

Nous n'irons plus voir la mer
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Nous n'irons plus voir la mer
Préface
Je ne suis pas chanteur.
Je ne suis même pas certain d’être un auteur, un écrivain. D’un point de vue purement étymologique et en se référant à la définition première, un chanteur est une personne qui chante. Est-ce que je chante ? Oui, ça m’est arrivé. J’ai même longtemps espéré en faire mon métier. Tout comme je me voyais tantôt archéologue, tantôt pilote de X-Wing… Mais les rêves de gosses sont ce qu’ils sont. Et, bien souvent, ils finissent, à l’instar des dinosaures, ensevelis sous des couches de terre, de pierres, ou de bon sens :
« Une carrière d’artiste n’est pas une chose sérieuse. Un diplôme, un bleu de travail, des horaires fixes, ça c’est une bonne situation ! »
Et puis il y a l’estime de soi, la confiance que l’on accorde à ce que l’on fait, à ce que l’on est. Et à ce niveau, je dois avouer qu’il me reste encore beaucoup de progrès à faire.
Alors suis-je devenu chanteur ? La réponse est oui, un peu. Un célèbre chanteur de salon… mon salon. Je me produis de temps en temps, lorsque les enfants sont absents, pendant qu’une pizza cuit dans le four, lorsque j’ai trois minutes quarante-neuf à tuer…
Durant nombre d’années, mes écrits étaient essentiellement des chansons. J’accompagnais les premières au piano avant d’arpéger les guitares, inspiré par de véritables artistes : Renaud, Damien Saez, Jacques Brel, Léo Ferré… Certaines compositions se voulaient drôles, d’autres contestataires et puis, en vieillissant, ma plume s’est faite plus mélancolique, poétique et dépressive.
Petit à petit, j’ai délaissé les notes pour les mots. J’ai cessé de me produire pour la famille, le voisinage, et me suis lancé dans l’écriture de poèmes, d’histoires, de nouvelles et de romans :
« Une carrière d’écrivain ? C’est pas sérieux ! Les mains dans le cambouis, les douleurs musculaires, se baiser le corps pour un salaire de misère, ça c’est un vrai boulot ! »
Ce rêve de gosse n’a jamais été enterré. Alors à la question suis-je un auteur, un écrivain ? Là encore, si l’on se réfère à l’étymologie et la définition première, un écrivain est une personne qui écrit des livres. Est-ce que j’écris des livres ? Oui ! Même que celui-ci est mon sixième. Est-ce que cela fait de moi un auteur talentueux, un véritable artiste ? Ce n’est pas à moi d’en juger.
Mais qu’il s’agisse d’une chanson, d’un poème ou d’une histoire, je n’ai pour seul désir que celui d’émouvoir, vous tirer un sourire ou une larme. Mes textes sont des photographies d’instant, d’un sentiment. Ils n’ont qu’une scène de la vie quotidienne à raconter, sans aucune autre prétention.
Je vous ai conté l’histoire d’un pantin en quête de liberté dans ‘’Nous n’étions que des Pantins sans filtre’’, mes souvenirs d’enfance dans ‘’Nous n’avions que la vie devant nous’’ et l’étrange Noël d’un photographe en mal d’amour dans ‘’Nous vous souhaitons un joyeux Noël de merde’’. Je vous livre, à présent, mes chansons. Elles témoignent de plus de vingt années d’écriture, de mots plus ou moins maladroits, de mélodies plus ou moins travaillées, d’une vision du monde changeante au fil du temps. J’ai tenté de les ranger de la plus ancienne à la plus récente pour mieux percevoir mon évolution ; écrire ayant toujours été une thérapie, une façon d’être vu, d’exister.
Elles sont mes vagues, mes plages, mes coquillages… Un océan qu’il m’arrivait parfois d'entendre lorsque je les jouais pour moi, pour ma femme, mes enfants. J’ai longtemps hésité à réunir tous ces textes dans un recueil car les chansons sont surtout faites pour être écoutées. Mais je ne suis pas un chanteur. Un gringotteur tout au plus. Et si l’envie de fredonner certaines d’entre elles me vient parfois, je crains que la plupart soient condamnées à l’obscurité sans cet ouvrage. Par respect pour elles, et pour le gamin qui y croyait autrefois, je me dois de mettre un peu de lumière sur ce qui fut mon premier rêve de gosse.
Je vous offre mes vagues, mes plages, mes coquillages… Je vous offre mes airs devenus vers, puisque de toute façon :
« Nous n’irons plus voir la mer »
***
Dernière étreinte (1999)
J’ouvre les yeux, pour la dernière fois,
je vois clair aujourd’hui.
Je vois la mort, à côté de moi,
elle ne fait pas de bruit.
Mon passé me revient,
j’entends les rires et les colères.
Mon amour, prends ma main,
avant que l'on me recouvre de terre.
Raconte-moi, parle-moi,
dis-moi comment vont les enfants.
Savent-ils, que leur Papa…
savent-ils ce qui m’attend ?
Ne pleure pas, ça ne changera rien,
bientôt je ne serai plus qu’un ange.
Le type, là-haut, a besoin de moi,
il est seul dans sa putain de cité blanche.
Raconte-moi, comment tourne le monde,
donne-moi des nouvelles du pays.
Est- ce que les hommes
et leur connerie profonde,
continuent de se pourrir la vie ?
Et toi, mon éternelle,
comment c'est dans ton cœur ?
Tu sais, t’es toujours belle,
mais tu l’es moins quand tu pleures.
Je t’en prie, princesse,
fais-moi plaisir, sèche-moi ces larmes inutiles.
Ta tristesse me fait souffrir,
dans mon état ce n’est pas utile.
La faucheuse perd patience,
elle regarde le ciel.
Elle trépigne de jouissance
à l'idée de me vider la cervelle.
Mon amour, promets-moi,
que le deuil ne te tuera pas.
Ma vie, maintenant, continuera
entre quatre pauvres planches de bois.
Dis à la p'tite de faire attention,
les garçons sont tous des menteurs.
Il n'y a jamais eu de prince charmant,
les hommes commettent les pires erreurs.
Et au dernier, qui ne me connaît pas,
dis-lui ce que tu penses de moi.
Je te fais confiance, protège-les bien,
surtout dans un monde comme celui-là.
Qu'est-ce t'attends, larbin du diable,
ma peine te fait-elle sourire ?
Allez, va-t’en et prends mon âme,
j'peux plus attendre, il faut en finir.
Pourquoi m’a-t-on choisi
pour payer les fautes humaines ?
Moi qui n'ai jamais rien compris
à leurs guerres et à leurs haines.
Ça y est, c’est différent,
les lumières se sont éteintes.
Bébé, c'est le moment pour une dernière étreinte.
***
Silence
Je ne sais pas pourquoi je suis là,
paraît qu'ça apaise, c'est c'qu'on m'a dit.
Alors me voici devant toi,
à te parler de ma p’tite vie.
Toi, tu n'dis rien,
tu m'écoutes peut-être,
et ton silence intense
résonne dans ma tête.
Si je dois me faire à l’idée,
laisse-moi juste le temps de l'encaisser.
D'abord on naît, et puis on vit.
Ça peut durer des années et on vieillit.
Et quand on meurt, quand on se fait absence,
il ne reste plus qu'un effrayant silence.
J'suis seul planté là, sans ta lumière.
T'es juste devant moi,
à trois mètres sous terre.
Je te parle, et tu m'écoutes.
Je te parle, mais ça m’dégoûte :
ce triste monologue sans intérêt
ne ramènera jamais l’homme que tu étais !
D'abord on naît, et puis on vit.
Ça peut durer des années et on vieillit.
Et quand on meurt, quand on se fait absence,
il ne reste plus qu'un effrayant silence.
Faut être désespéré, ou complètement fou,
pour parler à la terre, aux cailloux.
Ici, la seule chose qui reste de toi,
c'est ton nom gravé, dans le marbre, ça va de soi.
Toi, l’homme sincère et généreux,
ta mort est la preuve qu'il n'y a pas de bon Dieu,
car cette injustice arrive bien trop souvent,
on enterre les bons, et l’on garde les méchants.
D'abord on naît, et puis on vit.
Ça peut durer des années et on vieillit.
Et quand on meurt, quand on se fait absence,
il ne reste plus qu'un effrayant silence.
Allez, ça suffit,
je ne veux pas rester ici !
Ça sert à rien de parler à une tombe
car jamais, le marbre, ne saurait me répondre.
Que ce soit d'une maladie ou d'un accident,
que ce soit d’un crime, d’un découragement,
quand l'un de nous quitte la Terre
il impose, bien souvent, en nos cœurs, le désert.
D'abord on naît, on est et puis...
Ça dure des années, des années, une vie…
Et puis l’on meurt, on se fait absence,
avant de n’être plus qu’un effrayant silence.
***
Haine mécanique
Tiens, voilà tes valises, bien trop pleines !
Pleines de vestiges, que tu te souviennes
de moi, quand toi, tu seras là-bas,
je sais pas où, j’sais pas pourquoi…
Alors adieu, mon bouquet de roses,
tu t’en vas fleurir le balcon d’une autre ville.
J’aurais tant et tant de choses à te dire,
mais les mots qui m’viennent sont inutiles.
Que pourrais-je bien faire
pour l’empêcher de t’emmener
de l’autre côté de la Terre,
dans je ne sais quelle contrée.
Lui, qui n’attend qu’une chose :
que sonne l’heure du départ.
Tant pis si mon cœur explose,
si, sans toi, je m’égare.
Oui, je la hais, cette bestiole stupide
qui pense pouvoir nous séparer comme ça.
J’lui mettrais bien mon poing dans le bide,
si j’avais d’la force dans les bras !
Moi, j’ai pas peur
d’affronter les brutes sanguinaires.
Moi, j’ai des muscles plein le cœur
et de l’amour plein les artères.
Allez, vas-y, démarre !
Démarre ton moteur pourri et enfume-moi la vie !
Fais-moi bouffer tes vapeurs,
mets du brouillard sur ma douleur.
Attends ! Mais pourquoi tu t’emballes ?
Pressé de me priver de ma moitié ?
Pour l’instant, la colère, j’la ravale
mais ça risque de ne pas durer.
Suffit que je me jette sous tes roues,
j’suis un malade moi, capable de tout
pour qu’elle revienne dans notre T2,
r’mettre des couleurs dans ma banlieue.
Si tu m’écrases, pauvre naze,
le voyage est terminé.
Aux yeux du monde et d’ma bourgeoise,
tu seras le roi des enculés.
Allez, t’sais quoi ? J’me jette là, devant toi,
t’as plus le choix, faut que tu t’arrêtes,
ouvre tes portes et rends-la-moi !
T’es courageux, j’dois l’reconnaître.
Hé mais pourquoi tu ne freines pas ?!
Je suis là, fais attention !
Mais enfin ! Stop ! Ne m’vois-tu pas ?!
Tu fonces sur moi espèce de …
Eh bien voilà, dernier exploit,
mon amour est restée avec moi.
J’ai su mater le colosse d’acier,
l’était Goliath et moi l’gravier.
Sûr que demain, dans les journaux,
on parlera de moi. Sous ma photo,
en New Roman, gras, souligné :
Fou d’amour ou juste idiot, il se jette sous le TGV
***
La rechute
Aujourd’hui est un jour
de la plus haute importance :
j’ai un entretien d’embauche
dans l’une des plus grosses boîtes de France.
C’est mon premier rendez-vous
depuis qu’j’suis sorti de prison.
Ils étaient peu, je l’avoue,
à croire en ma réinsertion.
Le bus est en retard,
paraît que c’est normal.
J’suis parti en avance,
ça s’équilibre, c’est pas plus mal.
Je dois arriver à l’heure,
faut faire bonne impression,
montrer que j’suis plus un branleur,
que j’ai bien retenu la leçon.
Ça y est, le bus démarre,
ça s’annonce plutôt bien ;
une journée ensoleillée
sur le boulevard du droit chemin.
Mais v’là, qu’aux ‘’Invalides’’,
se pointe une p’tite vieille,
le genre pas très rapide,
qu’à le corps qui s’enraye.
Allez, Mamie ! Lève la jambe,
s’il te reste de la souplesse.
La marche n’est pas si haute,
suffit d’un déni d’vieillesse.
Le temps passe, ça m’agace,
je l’attrape par la taille,
la soulève, l’emmène dans l’bus,
puis repose l’antiquaille.
Elle me remercie,
puis s’approche du conducteur
et l’interroge, la bouche en cœur :
« Est-ce bien la ligne qu’il faut prendre
pour se rendre à l’hôpital ?
Je dois voir mon petit-fils,
il est en phase terminale. »
Le chauffeur lui explique,
pendant presqu’une éternité,
le trajet, les arrêts, jusqu’au centre hospitalier,
puis lui demande de présenter
son titre de transport.
Elle sort sa carte d’identité,
putain d’main on y sera encore !
Faut pas qu’j’m’énerve, j’dois rester calme,
ravaler ma colère.
Une rechute serait regrettable
j’vais pas r’plonger pour une grand-mère !
Elle achète son ticket mais,
ça dépasse l’entendement,
elle pioche dans son porte-monnaie
une poignée d’anciens francs…
Il faut gagner du temps, j’lui achète son billet.
Elle dit qu’j’suis un garçon charmant,
un jeune homme très bien élevé.
Par sécurité, son ticket, je lui poinçonne,
je préfère ne pas risquer
d’être retardé par Parkinson.
Je retourne m’asseoir,
espérant qu’on redémarre,
mais le pilote s’éternise
tant qu’la pâlotte n’est pas assise.
Voilà qu’elle se pose devant moi
et m’dit de sa voix desséchée :
« Laisseriez-vous votre place
à une vieille dame fatiguée ? »
Quelques minutes plus tard,
elle demande à débarquer,
mais réalise, tu vas pas l’croire,
qu’elle s’est encore trompée d’arrêt.
Cette fois-ci c’en est trop,
j’ai envie de la buter !
Elle va r’joindre son p’tit-fils
plus vite qu’elle l’aurait espéré !
J’vais lui fracasser la tête,
contre une barre d’acier,
la coincer dans l’strapontin,
l’aplatir, la poinçonner,
lui faire bouffer ses anciens francs,
la jeter à la prochaine station,
et si ce n’est pas suffisant
j’la finirai à coups d’talon.
La suite fut tragique, il fallait s’en douter,
alors qu’elle tentait de descendre,
discrètement,
je l’ai poussée.
Affalée sur le ciment,
le chauffeur à ses côtés :
« Elle a eu un accident et elle nous a quittés. »
Arrivé à destination,
avec plus de trois heures de retard,
j’invente une raison, je raconte une histoire
à la secrétaire qui me dit, désolée :
« Le rendez-vous est annulé,
on n’vous a pas téléphoné ?
