champ de bataille sanglant. Il a été consacré par Jésus lui-même et il doit rester à tout jamais un lieu de recueillement pour tous les hommes et toutes les femmes, quelle que soit leur religion.
Le moine, visiblement troublé par ses paroles, réplique :
— Mais n’est-ce pas notre devoir de protéger nos frères chrétiens et de récupérer nos lieux saints ?
— Protéger oui, conquérir non. Vous devez à tout prix négocier une paix durable à vos ennemis et les convaincre que cette terre doit un lieu de partage et de prière pour tous. Si vous échouez, les peuples de Dieu seront tous massacrés durant des centaines et des centaines d’années.
Bien qu’ébranlé par cette vision, Bernard de Clairvaux persiste dans sa volonté de mener la Guerre Sainte. Il quitte le monastère, marqué par cette rencontre, mais résolu à poursuivre son chemin. La nouvelle de la rencontre entre le moine cistercien et Hildegarde fait l’objet de nombreuses rumeurs. La Mère de Bingen a désormais, qu’elle le veuille ou non, pris place au cœur des intrigues du Royaume.