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un autre regard du Congo

un autre regard du Congo

Pubblicato 12 giu 2020 Aggiornato 12 giu 2020 Viaggi
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un autre regard du Congo

10 Janv 13

 

Ce matin comme tous les matins, je prends la ruelle qui part de chez moi pour rejoindre le goudron. Je slalome entre les immenses flaques d’eau qui la parsème, sur ce chemin défoncé et bouillasseux, raviné par les pluies. Pourtant, à 50m de chez moi habite un ministre qui subit lui aussi les inconvénients de cette rue en piteuse état. Mais cette rue est à l’image du Congo. A part les axes principaux goudronnés, et présentant eux mêmes à certains endroits de gros trous, aucune rue n’est aménagée. Aucun caniveau, aucun lampadaire, des quartiers entiers de la capitale non alimentés en eau et électricité, ou subissant le délestage 2 jours sur 4.

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Pourtant le fric ne manque pas ici. Grâce à la manne du pétrole, les pouvoirs publics sont excessivement riches. Mais l’aménagement du territoire est très souvent délaissé. Seuls les axes officiels empruntés par le président sont correctement entretenus. Les autres grands axes ne sont que des vestiges du temps de la colonisation. Le bitume n’a pas été refait depuis. Alors, pour pallier à ce déficit criant d’infrastructures certains font les choses à leur manière. Ils répandent un sac de gravas, parpaings cassés, vieux ciment, bouteilles en plastiques écrasées dans les mares pour tenter de compenser le terrain. Mais déposés là sans effort supplémentaire, c’est un vrai piège pour les voitures qui les évitent donc. Faisant des travaux chez eux, ils étalent du sable pour niveler le terrain. Je ne vous dit pas la pataugeoire que ça fait à la prochaine grosse pluie. Les riches comme mon ministre ne sont pas trop incommodés avec leur 4X4 qui passent partout. Mais pour les piétons (notamment la nuit) et les taxis c’est une autre histoire.

Ici on ne croit absolument pas dans les pouvoirs publics et on n’hésite pas à le dire. Les flics arrêtent les voitures pour un rien et attendent le billet pour laisser repartir. Les riches sont excessivement riches, il y a une classe moyenne aisée avec téléphones et tablettes tactiles, et puis il y a les gens qui se battent pour trouver l’argent pour la journée. Chacun gère ses affaires au quotidien sans se préoccuper du lendemain. On ne pense qu’au profit à court terme, sans vouloir faire trop d’effort pour autant. Il n’y a quasiment aucune industrie dans ce pays, la quasi totalité des produits manufacturés est importée ; seuls viennent du Congo les fruits et legumes cueillis et revendus tels quels.

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Pourtant comme je vous l’ai dit il y a de l’argent, beaucoup d’argent, et une catégorie de gens très aisée. Mais ici quand tu as de l’argent tu l’investis dans une parcelle à louer, des taxis, un commerce à faire tenir par un petit. Les moins aisés quant à eux achètent deux trois bricoles qu’ils cherchent à revendre un peu plus loin.  Mais rien n’est fait pour créer une valeur ajoutée aux biens. Ce n’est qu’un énorme trafic, du commerce sous toutes ses formes et les innombrables taxis et minibus qui font les navettes. L'emploi n'est que là. Tout le monde se plaint que le gouvernement ne créé pas plus d’emplois, ne développe pas d’activités, ne fait rien pour l’essor du pays. De nombreux diplomés du supérieur se retrouvent vendeurs de marché ou chauffeur de taxi.

Mais les initiatives privées n’existent pas non plus, chacun cherche son profit personnel, personne n’a la volonté ou l’espoir de faire progresser le pays. C'est sur que monter son entreprise est énormément compliqué ; sans banques qui prêtent, sans infrastructures fiables, des employés qui ne savent pas respecter les horaires, l'obligation de faire passer qqn de ta famille avant d'employer qqn qui a les diplomes et les competences requises...Tout ca rend les choses compliquées. Mais j'ai le sentiment qu'il n'y a pas non plus l'esprit d'initiative ni la volonté pour ceux qui en auraient la possibilité..

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Alors les expatriés en profitent. Il y a d’abord les westaf’ (comprenez west africains, sénégalais pour la plupart) qui gèrent toutes les épiceries. Les libanais qui possèdent nombre de commerces, d’hôtels et de restos. Les français qui ont développé contre vents et marées des entreprises de service, qui emploient désormais plusieurs centaines de locaux. Il faut avoir beaucoup de pugnacité pour créer une activité quand on voit la lenteur que prend chaque chose. Et enfin les chinois qui investissent ici en masse, construisent des champs de maisons ou des immeubles de haut standing, avec souvent leur main d’œuvre ramenée du pays.

Et les congolais sont les grands perdants de l’histoire, voulant profiter de tous ces biens de consommation mais ne produisant rien, trafiquant des produits sans jamais les transformer, vivant sur la richesse de ses matières premières (pétrole, minerai, fruits…) sans leur créer eux meme une valeur ajoutée.  C’est un peu l’histoire du cacao ou du café récolté en Afrique, importé tel quel en Europe ou il y est transformé, puis revendu ici à un prix élevé. Ici, on vend la concession de l'exploitation du petrole dans le golfe de Guinée à Total, qui s'occupe de l'extraire, de le raffiner et de le revendre.

 

Je ne dirai pas aujourd’hui qu'on vient  juste piller l’Afrique de ses biens. J’ai plutôt l’impression qu’on fait ici ce que les Congolais fortunés ne feraient pas eux-mêmes,  et que cela crée de la richesse et de l’emploi.  Ceux qui ont eu l’audace de monter leur business ici en tirent en contrepartie de très larges bénéfices, et les expat ont la belle vie. Il est cependant très désolant de voir que les Congolais ne tiennent pas eux-mêmes les cartes de leur propre développement. Et entre l’inertie du politique et l’état d’esprit peu entreprenant des congolais, je ne sais pas où se situent exactement les responsabilités.

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