Le directeur a dû partir
pour une urgence médicale,
son fils allait mourir
il était en phase terminale.
Le pauvre, c’est un coup dur,
surtout qu’on vient d’apprendre en sus,
que sa mère est décédée
en descendant d’un bus. »
***
Repose en paix (quand même…)
Éloge funèbre au père Lachaise.
Tu es parti trop tôt, y a comme un vide.
Dans l’assemblée, mal à l’aise :
costumes noirs, ambiance sordide.
Ta famille et tes amis…
nous sommes tous venus pour toi.
Comme un hommage un jour de pluie,
tous réunis une dernière fois.
Certains feront couler quelques larmes,
avec beaucoup de talent,
d’autres regarderont le paysage,
pour passer le temps.
Oui, bien sûr, tu nous manqueras,
mais pas tant que ça.
Allez, bon vent, maintenant, tire-toi,
et surtout ne reviens pas.
Au grand théâtre de la vie,
chacun son rôle et sa réplique.
Mais à trop jouer la comédie
le scénario vire au tragique.
T’étais le roi des emmerdeurs,
une grande gueule, un abruti,
on n’te portait pas dans nos cœurs,
alors on t’a ôté la vie.
Certains riront discrètement,
sans choquer personne,
d’autres joueront sûrement
avec leurs téléphones.
Oui, je sais, c’est pas réglo,
c’est la vie, c’est comme ça.
Allez, adieu enfant de salaud
et surtout ne reviens pas.
C’est vrai qu’on s’est donné du mal,
avec ta famille, tes amis…
pour t’envoyer dans les étoiles
ou dans les égouts de Paris.
Certains ont aspergé d’essence
toutes les pièces de ta maison,
d’autres t’ont gavé de somnifères,
sur le canapé du salon.
Oui, c’est vrai, on est coupables,
mais ça valait la peine.
Allez, adieu l’insupportable !
Et repose en paix (quand même).
***
La p’tite vieille
Les charentaises aux pieds,
le caddie écossais,
le ciré jaune froissé,
le plastique sur la tête ;
la p’tite vieille va au marché.
Dans toute la rue,
on entend son caddie grincer.
D’habitude son fils y remet d’l’huile
mais ça fait longtemps qu’il n’est pas v’nu :
le caddie a rouillé.
Tous les dimanches matin,
elle va faire ses courses pour la semaine :
fruits et légumes, viande et poisson…
des commissions plein les pochons,
englouties par le caddie.
Mémé cuisine les produits frais,
et fait sa soupe elle-même.
L’industriel ? Très peu pour elle !
Elle dit que ça a l’goût d’eau d’javel,
qu’ça manque d’amour et d’un peu d’sel.
Elle n’a eu qu’un enfant,
et un seul mari
décédé il y a quelque temps
d’une attaque cardiaque en pleine nuit.
Ce que la vie donne, la mort reprend.
Il n’y a pas grand-chose à dire
sur cette petite vieille
qui sait qu’elle va bientôt partir,
s’endormir sans réveil,
quand viendra l’heure du grand sommeil.
Mais puisque la vie continue,
aujourd’hui elle va faire ses courses
avec son pochon, son ciré,
son vieux caddie écossais
qui couine et ça la fait marrer.
Car la p’tite vieille à l’habitude
de faire chier tout le quartier
avec son caddie écossais
qui couine la solitude
le temps qui passe et les regrets.
***
La tarte aux fraises
Moi, j’aime la tarte aux fraises.
C’est du sérieux, elle et moi.
Fidèle à la tarte aux fraises,
mais fidèle, ça veut dire quoi ?
Moi, j’aime la tarte aux fraises
mais il m’arrive, parfois,
n’en déplaise à la tarte aux fraises,
de fondre pour du chocolat.
Ce n’est pas par maladresse
mais plutôt par gourmandise
si, parfois, je la délaisse
pour une autre friandise.
Moi, j’aime la tarte aux fraises.
C’est du sérieux croyez-moi.
J’aime le goût des rouges fraises,
mais aimer, ça veut dire quoi ?
Moi, j’aime la tarte aux fraises,
mais, quelquefois, c’est si bon,
au grand désarroi de la tarte aux fraises,
de succomber au citron.
Ce n’est pas par faiblesse
mais plutôt par envie
si, quelques fois, je la délaisse
pour une autre pâtisserie.
Moi, j’aime ma tarte aux fraises,
c’est du sérieux, n’en doutez pas.
Ma vie pour la tarte aux fraises,
mais la vie, ça veut dire quoi ?
Moi, j’aime ma tarte aux fraises
mais, des fois, on se lasse
et on remplace les douces fraises
par des morceaux d’ananas.
Ce n’est pas par ivresse
mais par curiosité
si, des fois, je la délaisse
pour une autre bouchée sucrée.
Moi, j’aime ma tarte aux fraises,
et je m’en veux un peu pour ça.
Quand je pense à la tarte aux fraises
qui se dit « tout ça, ça veut dire quoi ? »
Moi, j’aime ma tarte aux fraises
mais, souvent, j’ai des frissons
quand je mélange mes tendres fraises
aux divins fruits de la passion.
Quand je la provoque avec tendresse
c’est, souvent, des paroles en l’air,
puisque, jamais, je ne la délaisse
pour un quelconque dessert.
Moi, j’aime ma tarte aux fraises,
c’est du sérieux, je vous l’ai dit.
Allez, viens, ma tarte aux fraises,
que je te recouvre de chantilly.
***
Nous n’irons plus voir la mer
Ce soir, j'ai les larmes aux yeux.
Tu es loin de moi.
Mon ciel est devenu orageux,
tu ne seras jamais plus là.
Je suis assis, là, devant l'océan,
et je me souviens
de nos jeux dans les vagues,
sous le soleil couchant,
et ta main dans ma main.
Tu étais jeune et belle, ma petite fleur,
pourquoi t’être fanée ?
Nous étions amoureux, mon âme sœur,
et tu t'es envolée.
Je pourrais me dire que, malgré tout,
c'est ainsi que va la vie ;
on va, on vient et puis c'est tout,
mais je t'aimais et c'est fini.
Nous n'irons plus voir la mer
comme l'on faisait autrefois,
quand nous étions les seuls sur Terre,
quand c'était juste toi et moi.
Nous n'irons plus fouler le sable
de nos pieds dénudés.
Et je reste là, comme un coupable
qu'on aurait exilé.
Ce soir, j'ai mal dans le cœur,
tu es loin de moi.
Je n'ai que des souvenirs, quelques rumeurs,
j’oublie le son de ta voix.
Tu étais une princesse, une perle de pluie,
un amour de vacances, l'amour de ma vie,
et puis il a fallu que tu rentres chez toi,
de l'autre côté d'la France,
loin, trop loin de moi.
J'ai envie de vomir, de cracher mon dégoût,
de dire « merde » au monde entier.
J'ai envie de haïr,
je suis devenu fou,
fou et malade à en crever.
Il n'y a plus rien à dire, plus rien à faire,
t'es partie, c'est fini.
On n’est vraiment pas grand-chose
sur cette Terre,
alors j'emmerde l'amour et la vie.
Nous n'irons plus voir la mer
comme l'on faisait autrefois,
quand nous étions les seuls sur Terre,
quand c'était juste toi et moi.
Nous ne jetterons plus de galets blancs
dans les yeux de ceux,
qui disent qu'on ne s'aime pas vraiment,
qu'on n’est pas assez vieux.
Ce soir, j'ai froid, sur ce quai
où tombe la nuit.
Faut qu’je rentre, Maman va s'inquiéter,
je n'ai que six ans et demi.
***
Noyer Noël
Noël, ce soir, a comme un goût amer.
Il ne ressemble pas à celui de l’année dernière.
Au milieu du salon, le sapin mélancolique
a l’esprit sombre et moribond
sous les guirlandes électriques.
Il voudrait disparaître avant l’heure,
et, dans la cheminée, le feu se meurt.
Les guirlandes dégringolent et s’affaissent sur le sol.
Même la famille du Christ a le regard bien triste.
Il n’y aura pas de cadeaux,
il n’y aura pas de gâteaux,
pas plus de chants joyeux,
de longs dîners trop copieux.
Je n’ai pas faim,
j’n’ai pas le cœur à me coucher tard.
Non, je ne sortirai pas ce soir…
Moi, je suis sur le bord de la fenêtre.
Je regarde la nuit,
la Lune est en train de disparaître
derrière un nuage de pluie prête à tomber.
Noël, ce soir, sera noyé.
Noël, ce soir, a un goût amer.
Il est fade et périmé derrière toutes ses lumières.
Les gens ne rêvent plus, les gens sont perdus,
ils vont, les yeux baissés sans savoir où aller.
La vie est triste et banale.
Plus personne ne regarde les étoiles.
Où sont passées ces belles soirées,
avec la famille, les amis,
quand on chantait, quand on riait,
quand on partageait nos vies ?
Que sont devenus les rires d’enfants,
l’impatience des garnements
que l’on détestait hier,
et qu’on regrette à présent ?
Où est passé l’esprit de Noël ?
L’aurait-on jeté à la poubelle ?
Moi, je regarde le monde dehors.
Le ciel pleure à grosses larmes, triste décor.
La neige aurait pu tout changer,
mais ce soir, Noël sera noyé.
Au revoir mes amis, au revoir ma famille.
Au revoir mon amour, mon fils, ma fille.
Je n’ai plus de pays, je n’ai plus de patrie.
Je n’ai plus de loisir, je n’ai plus d’avenir.
On ne croit plus en moi
depuis bien longtemps.
J’ai raccroché ma hotte
et mon manteau rouge et blanc.
***
Tu es là
Je ne peux pas t'expliquer,
ça me tombe dessus sans prévenir,
c'est en moi, dans ma tête,
ça me déchire le sourire.
Si j'pouvais comprendre
j'arriverais peut-être à le gérer
mais voilà, j'ai mal,
mal à en crever.
J’ai des jours comme ça
où tout va bien, et puis
plus rien ne va…
Et j'ai froid dans le cœur,
l'âme meurtrie pendant des heures.
Je n'ai pas de remède,
ça me possède et m’obsède.
J'attends qu'ça passe,
et tu es là.
Ça y est, ça recommence,
il fait sombre autour de moi.
Je me mure dans le silence,
j'ai mal, j'ai froid.
Des images dans ma tête,
que je ne comprends pas,
je n'vois plus rien, tout est flou,
j’ai le corps et le cœur à genoux.
J’ai des jours comme ça
où tout va bien, et puis
plus rien ne va…
Et j'ai froid dans le cœur,
l'âme meurtrie pendant des heures.
Je n'ai pas de remède,
ça me possède et m’obsède.
J'attends qu'ça passe,
et tu es là.
Tu es là
Si seulement ça pouvait s'arrêter,
si seulement je comprenais.
Je veux passer ma vie à t'aimer,
être heureux à tes côtés.
Mais je suis dans le bad.
J'ai besoin de toi.
Embrasse-moi,
aime-moi
et ça passera.
***
L’enfant
Un hurlement dans la salle d’accouchement.
Cette fois, c’est plus la mère,
mais celui de l’enfant.
Déjà une grande voix,
si petit pourtant,
futur chanteur québécois,
briseur de tympans.
Moi je me relève,
non, j’me suis pas évanoui…
Juste un peu fatigué,
ça fait neuf mois qu’j’ai pas dormi.
Soumis aux quatre volontés
et aux idées loufoques
de mon amour, de ma moitié,
depuis qu’elle est en cloque.
J’ai assisté à la naissance,
le temps semblait s’être arrêté.
C’était tellement intense,
on en a sérieusement bavé.
D’ailleurs juste un mot
pour la femme de ménage :
« Sincèrement j’ai le cœur gros
d’avoir vomi sur le carrelage. »
La sage-femme, toute souriante,
nous félicite aimablement :
« Qu’il est beau ce bébé,
le portrait craché de ses parents ! »
Beau bébé c’est vite dit,
je trouve qu’il a une sale mine,
croisement étrange entre un Shar-Peï
et une pomme dauphine.
On a longtemps hésité,
entre une fille et un garçon.
On a cherché des faux jumeaux,
mais y en avait plus en rayon.
Les gens ne sont pas idiots,
faut profiter des promos
sur les gamins, comme les shampoings,
quand y en a deux pour le prix d’un.
Le suspense est terminé,
le grand mystère est révélé,
bébé est une fille,
c’est ce qu’on avait commandé.
J’vérifie qu’y a pas de défaut,
que tout est là, qu’il manque rien,
sinon j’la ramène illico
au SAV du magasin.
Les jours passent, on fait c’qu’on peut,
on fait c’qu’il faut pour s’adapter,
la p’tite joue dans son parc, on a dû l’enfermer.
C’est pas un gosse, c’est un poulpe
aux bras tentaculaires,
qui jamais ne loupe
l’occaz de tout foutre en l’air.
Attention ! Alerte !
J’enfile ma combinaison :
les gants en latex,
les lunettes de protection,
masque et bouteille d’oxygène,
panneaux de signalisation,
une fois de plus la couche est pleine :
« Paré pour la désinfection ! »
Les années passent, moins de grimaces,
finie la morve, la bave, par litres.
Tant mieux, j’trouvais ça dégueulasse
de te voir mousser comme une huître.
Tu ne pleures plus le soir,
tu dois être moins malheureuse
depuis qu’j’ai rangé la guitare
et la niaiserie de mes berceuses.
Bébé sait marcher,
et articule des mots abstraits.
Sa mère la comprend,
moi j’essaye mais pourtant,
j’ai pas les codes, j’ai pas les clés,
pour essayer d’interpréter
ses baragouinages, ses onomatopées.
À chaque repas de famille,
on décortique ses ressemblances :
« Elle a le sourire de sa mère,
et les panards de son père ! »
« Comme elle est jolie,
qui donc choisit ses vêtements ?
— Si c’est rose fluo,
ça ne peut être que sa Maman ! »
Tu grandis à vue d’œil,
mes yeux n’ont pas l’temps de te regarder.
Il en est tombé, des mortes feuilles,
depuis que t’as débarqué.
Souvent je pense à l’avenir
et je redoute le matin
où tu remplaceras ton père,
par une branleuse, par un crétin
dont tu seras tombée amoureuse
comme tombe la neige sur les jardins.
Les pleurs incessants,
les cris, les hurlements…
Les mots maladroits, les nuits blanches,
les premiers pas…
Les bulles de salive,
les odeurs corrosives…
Toutes ces choses, je dois l’avouer,
à présent, vont me manquer.
Un hurlement,
dans la salle d’accouchement.
Cette fois encore ce n’est plus la mère,
mais celui d’un deuxième enfant.
***
Sale aveugle
Bonsoir à toi, belle Lune,
puis-je te hurler à la mort
ma douleur, mon amertume
qui me ronge une fois encore.
