

Les victimes entre la culpabilisation et la lâcheté ordinaire
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Les victimes entre la culpabilisation et la lâcheté ordinaire
Ceci est un commentaire étendu rédigé à chaud sur une publication de Lola Clarouche intitulée Harcèlement scolaire : "Le jour où j'ai compris que le silence ne protégeait pas
C'est une réaction à chaud... qui vaut ce que vaut une réaction à chaud...
Edit : je viens de republier ce texte via ordinateur suite à un incident technique qui n'en laisse apparaître que les deux derniers paragraphes.
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Disparaître, s'effacer de soi- même, c'est donner aux harceleurs exactement ce qu'ils veulent. Ils trouvent qu'on ne devrait pas être là, qu'on ne devrait plus être là ? Eh bien voilà, on n'est plus là.
Le silence
Son silence à soi
Le harcelé (ou la harcelée) reste silencieux (ou silencieuse) parce qu'il/elle se dit que réagir, y accorder de l'importance, c'est déjà donner aux harceleurs ce qu'ils veulent. C'est montrer qu'on est touché, qu'on est blessé, alors que tout ce que les harceleurs cherchent, justement, c'est à toucher, c'est à blesser, c'est à tourner le harcelé en bourrique en le faisant courir.
Parfois, le silence, l'indifférence, ça marche. Ça marche quand le but est de faire courir le harcelé (ou la harcelée) après un objet qui lui appartient mais qu'il n'arrive pas à récupérer. Ça marche quand le but est de le faire réagir à certaines paroles pour s'amuser de sa réaction. Dans ces deux cas, l'indifférence tue le jeu. Un jeu qui tombe à plat, ce n'est plus du jeu. Ça cesse d'être amusant.
Mais les rires étouffés, les regards complices, les mauvaises blagues, ça, ce n'est plus du jeu pour s'amuser d'une réaction. C'est tout à fait autre chose. En fait, c'est signifier au harcelé, en commençant dans la douceur, que sa place n'est pas là où il se trouve. C'est une façon de dire : "Malheureusement, nous n'avons pas le pouvoir ni l'autorité de te foutre dehors, sinon, qu'est-ce que nous le ferions, et avec grand plaisir encore. Mais malheureusement, ça ne dépend pas de nous, ça dépend d'autres personnes, et ces autres personnes qui sont chargées de décider qui entre dedans, qui reste dehors et qui sort dehors ne font pas leur boulot, ou pas comme il faut, ou en tout cas pas comme nous, nous le ferions si nous étions à leur place. Mais si nous ne pouvons pas te foutre dehors, nous pouvons au moins t'exclure. Nous pouvons au moins te faire comprendre et te faire sentir que ta place n'est pas ici. Nous pouvons te faire comprendre que tu as intérêt à partir de toi-même, même si les adultes/le système ne te disent pas de foutre le camp, parce que ta vraie place est dehors et pas dedans. Nous commencerons en douceur, mais si tu ne comprends pas de toi-même, nous serons petit à petit de plus en plus durs, jusqu'à ce qu'enfin tu comprennes et tu partes de toi-même. Et sache que si toi, tu es tout seul, nous, nous sommes plusieurs, et que tout seul contre plusieurs, tu n'as aucune chance. D'ailleurs, si nous sommes plusieurs, c'est bien parce qu'il y a une raison, non ? Une raison qui n'est pas conne mais bonne ? Réfléchis et médite là-dessus - si toutefois tu en es capable."
En d'autres termes, le harcèlement est en réalité un aveu d'impuissance et de faiblesse de la part du harceleur - ou plutôt des harceleurs, parce qu'ils compensent souvent leur impuissance individuelle par la force du nombre. Non seulement on se sent toujours plus fort à plusieurs que tout seul, mais en plus, les harceleurs utilisent leur nombre même comme un argument qui prouve qu'ils ont raison et que c'est le système - qui inclut le harcelé au lieu de l'exclure - qui a tort. Ils agissent comme s'ils pensaient que la vérité est démocratique et que plus on est nombreux à penser la même chose, plus cela prouve qu'on a raison.
