CHAPITRE 7: T
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CHAPITRE 7: T
Je me souviens d’un moment très particulier. Cela s’est passé dans la salle des parents. Isabelle venait d’apprendre récemment que sa fille était guérie et qu’on allait lui enlever le cathéter. Elle était toute à son bonheur, heureuse de m’annoncer une si bonne nouvelle. Dans la salle, il y avait deux autres mères aux visages creusés et tendus. Bien sûr Isabelle ne pouvait pas s’en rendre compte et encore moins ne pas me faire partager sa joie. Il fallait ouvrir, laisser siffler la cocotte, faire exploser toutes ces choses tenues sous pression. Puis elle est partie rejoindre sa fille. Je suis restée là, dans la salle. Un peu sonnée par cette nouvelle tant attendue et presque inespérée. Je ne connaissais pas ces mères ni leurs enfants mais dans la discussion qui a suivi, j’ai entendu dire que l’une d’elle avait une petite fille à laquelle on avait diagnostiqué un cancer de l’hypophyse. Or, pour une fois, je connaissais ce terme, je savais exactement à quoi il correspondait et où il se trouvait dans le cerveau pour l’avoir étudier en classe. J’ai même pendant un quart de seconde revu le schéma biologique imprimé dans ma tête remontant à mes années lycée. J’ai tout de suite pensé que c’était terrible et sans issue, que ça devait laisser des séquelles puisque ça touchait le système nerveux et qu’il ne devait pas y avoir beaucoup d’espoir. Tout cela me terrifiait secrètement. Silencieusement les pires pensées s’accumulaient dans mon esprit me faisant redouter une rencontre à l’issue fatale. Je n’osais pas imaginer la guérison. Et j’avoue même avoir été soulagée de ne pas connaître cette petite fille. Rima n’était pas très loin, Fanny et Laura avaient suivies, je ne pouvais plus subir une nouvelle perte. J’étais arrivée à une certaine limite. On m’avait dit que trois quarts des enfants guérissaient du cancer. Qu’avais-je donc fait ? Pourquoi étais-je là ? Qu’est-ce que cela signifiait ? Cependant, la façon dont la mère avait dit : « -Ma fille a des tumeurs dans l’hypophyse » m’avait profondément ébranlée. Elle avait dit cela un peu en l’air, à personne en particulier, le regard jeté dans le vide mais avec la ferme intention d’être entendue et la volonté d’afficher sa résistance à travers ces quelques mots placardés dans le réel. Sans aucun doute, c’était une phrase pleine d’aplomb relevant tous les défis. Je n’avais jamais entendu jusqu’à ce jour un parent ou un proche dire exactement ce que leurs enfants avaient, mettre les mots sur le mal, dire la maladie pour mieux l’affronter. Elle avait parlé avec une telle assurance qu’on aurait presque pu croire qu’il s’agissait de quelque chose de banal. Absolument aucun abattement, une sorte de certitude de guérison possible et attendue que seule une pointe de gravité dans le ton venait perturber. A tel point, qu’après coup, je me suis dit pourquoi pas…la guérison. Là encore j’ai repensé à ce livre qui expliquait que les enfants étaient beaucoup plus nombreux que les adultes à guérir car ils étaient bien plus réceptifs aux traitements. Pourquoi pas.
Une semaine plus tard je rencontrais la Miss. Je suis rentrée dans la chambre à la rencontre d’une nouvelle venue dont je ne connaissais que l’âge et le prénom. J’ai fermé la porte, fait deux pas et j’ai vu la mère, d’emblée je l’ai reconnue. Je me suis dit –« c’est elle ! ». Mais étonnamment je n’ai pas été effrayée, au contraire j’étais préparée et même heureuse de faire finalement sa connaissance. Je n’avais pas peur de la suite des événements. Comme sa mère, je pensais la guérison possible à présent. Je n’avais plus en tête le schéma de l’hypophyse avec toutes ses fonctions biologiques inscrites à côté, mais ce petit bout de vie assise là, en face de moi, sur le lit et prête à sauter dessus comme un kangourou pour jouer à s’envoler. Je ne sais pas si la mère m’avait remarqué les quelques jours auparavant dans la salle des parents et si elle savait que je l’avais entendu mais cela n’avait pas d’importance.
La petite Tiffany me faisait beaucoup penser à Rima parce-qu’elles avaient à peu près le même âge mais aussi et surtout parce-qu’elles avaient la même force de caractère, le même regard espiègle, la même façon de s’affirmer et d’aller droit au but.
Je me souviens la première fois que je suis allée dans une chambre stérile, c’était pour voir la miss, elle s’ennuyait beaucoup, l’éducatrice m’avait demandé d’aller lui rendre visite. J’aimais beaucoup Tiffany, sa personnalité déjà bien définie. A chaque fois j’étais heureuse de la voir même dans cette circonstance, même si je devais lui parler derrière une vitre dans un combiné de téléphone, même si je voyais sur elle les traits marqués de la fatigue. J’étais folle de joie de la voir quand j’a fait le spectacle de noël dans l’amphithéâtre, c’était ma spectatrice privilégiée et elle le restera pour l’éternité. Je me souviens encore qu’elle m’avait demandé de lui dessiner une Cléopâtre car elle aimait bien mes dessins et c’était l’année du film d’Astérix, elle avait mis sur le mur de sa chambre. Cette petite fille là était craquante à souhait. L’avoir connu fût un honneur, les avoir tous connu !
Pendant longtemps je n’ai pas su ce qu’elle était devenue. Aujourd’hui, par un étrange hasard j’ai rencontré Marie-Noëlle dans la rue, une infirmière du service qui a été mon mentor et dont je reparlerai un peu plus loin. Je lui ai posé la question malgré tout car je voulais savoir. J’aurai aimé avoir une autre réponse. J’ai d’ailleurs toujours du mal à y croire.
La femme m’a dit : « - Peut-être que si tu as été envoyée ici c’est pour les accompagner ».