Bonsoir à toi, astre nocturne,
qui éclaire de ta lumière
ma pauvre vie d’infortune
qui se perd en enfer.
Dis-moi, toi, qu’en penses-tu,
suis-je seulement qu’une pauvre bête ?
Dis-moi, toi, le sais-tu ?
Je t’en prie soit honnête !
Suis-je condamné à souffrir
pour les beaux yeux de mon maître.
Dois-je obéir sans rien dire
quand il me frappe et me maltraite ?
Bonsoir à toi, belle Lune,
Toi qui caches aux yeux du soleil,
ta tristesse, ta solitude
et ta part d’ombre qui sommeille.
Bonsoir à toi, astre nocturne,
Toi qui n’es autre qu’un caillou
perdu dans son altitude
et dont tout le monde se fout.
N’as-tu jamais ressenti
la haine et la colère ?
N’as-tu jamais eu envie,
un jour, de tout foutre en l’air ?
D’oublier pourquoi tu es là,
les gestes et les façons de faire
qu’on t’a imposés autrefois
quand tu rêvais de bord de mer.
Tu sais, moi, j’ai mal au cœur,
mon cœur qui gardait pourtant
une place d’honneur
pour cet homme que j’aimais tant.
Lorsque l’on m’a confié à lui,
je n’avais pour seul désir
que celui d’être, pour la vie,
son guide, son avenir.
Être ses yeux, son ange gardien,
son ami le plus fidèle.
Être plus qu’un simple chien
qu’on laisse dormir près des poubelles.
Mais vois-tu, ma belle Lune,
malgré ma totale dévotion,
je n’ai eu que servitude
et des coups de bâton.
Voilà pourquoi, bella Luna,
je viens à toi ce soir,
te hurler une dernière fois
ma douleur et mes idées noires.
Voilà pourquoi, bella Luna,
je suis assis sur cette falaise
pour me confier une dernière fois
avant de filer à l’anglaise.
Je l’ai conduit jusqu’ici,
au beau milieu de nulle part,
après avoir passé la nuit
à faire la tournée des bars.
Je l’ai amené sur cette falaise
en attendant impatiemment
qu’il glisse, qu’il se blesse
et qu’il crève lentement.
Sale aveugle, tu ne voyais pas
que j’étais prêt à tout pour toi !
Je suis un chien, c’est ma nature
d’aimer l’homme avec démesure.
Oui, sale aveugle, regarde-toi !
Un corps sans vie, c’est tout ce qui reste !
Je te laisse avec les rats,
qu’ils te bouffent les yeux et le reste !
Salut à toi, belle Lune,
je te quitte à tout jamais.
À moi la mer, les vagues, l’écume,
les montagnes et les forêts.
Salut à toi belle nature,
surtout ne te laisse pas faire,
quand la main de l’homme devient injure,
fais-lui mordre la poussière !
***
La porte d’entrée
Elle vient de fermer sa porte de sortie.
C’est comme une porte d’entrée
mais vue de l’autre côté.
Elle relève son col, il est sept heures et demie,
il ne fait pas très chaud,
j’aurais dû mettre un autre manteau.
Elle marche à pas réguliers,
un pied devant l’autre,
son sac à main, en bandoulière,
posé sur son épaule.
Elle avance à pas pressés,
j’ai bien du mal à la suivre.
Je suis déjà tout essoufflé,
j'ai l'cœur fragile et fatigué.
Je reste tout derrière,
je n’ose pas m’approcher.
Je sais ce qu’il faut faire, me taire
et ne pas la retarder.
Je regarde sa silhouette,
contemple son déhanché,
son dos, je le connais par cœur,
j’peux vous l’décrire les yeux fermés.
Son sac glisse, de temps en temps,
elle le relève machinalement.
Elle met ses mains dans ses poches,
je la sens frissonner.
Il fait vraiment froid ce matin,
on sent que l’hiver n’est pas loin.
Je la vois respirer,
de sa bouche sort de la fumée.
On arrive au carrefour,
là, elle va tourner à gauche.
Puis plus loin, ce sera à droite,
et tout droit sur 300 mètres.
Elle longera le parc, le tabac et le PMU.
Elle sourira au boulanger,
et prendra le bus au coin de la rue.
Ses cheveux sont encore humides,
elle a dû se lever en retard,
pas le temps de les sécher,
a-t-elle pris un p’tit déjeuner?
J’imagine ses yeux cernés,
peut-être fait-elle des cauchemars,
insomniaque, préoccupée,
somnambule ou bien couche-tard ?
Tiens! Mais que fait-elle ?
Ça ne lui ressemble pas !
Elle aurait dû tourner à droite,
mais elle continue tout droit.
Ne serait-elle pas réveillée ?
Faudrait-il que je la prévienne ?
Lui dire qu’elle s’est trompée,
que son bus est de l’autre côté…
Mais enfin ouvre donc les yeux !
Ce n’est pas par là qu’il faut que tu ailles !
Si tu ne te dépêches pas un peu,
tu vas être en r’tard à ton travail!
Je ne me sens pas très bien,
elle bouscule mes habitudes.
J’ai l’impression de perdre pied,
je n’ai plus aucune certitude.
Son trajet, j’le connais par cœur,
elle ne l’a jamais changé.
Il est bientôt presque 8H, son bus,
elle va le rater !
Et maintenant, elle prend à gauche,
mais enfin qu’a-t-elle dans la tête !
Ne travaille-t-elle pas aujourd’hui ?
Bien sûr que si, on est mardi…
Je vais continuer de la suivre,
voir ce qu’elle fait, on verra bien.
Peut-être a-t-elle une course à faire,
sinon pourquoi prendre un autre chemin ?
Tiens ! Elle ralentit,
mais il n’y a pas d’magasin dans l’coin.
Juste quelques lotissements,
quelques jardins mitoyens.
Elle s’approche délicatement
d’une porte d’entrée.
C’est comme une porte de sortie
mais vue de l’autre côté.
Elle sonne, elle attend,
et la porte s’ouvre.
Je vois un homme souriant,
l’accueillir en l’enlaçant.
Ça y est, j’ai compris !
Notre histoire, anéantie !
Elle m’a oublié,
jeté derrière cette porte fermée.
Comment peut-elle me faire ça,
moi qui l’aime à en crever.
Moi qui l’ai toujours aimée,
qui la suis depuis des années.
Je connais toute sa vie par cœur,
je pourrais tout vous raconter,
vous dire ce qu’elle fait
à n’importe quelle heure,
à tout moment de la journée.
J’ai toujours marché avec elle,
comme son ombre, je la suivais
discrètement, mais toujours fidèle,
sans jamais la déranger.
Je sens la rage m’envahir,
j’vais aller sonner à cette porte !
Lui dire tout, oui, tout lui dire,
et que le Diable l’emporte.
Je vais fracasser ce type,
lui faire ravaler son sourire,
car c’est chez moi qu’elle doit sonner,
c’est dans mes bras qu’elle doit tomber.
Elle se moque de moi ou quoi,
ne sait-elle pas que j’existe?
Et même si je n’ai rien fait pour ça,
j’aurais aimé qu’elle me voie…
Alors on en reste là, chacun de son côté.
Elle derrière la porte de sortie,
moi, devant la porte d’entrée.
***
À dos de pigeons
Il y a ceux qui marchent trop vite
parce qu’habitués à fouler
chaque jour les mêmes sols,
piétiner les mêmes pavés.
Le nez collé sur le smartphone,
dans l’horizon des virtuels,
ils n’ont d’intérêt pour personne
et des sourires artificiels.
Il y a ceux qui parlent fort
et qui ont toujours mot à dire
pour sortir un peu du décor,
pour critiquer et pour maudire.
Qui, pour se donner du relief,
hurlent leur dégoût, leurs inepties,
dissimulant sous leurs griefs,
leur inconfiance, leur jalousie.
Il y a ceux-là qui jurent l’amour
par de vaines promesses
et qui le trahissent chaque jour
pour la chaleur de l’ivresse
au creux des corps qui se cambrent
de plaisirs volages.
C’est souvent dans les chambres
que se meurent les vœux de mariage.
Il y a celles qui se font cogner
pour un regard de travers
par ce gars-là qu'elles croient aimer,
mais dont elles demeurent prisonnières,
et dans leurs valses tristesses,
elles ne connaissent que trop bien
les violentes caresses
de l'amour assassin.
Il y a les gros, il y a les moches,
ceux qui se vomissent sur les miroirs,
qui se dégoûtent, qui se reprochent
de ne pas être comme ces standards,
ces beautés anorexiques,
qu’on leur vend en modèle
pour qu’ils aillent dépenser leur fric
sous la lame du scalpel.
À dos d’pigeon, tout en haut,
sur les toits des maisons,
il fait bon, il fait beau,
j’ai l’infini pour horizon,
loin du monde d’en dessous
qui ne vaut vraiment pas le coup.
Parfois, je baisse les yeux, oui tel un dieu,
et je contemple la fourmilière.
Les aider à survivre ?
Ou les laisser dans leur misère ?
Je demanderais bien aux pigeons
mais ils sont bien trop cons.
Il y a les friqués prétentieux,
avec leurs costards de ministre,
qui s’exhibent aux yeux de ceux
qui ont l’apparence des tristes.
Les naufragés, les oubliés,
autour du cou, n’ont guère cravate.
Ils ont misère pour tours de verre,
le désespoir sous les savates.
Il y a ceux qui partent en guerre,
pour l’honneur de la patrie.
Des héros dont on est fier,
qui assassinent pour leur pays
parce qu’ils ont le droit de tuer
sans que reproche ne leur soit fait,
pas comme ce père de famille
qui venge la mort de sa fille…
Il y a ceux-là qui crèvent lentement
dans un petit lit d'hôpital
et qui souhaiteraient simplement
être libérés du mal.
Comment pourraient-ils comprendre
qu’ils n’ont pas le droit de choisir,
qu’ils doivent souffrir et attendre,
qu’on veuille bien les laisser partir.
Et dans ce monde assourdissant,
où rien ne vaut plus que l’argent,
c’est la bêtise qui est de mise,
de siècle en siècle, elle s’éternise.
Y a des alcools dans les bagnoles,
et des carnages dans les virages.
L’intolérance et le racisme,
la violence et le terrorisme…
Mentalités en régression,
le monde va mal, tout est normal !
La télé fait l'éducation,
et les neurones se font la malle.
Des politiques de fausses promesses,
pour le petit peuple, pas de richesse.
Des mômes qui crèvent pour du pétrole,
assassinés dans leurs écoles.
À dos d’pigeon, tout en haut,
sur les toits des maisons,
il fait bon, il fait beau,
j’ai l’infini pour horizon,
loin du monde d’en dessous
qui ne vaut vraiment pas le coup.
Parfois je baisse les yeux, oui tel un dieu,
et je contemple la fourmilière.
Les aider à survivre ?
Ou les laisser dans leur misère ?
Je demanderais bien aux pigeons
mais ils sont bien trop cons.
À dos d’pigeon, tout en haut,
sur les toits des maisons,
il fait bon, il fait beau,
j'ai l'infini pour horizon,
loin du monde d’en bas
qui n'existe plus pour moi.
Les dieux et les rois,
qui se partagent la Terre,
qui méprisent ceux d’en bas,
qui spéculent sur la misère,
ont bâti leur ascension
sur le dos des pigeons.
***
Elle m’embobine, de film
Silence, moteur, action !
Ainsi commence ma chanson.
Bien au fond d’un fauteuil rouge,
que plus personne ne bouge.
Les lumières s’éteignent
et l’obscurité règne.
Ne demeure qu’un soupçon de jour
indiquant l’issue de secours.
Une odeur de pop-corn
comme il n’y en a qu’au cinéma,
on entend quelques murmures
et le ‘’pschitt’’ des bouteilles de soda.
Soudain l’écran s’allume,
musique d’intro, travelling avant.
Chacun son rôle et son costume,
et je ne vois qu’elle, évidemment.
Première scène, premier plan,
j’ai le cœur qui se tord.
Elle est là, je l’entends,
première réplique, je l’adore !
Elle parle d’amour,
de l’homme de ses rêves,
et moi, comme toujours,
je suis pendu à ses lèvres.
Dans la salle, il n’y a plus que moi,
les autres n’existent pas.
C’est pour moi qu’elle sourit,
c’est pour elle que je souris, aussi.
Je suis l’acteur de ce film,
avec elle, je partage l’affiche.
C’est l’histoire de notre idylle
et, tout le reste, on s’en fiche.
Elle m’embobine de film
et moi je l’aime en grand écran.
Elle m’a rendu cinéphile
et moi je l’aime en gros plan.
Elle m’embobine de film
et moi je l’aime en grand écran.
Elle m’a rendu cinéphile
et moi je l’aime sur tous les plans.
Elle a mis le feu à mes planches,
avec elle, c’est un festival.
Lorsqu’elle apparaît, mon cœur flanche,
en 16/9 comme en normal,
pour ses grands yeux, bleus, de sirène,
naturels ou maquillés,
et sa voix d’américaine
parfaitement sous-titrée.
Je connais ses films par cœur,
on se donne souvent la réplique
sur mon p’tit téléviseur,
dans ma p’tite vie pathétique.
Cette femme est un phénomène,
pour moi, l’Elfe au cœur tendre.
J’aimerais tant qu’elle soit mienne,
passer 500 jours ensemble.
Elle m’embobine de film
et moi je l’aime en grand écran.
Elle m’a rendu cinéphile
et moi je l’aime sur tous les plans.
Elle m’embobine de film
et moi je rêve de grand écran.
P’t’être bien qu’je me fais des films,
dans ma tête ça tourne tout le temps.
L’écran vient de s’éteindre,
mon étoile s’est enfuie.
Il m’est impossible de l’atteindre,
le film est déjà fini.
J’n’ai plus qu’à faire preuve de patience,
garder son souvenir au cœur,
jusqu’à la prochaine séance
dans une petite demi-heure.
***
J’ai mal à la télé
Je me suis perdu, un jour,
au pays du p’tit écran.
Un peu comme cette gamine
qui suivait un lapin blanc.
Mais mon pays à moi
n’est pas celui des merveilles ;
aucun chant d’oiseau, ni ciel bleu ni soleil.
J’avance à l’aveugle dans ce monde déchu,
au détour des chemins,
croisant des êtres étranges :
des animateurs bidons,
des journalistes vendus…
Irrespectueux et vulgaires,
leurs propos me dérangent.
J’ai mal à la télé.
Qui pourrait me soigner ?
J’ai mal à la télé,
est-ce que quelqu’un pourrait zapper.
Je m’enfonce dans la jungle des téléréalités.
Y a de quoi devenir dingue,
mieux vaut n’pas trop s’éterniser.
Des tribus de sauvages veulent m’obliger
à regarder
des programmes obscènes
de mauvaise qualité.
Ici tout va de travers,
on nous prend pour des cons.