Soi-même, on peut avoir tendance à se taire, surtout au début, et à jouer l'indifférence parce qu'on pense que réagir serait disproportionné et un aveu de faiblesse ("tu es susceptible, tu te vexes de bien peu de chose, on ne fait que rire et lancer des regards, ce n'est pas bien méchant, on ne fait rien de mal, on en a bien le droit, non ? on a encore le droit d'avoir une opinion et de ne pas aimer tout le monde ?"). J'avoue que moi-même, j'avais - et j'ai peut-être encore - tendance à réagir par le silence et en jouant l'indifférence. À me dire qu'il ne faut pas accorder à ces choses encore bien insignifiantes une importance qu'elles ne méritent pas, et que je ne dois pas me laisser intimider par si peu. Alors qu'en réalité, dès le début, confronter le(s) harceleur(s) (et/ou harceleuse(s)) dans le style "t'as un problème ?", même si ça paraît exagéré, est souvent ce qu'il faut pour remettre les choses en place. Souvent, les harceleurs n'oseront pas dire tout haut en face au harcelé (ou à la harcelée) ce qu'ils murmurent tout bas quand il/elle a le dos tourné, ou même, une fois que le harcèlement a commencé, quand il/elle n'est tourné(e) que de côté ou de trois quarts. Ils n'en auront pas le courage, surtout en cas d'une confrontation directe qu'ils font justement tout pour éviter (si on leur demande de se justifier, la plupart du temps, ils nieront tout en bloc, c'est assez rare qu'ils assument franchement leurs actes et leurs positions). Mieux même : une confrontation directe vaudra même du respect de leur part !
Le silence des autres
Parmi les autres qui ne sont pas partie prenante dans le harcèlement mais qui n'en sont que spectateurs, ceux-là mêmes dont le silence fait tant souffrir les harcelés plus que le harcèlement en lui-même, les raisons de se taire varient selon le groupe, les opinions et les intérêts.
Le silence des condisciples
Ils peuvent se taire par approbation, parce qu'ils donnent raison aux harceleurs et les admirent même de dire et surtout de faire tout haut ce que les autres ne font que penser tout bas sans oser aller plus loin parce qu'ils craignent des ennuis avec le système ou parce que plus largement ils ne cherchent pas la bagarre et se contentent de penser tout seuls ou en petits groupes dans leur coin. Les harceleurs, parce qu'ils passent à l'action dans leur refus, prennent à leurs yeux une aura de rebelles qui, eux, ont le courage de tenir tête aux adultes et/ou au système. Leur silence est bienveillant pour les harceleurs, il est pleinement complice, et d'ailleurs, à la première occasion, dès qu'ils sont sûrs de ne pas avoir d'ennuis parce qu'ils pensent que le nombre en soi les protègera, ils se laissent entraîner, ils s'enhardissent, ils se joignent à eux et vont grossir leurs rangs.
Ils peuvent désapprouver mais se taire quand même, par simple peur d'avoir des ennuis. Peur de passer à leur tour sous les fourches caudines du harcèlement. Peur d'avoir des ennuis avec les adultes/le système si le conflit devient visible et/ou bruyant. Peur d'avoir des ennuis avec leurs parents qui leur demanderont pourquoi ils se mêlent d'un conflit qui ne les regarde pas, et qui leur rappelleront qu'ils vont à l'école pour faire des études, obtenir un diplôme et préparer leur avenir (transposé au monde du travail, ce seront un conjoint, un foyer, une famille, des amis, qui leur rappelleront qu'ils vont au boulot pour gagner leur vie, éventuellement pour faire carrière et surtout pour nourrir les leurs) et pas pour jouer les chevaliers servants et prendre la défense de la veuve et de l'orphelin. Autrement dit, "tu n'es pas là pour les autres, tu es là pour toi-même (et éventuellement pour les tiens)". Donc, manque de soutien dans leur entourage, surtout proche. Un manque de soutien qu'ils finissent par intérioriser, sur le mode "c'est mal, c'est vrai, mais qu'est-ce qu'on peut y faire ?" ou encore "on ne fait pas la révolution à soi tout seul, même si on intervient, ça ne changera rien et les choses seront peut-être même encore pire pour tout le monde", voire sur le mode "ce n'est pas à nous d'intervenir et de faire quelque chose, et si ceux qui sont censés le faire ne le font pas, que pouvons-nous faire, nous ?". Certains vont même jusqu'à douter du bien-fondé de leur intervention éventuelle : "si ceux qui sont censés intervenir n'interviennent pas, c'est peut-être qu'ils ont une bonne raison de s'abstenir, une raison que nous ne connaissons pas évidemment, nous n'avons pas tous les éléments pour en juger et peut-être qu'il y a une bonne raison pour que les choses soient ce qu'elles sont..."