Il n’est pas plus grand désert
que celui de l’information.
Les guerres, les violences,
et la pauvreté du tiers-monde
font beaucoup moins d’audience
que les matchs de la coupe du monde.
J’ai mal à la télé.
Qui pourrait me soigner ?
J’ai mal à la télé,
est-ce que quelqu’un pourrait me débrancher.
J’avance à travers les chaînes,
et mes jambes deviennent lourdes.
La télé est comme un boulet qu’on traîne
où que l’on aille.
Agressé par leurs conneries, je prie
pour que mes oreilles deviennent sourdes.
Je veux me libérer de ses chaînes
à grands coups de cisaille.
Je veux exploser chaque écran,
chaque poste de télévision,
pour plus jamais me perdre
dans ce monde de débauche.
Ramener la lumière,
qu’elle inonde votre maison.
Si toi aussi tu penses comme moi
alors viens là, que j’t’embauche
pour faire du mal à la télé
et retrouver la liberté.
Maintenant que je n’ai plus de télé,
je vais pouvoir profiter
des chants d’oiseaux et du soleil,
du souffle du vent et du ciel bleu,
car pour aller au pays des merveilles,
il suffit juste d’ouvrir les yeux.
Allons enfants c’est aujourd’hui
que le jour de gloire est arrivé.
Contre nous de leur connerie,
faisons du mal à la télé.
***
Au grand marché des filles de joie
« Approchez, approchez !
Amateurs de qualité !
Ici le client est roi,
venez faire votre choix !
Des femmes pleines de saveurs !
De quoi s’en mettre plein le cœur !
Profitez des promos sur les femmes bio !
Vous, les déçus des femmes sauvages,
mis à l’écart sur des bancs de touche,
vous qui manquiez de courage,
vous les rejetés, les moches qui louchent.
Cendrillons masculinisées
qui cherchent chaussures à leur pied…
Approchez, admirez et choisissez !
Il y a des femmes parfaites,
et d’autres entièrement refaites.
Y a des ‘’Marie couche-toi là’’
et des ‘’Marie « j’couche pas comme ça ! »’’
Il y a des femmes qui blessent
et des histoires de fesses.
Tout un lot d’anorexiques,
de complexées, de boulimiques…
Des femmes de caractère,
des têtes de cochon,
des femmes autoritaires
et des femmes soumission.
Des femmes qui aiment les hommes
et qui, souvent, croquent la pomme,
ou qui préfèrent les clémentines,
bien moulées dans un jean.
Costume blanc de majorette,
robe à pâquerettes de midinette,
uniforme d’écolière,
queue de cheval, top à paillettes.
Êtes-vous plutôt bourgeoise,
parfumée de chez Hermès ?
Ou deuxième main d’occaz,
parsemée d’un peu d’herpès ?
Une femme pour la semaine,
une qu’on présente aux copains,
une autre pour le week-end,
une qu’on garde jusqu’au matin,
une qu’on marie devant l’autel,
une avec laquelle on convole,
une qu’on baise dans un hôtel,
ou à l’arrière d’une bagnole.
Fidèles ou infidèles,
une femme digne de confiance.
Amour éternel
ou love story de vacances.
J’ai en stock une femme en cloque
et quelques poissonnières,
des peaux d’vache, qu’ont d’la moustache,
des routières et des rombières.
J’ai des femmes trompées
des femmes trempées,
des femmes trompeuses.
Des salopes, des poufiasses
des vicieuses, des racoleuses…
Des intellos, des amusantes,
des toxicos, des enivrantes…
Dépensières ou économistes,
des artistes et des âmes tristes…
Des belles, des moches et j’en passe,
des propres sur soi, des dégueulasses.
Des ‘’un peu tâche’’, des jolies fleurs,
tout un régiment de bonnes sœurs…
Des femmes très, très haut placées,
et d’autres très, très déplacées,
des comiques, des collantes,
des alcooliques déprimantes.
Approchez, n’ayez pas peur
de passer pour des phallocrates.
Certaines d’entre elles viennent de bon cœur
à quatre pattes pour d’l’audimat.
Le féminisme n’est plus de mise
au grand marché des filles de joies
qui, pour de la thune, autorisent
les dérives du patriarcat.
Placardées, plus que de raison,
publicité prostitution
pour vanter les bienfaits
d’un énième produit de beauté,
d’une marque de fringue, d’un pot d’yaourt,
dans des tenues plus ou moins courtes
pour attirer l’œil obsédé
d’une carte bleue ou d’un chéquier.
Dans cette époque où rien ne va,
Mère nourricière ne sert qu’à vendre.
Dans cette époque où tout s’en va,
Mère nourricière n’est plus que viande.
Pose lascive sur l’étalage,
étiquetée sur le visage,
code-barres tatoué entre les cuisses,
pour y scanner les orifices. »
***
Sur les marches de l’église
Assis par terre, sur les marches de l’église,
je regarde le monde vivre sans moi.
Tournant le dos à ce Dieu que je méprise ;
les prières, les sermons, ne m’intéressent pas.
Roulez jeunesse dans la cour de l’école,
les enfants s’amusent en face de moi,
sous les yeux des adultes
surveillant leurs bestioles,
quelque peu inquiets, mais pas tant que ça.
Ça cri de bon cœur, ça déborde de joie,
qu’elle est belle l’insouciance
des premières années.
Et si certains rigolent,
d’autres pleurent quelquefois.
La vie, tu sais, est faite d’inégalités.
Les hommes naissent égaux,
tu parles d’une foutaise,
y a des conditions qu’on ne nous dit pas.
La vie est une administration qui te baise,
qui te prend tes rêves et jamais ne les rendra.
Mais les mômes, tu sais,
ils se moquent de tout ça,
parqués dans leur enclos, à l’abri, ils sont bien,
sous les yeux de leurs parents
qui, eux, n’oublient pas
qu’à la fin du mois, ils n’auront plus rien.
Assis, jambes tendues,
sur les marches de l’église,
je regarde les hommes errer lentement
sous les yeux d’un Dieu qui les méprisent
et qui joue avec eux, comme jouerait un enfant.
Mais un jouet ça se casse, un jouet ça s’oublie
et ça prend la poussière
tout en haut d’une étagère.
Un enfant ça se lasse, un enfant ça grandit
et un jour finit le rêve et bonjour la misère.
Et je ris de bon cœur, je déborde de joie.
Qu’elle est belle l’insouciance que j’ai su garder.
Oui, la vie peut être folle et triste, quelquefois,
il faut faire avec, même si c’est compliqué.
Penché, sur le monde,
j’observe, tranquillement,
assis sur les marches de l’église tout là-haut.
Tout devrait être calme
comme la surface d’un étang
et l’on devrait être heureux
comme des poissons dans l’eau.
Et je jette des étoiles
comme on jette des miettes de pain
sur votre ciel si pâle, terni par la vie.
Et si Dieu s’en contrefout,
pour moi, il n’en est rien.
Une nuit illuminée, c’est quand même plus joli.
Il est temps que je quitte
les marches de l’église
et que je rejoigne ma vie de mortel.
Promis, j’mettrai plus mes doigts dans la prise,
pour voir des étoiles, je regarderai le ciel.
***
Le marchand de glaces
Méfie-toi de cette musique
qui résonne au coin de la rue,
ne l’écoute pas, elle est maléfique,
beaucoup n’en sont jamais revenus.
Méfie-toi du gentil homme
au sourire si enjôleur.
Ce n’est pas le diable,
mais c’est tout comme,
il va nous arracher le cœur.
Le marchand de glaces
n’est pas celui que tu crois.
C’est dégueulasse,
je sais,
mais n’y va pas.
Regarde bien, tous ces enfants
se jetant dans la gueule du loup.
Leurs parents sont inconscients,
heureusement que je prends soin de nous.
Moi, je préfère te prévenir,
au risque de t’effrayer,
ce n’est pas le diable, c’est peut-être pire,
des cœurs, il en a déjà brisé.
Le marchand de glaces
n’est pas celui que tu crois.
C’est dégueulasse,
je sais,
mais n’y vas pas.
Méfie-toi de cette rengaine,
cette putain de mélodie,
elle n’est pas belle, elle fait de la peine,
comme les chansons d’aujourd’hui.
Méfie-toi de ce gars-là,
son cœur est de glace,
froid comme la mort,
ce n’est pas le diable mais,
crois-le ou pas,
les enfants comme toi, il les dévore.
Le marchand de glaces
n’est pas celui que tu crois.
C’est dégueulasse,
je sais,
mais n’y vas pas.
Marchand de glaces, marchand de misère,
qui vient jusque sous ma fenêtre
me souffler ton hiver,
tu ferais mieux de disparaître.
Tire-toi marchand de gourmandises,
et remballe tes glaçons,
va-t’en crever sur ta banquise,
tu n’auras jamais mon garçon.
Le marchand de glaces
n’est pas quelqu’un d’ordinaire,
ce n’est pas le diable, c’est pire,
c’est ton père.
***
Moi, quand je serai grand, je veux être un canapé
Moi, quand je serai grand,
j’veux être un canapé,
c’est sûrement le plus beau
de tous les métiers.
Resté posé, sans jamais bouger,
et voir toute la journée
des paires de fesses défiler.
D’abord un pouf, sans intérêt,
acheté comme ça, juste pour dépanner.
Puis jouer les lèches-culs
pour me faire remarquer
et enfin obtenir ma promo canapé.
Mais attention, j’veux pas du n’importe quoi.
Pas une occasion, ni un clic-clac de chez Ikea.
Moi, je veux être un vrai canapé de salon,
de style bien bourgeois, une pièce de collection.
La texture, j’dois vous dire,
franchement ça m’est égal,
mais si j’pouvais être en cuir,
ce serait vraiment l’idéal.
Plusieurs couleurs ou ton uni,
pas vraiment d’importance,
je serai un canapé lit,
ça fait toute la différence.
Moi, quand je serai grand,
j’veux être un canapé,
du genre trop cher pour un simple ouvrier,
et que toute personne
qui veuille, sur moi, s’asseoir
devra, c’est une obligation,
enfiler un costard.
Mais être un canapé n’est pas si évident.
Bien sûr y a des bons côtés,
mais aussi des très chiants
car, sur cette planète,
qu’on veuille y croire ou non,
y a des culs, faut bien l’admettre,
qui sentent franchement pas très bon.
Alors je vous préviens,
accordez-moi votre attention,
j’offrirai mes coussins,
sous réserve de deux conditions :
qu’une bête pleine de poils
ne vienne pas y faire ses griffes
ni qu’on m’impose un plaid dégueu
parce que c’est plus décoratif.
Moi, quand je serai grand,
je veux être un canapé.
Ce n’est sûrement pas le plus dur
de tous les métiers.
C’est la vie que j’aimerais,
mais faut pas que je m’emporte,
je peux juste être un tabouret
ou, pire,
une cuvette de chiottes.
***
T’es pas une Barbie
Quand tu étais petite,
tu disais vouloir ressembler
à ces poupées en plastique
que tu collectionnais.
Ces blondasses anorexiques,
parfaitement proportionnées,
un modèle de réussite
pour les gamines du monde entier.
Elles avaient un beau visage
et la silhouette élégante,
nul besoin de maquillage
pour les rendre excitantes.
Pas un kilo de trop,
imberbes et sans bouton,
un joli grain de peau
et de beaux cheveux blonds.
Les années ont passé,
te voilà femme à présent.
Ton corps a bien changé,
il n’est plus celui d’une enfant.
Mais voilà, t’es pas heureuse,
tu dis qu’tu r’ssembles à un boudin,
qu’les années t’ont rendue hideuse.
Elle est où cette taille mannequin
que tu désirais autrefois
en fantasmant sur tes poupées
qui seront toujours selon toi
le summum de la féminité.
Ton reflet te fait chialer.
Dans un miroir, une flaque d’eau,
tu n’oses même plus te regarder
tellement on t’a lavé le cerveau.
Mais sache que personne sur cette Terre
ne peut décider d’un standard.
À moins d’être partisan d’Hitler,
autrement dit, un vrai connard.
T’encombre pas de ces critères,
toutes ces normes à la mords-moi le nœud,
qu’imposent les publicitaires,
et les pervers libidineux.
Ces pimbêches plastifiées
avec leur p’tit cul, leurs p’tits seins
et leurs cheveux tout bien peignés,
au final ne valent rien !
Stéréotypes de la potiche,
minijupe et décolleté,
juste bonnes à faire la godiche
sur les plateaux télé.
Les bimbos, c’est bien connu,
peu importe leur QI,
ne sont célèbres que par leur cul,
tout le monde se fout de leur I.
Quand ça veut être célèbre,
ça enfile un maillot de bain,
ça se barbouille de rouge à lèvres
et ça postule chez TF1.
Quand ça croit que ça sait chanter,
ça enfile un carré de tissu,
ça beugle d’une voix trafiquée
des paroles décousues.
Et quand c’est vraiment empressée,
ça joue provoque, plus qu’élégance,
ça baise en real TV
pour faire grimper les audiences.
Moi, j’aime tes formes généreuses
et ton foutu caractère.
Ta petite mine boudeuse
ébranle mon côté pervers.
J’aime quand tu m’dis que tu t’sens moche
car, pour moi, c’est un compliment.
Toi, t’es pas comme toutes ces cloches
qui se font refaire entièrement.
Moi, mes critères de beauté
ne se limitent pas à l’apparence.
Je préfère tes p’tits bourrelets
aux lignes trop fades des miss France.
Mon amour pour toi est honnête,
j’me fous de tes mensurations.
Je suis comme un chien qui te fait la fête
dès que tu rentres à la maison.
Elles en auront des prétendants,
bien souvent, que des toquards
qui les aimeront entièrement,
mais seulement pour un soir.
Moi j’te l’dis, au fond des yeux,
que j’t’aimerai toute ma vie
et que, pour me rendre heureux,
t’as pas besoin d’être une Barbie.
***
Les fous ne me disent rien
Ravagé, mon bouillon,
face à face invisible,
tu parles d’une discussion,
rien n’est moins plausible.
Toutes ces voix dans ma tête
qui s’en vont et s’en viennent
par les portes, les fenêtres,
me parlent et me tiennent.
Amitiés de brouillon,
conseils de pacotille.
Mais d’où vient cette chanson
qui me tord et me vrille ?
Seul et pourtant nombreux,
dans une si petite pièce,
atmosphère étouffante…
Vaudrait mieux qu’on s’disperse.
Les sans-soucis me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Positif malgré tout,
être fou c’est humain.
Les sans-soucis me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Avec eux je suis nous
et ça me va très bien.
Un jour comme ci,
un autre comme ça
et le reste de travers.
Assourdi par ces voix,
l’équilibre se perd.
Dans le tourbillon de la vie,
qui tourne et me chavire,
le navire a choisi
de ne point revenir.
Et pourtant, moi, je crois
qu’il fera beau de nouveau,
c’est c’que pensent les voix
qui me hantent le cerveau.
Qu’importe si l’on dit de moi
que j’suis bon à enfermer.
Le malade, quelquefois,
ne veut pas être soigné.
Les sans-soucis me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Au fond, moi, je m’en fous,
être con c’est humain.
Les sans-soucis me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Avec eux je suis nous
et nous allons très bien.
Je ne suis pas malade,
seulement trop habité
par des voix qui m’évadent
de la réalité.
Moi qui, depuis tant d’années,
ne recherche que l’amour,
si ma tête est fêlée,
mon cœur, lui, bat toujours.
Ma vie est une folie,
un trop-plein d’illusion,
entre crises d’hystérie
et d’imagination.
Vous pouvez m’interner ;
camisole et cachetons,
le sain d’esprit, aussi,
peut bien perdre la raison.
Les sans-soucis me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Oui, je veux croire en vous,
espérer, c’est humain.
Les sans souci me disent fou,
les fous ne me disent rien.
Qu’ensemble l’on puisse être un tout,
qu’ensemble nous ne fassions qu’un.
***
L’âge des amours
Elle avait l’âge des amours,
celui où rien n’est impossible.
Du temps où s’aimer pour toujours
n’avait rien d’une idée stupide.
Lorsque les cœurs battaient ensemble
et que le monde tournait pour soi.
Qu’il n’y avait rien d’autre à comprendre.
Que l’ignorance vaut mieux, parfois.
Elle avait l’âge des insouciances,
du temps où rien n’est interdit.
Celui qui succède à l’enfance,
mais qui en garde la folie.
Lorsque raisonnaient encore,
en leur cœur, les passions,
l’envie qu’ils avaient dans le corps
d’aller se faire les horizons.
Elle avait l’âge des voyages,
des découvertes et des naufrages.
L’âge de partir en mer,
de dire adieu à la terre.
Lorsque la nuit manquait d’étoiles
et que l’monde semblait trop petit.
Que liberté devenait vitale
pour ne pas voir tomber la vie.
Elle avait l’âge des colères,
des caprices, des jalousies.
Du temps où s’aimer pour toujours
impliquait d’être ensemble toute sa vie.
Lorsque les cœurs ne battaient plus,
et que le monde n’existait pas.
Que l’amour était absolu
mais qu’absolu ne durait pas.
Elle avait l’âge des passions,
l’âge de la déraison.
Celui qui précède l’âge adulte,
des prises de tête et des disputes.
Lorsque tout devient différent,
que l’enfant est devenu grand.
Fini l’âge de l’irréfléchi,
du temps ou vivre était folie.
Elle avait l’âge des amours,
où les « je t’aime » sont des promesses.
Elle avait l’âge des amours,
mais parfois l’amour se blesse.
Parce qu’il s’est vu voler trop haut,
parce qu’il a connu les vertiges,
parce que le temps est un salaud,
faut voir le mal qu’il nous inflige.
Nous n’devrions jamais grandir,
sans cesse refuser de vieillir,
afin de garder pour toujours
le bel âge des amours.
Nous n’devrions jamais grandir,
sans cesse refuser de vieillir,
afin de garder pour toujours
le bel âge des amours.
***
Si aimer ne suffit pas
Que reste-t-il de nous, si aimer ne suffit pas ?
Les mots futiles, les mots doux,
s’échoueront-ils quelquefois
sur la plage d’une île,
tout au bout de ce monde que l’on n’aime pas?
Que restera-t-il de nous, dis-le-moi ?
Puisque la vie n’est pas honnête,
qu’elle promet bien plus qu’elle ne donne
et qu’une fois pris dans sa tempête,
on n’est plus rien, on est personne…
À trop s'prendre des coups de pied au ventre,
on dégueule toute son amertume
et tous ces rêves qu’on nous éventre,
pour peu que l’espoir nous consume.
Puisque s’aimer ne coûte rien,
ni plus ni moins que d’être à l’autre,
mais que la vie a des moyens
pour qu’on échoue, pour qu’on se vautre.
Bien sûr, il n’y a nulle conquête
pour qui ne tente aucune bataille.
Bien sûr, tout ça c’est dans la tête,
pas étonnant que l’on déraille.
Que reste-t-il de nous, si aimer ne suffit pas ?
Les mots futiles, les mots doux,
s’échoueront-ils quelquefois
sur la plage d’une île,
tout au bout de ce monde que l’on n’aime pas?
Que restera-t-il de nous, dis-le-moi ?
Puisque nous ne sommes que poussière,
un grain de sable insignifiant
perdu dans ce vaste univers,
broyé sous les souliers du temps.
“L’espoir”, “y croire”, tout ça c’est chouette,
mais y a toujours des représailles.
Nous ne sommes que des marionnettes,
pauvres pantins, fétus de paille.
Puisque l’avenir est incertain,
un pas de travers et c’est la fin.
Tellement d’embûches à chaque tournant.
Tellement d’erreurs ou d’accidents.
L’argent, la mort, la maladie,
un coup de foudre, un coup de folie…
Tellement de raisons de partir,
comment donc éviter le pire ?
Bien sûr mon monde, sans toi, n’est rien.
Sans toi, il tournerait moins bien.
Mais on avance à l’aveuglette,
dire le contraire serait malhonnête.
Alors dis-moi ce qu’il nous reste,
si la vie peut nous tuer d’un geste,
si l’amour ne suffit pas,
qu’adviendra-t-il de toi et moi?
Que reste-t-il de nous, si aimer ne suffit pas ?
Les mots futiles, les mots doux,
s’échoueront-ils quelquefois
sur la plage d’une île,
tout au bout de ce monde que l’on n’aime pas?
Que restera-t-il de nous, dis-le-moi ?
***
Au hasard de nos vies
Au hasard de nos vies
se pointent des rencontres.
Au détour d’une rue, dans un bar enfumé.
Alors mon amie
dis-moi ce que tu racontes.
Qu’es-tu devenue depuis l’éternité ?
Montagnes et océans
toujours nous séparent.
Dis-moi sous quel soleil vois-tu filer le temps.
D'autres terres, d'autres routes
depuis ton départ ?
Dis-moi sous quelles étoiles
ont grandi tes enfants.
Au hasard d'un comptoir
qui ne me connaît guère.
Au détour d'un quartier où je ne vais jamais.
« Garçon, s'il vous plaît,
veuillez remplir nos verres ! »
Il y a tant de passé qu'il nous faut rattraper.
Te souviens-tu encore
du jour où nous étions...
D'ailleurs qu'est devenu ce gars
qui ne te lâchait pas ?
Te rappelles-tu toujours de nos rêves à la con ?
De nos projets qui,
finalement,
n'en étaient pas.
Au hasard d'une bière,
au hasard d’un soda.
Autour d'une petite table, dans un vieux bistrot.
C'est étrange tu ne trouves pas
qu'on se croise comme ça ?
« Le hasard, tu vois bien ! »
Le hasard a bon dos.
Raconte-moi ta vie,
vas-y, divertis-moi.
Dégueule ce bonheur
que je vois dans tes yeux.
Parle-moi de tout ce que je ne connais pas.
Parle-moi de toi, de tout ce que tu veux.
Au hasard d'une journée
qui ne m'amuse plus.
Au détour d'un virage très mal négocié.
Pris au piège dans la carcasse
d'un vieux PMU,
étourdi par les tonneaux
que provoquent mes pensées.
Te souviens-tu encore
du temps où nous étions...
D'ailleurs, ce gars-là ne t'a jamais lâché !
Te rappelles-tu toujours de nos rêves bidons ?
De tous nos projets,
finalement,
avortés.
Au hasard d'un évènement imprévu.
Au détour d'un coma de plusieurs années.
Mon amour, pourquoi ne pas avoir attendu ?
Deux, trois ans ne sont pourtant pas éternité…
Au hasard…
mais le hasard tu sais n'existe pas.
Ce café, cet endroit, moi, je n'y viens jamais.
Coïncidences et destin se provoquent parfois,
voilà pourquoi je n'ai
cessé de te chercher.
Au hasard de nos vies se ternissent les couleurs.
Au détour de mensonges,
de promesses sans valeur.
Profite tant que tu peux de ta vie sans douleur
car un jour, le hasard
te crèvera le cœur...
***
Dieu nous hait tous
Encore une bière,
la dernière cette fois.
Je lève mon verre
à la santé des rois.
Aux puissants, aux élites,
à votre santé je bois.
D’ailleurs je vous invite
à trinquer avec moi
à la gloire du pouvoir,
à la gloire de l’argent,
de ce monde blafard,
à la santé des gens
qui regardent le ciel,
les yeux emplis d’espoir.
Mais tu sais, dans ce ciel,
il n’y a rien à voir.
Ne penses-tu pas
que tout va de travers ?
Que le monde pète les plombs.
Qu’il tourne à l’envers.
Qu’il n’y a plus de raison,
qu’il n’y a plus de repère.
Qu’à la moindre occasion
on s’envoie en l’air
à coup de balle dans la tête,
mon joli revolver,
le doigt sur la gâchette,
allons vers la lumière.
Assez de temps perdu
à rêver de chimères,
et si ce monde est foutu
autant quitter la Terre.
Encore une bière,
j’ai bien trente secondes
pour lever mon verre
à la santé du monde.
Aux laissés-pour-compte,
à votre santé, je bois.
Un dernier décompte,
je trinque encore une fois
à la gloire du pouvoir,
à la gloire de l’argent,
de ces dieux dérisoires,
à la santé des gens
qui se perdent dans un ciel
devenu bien trop grand.
Mais, tu sais, dans ce ciel
il n’y a rien de grand.
Ne penses-tu pas
qu’on t’a assez menti ?
Qu’on s’est foutu de ta gueule
avec toutes ces conneries ?
Que la vérité
au mensonge se mélange ?
Faisons taire à jamais
la voix des anges
à coups de balle dans le cœur,
dis-moi, mon flingue,
fais-je une erreur,
suis-je devenu dingue ?
Aucune main tendue
ne retiendra mon geste.
Ce monde est foutu
et Dieu nous déteste.
Encore une bière,
une dernière pour la route.
Qu’importent l’ivresse
et le prix que ça coûte.
Et puis jetons nos verres
au milieu des ronces,
trinquons aux prières
qui demeurent sans réponse.
À coups de balle dans les cieux,
dis-moi, qu’est-ce qui en tombe
puisqu’il n’est aucun dieu,
puisqu’on est seul au monde.
Quelques oiseaux paumés,
des pigeons un peu fous,
des colombes souillées
et dont tout le monde se fout…
À coups de balle dans la foule
que votre fin soit douce
puisque la vie rend saoul
et que Dieu nous hait tous.
***
On finit toujours seul
Je
ne crains ni le silence
ni le vide étouffant
que laisse une absence.
Une porte qui claque,
des mots qui écorchent,
des promesses en vrac,
j’en ai déjà plein les poches.
Je me moque des autres,
de ce qu’ils pensent de moi.
Si jamais je me vautre,
personne ne me relèvera.
Je me fous d’être seul
tant que je peux être moi.
Tu ne veux plus voir ma gueule,
je ne te retiens pas.
L’amour est une injure,
l’amitié une arnaque
quand l’un panse les blessures
l’autre fout le cœur en vrac.
Une nuit tu t’endors
dans un lit de confiance,
dans les bras du confort,
dans des draps d’insouciance.
Mais une fois réveillé,
il ne reste plus rien.
Jeté, oublié,
comme on abandonne un chien
attaché à un arbre
gémissant sa douleur,
implorant par les larmes
que son maitre ait un cœur.
Eh bien voilà ce que je suis :
un clébard solitaire
qui veut vivre sa vie
sans collier qui lacère.
L’amour est un salaud,
l’amitié est une pute
qui te pousse de haut
et se moque de ta chute.
Voilà ce que je suis,
que ça te plaise ou non.
Tu devras faire avec
ou casse-toi pour de bon.
Je n’ai pas de temps à perdre.
Je suis vieux à présent,
et je crache, et je gerbe,
vos jugements méprisants.
J’exècre ce monde !
J’emmerde les hommes !
Même un pied dans la tombe,
je n’ai besoin de personne.
Allez donc vous faire foutre !
Allez donc voir ailleurs !
À chacun sa route.
À chacun son heure…
L’amour et l’amitié
sont des toréadors
qui se plaisent à te planter
leurs banderilles dans le corps.
L’amour est ingrat,
l’amitié une grande gueule.
À la fin, tu verras,
on finit toujours seul.
***
Des mots bon marché
Tu voudrais des « je t’aime »
un peu plus souvent.
Que je couvre ta peau
de poèmes et de mots.
Des preuves d’amour
à longueur de temps.
Te dire que tu es belle,
que nous sommes éternels.
Tu voudrais que je te chante
des mots pleins d’espoir.
Que j’oublie une seconde
de raconter les ombres.
Tu voudrais que mes mots
fredonnent de belles histoires.
Que je sois romantique,
et moins mélancolique.
Mais, vois-tu,
je n’ai pas la plume heureuse.
Je l’ai plutôt à pleurer,
la pointe noyée
dans une encre enragée.
Oh vois-tu,
je n’ai pas la plume amoureuse.
Je l’ai plutôt solitaire,
car l’amour c’est de l’air,
aimer n’est qu’éphémère.
Tu voulais des « je t’aime »
un peu plus convaincants.
Que je couvre ton cœur
de bijoux et de fleurs.
Mais les preuves d’amour,
ça ne coûte pas tellement.
Quelques mots enflammés,
quelques mots susurrés.
Tu voulais que je chante
avec le sourire.
Que j’oublie un instant
la bêtise des gens.
De ces gens qui comme toi
pensent qu’aimer c’est se dire
des mots galvaudés,
des mots bon marché.
Mais, vois-tu,
je n’ai pas la plume niaise.
Je l’ai plutôt blasée
de voir à quel point
vivre me pèse.
Oh vois-tu,
je n’ai pas la plume fade.
Je l’ai plutôt agacée
de voir à quel point
l’amour se brade.
Car, vois-tu,
ma plume est souffrance.
Et les mots les plus beaux,
sont ceux qui écorchent,
qui font le plus mal.
Oh vois-tu,
comme ma plume est silence.
Car ce qu’elle ne dit pas,
vaut bien plus, je crois,
qu’un « je t’aime » banal.
Car ce qu’elle ne dit pas,
vaut bien plus, je crois,
qu’un « je t’aime » bancal.
***
Le sapin de Noël
Décembre est bien là, ça ne fait aucun doute.
Certains se plaignent du froid
et regrettent le mois d’août
quand ils avaient si chaud,
qu’ils s’en prenaient au ciel.
Un doigt levé bien haut, en direction du soleil.
Décembre s’est pointé, habillé de lumière
afin d’illuminer les longues soirées d’hiver.