Ils peuvent se taire tout simplement parce qu'ils sont indifférents, parce qu'il ne s'agit pas de gens qui leur sont proches, parce qu'ils ignorent de quoi il retourne et qu'ils ne veulent pas le savoir non plus, parce qu'ils estiment que ce n'est pas leur problème, donc qu'ils n'ont pas envie d'avoir des ennuis pour ça et qu'après tout, c'est aux harcelés et aux harceleurs qu'il revient de s'expliquer et d'arranger leurs bidons entre eux et ce n'est le problème de personne d'autre à part eux.
Le silence des adultes/du système
Il y a ceux qui se taisent parce qu'à l'instar des harcelés, surtout au début du processus, ils trouvent qu'il n'y a là rien de bien grave, qu'il n'y a même pas de quoi fouetter un chat, qu'il ne faut pas exagérer les choses et que les parents qui viennent se plaindre de ce que leurs enfants se font harceler (car les plaintes viennent souvent des parents à ce stade, qui relaient auprès des autorités scolaires les problèmes de leurs enfants parce que ces derniers leur en parlent) font vraiment une montagne d'une souris, encouragent de la sorte une certaine fragilité morale chez leurs enfants et feraient mieux de leur apprendre à s'endurcir un peu et à se défendre. Ceux-là répondent aux éventuelles plaintes par un silence poli, parfois accompagné d'un sourire.
Il y a ceux qui craignent qu'en intervenant, ils se retrouvent en train de faire pis que bien, parce que l'autorité n'est pas que protectrice mais doit remplir aussi d'autres fonctions donc ne peut pas être constamment derrière harcelés et harceleurs, et parce que si les harceleurs se calment effectivement quand la protection est présente, leur agressivité redouble dès qu'elle s'absente, contre des harcelés perçus alors comme des fayots et des frotte-manche voire des lèche-bottes : "ah, tu fais bien le malin quand tes protecteurs sont là, à ce moment-là tu te crois fort, hein, mais dès qu'ils ne sont plus là, tout de suite, tu fais moins le malin !"
(Je dois dire que malheureusement, leur crainte est loin d'être infondée. Je me souviens dans mes années secondaires d'un jeune prof chambardé qui s'en était allé quérir l'aide du directeur de l'école pour ramener le calme. Sur le moment même, tant que le directeur était sur place dans la classe et délivrait en la matière un laïus plutôt énergique, certes, les élèves se sont retenus. Mais dès qu'il est reparti et a refermé la porte, le chambard a repris de plus belle. En fait, la situation était encore pire après qu'avant ! Cet événement m'a laissé la conviction durable que se réfugier derrière l'autorité ne fait qu'empirer les choses au lieu de les résoudre. Autre exemple tiré de la vie adulte, que ne renierait pas Stephen King (il l'a mis en scène dans Rose Madder) : nous connaissons la situation de ces femmes qui sont attirées par des hommes aux gros bras et aux carrures de déménageurs parce qu'elles voient en eux des défenseurs... jusqu'au jour où ces gros muscles derrière lesquels elles se sont réfugiées, leurs hommes les utilisent contre elles pour les battre...)
Certains craignent même que la légitimité de leur autorité soit remise en cause s'ils se mettent à défendre des harcelés, parce qu'ils se feront tout de suite accuser de favoritisme (ce qui se révèlerait préjudiciable aussi bien aux harcelés qu'à eux-mêmes).
Il y a ceux qui foncent encore plus loin dans ce raisonnement et qui disent que le harcèlement est pour le harcelé l'occasion d'apprendre à se défendre et à le faire lui-même, car c'est toujours un piège, et toujours dangereux, de dépendre de quelqu'un d'autre pour assurer sa défense. Ceux-là disent que ça fait tout simplement partie des dures et difficiles leçons de l'existence.