Un feu de cheminée pour réchauffer les corps,
les fenêtres embuées par la fraicheur du nord.
Et dans le salon,
un gamin silencieux
observe le sapin de ses grands yeux ronds.
Il dépose un chausson, au pied du conifère
juste à côté du soulier de son père.
Décembre est bien là, impossible d’en douter.
Des chiots ont sauvé Noël à la télé.
Divertissements ratés, éternels bêtisiers…
Un doigt haut levé aux scénarios bâclés.
Décembre s’est pointé avec sa neige blanche.
La nature s’est drapée d’un habit du dimanche.
Et dans la cheminée le bois craque,
flambe et fume
dévoré par les flammes qui, lentement,
le consument.
Et dans le salon, un gamin silencieux
observe le sapin de ses grands yeux ronds.
Il regarde les chaussons, au pied du conifère :
le sien
et celui de son père.
Décembre est reparti, croyez-le ou non.
Certains se plaignent encore et sans raison.
Trop d’cadeaux, trop d’gâteaux,
les vacances terminées…
Un doigt levé bien haut pour les pourris gâtés.
Décembre s’est enfui, emportant avec lui
ses lumières, sa neige et son hiver.
Et dans la cheminée
il ne reste que des cendres :
dernier vestige du mois de décembre.
Et dans le salon, un gamin silencieux
observe le sapin de ses grands yeux ronds.
Cette année deux souliers, au pied du conifère,
il ne manquait que celui de sa mère.
***
Ni dieu ni maître
Vois-tu, belle Lune,
je n’ai plus que toi à qui pleurer
mon infortune, ma triste vie et mes regrets.
Toi seule sur Terre,
toi seule saurait me faire oublier
toutes mes galères,
toutes ces chimères longtemps cherchées.
Je n’ai jamais souhaité qu’amour
mais à trop jouer on perd un jour,
une erreur suffit au bonheur
pour qu’il s’en aille vers un ailleurs.
Crois-moi, belle Lune,
si tu peux entendre ces maux ;
je n’ai que ma plume
pour te les envoyer tout là-haut.
Toi seule m’éclaire, tu es ma lumière,
ma petite bougie.
Sans toi je me perds,
et mes jours deviennent des nuits.
Je n’ai jamais voulu tout ça,
d’ailleurs, je ne demandais rien.
Je ne mérite pas qu’on tienne à moi.
Je ne mérite pas qu’on me tienne la main.
Dis-moi belle Lune,
faut-il que tout se termine ainsi ?
Dans la solitude, dans la colère
puis dans l’oubli ?
Moi, seul sur Terre,
pauvre éphémère, j’ai trop vécu,
gâché tant d’années
pour une futile histoire de cul.
Je n’ai jamais aimé que toi
mais je ne cherche pas ton pardon.
Ta vie sera plus belle sans moi.
Ton monde tournera plus rond…
Vois-tu belle Lune,
je n’avais que toi à qui pleurer.
Je n’ai nulle fortune,
ma seule richesse m’a quitté.
Moi, seul sur Terre,
moi et ma misère,
allons ce soir,
emportés par la mer, sous ta lumière
ma Lune, mon phare.
Je ne rêvais que de liberté,
je voulais tout et tout connaître
et puis l’amour m’a tué
moi qui n’avais ni dieu ni maître.
Je n’ai jamais souhaité qu’amour,
cet amour m’a fait perdre la tête.
Tu vivras en moi pour toujours,
moi qui n’avais ni dieu ni maître.
***
Une chanson qui n’a rien à dire
Voici une chanson qui n'a rien à dire.
Une mélodie qu'on oublie.
Quelques notes issues d'un délire.
Une image éphémère, sans vie.
La nuit est tombée sur la ville,
j’ai le cœur qui saigne.
Debout sur le quai, immobile,
je laisse déferler ma peine.
Sur mes joues coulent quelques larmes.
Je ne suis plus vraiment un homme.
Une machine sans âme,
je ne ressemble à personne.
Assis sur un caillou,
je me laisse aller aux rêves.
Sur l’eau, quelques remous.
Je tremble un peu, puis me relève.
Je marche sans savoir où aller,
dans la pénombre de cette nuit.
La Lune n’a pas voulu se lever,
serait-elle triste elle aussi ?
C’est la balade
d’un ange déchu.
Dans le cœur, plus aucune flamme,
et plus d’aile non plus .
Voici une chanson qui n'a rien à dire.
Chanson qui touche un peu quand même.
Pour tous ceux qui ont perdu le sourire,
à tous ces anges que la vie traîne…
***
Les plans de la faucheuse
Comment comptes-tu t’y prendre ?
Dis-moi sur quels chemins tu vas me pendre,
dis-moi par quels moyens,
je veux comprendre.
Comment comptes-tu me descendre ?
Comment comptes-tu t’y prendre ?
Dis-moi quel genre de piège tu vas me tendre,
dis-moi à quels privilèges je peux prétendre.
Pourrais-je au moins me défendre ?
Dis-moi quels sont tes plans,
s’il me reste beaucoup de temps
avant que tu prennes mon âme,
que tu éteignes ma flamme.
Vas-tu me tuer en une seconde ?
Ou me laisser agoniser ?
Allez dis-moi, ombre vagabonde,
dis-moi quels sont tes projets.
Vas-tu me noyer dans la mer,
me faire chavirer d’un bateau ?
Est-ce qu’un océan, en colère,
sera mon infini tombeau ?
Si je ne suis qu’un grain de sable,
autant finir au fond de l’eau…
Comment comptes-tu t’y prendre ?
Dis-moi sur quel terrain je vais m’étendre,
sur quelle lame mon sang va se répandre.
Comment comptes-tu me surprendre ?
Comment comptes-tu t’y prendre ?
Dis-moi quel genre de fin tu vas me vendre,
dis-moi à quel destin je peux m’attendre.
Je ne voudrais pas me méprendre.
Dis-moi quels sont tes plans,
s’il me reste encore du temps
avant que tu m’arraches le cœur,
que tu assombrisses ma lueur.
Vas-tu me tuer sans un remord
ou laisser faire la maladie ?
Allez dis-moi, ombre de la mort,
dis-moi ce qui te fait envie.
Vas-tu me faire partir en fumée,
me consumer lentement ?
Est-ce que j’aurai pour mausolée
les cendres d’un brasier ardent ?
Si je ne suis que poussière,
autant finir dans le vent…
Comment comptes-tu t’y prendre ?
J’t’en prie, dis-moi, je peux l’entendre.
je n’vais pas te faire un esclandre.
Ma vie t’appartient,
tu peux la reprendre.
***
Le cœur des hommes
Un ciel de ténèbres s’est abattu sur moi,
un cortège funèbre marche dans mes pas.
Je le sens qui s’agace, impatient de piller
ma vieille carcasse, mon cœur fatigué.
Ce soir, les tristes gueules
n’auront pas ce qu’elles veulent,
puisque l’ancre levée,
pour toujours, je m’en vais.
Je quitte la terre
des hommes endormis
qui se rêvent lumière
mais ne sont que la nuit.
Adieu mes frères,
mes amis, mon pays.
Je quitte la pierre
pour l’onde infinie.
Et le vent dans les voiles,
sous un ciel d’étoiles,
Yo oh oh oh chope de bière, flasque de rhum,
Yo oh oh oh je lèverai mon verre
pour le cœur des hommes.
Oh Lune, regarde
ce qu’ils ont fait de moi :
capitaine solitaire
d’un navire à trois mâts.
Je ne suis plus qu’un corsaire
sur une eau chavirante,
juste un grain de poussière
sur la Terre tournoyante.
Plus envie de combattre
l’immature humaine,
j’ai le cœur pirate
et l’amour d’une sirène.
Je m’en vais la rejoindre
au profond de la mer,
vous n’aurez plus à craindre
mes jugements, mes colères.
Adieu ma mère,
mon père. Ma vie,
je la veux en mer,
je la veux en vie,
et le vent dans les voiles
sous un ciel d’étoiles,
Yo oh oh oh chope de bière, flasque de rhum
Yo oh oh oh je lève mon verre
pour le cœur des hommes.
Amour, guide-moi
de tes chants envoûtants,
que résonne ta voix
jusqu’au firmament.
Mon navire et mon âme
t’appartiennent à jamais,
que chavirent dans mes larmes
mes souvenirs, mes regrets.
Je ne veux plus être,
je ne veux plus rien,
que laisser mon être
se perdre entre tes mains.
Au profond de tes yeux,
me plonger pour toujours,
m’y noyer, amoureux,
jusqu’à la fin des jours.
Adieu mon dégoût,
ma colère, ma peine.
Ce monde à genoux
ne vaut plus la haine.
Et le vent dans les voiles
sous un ciel d’étoiles
Yo oh oh oh chope de bière, flasque de rhum
Yo oh oh oh j’ai levé mon verre
pour le cœur des hommes.
Oh ciel de ténèbres,
je me moque de toi,
de ta marche funèbre
espérant mon trépas.
Je ferai les océans,
je voguerai les eaux,
j’irai aux quatre vents
sur mon libre bateau.
Au plus loin des divins
qui hantent vos cieux,
à l’abri du malsain,
de l’or dans vos yeux,
je quitte la terre
des hommes endormis
qui rêvent de lumière
mais ne font que la nuit.
Adieu mes frères,
mes amis, mon pays.
Je quitte la pierre
pour l’onde infinie.
Et le vent dans les voiles
sous un ciel d’étoiles
Yo oh oh oh chope de bière, flasque de rhum
Yo oh oh oh je lève mon verre
pour le cœur des hommes.
***
Dans ma tête
Dans ma tête c’est le merdier,
un bordel sans nom,
un royaume bariolé
qu’a perdu la raison,
un monde surpeuplé
de pensées, de passions
et qui tourne sans arrêt,
mais qui ne tourne pas rond.
Dans ma tête c’est l’usine,
la chaleur et la sueur,
p’tite machine qui trime,
qui y met tout son cœur,
qui y met toute sa rage,
toute sa peine et sa peur
et elle tourne et elle tourne
comme tournent les heures.
Dans ma tête il y a les souhaits,
les souvenirs, les idées,
un pot-pourri de songes
qui rêvent de liberté.
Dans ma tête il y a des trêves,
des batailles inachevées,
des mots sur la grève,
naufragés échoués.
Dans ma tête y a des mirages,
des tempêtes, des déceptions,
un optimiste qui se voile la face
avec les voiles d’un galion.
Dans ma tête y a des remords,
des regrets, des dépressions,
mille désirs qui perdent le nord
sur la mer des désillusions.
Dans ma tête il y a moi,
il y a moi, que je déteste.
Dans ma tête il y a toi,
il y a toi et le reste.
Dans ma tête y a la mer,
la plage, l’horizon.
Dans ma tête y a l’amour,
la joie et l’ambition.
Il y a des folies,
des envies d’aventures,
il y a le désir,
le sexe et la luxure.
Des pensées érotiques :
la courbure de tes reins,
ton corps qui m’excite
ta chaleur et tes seins.
Dans ma tête y a ta voix,
tes lèvres que j’embrasse.
Dans ma tête il y a toi
qui prends beaucoup de place.
Dans ma tête c’est le merdier,
rien qui ne tienne la route.
Un monde ravagé,
en ruine, en déroute.
Un royaume sans roi,
un royaume sans loi,
dans ma tête c’est le désordre,
je m’y perds quelquefois.
Les yeux fixant le vide,
le corps comme pétrifié,
plus rien n’est limpide,
tout est embrumé,
perdu dans mes pensées,
bien souvent dans l’impasse,
j’perds la notion du temps
qui vient puis qui passe.
Dans ma tête il y a moi,
il y a moi, que je déteste.
Dans ma tête il y a toi,
il y a toi et le reste.
Dans ma tête y a des voix
qui me parlent sans arrêt,
qui me dictent des choix,
qui m’imposent leurs idées.
Elles braillent toutes en même temps,
ne sont jamais d’accord,
elles brassent du vent
me font perdre le nord.
Et elles hurlent leurs bêtises,
leurs aigreurs, leurs insultes.
Elles se payent ma tête,
comme on s’paye une pute.
Elles me baisent sans amour,
me salissent de leur haine,
elles me baisent sans détour,
sans remords et sans gêne.
Dans ma tête y a des histoires
inventées de toutes pièces.
Dans ma tête y a ma mémoire
qui déconne sans cesse.
Dans ma tête il y a ces gens,
tous ces visages gravés.
Dans ma tête, toutes ces choses
que j’aimerais oublier :
les déprimes, les angoisses,
les sentiments refoulés
qui s’enveniment, qui s’entassent
qui n’demandent qu’à crier.
Y a des chansons et des poèmes,
quelques blagues absurdes,
des questions, des problèmes
et de l’incertitude.
Dans ma tête il y a moi,
il y a moi, que je déteste.
Dans ma tête il y a toi,
il y a toi et le reste.
Dans ma tête c’est le merdier,
et le merdier ça m’prend la tête.
J’aimerais pouvoir faire le vide,
tout jeter par la fenêtre.
Mais j’veux pas être comme eux,
tous ces fantômes, ces robots…
Non je ne veux pas être comme eux,
qu’on me lave le cerveau.
Dans leur tête y a qu’l’argent,
le pouvoir et la gloire,
la richesse au détriment
de ceux qui perdent espoir.
Dans leur tête c’est le merdier,
un bordel sans nom,
alors je garde mes pensées
à tort ou à raison.
Dans ma tête il y a moi,
il y a moi, que je déteste.
Dans ma tête il y a toi,
il y a toi et le reste.
***
Gueule d’ange
Il aura les yeux de ceux
qui n’ont au fond que la pression de n’être ici
que pour sublimer la vie.
Un regard qui en dit long
sur tout l’espoir et la passion.
Quand tout est nouveau, tout semble être beau.
Il aura la voix des dieux,
la douce voix de nos aïeux qui, de là-haut,
lui souffleront les mots
qui dissipent ces flammes,
consumant le cœur et l’âme,
quand tous ceux qu’on dérange,
sans arrêt, nous condamnent.
Il sourira sûrement
devant nos yeux pochés
par un manque de sommeil
qu’on ne saurait lui cacher.
Nos visages vieillis
par le stress et par la peur
que cette pute de vie nous l’arrache avant l’heure.
Ses petits doigts fripés,
dans nos mains tremblantes
de jeunes parents désemparés.
La joie et la boule au ventre qui,
dans une danse terrifiante,
s’enlacent, s’emmêlent et se mélangent…
Il aura la gueule des anges
Il aura la gueule des anges
Il aura la gueule des anges
Il aura
du temps pour mieux comprendre
comment tourne cette planète,
pour s’habituer à la nausée et au mal de tête,
à la fatigue qui s’accumule,
jour après jour, au fil des heures,
car il faut travailler, toujours,
l’argent du beurre s’gagne au labeur.