Et il y a enfin ceux qui sont convaincus que les harcelés sont eux-mêmes responsables de leur propre harcèlement, pour la bonne et simple raison que tout le monde ne se fait pas harceler, et que ce n'est pas non plus n'importe qui qui se fait harceler. Leur argument consiste à dire que les harcelés attirent eux-mêmes leur triste sort sur eux pour deux raisons possibles : soit ils correspondent à un certain profil (manque d'aptitude à se défendre, différence trop forte par rapport au groupe et manque de volonté d'intégration, isolation, manque de compétences sociales pour savoir s'entourer et créer autour d'eux un réseau de relations - et dans ce cas ils estiment que c'est l'éducation parentale qui est en cause et qui s'est montrée défaillante, donc que les vrais responsables sont les parents, et que ces derniers ont un fier culot s'ils viennent encore se plaindre après ça qu'on harcèle leurs enfants), soit ils ont adopté un certain comportement (qui a erronément donné à penser que...). On y retrouve le même raisonnement pervers qui rend la victime coupable de sa propre victimisation parce que soi-disant elle aurait "provoqué" son bourreau en lui donnant de faux espoirs d'obtenir certains avantages ou certaines faveurs, ou alors en se positionnant comme "faible" - raisonnement couramment servi en cas de viol, mais pas que. Ceux-là vont parfois jusqu'à dire que harceler, c'est comme attaquer, c'est une question d'audace : il faut oser le faire - et si certains ont osé, c'est parce que d'autres leur ont erronément (ou pas...) donné des signaux qui leur ont donné à penser qu'ils pouvaient se permettre d'oser et y aller sans crainte... ou alors plus simplement parce que les autres en question ont manqué de prudence et n'ont pas su se protéger comme il fallait.
Des mentalités à changer
Disons-le clairement : le système estime qu'en cas de victimisation, qu'il s'agisse de harcèlement, d'agression, de viol, de vol, de cambriolage ou d'autre chose encore, la faute est du côté de la victime et pas du côté du bourreau. Le bourreau, le pôvre, il a juste été tenté par la victime, voyons... on ne peut pas lui reprocher plus que d'être simplement tombé en tentation...
Mais oui bien sûr.
Il reste encore du boulot pour éduquer la société...
Crédit image : © Alain Bachelier


Aline Gendre 4 ore fa
Oui, notre société a un grand problème d'empathie, de responsabilisation et d'éducation genrée qui distille de la domination dans toutes les relations. Chez les hommes le plus souvent, mais aussi les femmes d'aune autre manière.
En lisant votre article, j'ai réalisé que j'avais souvent assisté au harcèlement à plusieurs âges autant milieu scolaire et pro.
Je n'ai pas toujours été au top pour me positionner.
Ado, j'ai su m'excuser d'avoir juste regardé. J'ai consolé.
Parfois protégé ( le protocole scolaire ayant été efficace et ayant rendu justice ).
Mais le plus dur a été de s'opposer franchement au groupe. Je l'ai fait parce que j'étais en train d'imploser devant cette injustice. J'ai cru que j'allais y laisser des plumes. Mais non. Dans ce groupe de personnes, il s'avère que chacune, individuellement, était quelqu'une de bien ... Vraiment. Cette expérience m'a montrée combien on se sentait légitime à tout en "meute" et l'on oubliait ce que l'autre vivait.
Par contre, face au harcèlement d'un cousin que j'ai vécu enfant, je me souviens très bien d'avoir eu un "tu n'as qu'à pas traîner avec ou te défendre." yeah ! En voilà une solution qu'elle était pas bonne car pas à ma portée affective et physique ! ;-)
Aline Gendre 1 giorno fa
Hou la la : un article que je vais aimer lire en entier !
Yvon Stein 2 giorni fa
Je l'ai un peu vécu suite à un cambriolage (loitain) : au commissariat, tu es d'abord regardé d'un air suspicieux , il faut de longues explications pour que cela change.. un peu.. ce n'est pas agréable, déjà on se fait dépouiller , alors affronter cela en plus...
Jackie H 2 giorni fa
Avis à tous ceux qui ont aimé ma publication : elle est très incomplète parce que j'ai rencontré un problème technique. Quand j'essaie de publier, le bouton "Publier" reste mort (c'est la deuxième publi sur laquelle ça m'arrive 😡) donc je crée un nouveau brouillon, je refais le formatage, je publie et j'efface l'ancien brouillon. La fois dernière, ça avait bien marché mais cette fois-ci, la publi est incomplète. Je refais donc le processus mais je n'ai toujours qu'un extrait qui réussit à se recoller - et pourtant je jure que j'avais bien tout copié 😥 Si quelqu'un peut aider... parce que c'est difficile d'avoir une idée du message en n'en lisant que les derniers paragraphes 😭
Yvon Stein 2 giorni fa
le mieux à faire selon moi , c'est d'envoyer un mail à info@panodyssey.com - de mon côté j'ai un souci de sauts de ligne, la première fois que je publie ils n'apparaissent jamais, par contre si je republie c'est OK.
Jackie H 2 giorni fa
C'est fait, Marc est en train de plancher sur le problème 🙂 je suis sûre que l'équipe trouvera une solution 🙂
Marie Bulsa 2 giorni fa
oui reste une grande rééducation des juges pour tout les actes commis. 🙌😍