Il parlera doucement, hurlera souvent, contre nous,
nos erreurs, nos mensonges et nos fautes.
Plus tard, il se lèvera, marchera, puis s’en ira
vivre sa vie au milieu des autres.
Il pleurera sans doute,
perdu dans ce monde
où tant d’entre nous, cent fois, se sont vautrés.
Qui n’a jamais senti la route,
le bitume immonde,
lui arracher la peau jusqu’à le faire saigner ?
Il nous aimera,
nous haïra, par intermittence,
c’est le prix à payer, c’est notre pénitence
pour lui avoir imposé ce monde si étrange.
Normal qu’il nous juge, normal qu’il se venge,
et qu’il gueule sur les anges
et qu’il gueule sur les anges
et qu’il gueule sur les anges
et qu’il gueule
comme moi, peut-être, la musique pour drapeau,
la guitare sous le bras, ou devant un piano…
Les doigts glissant sur des blanches, sur des noires,
sur des notes déchirantes, sur des touches d’ivoire.
Comme moi, peut-être, couchera-t-il ses maux
sur un bout de papier, à la pointe d’un stylo
qui déversera son encre,
comme s’écoule l’eau d’une rivière,
quand la tristesse d’un océan
se cache sous la paupière.
Il aimera, bien entendu,
parfois plus que de raison,
entre un amour éperdu et une fugace passion.
Il naviguera ici et là, à la recherche de l’âme sœur,
une sirène qui le laissera s’amarrer à son cœur.
Il sera droit, juste et honnête,
des valeurs plein la tête.
Il aura toutes les clés en main
pour conquérir sa planète.
Alors, à son tour,
il vivra le bonheur étrange,
lorsqu’il tiendra sa main fripée entre ses phalanges
et qu’il verra sa gueule d’ange
et qu’il verra sa gueule d’ange
et qu’il verra sa gueule d’ange
et qu’il verra
qu’elle aura les yeux de ceux
qui n’ont au fond que la pression de n’être ici
que pour sublimer la vie.
Un regard qui en dit long
sur tout l’espoir et la passion.
Quand tout est nouveau, tout semble être beau.
Elle aura la voix des dieux,
la douce voix de nos aïeux qui, de là-haut,
lui souffleront les mots
qui dissipent ces flammes,
consumant le cœur et l’âme,
quand tous ceux qu’on dérange,
sans arrêt, nous condamnent.
Elle sourira sûrement devant leurs yeux pochés
par un manque de sommeil
qu’ils ne sauront lui cacher.
Leurs visages vieillis par le stress et par la peur
que cette pute de vie la leur arrache avant l’heure.
Ses petits doigts fripés, dans leurs mains tremblantes
de jeunes parents, désemparés,
et sur la piste de danse,
ça s’enlace, ça se balance,
et la roue tourne, tourne
et tout recommence…
Ils auront la gueule des anges
Ils auront la gueule des anges
Ils auront la gueule des anges
Ils auront…
***
Une moitié de moi
Je ne suis qu’une moitié de moi
depuis que tu t’en es allée.
Sûr, ça ne fait pas des mois
et pourtant l’éternité
me semblerait bien moins longue
que ces heures sans toi,
puisque chaque seconde
me saigne les doigts.
Je ne suis qu’une moitié de moi
depuis que tu t’en es allée.
Bien sûr, tu reviendras, bientôt, à mes côtés.
Alors je ne pleure que d’un œil
puisque l’autre ne m’appartient plus.
Pendant que l’un se recueille,
le second ne perd pas de vue
qu’une autre moitié de nous
ne s’en est pas allée.
Et qu’il me faut tenir le coup,
ne pas abandonner.
Qu’importe ce qui me ronge,
quand, de toi, je suis loin.
Son cœur est une éponge
qui se gorge de mes chagrins.
Je ne suis qu’une moitié de moi
depuis que tu t’en es allée.
Et cette moitié veillera sur notre bébé.
Pourvu qu’elle tienne le coup,
qu’elle garde bien toute sa tête,
jusqu’à ce que nous reformions un tout,
que nous ne fassions plus qu’un être.
Je ne suis qu’une moitié de moi
depuis que tu t’en es allée.
Sûr, ça ne fait pas des mois,
et pourtant l’éternité
me semblerait bien moins longue
que ces journées sans toi,
puisque je me fous du monde
et qu’il se moque de moi.
Puisque je me fous du monde,
que je ne vis que de toi…
***
J’aime pas…
J'aime pas c’que j’deviens,
depuis qu’t'es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime plus trop c’que je suis.
C’est pas bien d’ta faute,
mais c'est sur toi que ça tombe.
T’es, comme dirait l'autre,
pas tombé dans l’bon monde.
J'aime pas c’que j’deviens,
j'aime pas quand j’t’engueule,
quand t’as du chagrin,
qu’t’aimes pas être tout seul
parc’que c'est la nuit,
et qu’la nuit ça t’fait peur,
alors tu pleures et tu cris
toutes les larmes de ton cœur.
J'aime pas c’que j’deviens,
depuis qu’t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime plus trop c’que je suis.
J'aime pas la fatigue
qui m’fait monter violence,
qui m’fait claquer les portes
au nez de ton innocence.
J'aime pas c’que j’deviens,
j'aime pas les mots qui m’viennent,
les insultes, les « putain ! »,
les « fais chier ! Tu m’emmerdes ! »
J'aime pas ma grosse voix
qui prend ses grands airs.
J'aime pas hausser le ton,
j'aime pas être en colère.
J'aime pas c’que j’deviens
depuis qu’t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime plus trop c’que je suis.
Moi qui ai rejeté
l'autorité toute ma vie,
comment suis-je censé
l’incarner aujourd'hui ?
J'aime pas c’que j’deviens,
j'aime pas interdire,
j’aime pas t’obliger,
j'aime pas m’faire obéir.
On m’dit qu’c’est pour ton bien,
qu’il te faut des barrières.
C’est le propre de l’humain,
d’imposer des œillères.
J'aime pas c’que j’deviens
depuis que t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime pas trop c’que je suis.
J’m’aime plus dans la glace,
j’comprends plus c’que j’dis.
J’peux plus m’voir en face,
j’me déteste, j’me vomis.
J'aime pas c’que j’deviens,
et j’veux pas faire mon deuil.
Mes rêves de gamin
n'iront pas au cercueil.
Pardonne mes insultes,
mes excès de colère.
J’veux pas être adulte,
j’sais pas être père.
J'aime pas c’que j’deviens
depuis que t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime pas trop c’que je suis.
Alors j’cogne les murs,
alors j’me fais du mal.
Je n'ai pas l’envergure
de la figure parentale.
J'aime pas c’que j’deviens
depuis que t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime pas trop c’que je suis.
C'est pas bien d’ta faute,
et c'est sur toi qu’ça tombe.
T’es, comme dirait l'autre,
pas tombé dans l’bon monde.
J'aime pas c’que j’deviens
depuis que t’es dans ma vie.
Depuis qu’t’es là gamin,
j'aime pas trop c’que je suis.
J'aime pas c’que j’deviens
et ça m’fout la haine.
J’aime pas c’que j’deviens,
mais putain, toi, je t’aime.
***
Le temps d’être père
Comment lui dire, sans mentir,
que la vie vaut d’être vécue,
que venir au monde est un cadeau,
comment rendre vrai ce qui est faux ?
Comment lui dire, sans rougir,
que la vie n’est pas un combat,
qu’il suffit de quelques efforts,
que les faibles gagnent contre les forts ?
Comment lui dire sans trahir
la confiance qu’il a en moi ?
L’amour d’un enfant pour son père
est le plus bel amour qui soit.
Comment lui dire, avec le sourire,
que le monde qu’il découvre
ne lui brisera jamais le cœur.
Je ne suis pas prêt, j’en ai bien peur…
Et pourtant, il est temps pour moi
d’être père comme mon père avant moi,
de porter à bout de bras
toutes les peines qu’il aura.
Comment lui apprendre à marcher
alors qu’on ne fait que courir ?
Comment lui apprendre à parler
alors qu’on ne sait que crier ?
Comment lui faire aimer les Hommes
alors que moi-même, j’ai du mal ?
Comment lui faire croire en l’humain
alors que je ne crois en rien ?
Comment lui parler d’amour
sans évoquer le pire ?
Qu’aimer réchauffe le cœur
mais qu’un cœur ça se déchire…
Comment être un bon père ?
Que dire et quoi faire ?
Pour lui donner envie
de croire en la vie…
Et pourtant, il est temps pour moi
d’être père comme mon père avec moi,
de tenir du bout de la main
toutes ses peines et tous ses chagrins.
Comment lui dire sans mentir
que faire du vélo sans petites roues
ne le fera que grandir
sans le moindre bleu aux genoux…
Je crois que je vais m’en tenir
à la beauté de ce monde
que je peux voir au travers
des yeux de sa mère.
***
Pardonne moi gamin
Si la lumière du soleil te fait mal aux yeux
quand se lèveront tes paupières
pour la première fois,
si tout ce que tu vois te semble dangereux,
sache que j’ai peur tout autant que toi.
Si tu te demandes ce que tu fais là,
où est ta place dans ce vaste monde,
si tu te sens petit, perdu ici-bas,
sache que tout comme toi, j’ignore qui je suis.
Si tu rêves d’étoiles et de liberté,
si tu veux mettre les voiles et tout quitter
mais que le courage, un jour, s’en est allé,
que la crainte du naufrage te fige sur le quai.
Si tu veux que tempête inonde cette Terre,
Purifier, par les eaux, l’humanité entière,
si tu rêves d’océan, d’embruns et d’écume,
que le souffle du vent embrasse ta solitude.
Pardonne-moi gamin,
tu tiens tout ça de moi.
Pardonne-moi gamin
si ce monde n’est pas pour toi.
Si le vacarme ambiant te saigne les oreilles
quand tu écouteras pour la première fois,
s’il n’y a que les notes qui apaisent ton ciel,
sache que sans musique je ne survivrais pas.
Si l’existence d’un Dieu te paraît impossible
et que la religion est une plaie qui suinte
d’où s’écoule la haine, la folie nuisible
qui séduit les hommes
sous les traits d’une sainte…
Si les mots sont pour toi un moyen de défense,
qu’un stylo à la main reste ta plus belle arme,
qu’une simple rime bancale
te redonne l’espérance,
te délivre du mal et te sèche les larmes…
Et si tu aimes une femme
comme j’aime ta mère,
si tu ne vis que pour elle,
que tu crèverais sans elle,
si tu oublies ton rêve d’arpenter les mers,
que tu te sens à ta place
chaque fois qu’elle t’embrasse…
Pardonne-moi gamin,
tu tiens tout ça de moi.
Pardonne-moi gamin
si ce monde n’est pas pour toi.
Pardonne-moi gamin,
tu tiens tout ça de moi.
Mais ne t’inquiète pas,
tout ira bien…
***
La chandelle
Sais-tu ce que c'est de tenir la chandelle ?
Ce n’est qu’une image,
mais la douleur est réelle.
Ces sorties entre couples
où t'es le seul qu'est tout seul,
scrutant le néant
pendant qu’ils se lèchent la gueule.
Quand tu détournes le regard,
que t'aimerais devenir transparent,
que tu préférerais être ailleurs,
chez toi bien à l’abri,
loin de ces deux connards
et de leur bonheur écœurant,
seul avec ce petit cœur
dont personne n’a envie…
Sais-tu ce que c'est de tenir la chandelle
sans succomber aux pulsions criminelles ?
Faut savoir se contrôler
pour pas tout jeter par la fenêtre,
faut savoir paraître bien
même si on a l'air bête.
« Mais sont-y pas mignons,
ils forment un joli couple ! »
Putain, l'amour ça rend con,
leur bonheur me dégoûte.
Ils se disent mes amis
mais ne se soucient pas de moi.
Je pourrais crever d’ennuis
qu’ils ne le verraient pas.
Sais-tu ce que c'est de tenir la chandelle ?
Durant toute une soirée,
essayer de les décoller.
Car, quand on est amoureux,
on va toujours par deux.
Moi, ce n’est pas de ma faute
s'ils ne vont jamais l'un sans l'autre.
Des ‘’je t'aime’’ à tout va,
et toutes leurs petites manières…
L’amour ça dégouline,
l’amour c’est dégueulasse.
Ça ne durera pas,
aimer est éphémère.
Un jour elle t’assassine,
te jette, puis te remplace.
Un jour tu verras, tu auras ta chandelle ;
la cire chaude sur les doigts,
la douleur bien réelle.
Ce sera à toi de te brûler les mains
avec cette jolie bougie qui m'allait si bien.
J’ai le cœur calciné, cette chandelle me crame,
elle s’est incrustée dans ma peau, dans mon âme.
Mon amour laisse-moi, je n’y survivrai pas !
Te voir heureuse dans ses yeux,
me consume à petit feu.
Éteins cette chandelle,
que tout parte en fumée !
La dernière étincelle
du temps où l’on s’aimait.
***
L’épouvantail, épouvanté
Là,
sur son socle de terre,
planté,
comme un arbre fier,
il protège son royaume
dans sa poussiéreuse armure jaune.
Souillé par les caprices du temps,
triste mais pourtant souriant,
son taf c’est toute sa vie,
épouvantail jour et nuit.
Mais il sait bien, qu’il n’est plus rien.
Un bout de tissu,
un pantin
au fond d’un jardin.
Il ne fait plus peur à personne,
les oiseaux et les enfants s’en moquent.
Il sent bien qu’on l’abandonne,
que c’est la fin d’une époque.
Condamné à la poussière,
brûlé sûrement cet hiver,
il décide de tout quitter,
dès ce soir, de s’en aller…
Descendre tant bien que mal,
de son piédestal,
pour découvrir le monde
avant que tout ne s’effondre.
Corps fragile, cœur sur la main,
il renonce à son jardin.
Adieu majestueux pantin,
qui sème sa paille sur le chemin.
Il n’ira pas loin faut être honnête,
il est dépassé, obsolète,
mais il avance quand même,
l’espoir le pousse, ou le traîne.
Au matin, il ne restera rien
de lui, de son glorieux destin.
Il n’était pas fait pour marcher,
l’épouvantail épouvanté.
Aujourd’hui, on est demain,
et il est mort, le pantin.
Sa paille laissée derrière lui,
est une rivière dorée qui le relit
au champ qu’il aimait tant
pour qui il a donné sa vie.
Il est libre à présent,
sur le sol un tas de vêtements.
Ancien héros en armure jaune,
trop vieux pour mener leur combat.
Adieu pauvre fantôme,
ce monde n’était plus pour toi.
***
Triste complainte
Le silence est un chant
que je connais trop bien.
Un sanglot en latence,
une boule au creux des reins.
Une envie de crier,
sans qu’aucun son ne sorte.
Une envie de sourire
que le diable emporte.
Le silence est un air
qui se moque de moi.
Qui sans en avoir l’air
me fait manquer de toi.
Quand le vide est trop plein,
qu’il déborde de rien,
qu’il inonde mon monde
de futiles lendemains.
Bien sûr j’ai conscience
que rien n’est jamais perdu.
Qu’un peu d’espérance
peut redonner la vue.
Mais si le silence
me saigne les oreilles,
mes yeux quant à eux
ont perdu le sommeil.
Alors bien entendu le bonheur
n’est pas mort,
si mon cœur ne bat plus,
moi, je respire encore.
Mais l’arrogance du silence
qui s’impose sans gêne
fait de mon existence
une pauvre rengaine.
Le silence est un chant
que je sais merveilleux.
Une symphonie qui danse
mais sous d’autres cieux.
Ici pas de place
pour qu’elle puisse s’envoler.
Le silence n’enlace
que ceux qui savent écouter.
Le silence est un air
qui se rit bien de nous,
qui ne manque pas d’air,
le chagrin il s’en fout.
Il s’étend sereinement
aux quatre coins du globe
et nous pauvres de nous,
on n’est personne.
Bien sûr, il existe une façon de le taire,
avec un artiste et un peu de lumière,
mais si le silence
se meurt au moindre bruit,
qu’en sera-t-il de mon cœur,
peut-il battre sans lui ?
Alors bien entendu le bonheur est ailleurs.
Si nous deux c’est foutu,
si l’amour se meurt.
Mais vois-tu ce silence
qui me pèse tellement
comble ton absence
qui me pèse tout autant.
Le silence est un chant
que je connais par cœur,
un petit requiem
qui égaye mes heures,
quand le son de ta voix
s’efface peu à peu,
que ton rire n’est plus
qu’un souvenir vaporeux.
Le silence est un air
que je chante pour toi,
toi, la fille de l’air
qui s’est lassée de moi.
Parce que j’étais trop bien
ou bien trop con…
J’ai bien du mal encore
à comprendre la raison.
Bien sûr, j’ai mal
chaque jour que Dieu fait,
que ce Dieu sans amour
m’oblige à supporter.
D’ailleurs j’emmerde les dieux
et leurs petits apôtres,
je ne crois pas en eux
mais tout est de leur faute.
Alors bien entendu l’amour reviendra,
assassinant le silence de sa petite voix.
Silence assourdissant
qui doucement m’esquinte
et fait de mon existence
une triste complainte.
***
Les Assassines
Elles ont des revolvers à la place des yeux.
Cavalières hors pair sur des chevaux de feu.
Elles galopent les plaines en quête de victimes.
Elles sèment terreur au cœur,
ce sont les Assassines.
À coup de balles d’argent,
elles pénètrent les corps,
marient le noir et blanc,
fusionnent l’amour et la mort.
Elles laissent dans leur sillage,
des âmes en ruine, calcinées,
détruisent sur leur passage
tous ceux qui tentent de les aimer.
Dans un vieux saloon, dans l’enfer de la nuit,
accoudé au comptoir, un verre de whisky,
je tente de faire taire
celle qui m’emporte la raison.
Moi le cowboy solitaire,
je cherche la rédemption.
J’ai succombé, un jour,
à ces femmes fatales.
J’ai goûté à l’amour, au bien qui fait du mal.
Oui, je me suis offert
aux femmes qui fascinent
et j’ai mordu la poussière
aux pieds des Assassines.
Elles te promettent le grand voyage,
des horizons sans frontières,
une chevauchée sauvage
à travers l’univers.
Elles t’offrent leurs soleils, leurs étoiles,
leurs astres.
Elles t’offrent leur amour, mais leur amour,
un jour, te castre.
Quand vient la tempête,
l’océan se déchaine
et les cœurs poètes
se noient dans leurs poèmes.
Toi qui te croyais si fort,
bien au-dessus de tout ça,
tu perdras plus que le nord,
oui, mon vieux, tu te perdras.
Moi je me suis oublié
pour les beaux yeux d’une femme
qu’a joué avec mon cœur,
l’a jeté dans les flammes.
Elle a fait de moi sa chose,
son pantin de bois,
depuis, les ecchymoses,
dans le whisky, je les noie.
Elles ont des revolvers à la place des yeux.
À coups de balles d’argent
elles tuent les amoureux.
Cavalières hors pair, toujours,
elles nous dominent.
Vêtues de noir, vêtues de blanc,
ce sont les Assassines.
Dans un vieux saloon, dans l’enfer de ma vie,
accoudé au comptoir, moi, je chante les filles.
Celles qui ont le pouvoir d’emporter ta raison.
Moi, pauvre tocard, je cherche la rédemption.
L’une d’elles m’a choisi, une triste nuit d’orage.
Elle a fait de ma vie un désert de mirages.
Elle était ma lumière,
quand je n’y voyais plus rien.
J’erre à présent, sans repères,
dans une obscurité sans fin.
Les Assassines ont dans les mains
couteaux et carabines.
Elles te laissent effleurer leurs seins,
et puis, soudain, elles te piétinent.
Elles se jouent de tes malheurs,
font de toi moins que rien.
Elles savent t’arracher le cœur
et l’étouffer entre leurs mains.
Les Assassines ont dans les mains
couteaux et carabines.
Les Assassines, écoute-moi bien,
toujours elles te piétinent.
À toi qui penses encore, à tort,
que l’homme l’emportera,
je ne donne pas cher de ton corps
quand l’une d’elles te choisira.
***
Fanent les roses
La petite flamme vient de s’éteindre,
elle n’aura que très peu vécu.
Mais je ne vais sûrement pas me plaindre
si ce qui était n’est plus.
Tout ce qui commence doit se finir.
Il y a un temps pour chaque chose.
La Lune va bientôt s’endormir,
et je regarde se faner les roses.
Le petit poisson dans son bocal
ne nage plus autant qu’avant.
Dans sa prison de cristal,
il s’est noyé, apparemment.
Tout ce qui commence doit s’achever.
Il y a un temps pour chaque chose.
Le soleil va bientôt se lever,
et je regarde se faner les roses.
La petite voix dans ma tête
s’en est allée cette nuit.
Elle a esquivé la tempête,
a pris le large, elle aussi.
Tout ce qui commence doit se conclure.
Il y a un temps pour chaque chose.
L’amour impose ses écorchures,
et je regarde se faner les roses.
La petite flèche plantée dans l’cœur
s’est changée en lame de rasoir
et elle lacère, au fil des heures,
ce cœur qui continue de croire
que tout ce qui se finit, recommence.
Qu’il y a un temps pour autre chose.
La vie est faite de renaissances,
et moi je dois cueillir des roses.
La petite musique vient à se taire,
elle n’aura que bien trop duré.
Et le petit poisson dans sa misère
a dû déjà tout oublier.
Tout ce qui s’arrête doit repartir.
Il y a un temps dont on dispose.
La mort va, un jour, s’en venir,
réclamer son bouquet de roses...
***
Les poupées
Petite tête blonde assise en tailleur
se réchauffe l’esprit près du radiateur.
Elle s’imagine des films, invente des histoires,
le sourire figé, au pied d’un miroir.
Petit être fragile dans une robe à fleurs ;
aucun signe de vie, point de battement de cœur.
Posée sur l’étagère des entités inhumaines,
elle s’émaille
et entaille son vieux cœur porcelaine.
Petite tête brune sur un piédestal,
un jour, a glissé, rien d’original.
Une moitié de visage, une moitié d’âme ;
une poupée qui tombe, ce n’est pas un drame…
Petit être inutile, incapable de mourir,
rangé, balancé, au grenier des souvenirs.
Elle s’accroche sans faiblir au rebord de la nuit,
espérant qu’un sourire la ramène à la vie.
Petite tête rousse a perdu ses couleurs ;
lorsque le temps passe, la beauté se meurt.
Nimbée de pénombre, à mille lieues du soleil,
Alice est bien loin du pays des merveilles.
Petites têtes font la tête de ne plus être aimées.
Pauvres jouets obsolètes d’un temps dépassé.
Décoiffées par l’oubli, débraillées par le temps,
par l’enfant qui grandit inexorablement.
Petits visages pâles au regard triste,
comme le serait un pantin
sans son marionnettiste.
Immobiles, sur l’étagère,
les poupées prennent la poussière.
***
Allume-moi
Libère tes ardeurs.
Allongé sur un lit de cendre,
l’altitude me fait peur
mais je refuse de descendre.
Brûlés de l’intérieur,
nos deux corps ne font qu’un.
Feux de forêt dans mon cœur,
douce chaleur dans le tien.
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme, incendie-moi !
Toi la flamme, embrase-moi !
Fais-moi partir en fumée…
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme et mon esprit !
Toi ma flamme, embrasse-moi
dans la chaleur de ce brasier.
La nuit nous appartient.
Toi et moi au bord du monde.
Inhibe mes sens un par un,
qu’importe si la Terre s’effondre.
Suffoque et pleure, tousse et meurs !
Viens en moi si tu préfères.
Et durant des heures et des heures,
consume chaque lambeau de ma chair.
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme, incendie-moi !
Toi la flamme embrase-moi !
Élève-toi dans la fumée…
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme et mon esprit !
Toi ma femme envahis-moi !
Que nos ébats n’en finissent pas.
S’il est une braise ardente
qui jamais ne pourra s’éteindre,
si cette baise est indécente,
ne cessons jamais de nous étreindre.
Mets le feu à nos amours,
qu’ensemble nous nous brulions les ailes.
explosons, tour à tour,
nos cœurs en millions d’étincelles.
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme, incendie-moi !
Toi ma flamme embrase-moi !
Fais-moi partir en fumée…
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon être et mon esprit !
Toi ma flamme qui flamboie,
offrons l’enfer au paradis.
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon âme incendie-moi !
Toi la flamme embrase-moi !
Qu’il n’en reste que des cendres…
Allume-moi, allume-moi !
Crame mon corps, incinère-moi !
Toi, ma femme, disperse-moi
aux quatre coins du monde.
***
Le collectionneur
J’ai des mots plein la tête,
des pensées de poète,
des images sans couleur, je suis le collectionneur.
Il y a des fois ça déborde,
un peu trop, je vous l’accorde,
alors, sur du papier, je m’en vais écoper.
Quand le trop-plein s’installe,
il n’y a plus de place pour que dalle,
alors moi je défaille, comme un train qui déraille.
Ma mémoire sur le flanc,
peinant à se relever,
quand survient l’accident, il n’y a plus rien à sauver.
J’ai des maux pleins l’aorte,
des colères, des soupirs,
je collectionne les révoltes que ce monde m’inspire,
et ces peines du cœur,
dans mon corps, elles voyagent.
De tout mon intérieur,
elles provoquent le naufrage.
J’ai la coque perforée
et les voiles déchirées,
le gouvernail pété à chaque raz-de-marée.
Quand viennent les déferlantes
et les pluies abondantes,
au derrière des pupilles,
il n’y a plus rien qui scintille.
J’ai des yeux qui se retiennent,
puisque larmes sont vaines,
de perles de pleurs je suis le collectionneur.
La sécheresse du désert
au-dessous des paupières,
des peines arides qui se plaignent du vide
que je sens dans mon ventre,
quand vient la tourmente,
la valse des pensées qui me saignent les plaies
que je pensais fermées,
à jamais oubliées.
Il y a des lésions, parfois, qui ne guérissent pas.
J’ai du beau plein la tête,
des pensées de poète,
des images en couleur, je suis le collectionneur.
Il y a des fois ça déborde,
un peu trop, je vous l’accorde,
alors, sur du papier, je m’en vais écoper.
Quand le trop-plein s’installe,
il n’y a plus de place pour que dalle,
alors moi je défaille, comme un train qui déraille.
Ma mémoire sur le flanc,
plutôt bien installée,
quand survient l’accident,
il n’y a plus rien à pleurer.
J’ai du beau plein le cœur,
des folies, des sourires,
je collectionne les bonheurs
que ce monde m’inspire
et ces graines douceurs,
dans mon corps, elles fleurissent,
dans tout mon intérieur
que leurs couleurs embellissent.
J’ai la chair en jardin,
un éden, un matin, de roses et d’orchidées,
de pâquerettes bariolées.
Quand vient le printemps,
et les oiseaux chantants,
au derrière des pupilles,
il n’y a que le soleil qui brille.
J’ai des yeux qui se retiennent,
puisque larmes sont vaines,
de perles de pleurs, je suis le collectionneur.
C’est le dessèchement
au-dessous des paupières,
quel que soit le sentiment, l'est tarie la rivière
que je sens dans mon être,
quand vient la tempête,
la valse des pensées qui me pansent les plaies
que je pensais béantes,
toujours sanguinolentes.
Il y a des blessures, je crois, qui se ferment parfois.
J’ai des mots plein la tête,
des pensées de poète,
des images sans couleur, je suis le collectionneur.
De confessions de cœurs,
de processions de fleurs,
tant de choses et j’en passe,
je collectionne et j’entasse.
De pensées assassines,
des tendres, des câlines,
j’en ai plein les vitrines, je suis le collectionneur.
De râteaux, de ruptures,
de brûlots, de brûlures,
encadrés sur mes murs, je suis le collectionneur.
De couchers de soleil,
de bouchons de bouteilles,
gueules de bois au réveil,
amnésies de la veille,
d’histoires sans lendemain,
solitudes du matin,
des amours éphémères, j’en ai le cœur chagrin.
Déceptions et tristesses,
successions de tendresse,
absentéismes à la messe pour le cul d'une déesse…
J’ai des mots plein la tête,
des pensées de poète,
des images en couleur, je suis le collectionneur.
Des perles salées ?
J’en ai tant que ça déborde !
Les laisser rouler me ferait du bien,
je vous l’accorde.
Mais si quelqu'un en veut,
au profond de ses yeux,
plutôt que les gâcher, je veux bien les filer.
Des mots de poète,
j’en ai plein les armoires,
des maux de poète,
j’en ai plein les tiroirs.
Je suis collectionneur et sur mes étagères,
il y a des gouttes de pleurs et des rais de lumière.
***
Laisse-moi juste faire partie de toi
Je ne demande pas grand-chose,
ne serait-ce qu’un morceau de chair.
Un petit millimètre carré
n’importe où fera mon affaire.
Planté au creux de ton épaule,
là, bien à l’abri du vent.
Dans la chaleur de ton corps,
caché derrière tes sous-vêtements.
Perdu dans tes veines,
je pourrais me glisser en toi.
Aux quatre coins de ton être,
trimbalé comme je ne sais quoi.
Et pouvoir te frôler le cœur,
y pénétrer même quelquefois,
un peu trop vite, comme un voleur,
et m’enfuir à travers toi.
Mais laisse-moi juste faire partie de toi,
une infime molécule,
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